• Aucun résultat trouvé

ELLACURIA, « Historicidad de la Salvación Cristiana » dans Mysterium Liberationis, T I, p 336.

Niveau herméneutique

15 ELLACURIA, « Historicidad de la Salvación Cristiana » dans Mysterium Liberationis, T I, p 336.

Pour Romero, il appert que Dieu est témoin du sort qui est fait aux innocents. H reconnaît le bourreau et celui-ci recevra sa sentence tôt ou tard. Dieu choisit toujours ce qui est faible et petit afin de révéler sa puissance et sa gloire. Il veut nous libérer et nous sauver mais pour correspondre à ses attentes nous devons avoir la foi. L’Histoire du Salut-Libération renverse les potentats de leur trône comme le dit si bien le Magnificat (Le 1,51-53). L’appel de Dieu doit cependant être entendu afin de devenir effectif 16.

L’homme d’Église établit toujours un lien entre les événements bibliques et l’actualité de son pays. Les Écritures lui servent en quelque sorte de point de repère. Il ne va pas cependant jusqu’à vouloir transformer à sa racine le système d’exploitation en vigueur dans son pays. Il ne cherche qu’à l’humaniser. L’archevêque se situe davantage dans la ligne des réformateurs que des révolutionnaires qui eux, réclament purement et simplement l’abolition des structures d’exploitation. Par ailleurs, même si la tragédie et la mort remplissent les pages de l’Ancien Testament, au milieu d’elles demeure toujours présente l’espérance de la libération, du Salut à venir. L’Histoire sainte nous enseigne que le bras justicier de Dieu vient secourir ceux qui sont la proie des tyrans. Le pauvre et l’opprimé attendent le jugement de Dieu avec confiance, nous dit-il.

Celui qui blesse par l’épée, périra par l’épée, a dit la Bible. Tous ces outrages du pouvoir de la patrie ne peuvent demeurer impunis. Et Tange exterminateur passe par les terres d’Égypte et cette nuit il y eut des lamentations dans les foyers de ce peuple parce que Dieu châtia les crimes du Pharaon. Comme apparaît terrible l’autorité lorsqu’elle n’accomplit pas son devoir, quand elle veut faire prévaloir la force des armes contre Γ impuissance des peuples désarmés17

L’archevêque de San Salvador lance cet avertissement aux bourreaux de son peuple : aucun crime ne demeure impuni, ici sur cette Terre ou dans T au-delà. Le Jugement dernier n’est pas une fable dans l’esprit de Monseigneur, mais une réalité tout aussi palpable que l’air que nous respirons. Le châtiment apparaît comme une occasion de repentir. L’innocente victime est élevée au rang de martyr, il verra la gloire de Dieu. La pâque est cette première nuit de libération du peuple juif, lorsque l’ange exterminateur fondit sur les premiers-nés d’Égypte. Ignacio Ellacuria y reconnaît la figure de deux absolus, deux interprétations de Dieu en lutte.

16 Voir 07/08/77, p. 163-164,1-Π. 17 07/08/77, p. 163-164,1-Π.

La théo-praxis est le point initial du processus salvateur comme Γ empire du péché et du mal est le point initial du processus de condamnation. Moïse correspond pleinement à la théo-praxis de Dieu, tandis que le Pharaon correspond pleinement à la négation du Dieu de la vie et de la liberté, peut-être au nom du dieu qui soutient son mode de domination. Comme leur position est distincte dans ΓHistoire du Salut, de même est distincte la théophanie qui leur correspond. Pour Moïse et son peuple, c’est la théophanie d’un Dieu libérateur, pour le Pharaon et son peuple, c’est celle d’un Dieu qui châtie. Mais la libération et le châtiment se réalise au cœur d’événements historiques. C’est seulement si l’on parvient à cette théophanie que se complète la théo-praxis et que se révèle la plénitude de l’histoire, la plénitude de Dieu dans l’histoire. À partir de cette théophanie toujours rénovée, on peut savoir ce que doit être la praxis historique du Salut18.

Quarante ans plus tard, nous dit la Bible, après la traversée du désert, Moïse rappelle à son peuple les épreuves et les tentations qu’ils ont dû affronter et surmonter avec l’aide de Dieu. Il leur fait promettre, pour leur sauvegarde, de demeurer toujours fidèles à Yahvé et à ses lois. C’est là le gage de la survie et de la prospérité d’Israël. S’ils s’en éloignent, Dieu les abandonnera et les livrera au désordre de leurs passions qui finira de dissoudre le peu d’unité qui demeure en eux. C’est une condition sine qua non que pose Moïse à son peuple, non pas pour le simple plaisir de les soumettre à une loi trop lourde pour eux, ce sera là une perversion des siècles suivants, mais pour garantir leur Salut historique et la pérennité d’Israël 19. Rafael de Sivatte interprète ces tentations du désert de la manière suivante :

Les Israélites déjà installés dans la Terre promise, situent ces tentations d’abandonner Dieu pour choisir des voies plus commodes, à l’époque du désert. C’est-à-dire que tout ce qu’ils vivent dans leur patrie, ils le situent théologiquement dans le désert. [...]Le désert est la manière d’expliquer la réalité du peuple : le lieu des dangers, de !’intervention de Dieu, de la relation à Dieu, de Γinfidélité du peuple et de la maturation de l’expérience de Dieu20.

Ils ne doivent jamais oublier les gestes sans pareil que Yahvé a accomplis en leur faveur. Ils étaient esclaves en Égypte. Ceci leur vaut une reconnaissance étemelle à Dieu et doit préserver leur humilité. Ils ont cependant un prix à payer pour cette libération qui leur a été offerte sur un plateau d’argent. Ils doivent la préserver dans un effort constant. La liberté n’est pas définie

18 ELLACURÍA, « Historicidad de la Salvación Cristiana » dans Mysterium Liberationis, T I, p. 339. 19 Voir 28/05/78, p. 265-267, IV.