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Validation de la stratégie de modélisa- modélisa-tion par mesures in-situ

IV.1 Analyse vibratoire in-situ sous bruit ambiant : état de l’art

IV.1.2 Enregistrement des vibrations ambiantes

a Nature des sollicitations ambiantes - Hypothèse de bruit blanc

Les structures de génie civil sont excitées en permanence par un bruit de fond de nature complexe que l’on peut décomposer en deux groupes selon Bonnefoy-Claudet (2004) :

- Des sollicitations quasi-stationnaires ayant une triple origine. Tout d’abord les conditions océaniques et atmosphériques de grande échelle sont sensibles à des fréquences < 0,5Hz. Par exemple l’océan joue un rôle important même en milieu continental, notamment la houle présente dans le bruit de fond macrosismique à une fréquence ƒ 0,2Hz. Les conditions météorologiques locales pour des fréquences ƒ 1Hz. Le vent possède un maximum d’énergie la plupart du temps entre 0,01 et 0,05Hz donc hors de la bande de fréquence correspondant aux structures courantes (0,5 ≠ 15Hz) mais garde de l’énergie jusque 1Hz. Cependant, même en période de vent fort, les églises ne sont pas des édifices suffisamment élancés (fréquence de résonance > 1Hz) pour que ce soit un phénomène à prendre en compte. La sollicitation par la pluie est plutôt verticale donc intervient peu comme sollicitation directe. Enfin les activités humaines (machines industrielles, trafic automobile, travaux...) contribuent pour la plus grande part aux vibrations ambiantes en milieu urbain. A des fréquences > 1Hz, elles sont très variables dans la journée et dans l’année comme on peut le voir en figure IV.3. Autour de 1.15Hz, fréquence de résonance de l’Hôtel de Ville, on remarque l’alternance de l’amplitude entre le jour et la nuit, la semaine, les week-end et les jours fériés du mois de mai. Certaines machines comme les ascenseurs induisent une fréquence considérée comme parasite car très marquée : forte amplitude, bande de fréquence très fine car non amortie.

- des mouvements transitoires d’origine naturelle ou anthropique tels que les ruptures dans la croûte terrestre à toutes les échelles, donc à toutes les fréquences (séismes, tremors volcaniques, glissements de terrain, éboulements), les lâchers de barrages ou les explosions et des sources internes : passages de piétons, machines... Les sollicitations transitoires, si elles sont d’amplitude trop importante, sont à écarter des enregistrements. En effet elles introduisent des fréquences et une direction préférentielles dans la sollicitation, ce qui nuit à l’hypothèse de bruit blanc. C’est le cas des sonneries de cloches par exemple, qui nous ont conduit à recommencer plusieurs enregistrements, et ce d’autant plus que les capteurs saturaient.

Utiliser le bruit ambiant comme sollicitation repose sur l’hypothèse que celui-ci peut être assimilé à un bruit blanc. Cela revient à supposer que les vibrations ambiantes constituent un signal, mesuré en accélération ou en vitesse en fonction du temps, dont la moyenne E(t), la variance (E((t ≠ E(t))2) et la covariance E((t1≠ E(t1))(t2≠ E(t2))) varient peu.

Fig. IV.3 Variations de l’amplitude des vibrations ambiantes enregistrées au sommet de l’Hôtel de Ville de Grenoble pendant le mois de mai 2009 (d’après Bonnefoy-Claudet (2004))

En pratique la moyenne est théoriquement nulle. Dans le cas contraire, on peut s’y ramener par filtrage, retrait de la moyenne etc. Par contre la stationnarité de la variance (amplitude du bruit) n’est pas toujours réalisée et introduit une source d’incertitude dans les résultats. La stationnarité en covariance signifie que le spectre du bruit ne varie pas. A l’échelle de temps de nos enregistrements, elle est souvent bien réalisée (Fig IV.4). Toutefois, cela revient à considérer que le bruit ambiant possède une densité spectrale de puissance (DSP) constante, soit un spectre horizontal. Un tel signal n’existe pas dans la réalité car il serait d’une énergie, ou aire sous la courbe, infinie. Un signal n’est donc un bruit blanc que sur une bande de fréquence finie. On considère que le bruit de fond sismique est un bruit blanc dans la bande de fréquence 0.5 ≠ 20Hz. Cette bande est intéressante pour les bâtiments car elle est suffisante pour couvrir les premiers modes de la plupart des bâtiments, ainsi que les fréquences excitées lors d’un séisme.

La figure IV.4 montre un enregistrement de bruit de fond sismique de bonne qualité, réalisé au rez-de-chaussée de l’église de la Sainte Trinité aux Contamines. L’enregistrement en temps est assez stationnaire. Mais la distribution statistique des vitesses n’est pas tout à fait une loi normale : son pic est aplati. D’autre part la densité spectrale de puissance est loin d’être plate. L’hypothèse de bruit blanc n’est donc pas pleinement vérifiée dans la réalité et peut poser quelques problèmes comme l’ont montré les différentes références citées auparavant. Mais la méthode est généralement suffisamment robuste de ce point de vue.

