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Le droit français s’est doté d’une législation médicale spécifique : la loi du 4 mars

À LA LUMIÈRE DU DROIT MÉDICAL FRANÇAIS

20. Le droit français s’est doté d’une législation médicale spécifique : la loi du 4 mars

2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Le mérite reconnu à cette loi est d’avoir uniformisé les paramètres fondamentaux du régime de la responsabilité médicale, à savoir :

— Les règles applicables aux victimes d’accidents médicaux quel que soit leur qualité : partie prenante au contrat médical ou par ricochet (consorts) ;

— Les règles applicables aux structures d’accueil quelle que soit leur statut juridique 172 : public ou privé.

— Et la règle en matière de prescription quelle que soit la nature de la responsabilité et le lieu d’exercice : dix ans.

L’unification des régimes juridiques opérée par la loi de 2004, facilite l’appréciation de la responsabilité médicale. À travers elle, s’opère un dépassement de la distinction traditionnelle des responsabilités – délictuelle et contractuelle – de la relation médicale 173. En soustrayant la responsabilité médicale de la distinction

bipartite, la loi du 4 mars 2002 contribue à l’unité de régime de la responsabilité en droit privé et en droit public (hôpitaux) et de fait, stabilise la jurisprudence 174. Elle

172 Les seules différences qui subsistent, résultent de la dualité de compétences juridictionnelles :

les juridictions administratives sont compétentes en matière de responsabilité des établissements publics et les juridictions judiciaires pour les établissements privés et pour l’exercice libéral.

173 Il importe de disposer de régimes spécifiques ou mixtes qui dépassent les frontières naturelles de

la responsabilité civile. L’application mécanique des acquis fondamentaux tels que le triptyque

« faute-préjudice-lien de causalité » ; la summa divisio responsabilité contractuelle-responsabilité

délictuelle suivie par la prohibition du cumul des ordres de responsabilités, […] à la sphère de responsabilité professionnelle entraîne inévitablement des incohérences sources de solutions jurisprudentielles incertaines voire inadaptées, P. SERLOOTEN, Vers une responsabilité professionnelle,

Mélanges offerts à P. HÉBRAUD, p. 805. V., également Ph. LE TOURNEAU, Rapport d’ouverture

Colloque du 26 et 27 janvier 2001 au Centre de recherches sur le droit de l’activité professionnelle

de l’Université de Rouen, La responsabilité professionnelle et la personne du professionnel, in La responsabilité professionnelle : une spécificité réelle ou apparente, Petites affiches, 11 juillet 2001, n° 137, p. 4.

174 Considérant les fluctuations jurisprudentielles en matière de responsabilité médicale, la question

se pose si on tend vers un régime spécial de responsabilité légale, voir : M. BACACHE, La

responsabilité médicale : Principes généraux, n° 472263, LexisNexis SA 2011, Droit médical et

hospitalier, fasc. 18, p. 5. Dans l’affirmatif, l’évolution constatée renvoie à une autre interrogation : y a-t-il toujours intérêt à distinguer la nature délictuelle ou contractuelle de l’activité médicale ?, voir : Ph. MALAURIE, La responsabilité civile médicale, Répertoire du notariat

Défrenois 2002, n° 23, Doctr. n° 37632, p. 1516. Quoiqu’il en soit, force est de constater

l’effacement du fondement contractuel de la responsabilité médicale acquis en 1936, voir : les jurisprudences citées au n° 16. La Cour de cassation n’hésite plus à se détacher de l’article 1147 du Code civil dans l’appréciation de la faute médicale. Désormais, La Haute juridiction appuie certaines de ces décisions au visa de l’article L.1111-2 du Code de la santé publique voire de l’article 1132 du Code civil, Cass. civ 1ère 28 janvier 2010 ; Cass. civ 1ère 3 juin 2010 ; 14 octobre

pose une référence principale en matière de responsabilité : le régime spécial de la responsabilité médicale fondée sur la faute 175. Sur le plan pratique, cette référence ne

modifie certes pas grand-chose, mais pour la doctrine et la jurisprudence, elle rend stable les points de repère. L’apport unificateur du régime de la responsabilité médicale réalisé par la loi du 4 mars 2002 lui vaut pragmatisme et simplicité 176.

Si en France, la loi du 4 mars a permis au droit français de se doter d’un principe de responsabilité professionnelle autonome, à Madagascar, il n’existe pas de norme légale qui réglemente de façon spécifique la responsabilité professionnelle du médecin 177. En soi cette absence n’emporte aucun bouleversement de fond puisque

les règles de la responsabilité délictuelle 178 et contractuelle 179 restent invocables en

matière contentieuse. Après tout, un professionnel est responsable selon les termes du droit commun 180. Schématiquement, tout sujet de droit est libre d’agir dans la

limite du respect des intérêts légitimes d’autrui, il est de bonne justice d’obliger à réparer dès l’instant où l’auteur d’un dommage ne s’est pas comporté en homme « ordinairement capable et prévoyant » 181. Par conséquent, à défaut d’une législation

spécifique à la responsabilité médicale, les litiges relatifs aux dommages physiques et moraux occasionnés par le médecin, peuvent être envisagés dans le cadre général du droit commun de la responsabilité. C’est dans ce sens que la loi sur la théorie des

175 Malgré les variations jurisprudentielles, la jurisprudence judiciaire conformément à la loi du

4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, se fonde sur le principe de la responsabilité médicale pour faute, voir, M.BACACHE, La responsabilité médicale :

Principes généraux, n° 472263, LexisNexis SA 2011, Droit médical et hospitalier, fasc. 18, p. 6.

