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La responsabilité médicale à Madagascar : Réalités internes et proposition d'actualisation en référence au droit médical français

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Academic year: 2021

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Texte intégral

(1)

THÈSE

Pour l'obtention du grade de

DOCTEUR DE L'UNIVERSITÉ DE POITIERS UFR de droit et sciences sociales Équipe de Recherche en Droit privé (Poitiers)

(Diplôme National - Arrêté du 7 août 2006)

École doctorale : Droit et science politique - Pierre Couvrat (Poitiers) Secteur de recherche : Droit privé

Présentée par :

Tahiry Anja Razafiarison

La responsabilité médicale à Madagascar : Réalités internes et proposition d'actualisation en référence au droit médical

français

Directeur(s) de Thèse : Gérard Mémeteau

Soutenue le 12 octobre 2013 devant le jury

Jury :

Président Rivo Ratovo Andrianavalona Maître de conférences HDR - Université de Poitiers

Rapporteur Emmanuel Cadeau Maître de conférences HDR - Université de Nantes

Rapporteur Cyril Clément Maître de conférences HDR - Université de Paris 8

Membre Gérard Mémeteau Professeur - Université de Poitiers

Membre Éric Savaux Professeur - Université de Poitiers

Pour citer cette thèse :

Tahiry Anja Razafiarison. La responsabilité médicale à Madagascar : Réalités internes et proposition d'actualisation en référence au droit médical français [En ligne]. Thèse Droit privé. Poitiers : Université de Poitiers, 2013.

(2)

U

NIVERSITÉ DE

P

OITIERS

F

ACULTÉ DE

D

ROIT ET DES

S

CIENCES SOCIALES

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COLE DOCTORALE

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ROIT ET

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CIENCE POLITIQUE

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– ED

088

L

A RESPONSABILITÉ MÉDICALE

À

M

ADAGASCAR

R

ÉALITÉS INTERNES ET PROPOSITION D

ACTUALISATION EN RÉFÉRENCE AU DROIT MÉDICAL FRANÇAIS

Thèse pour le doctorat en droit privé

présentée et soutenue publiquement le 12 octobre 2013 par

Madame Tahiry Anja R

AZAFIARISON

DIRECTEUR DE RECHERCHE

Gérard MÉMETEAU

Professeur à l’Université de Poitiers

SUFFRAGANTS

Emmanuel CADEAU

Maître de conférences HDR à l’Université de Nantes (rapporteur)

Cyril CLÉMENT

Maître de conférences HDR à l’Université de Paris VIII (rapporteur)

Éric SAVAUX

Professeur à l’Université de Poitiers

Ratovo ANDRIANAVALONARIVO

(3)

LA RESPONSABILITÉ MÉDICALE À MADAGASCAR : RÉALITÉS INTERNES ET PROPOSITION D’ACTUALISATION

EN RÉFÉRENCE AU DROIT MÉDICAL FRANÇAIS

Afin de répondre aux attentes de la société malgache, une proposition de loi relative à la responsabilité médicale doit être en cohérence avec la vision locale de la pratique médicale. À Madagascar, l’issue d’un acte de soin est supposée émaner de la divinité et ne saurait être maîtrisée par le soignant. De fait, l’aléa thérapeutique s’insère dans le droit médical local. Le médecin n’est pas tenu de réaliser une guérison; il doit prodiguer des soins consciencieux et conformes à la science. Ceci étant, la culture malgache est sensible à toute atteinte corporelle subie par la victime d’accident médical. Le cas échéant, le médecin fait un geste de courtoisie à l’égard de la victime. Ce « geste » peut ne pas représenter l’intégralité du préjudice mais il participe au respect de la victime. Ainsi, à Madagascar, l’obligation médicale de réparer vise la reconnaissance de la douleur du patient et non la réparation quantitative du préjudice. Sur ce poin une divergence se dessine avec le droit français, lequel préconise la réparation intégrale pour les atteintes corporelles. Les modes alternatifs de résolution des conflits présents dans les deux systèmes juridiques, dénouent cette divergence.

Mots-clés en français

Fautes médicales : Faute technique, Faute relationnelle — Modes alternatifs de résolution des conflits médicaux — Mécanismes de prévoyance de dette de responsabilité médicale : structure assurantielle,

structure mutualiste.