On suppose aussi que le bruit ambiant, comme un bruit blanc, est un processus ergodique. Ses caractéristiques sont donc supposées identiques qu’elles soient déterminées en moyenne à partir d’un seul ou de plusieurs enregistrements.

a)

b) c)

Fig. IV.4 Hypothèse de bruit blanc : Exemple d’enregistrement au RDC de l’église de la Sainte Trinité aux Contamines. a) enregistrement en temps ; b) densité spectrale de puissance ; c) distribution statistique des vitesses.

b Chaîne d’acquisition des données

L’amplitude des vibrations des bâtiments sous bruit ambiant est faible (IV.1.1.a). Il est donc nécessaire que le bruit de la chaîne d’acquisition, constituée des capteurs et du numériseur, soit minimum dans la bande de fréquences d’intérêt soit 0 ≠ 20Hz dans notre cas.

Le capteur convertit les vibrations en vitesse ou en accélération en une tension électrique. Il doit être très sensible dans la bande d’intérêt et présenter un faible bruit. Nous avons choisi d’utiliser des vélocimètres, très sensibles dans la bande de fréquence 0,4≠25Hz avec une réponse plate, même s’ils sont limités en amplitude. Sous séisme où l’on doit enregistrer de grandes amplitudes, on utilise plutôt des accéléromètres, moins sensibles et plus bruités mais couvrant une large bande et ne saturant pas. Les vélocimètres sont nécessairement relativement lourds et volumineux car c’est leur masse mise en mouvement qui garantit leur sensibilité.

Le signal du capteur est ensuite numérisé sur un nombre fini de bits entre une valeur minimale et une valeur maximale. Un bon numériseur doit donc avoir un niveau de bruit électronique faible en comparaison de l’amplitude du signal électrique en provenance du capteur, une amplitude de saturation suffisante pour les vibrations que l’on veut enregistrer et un nombre suffisant de bits pour que la précision des faibles valeurs enregistrées soit satisfaisante.

c Réalisation des mesures

Si les planchers sont rigides, comme dans le cas de dalles en béton armé, il est nécessaire de placer au moins 2 à 3 capteurs par niveau, non séparés par des joints de dilatation ou parasis-miques, pour pouvoir déterminer les modes de torsion. Mais dans les bâtiments en maçonnerie, sans plancher ou avec des planchers souples comme c’est le cas pour les églises traitées, chaque mur peut avoir un comportement propre. Il faut donc privilégier l’installation de capteurs sur les murs ou sur des éléments liés aux murs (Fig IV.7 et IV.8).

Dans les dispositifs classiques temporaires comme ceux employés ici, le nombre de points d’en-registrement est forcément limité par le nombre de voies du numériseur employé. C’est pourquoi il est nécessaire de garder un capteur au même emplacement lors de tous les enregistrements afin de pouvoir assembler des jeux de données successifs. Les enregistrements seront ensuite normalisés par rapport au déplacement de ce point commun, ce qui permettra d’assembler les différentes parties de la déformée. Ce capteur est placé de préférence au sommet de la structure car le signal y est théoriquement plus simple et de plus grande amplitude, donc permettra des enregistrements plus fins. De plus, en position de bord libre, il ne sera jamais sur un nœud de mode. Un capteur placé au niveau du sol extérieur permet d’enregistrer les sollicitations donc théoriquement d’isoler la structure elle-même de son interaction avec le sol.

La fréquence d’échantillonnage correspond au nombre d’enregistrements du signal réalisés par seconde. Elle doit être supérieure à la fréquence maximum de la structure étudiée, soit rarement plus de 25Hz. La durée d’enregistrement peut être déterminée de plusieurs façons différentes. Brincker et al. (2003) proposent d’enregistrer au minimum max(100/›kÊk) secondes, où Êk sont les pulsations propres et ›k le taux amortissement visqueux équivalent. Cantieni (2005) recommande d’enregistrer 1000 à 2000 périodes du mode fondamental. Un bâtiment de première fréquence propre 1Hz et d’amortissement 1% devrait donc être enregistré dans le premier cas pendant au moins 1600s (environ 25min), et dans le second pendant 16 minutes. Selon Michel (2007) pour des bâtiments classiques, une durée d’enregistrement de 15 min suffit. En pratique, cette durée peut ne pas suffire à déterminer les déformées avec précision, notamment pour les bâtiments de grande hauteur et les ponts, aux fréquences fondamentales plus basses. En effet, pour déterminer des modes avec peu d’énergie, il faut faire une moyenne sur de plus nombreuses fenêtres de temps.

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