176 Ph. MALAURIE, La responsabilité civile médicale, Répertoire du notariat Défrénois 2002, n° 23, Doctr.

n° 37632, p. 1516 ; F. DREIFUSS-NETTER, Feue la responsabilité civile contractuelle du médecin ?,

R.C.A. 2002, Chr. n° 17, L. NEYRET, Spécificité de la responsabilité médicale à la croisée du droit commun

et du droit de la santé, R.L.D.C. 2009, n° 57, p. 14.

177 De nombreux droits en faveur des malades ont été établis en France […] : le droit à réparation

en cas de faute prouvée (à Madagascar aussi avec comme base juridique la LTGO disposant du principe de la responsabilité civile. Le droit à réparation serait renforcé signifié par une loi spécifique ) ; l’obligation d’information supposant le consentement des malades ou encore la question de fin de vie. À Madagascar, ces sujets sont aujourd’hui au stade de conception, donc fragile, voir : B. N. RICHARD et V. JULIEN, Consécration règlementaire : Des droits des malades à Madagascar, R.D.S., septembre 2005, n° 7, p. 439.

178 Article 204 de la LTGO malgache.

179 Article 177 de la LTGO malgache.

180 En application du principe de la responsabilité professionnelle, le médecin est responsable selon

les termes du droit commun, Ph. MALAURIE,L. AYNÈS et Ph. STOFFEL-MUNCK, Les obligations,

5e éd., Défrénois, 2011, n° 320.

181 J. BELLISENT, Contribution à l’analyse de la distinction des obligations de moyens et des obligations de résultat,

obligations malgaches 182 est en mesure d’encadrer juridiquement, les contentieux

médicaux sur place. Pour cette raison, on peut dire que l’encadrement juridique de la responsabilité médicale existe réellement à Madagascar.

Certaines dispositions de la LTGO malgache sont particulièrement invocables pour asseoir juridiquement la responsabilité du médecin :

— le Chapitre IV des dispositions générales 183, intitulé : « De l’exécution en nature ou

par équivalent » 184 ;

— le Chapitre II du Titre II 185, intitulé « La responsabilité contractuelle » 186 ;

— le Chapitre I du Titre III 187, intitulé « La responsabilité extracontractuelle » 188.

En outre, en application de l’Accord de coopération en matière de justice entre la République française et la République malgache 189, les dispositions législatives et

réglementaires du droit français, continuent à être applicables par les juridictions malgaches à défaut de textes malgaches correspondants. En matière de responsabilité médicale, un tel accord implique la possibilité d’invoquer les dispositions du Code civil et du Code de la santé publique française. Enfin, le droit pénal malgache reste invocable en cas de violation à l’intégrité physique de la personne 190.

L’existence de toutes ces dispositions législatives prouve que malgré l’absence de régime légal propre à l’indemnisation des victimes d’accidents médicaux, le droit commun permet de soumettre les médecins aux lois applicables à l’ensemble des citoyens 191. Après tout, si un médecin commet une faute dans l’exercice de son art,

182 La loi n° 66-003 du 2 juillet 1966 relative à la Théorie générale des obligations ou la LTGO. 183 Les dispositions générales constituent le Titre Premier de la loi relative à la théorie générale des

obligations.

184 Articles 51 à 57 de la LTGO. 185 Titre II : « Les actes juridiques ». 186 Article 177 à 196.

187 Titre III : « Les faits juridiques ». 188 Article 204 à 216.

189 « À défaut de textes malgaches, les dispositions législatives et réglementaires du droit français, en vigueur à

Madagascar à la date à laquelle prend effet le présent Accord, continuent à être appliquées par les juridictions malgaches », Article 4 de l’Accord de coopération en matière de justice entre la République française et la République malgache. Cet Accord de coopération a été approuvé en 1960 par la loi n° 60-009 du

9 juillet 1960, J.O.R.F. du 20.07.60, p. 6616 ; J.O.R.M. n° 107 du 09.07.1960, p. 1163.

190 Article 319 et 320 du Code pénal malgache.

191 J.F. LEMAIRE et J. L. IMBERT, La responsabilité médicale, Puf, Coll. « Que sais-je ? », 1985, n° 2200

il est à juste titre que lui soient appliquées 192 les règles de la responsabilité civile

fondée sur la faute. La LTGO en prévoyant aux articles 229 à 242 le principe de la responsabilité pour faute, affirme sa compétence à régir le contentieux médical à Madagascar.

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