MEDICAL RESPONSIBILITY IN MADAGASCAR :

REAL SITUATIONS AND A PROJECT OF RENOVATION REFERRING TO FRENCH LAW

To come up to the Malagasy society’s expectations a legal act on medical responsibility should be coherent with the local conception of medical practice. In Madagascar, the public opinion is convinced that medical practice has to deal with a divine action out of the physician’s control so that the legal concept of therapeutic risk is therefore accepted. The physician is only required to assume the continuity of the service and to provide his or her best care to patients. Meanwhile Malagasy culture shows an extreme compassion towards people suffering of bodily injuries mainly when these wounds result from a malpractice. To prevent a godly punishment doctors usually have to donate to their injured patient. This helps to preserve the physician’s reputation and his or her relationship with the patient. Medical duty in Madagascar is more a matter of recognition of the patient’s pain than a procedure of compensation. French legal system is different as it promotes the complete compensation in case of malpractice. However, both legal systems are similar when proposing alternative process to resolve conflicts.

Keywords

Medical fault: Technical foul, relational fault — Alternative dispute resolution in medical conflicts — Mechanisms of pension liability: insurance and mutual structure.

NY ADIDY AMAN’ANDAIKITRY NY MPITSABO MALAGASY

Mba hahafahan’ny lalàna mifehy ny fitsaboana mamaly izay andrasan’ny fiarahamonina aminy dia tokony hampifandraisina amin’ny kolontsaina malagasy mikasika ny fitsaboana ny volavolan-dalàna mikasika ny fanonerana ny loza ara-pitsaboana. Amin’ny kolontsaina malagasy, ny loza tsy ampoizina amin’ny asam-pitsaboana dia efa fotokevitra mitoetra satria ny fiafaran’ny asam-pitsaboana dia avy amin’Andriamanitra fa tsy avy amin’ny mpitsabo. Raha mitranga ary ny loza dia miezaka ny dokotera hanao fihetsika amin’ny niharam-boina. Izany fihetsika izany dia tsy voatery hitovy amin’ny taha-ara-bola ny loza nitranga, fa fandraisana anjara ho fanajana ny niharam-boina. Raha fehezina, eto Madagasikara, ny andraikitra ateraky ny fitsaboana mikasika ny fanonerana dia mahakasika kokoa ny fanekena ny fisian’ny fanaintainana nihatra tamin’ny marary fa tsy fanonerana ara-bakiteny ny loza. Tsapa eto ny fahasamihafany amin’ny lalana ara-pitsaboana frantsay izay mifototra amin’ny fanonerana manontolo ny loza. Ny paik’ady ifanarahana no mampifandray ny lalana roa tonta.

(4)

L’université de Poitiers n’entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans les thèses ; ces opinions doivent être considérées comme propres à leurs auteurs.

(5)

À la mémoire de mon père, À ma famille,

À mes sœurs de Congrégation, À Marthe, à Clément,

À Monsieur le professeur Gérard Mémeteau pour son soutien de toujours,

(6)

S

OMMAIRE

INTRODUCTION ... 6

PARTIE I. L’APPRÉCIATION DE L’ENCADREMENT JURIDIQUE DE LA PROFESSION MÉDICALE À MADAGASCAR À LA LUMIÈRE DU DROIT MÉDICAL FRANÇAIS ... 44

TITRE I. EXISTENCE D’UN PRINCIPE DE RESPONSABILITÉ APPLICABLE À LA PROFESSION MÉDICALE À MADAGASCAR ... 50

Chapitre I. Exposé de la nature contractuelle du rapport médecin-patient en droit positif malgache ... 53

Chapitre II. Les modalités et l’étendue du droit de la réparation ... 96

TITRE II. INEXISTENCE PRATIQUE DE LA RESPONSABILITÉ MÉDICALE À MADAGASCAR ... 116

Chapitre I. Le système assurantiel des médecins face aux accidents thérapeutiques ... 118

Chapitre II. La difficulté de la réalité du lien de causalité ... 144

PARTIE II. LES VOIES D’ÉLABORATION DU DROIT DE LA RESPONSABILITÉ MÉDICALE À MADAGASCAR ... 168

TITRE I. VOIE AMIABLE, VOIE CONTENTIEUSE : QUELLE OPTION POUR LE DROIT MÉDICAL MALGACHE ? ... 171

Chapitre I. Le déploiement des résolutions amiables en cas d’accidents médicaux ... 174

Chapitre II. La compensation pécuniaire : signe de non impunité pour fait médical préjudiciable ... 206

TITRE II. LE DROIT MÉDICAL FRANÇAIS : SOURCE LÉGISLATIVE À MANIPULER AVEC MESURE ... 225

Chapitre I. L’incapacité de la loi du 4 mars 2002 à apporter une sécurité juridique intégrale aux parties ... 227

Chapitre II. La codification mesurée de la responsabilité médicale à Madagascar ... 252

CONCLUSION GÉNÉRALE ... 272

ANNEXES ... 288

Code de la santé (Madagascar) ... 289

Code de déontologie médicale (Madagascar) ... 382

Exemple de conditions particulières d’un contrat d’assurance responsabilité d’un professionnel de santé (Madagascar) ... 394

BIBLIOGRAPHIE ... 397

INDEX ... 408

(7)
(8)

De sorte que croire à la médecine serait la suprême folie, si n’y pas croire n’en était pas une plus grande, car de cet amoncellement d’erreurs se sont dégagées, à la longue quelques vérités.

M.PROUST1

La responsabilité civile médicale n’est pas une exception de responsabilité civile.

A. BACHELLERIE2

1. Le principe de la responsabilité civile traduit le système d’indemnisation

authentique. — La mise en oeuvre de la responsabilité civile résulte d’un fait

dommageable 3 issu soit de l’inexécution contractuelle 4, soit de la commission d’une

faute « événementielle » 5 hors toute convention (faute délictuelle). Historiquement,

un tel régime reposait sur un concept de responsabilité individuelle où chaque citoyen devait se conduire correctement afin de ne pas causer de tort à ceux et celles qui l’entourent 6. La responsabilité civile était ainsi conçue en vue de réguler les

1 M.PROUST, À la recherche du temps perdu, t. 3, Le Côté de Guermantes, Gallimard, 1921-1922.

2 A. BACHELLERIE, L’évolution du contentieux médical et ses conséquences sur la relation médecin-assureur,

L’Harmattan, 2004, p. 21.

3 Nommée également fait générateur.

4 D. TALLON, L’inexécution du contrat : pour une autre présentation, RTD civ. 1994, p. 223 ; « Pourquoi

parler de la faute contractuelle ? », in Droit civil, procédure, linguistique juridique : écrits en hommage à Gérard Cornu, P.U.F., 1994, p. 429 ; G. VINEY et P. JOURDAIN, Traité de droit civil, sous la direction de

J. GHESTIN, Les conditions de la responsabilité, 3e éd., L.G.D.J., 2006, p. 374.

5 Il y a ainsi deux sortes de faute : la faute contractuelle : article 1147 du Code civil français et la

faute délictuelle : article 1382 du même Code. L’article 1384 élargit le principe de la responsabilité délictuelle en indiquant qu’on est également responsable du dommage causé par le fait des personnes dont on doit répondre ; c’est le principe de la responsabilité pour « fait d’autrui ». « Autrui » pouvant être représenté soit par les enfants par rapport aux parents, soit par les élèves par rapport aux instituteurs, soit par les préposés par rapport aux commettants ou encore les apprentis par rapport aux artisans. Mais la doctrine confirme que cette extension, n’a pas de pendant en droit d’inexécution contractuelle ; ceci parce que le droit à un remède contractuel suppose seulement l’inexécution d’une obligation contractuelle, à savoir l’écart entre ce qui était promis par le débiteur et ce qu’il a fourni (il y a exécution mais qualifiée de défectueuse) ou n’a pas fourni (l’inexécution totale est consumée). Et le Code civil ne contient pas de dispositions érigeant le « fait d’autrui » ou le « fait des choses » en fait générateur de responsabilité contractuelle ; M. FAURE-ABBAD, Le fait générateur de la responsabilité contractuelle,

Th. pour le doctorat en droit, 5 janvier 2002, Université de Poitiers, p. 297 et s., Coll. de la Faculté de droit et des sciences sociales.

6 A. TUNC, La responsabilité civile, Économica, 1981, p. 133. L’auteur relève quatre idées fondatrices

de la responsabilité civile : la prévention des comportements antisociaux, l’indemnisation de la victime, la dilution de la charge des dommages et la garantie des droits de citoyens au respect de l’intégrité corporelle soit ; bref la responsabilité civile s’inscrit dans la reconnaissance du préjudice subi. Le désir de mesure et d’équilibre motive la position jurisprudentielle en matière de responsabilité civile. Ainsi, en qualité d’hommes organisés en société, « Chacun d’entre nous est

(9)

rapports sociaux 7. Le principe de la responsabilité civile assumait à la fois une

mission de prévention face aux comportements contraires à la morale 8 et

consécutivement permet de réparer le préjudice injustement causé à autrui (damnum

injuria datum) 9. Une formule de Domat 10 relative à la responsabilité civile distingue

nettement le contenu des comportements dits contraires à la morale :

Toutes les pertes, et tous les dommages qui peuvent arriver par le fait de quelque personne, soit imprudence, légèreté, ignorance de ce qu’on doit savoir, ou autres fautes semblables, si légères qu’elles puissent être doivent être réparées par celui dont l’imprudence ou autre faute y a donné lieu. Car c’est un tort qu’il a fait, quand bien même il n’aurait pas eu l’intention de nuire 11 […].

Le défaut de s’acquitter d’un engagement, est aussi une faute qui peut donner occasion à des dommages et intérêts dont sera tenu l’auteur. 12

tenu par le bon sens, la morale, les règlements et bien d’autres normes encore, à agir ou à ne pas agir […] »,

J. BELLISSENT, Contribution à l’analyse de la distinction des obligations de moyens et des obligations de

résultat, préf. R. CABRILLAC, Bibliothèque de droit privé, L.G.D.J., 2001, p. 337.

7 Les rapports interindividuels.

8 Ce trait caractéristique de la responsabilité civile marque sa communauté d’origine avec la

responsabilité pénale. Historiquement, le droit romain et l’ancien droit français, ne procédaient pas à la distinction des deux ordres de responsabilité, voir : G. VINEY, sous la direction de J. GHESTIN, Introduction à la responsabilité, Traité de droit civil, 3e éd., L.G.D.J., 2008, p. 162.

Ce n’est qu’en 1975, que l’existence d’une véritable action civile distincte d’une action publique, fut consacrée par le Code des délits et des peines (Code de Brumaire) dont l’article 5 dispose que : « L’action civile a pour objet, la réparation du dommage que le délit a causé ». L’autonomie de la responsabilité civile par rapport à la responsabilité pénale est alors acquise et fut entérinée par la codification napoléonienne de 1804.

9 M.FAURE-ABBAD,op. cit., p. 3.

10 J. DOMAT, jurisconsulte français, né à Clermont-Ferrand (1625-1696). Son œuvre intitulé,

Les loix civiles dans leur ordre naturel, constitue un monument du droit civil français ; œuvre ayant

influencé le Code Napoléon de 1804.

11 C’est un point qui différencie la responsabilité civile de la responsabilité pénale. La responsabilité

pénale ne saurait en effet, être engagée sans l’élément intentionnel. « Il n’y a point de crime ou délit

sans intention de le commettre», dit l’article 121-3 al. 1 du Code pénal.

12 J. DOMAT, Les loix civiles, Livre II, Titre VIII, Section. IV. « La maladresse est une faute technique »,

Cass. civ. 1ère, 7 janvier 1997, Bull., I, n° 6, p .4 ; Dalloz, 1997, p. 189, note D. THOUVENIN et

rapport P. SARGOS ; en l’espèce engage sa responsabilité le chirurgien qui, au cours d’une

intervention chirurgicale portant sur une côte, blesse par maladresse une artère. Dans le même sens, encourt la cassation, l’arrêt qui exonère le praticien de toute responsabilité au motif que celui-ci n’avait pas commis de « maladresse fautive ou non admissible », alors que la blessure résultait de son fait.Pour Monsieur le Conseiller P. SARGOS, toute maladresse (chirurgicale) constitue une faute et qu’il n’y aurait pas de maladresse « admissible », in rapport présenté à la Cour de cassation en 1997. Le médecin est tenu spécialement d’une obligation de maîtrise du geste professionnel, Cass. civ 1ère, 23 mai 2000, Bull., I, n° 153, p. 100. Dans le même sens, la Cour de

cassation assimile la faute légère à la maladresse engageant de facto la responsabilité médicale. N’a donc pas été censuré l’arrêt de la cour d’appel ayant retenu la responsabilité d’un chirurgien, même si elle a précisé que la réalisation du dommage : perforation du colon, ne suffisait pas à engager la responsabilité du médecin dès le moment où, il a été constaté qu’à l’occasion d’une biopsie hépatique, il avait commis une erreur de trajet constitutive d’une maladresse, Cass. civ.

1ère, 13 octobre 1999, J.C.P., 2000. En somme, la maladresse constitue une « faute technique »,

(10)

En somme, constituent les comportements fautifs engageant la responsabilité civile 13, l’imprudence, la légèreté, l’ignorance de ce qu’on doit savoir ainsi que le

défaut de s’acquitter d’un engagement.

L’intérêt de la présente étude est de comprendre la déclinaison du principe de responsabilité civile dans le cadre de la pratique médicale à Madagascar.

2. Le principe de la responsabilité civile médicale à Madagascar. — Transposé

en matière médicale, le régime de la réparation implique le droit de la victime d’accident thérapeutique à une compensation qui se concrétise par l’indemnisation 14.

Le médecin a des obligations à l’égard du patient dont le non-respect engage sa responsabilité 15. En outre, conformément au principe de la responsabilité civile

délictuelle, le professionnel est susceptible de répondre aux agissements des personnes sous son ordre 16 ainsi que du fait des matériaux nécessaires à son art 17.

Pour approfondir les règles applicables à la profession médicale, il importe de savoir si les agissements préjudiciables dont il est question, relèvent de la faute contractuelle

13 Sur l’étude de la faute entendue comme fondement de la responsabilité civile, voir : G. VINEY,

sous la direction de J. GHESTIN, « La faute, seul fondement de la responsabilité ? », in Introduction à

l’étude de droit, Traité de droit civil, 3e éd., L.G.D.J., 2006, p. 108. Parmi les traités et manuels qui

traitent du sujet, figurent : R. SAVATIER, Traité de la responsabilité civile en droit français, préface de

G. RIPERT, t. 1, 2e éd., L.G.D.J., 1951 n° 274 et s. ; Ph. LE TOURNEAU, avec la participation de

C. BLOCH, A. GUIDICELLI, D. KRAJESKI, Droit de la responsabilité des contrats, Dalloz Action, 9e éd.,

2012-2013, n° 3437 ; Ph. MALAURIE, L. AYNÈS et Ph. STOFFEL-MUNCK, Les obligations,

Défrénois-Lextenso, 5e éd., 2011 n° 320 à 324 et notamment n° 323 ; J. FLOUR,J.-L. AUBERT et

É. SAVAUX, Droit civil, Les obligations. 2, Le fait juridique, 14e éd., 2011, Coll. Sirey Université, Droit

privé, n° 173.

14 A. BACHELLERIE, L’évolution du contentieux médical et ses conséquences sur la relation médecin-assureur,

l’Harmattan, 2004, p. 10 ; G. VINEY, Traité de droit civil, sous la direction de J. GHESTIN,

Introduction à la responsabilité, 3e éd., L.G.D.J. 2008, p. 77. Voir également : Les travaux du

Colloque franco-germano-suisse de Bâle de 1968 portant sur les fondements et les fonctions de la responsabilité civile.

15 Le non-respect des engagements légaux constitue la faute. Ainsi retrouve-t-on, la permanence du

principe de la nécessité de la faute pour engager la responsabilité médicale. La notion de « faute » est plus ou moins comprise, au besoin par le recours à des présomptions ( de type res ipsa

loquitur : « la chose parle d’elle-même » ), à laquelle les tribunaux français ont été sensibles avant

qu’elle ne fût officiellement abandonnée en octobre 1985, P. A. CRÉPEAU,L’intensité de l’obligation

juridique ou de l’obligation de diligence de résultat (ou de garantie), Y.BLAIS, 1989, spéc. p. 221 et s., in

Cours de droit médical, G. MÉMETEAU, 4e éd., Les Études hospitalières, 2010, p. 472.

16 En droit malgache, le principe de la responsabilité pour fait d’autrui est prévu à l’article 220 de la

Loi sur la théorie générale des obligations ou la LTGO malgache (dite aussi TGO). En droit français, l’article 1384 dispose qu’ : « On est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son

propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde ».

17 Ph. MALAURIE,L. AYNÈSET PH.STOFFEL-MUNCK, op. cit., n° 1006. La responsabilité pour les

faits des choses dont on a la garde prévue à l’article 1384 du Code civil français a pour correspondant l’article 206 de la LTGO malgache.

(11)

ou de la faute délictuelle. En droit français, la faute médicale fut longtemps rattachée à l’ordre délictuel mais pour des raisons pratiques que nous analyserons ultérieurement (n° 15.), un revirement a été opéré par le célèbre arrêt Mercier 18.

Depuis l’arrêt concerné, la responsabilité médicale a rejoint l’ordre contractuel 19

(actuellement la qualification contractuelle de la relation médecin-malade subit plusieurs revirements jurisprudentiels que nous verrons également par la suite (n° 16).

En droit malgache, c’est la loi n° 66-003 du 2 juillet 1966 relative à la théorie générale des obligations 20 qui règlemente les agissements préjudiciables du médecin.

Sachant qu’en fonction de l’évènement à l’origine du préjudice (fait générateur), la responsabilité civile peut être délictuelle ou contractuelle 21, la TGO a prévu des

dispositions respectives. Pour la responsabilité civile délictuelle, l’article 204 de la TGO énonce que « chacun est responsable du dommage causé par sa faute, même de négligence

ou d’imprudence » et pour la responsabilité civile contractuelle, l’article 177 de la TGO

énonce qu’« en cas d’inexécution totale ou partielle d’une obligation contractuelle, ou d’exécution

tardive, le débiteur doit réparer le préjudice causé de ce fait au créancier ». L’article 190 la TGO

confirme quant à lui, le fondement indemnitaire de la responsabilité civile en ces termes : « Les dommages-intérêts dus par le débiteur représentent le préjudice découlant directement

de l’inexécution de l’obligation et pouvant être raisonnablement prévu par le contrat » 22.

18 Cass civ., 20 mai 1936, D. P. 1936.1.88, concl. P. MATTER, rapp. L. JOSSERAND, RTD civ. 1936,

691, obs. R.DEMOGUE. Selon la Cour, « Il se forme entre le médecin et son client un véritable contrat

comportant pour le praticien l’engagement sinon bien évidemment de guérir le malade […] du moins de lui donner des soins consciencieux, attentifs et réserve faite de circonstances exceptionnelles, conformes aux données acquises de la science ; que la violation même involontaire de cette obligation est sanctionnée par une responsabilité de même nature, également contractuelle ».

19 J. BELLISENT, Contribution à l’analyse de la distinction des obligations de moyens et des obligations de résultat,

préf. R.CABRILLAC, Bibliothèque de droit privé, L.G.D.J., 2001, n° 804.

20 Loi n° 66-003 du 2 juillet 1966 relative à la Théorie générale des obligations, J.O. n° 486 du

9 juillet 1966, p. 1429. Par usage, on dispose d’une double appellation de la loi relative à la théorie générale des obligations : LTGO ou TGO.

21 Un an, avant la promulgation de la LTGO, la loi n° 65-003 du 9 juin 1965 relative aux sources

des obligations civiles a posé la distinction entre Acte juridique et Fait juridique. Leur violation implique respectivement la responsabilité civile contractuelle et la responsabilité civile délictuelle.

22 L’indemnité doit représenter aussi exactement que possible le dommage réel subi par le

créancier ; c’est le principe de l’intégralité de la réparation. Le dommage se compose de deux éléments distincts qui sont rappelés à l’article 191, al. 1er de TGO : la perte subie, c’est-à-dire

l’appauvrissement survenu dans le patrimoine du créancier et le gain dont le créancier a été privé du fait de l’inexécution de l’obligation légale contractuelle ou délictuelle. Cette distinction est héritée du droit romain qui appelait le premier élément damnum energens, et le deuxième

(12)

La dualité de régime de responsabilité civile (délictuelle et contractuelle) présente l’intérêt de recourir aux dispositions adéquates. Pour autant, en matière de responsabilité médicale, la dualité peut prêter à confusion et rend délicat le choix des dispositions juridiques opportunes. En effet, face à un médecin ayant commis une négligence ou une imprudence (responsabilité civile délictuelle) durant l’exercice de son art qualifié par la doctrine de contractuel 23, la question se pose sur la disposition

législative la plus adaptée : celle correspondant à la responsabilité civile délictuelle ou celle relative à la responsabilité contractuelle ? En définitif, dans le domaine médical, les fautes délictuelles 24 (dans le sens d’« imprudence » et de « négligence ») qu’un

médecin peut commettre dans l’exercice de son art, correspondent aux fautes d’inexécution ou de mauvaise exécution de ses obligations contractuelles telles qu’elles résultent de l’article 88 25 de la TGO. L’analyse est partagée par le droit

comparé qui avance par ailleurs, la théorie de l’unité de la nature de la responsabilité 26.

Une fois l’appréciation de la responsabilité du praticien résolue, on peut soutenir que la loi sur la théorie générale des obligations demeure pour les justiciables malgaches, la source de protection de leur droit et de leur intégrité physique. Expression de la volonté du peuple 27, elle forme le domaine principal de la logique

juridique du pays 28. Dans un pays comme Madagascar où la responsabilité médicale

23 S. RANDRIANAHINORO, Droit des obligations, éd. du centre malgache de promotion du livre

CMPL, 1984, p. 14, 15.

24 Article 204 de la TGO : « Chacun est responsable du dommage causé par sa faute, même de négligence ou

d’imprudence ».

25 Article 88 de la TGO : « Les obligations résultant d’un contrat ont pour objet, soit de fournir une prestation,

soit de s’abstenir d’une faculté. La prestation ou l’abstention doit être déterminée ou déterminable. Elle doit être possible. Elle peut être future aussi bien que présente ».

26 P. CHARIOT et,M.DEBOUT, Traité de médecine légale et droit de la santé, éd. Vuibert, 2010, p. 549.

En 1930, une théorie médiane a été proposée par A. BRUN ; la théorie de « compromis »

laquelle, suppose l’unité de la nature des deux ordres de responsabilité, in Rapports et domaines des

responsabilités contractuelle et délictuelle, Th. Lyon 1931.

27 En 1959, l’Assemblée nationale législative, à la suite d’un long débat sur la codification des

coutumes adoptait la résolution suivante : « L’Assemblée nationale législative demande au gouvernement

de tenir compte, dans la mesure du possible des règles coutumières à chaque province, en attendant l’extension et l’application à l’ensemble du pays d’une législation unifiée adaptée aux usages des différentes populations de Madagascar et acceptée par elle afin d’aboutir à l’établissement d’une législation moderne, conforme à la volonté d’évolution et de progrès du peuple Malgache. » . Cette législation n’est autre que la Loi sur théorie

générale des obligations, A. RAMANGASOAVINA, Rapport de synthèse sur l’état des personnes, Tananarive, l962, p. 1.

(13)

n’est pas encore formalisée à travers une loi spécifique 29, la loi sur la théorie générale

des obligations ou la LTGO, occupe une place capitale. La LTGO établit un cadre juridique malléable pour gérer les obligations juridiques à l’issu d’un fait ou d’un acte juridique 30. L’application de la loi sur la théorie générale des obligations au domaine

de la responsabilité médicale, se matérialise par le principe selon lequel aucune personne ne peut échapper à sa responsabilité si son activité a entraîné un dommage pour autrui 31. En effet, en application des articles 51 32 et 53 33 de la TGO, tout

débiteur est tenu de s’acquitter de ses obligations à l’égard du créancier lequel, en cas d’inexécution, peut faire appel à la force sociale organisée. Dans un premier temps, l’exécution forcée se matérialise par une exécution en nature. Le créancier est d’abord en droit de recevoir la même chose dont il avait été « amputé » 34. C’est seulement

lorsque l’exécution en nature est rendue impossible, qu’il devra se contenter de recevoir une prestation équivalente. L’exécution par équivalence consiste normalement en une somme d’argent, que l’on appelle dommages-intérêts 35.

Le devoir d’exécuter des prestations dont on est professionnellement tenu, répond à un refus social de voir un corps de métier quel qu’il soit, être à l’abri de toute action en justice en raison d’une compétence présumée sans faille. De surcroît, en matière de soins aux personnes, il est difficile de passer sous silence la question de la responsabilité juridique. Le droit français insiste sur le droit à réparation en cas de préjudice corporel issu d’un accident médical. Étant donné qu’il s’agit d’intervenir sur

29 Si de nombreux droits en faveur des malades ont été établis en France […] grâce à l’évolution

des esprits et que les intérêts portent sur des sujets comme la responsabilité médicale, l’obligation d’information supposant le consentement des malades ou encore la question de fin de vie, à Madagascar, ces sujets sont aujourd’hui au stade de conception, donc fragiles, voir : B. N.RICHARD et V.JULIEN,Consécration règlementaire : Des droits des malades à Madagascar, R.D.S.,

septembre 2005, n° 7, p. 439.

30 Ph. DELEBECQUE, L’actualité de la théorie générale des obligations malgache (TGO), in, Mélanges en

l’honneur du Professeur A. Raharinarivonirina, Éditions Jurid’ika, 2010 et L’Harmattan, 2010, p. 187

et s.

31 D. THOUVENIN, La responsabilité médicale, Analyse des données statistiques disponibles et des

arrêts rendus par la Cour de cassation et le Conseil d’État de 1984 à 1992, éd. Médecines-Sciences Flammarion, 1999, p. 2.

32 Article 51 : « Le débiteur est tenu d’exécuter son obligation dès lors que le créancier le prouve […] ».

33 Article 53 : « Lorsque le débiteur n’exécute pas l’obligation, le créancier peut le contraindre par toutes voies de

droit ».

34 Dès lors, on retrouve, l’idée de compensation ou de dédommagement octroyé afin de remédier à

une perte, soit le principe de la responsabilité civile, article 1382 du Code civile français.

35 S.RANDRIANAHINORO, Droit des obligations, Edition du centre malgache de promotion du livre

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le corps humain 36, il est difficile d’admettre qu’une atteinte 37 sur ce corps, même

involontaire, n’aie pas de réponse juridique 38. Il serait en effet, inadmissible que le

médecin soit préservé des lois applicables à tout citoyen 39. Autrement formulé, si le

praticien commet une faute dans l’exercice de son art, c’est à juste titre que lui soit appliquée la règle régissant la responsabilité civile fondée sur la notion de faute 40.

Ainsi, par le biais de la loi sur la Théorie générale des obligations ( TGO ), contrairement aux idées reçues 41, le « vide textuel » 42 ne saurait-être invoqué pour

justifier les lacunes en droit de la responsabilité médicale à Madagascar 43. Mais, le

36 « La relation médicale touche au corps et la vie, aux mystères de l’être », Ph. MALAURIE, L. AYNÈS et

Ph. STOFFEL-MUNCK, Les obligations, éd. Défrénois-Lextenso, 2e éd., 2004 n° 321.

37 L’atteinte à l’intégrité physique dans le sens de dommage corporel peut s’agir de blessures plus

ou moins graves et à plus forte raison de décès, Y.LAMBERT-FAIVRE,S.PORCHY-SIMON, Droit

du dommage corporel, système d’indemnisation, 6e éd., 2009, Dalloz, n° 2 et s. ; Y.LAMBERT-FAIVRE,

Le droit et la morale dans l’indemnisation des dommages corporels, Dalloz 1992, Chron. p. 165 et s.

38 L’article 16 du Code civile dispose à cet effet que : « la loi assure la primauté de la personne ». Et que

« Chacun a droit au respect de son corps » ; article 16-1 du même Code. Dans le même sens, Ph. MALAURIE et L. AYNÈS, disent : « La relation médicale touche au corps et à la vie, aux mystères de

l’être, […] le médecin ne peut être considéré comme un simple prestataire de services », in Les obligations,

Défrénois-Lextenso, 5e éd., 2011. Les études sociologiques révèlent également cet impératif de

réparation des dommages corporels en évoquant que nos sociétés « ont une aversion forte à l’égard

des risques résiduels », PERETTI-WATEL, Sociologie du risque, Repères, La Découverte, 2010, p. 45

et s. Il en résulte une difficulté à admettre que le hasard et la fatalité puissent justifier qu’un dommage reste sans réparation. Ainsi, la majorité des individus n’admette plus le fait qu’une atteinte portée au corps reste sans réparation intégrale. Voir aussi G. DEVERS, Retour sur la

responsabilité, Droit et déontologie du soin, Rev. Trim., décembre 2009, Vol. 9, n° 4, p. 393.

39 J. F. LEMAIRE, J. L. IMBERT, La responsabilité médicale, Puf, Coll. « Que sais-je ? », n° 2200, 1985,

p. 9. Pour Monsieur le Conseiller P. SARGOS, toute maladresse chirurgicale constitue une faute et

que la maladresse « admissible » ne saurait exister, in rapport présenté à la Cour de cassation en 1997 ; dans le même sens, G.VINEY, L’indemnisation des accidents médicaux, L.G.D.J., Actes du colloque du 24 avril 1997, organisé par le Centre de droit des obligations de l’Université de Paris I, p. 3.

40 H.,L. MAZEAUD,parA. TUNC,Traité théorique et pratique de la responsabilité délictuelle et contractuelle,

6e éd., Paris, Monchrétien, 1965, n° 36 et s.

41 Si la doctrine africaine constate qu’« En Afrique, le médecin n’est soumis à aucune exigence légale précise et

spécifique relative au droit du patient », S.THIAM, La déontologie médicale et la tradition africaine, approche

anthropologique sur le rapport médecin-patient, in La déontologie médicale, Actes du Ve Colloque national,

Droit, Histoire, Médecine, Aix-en-Provence, 1er et 2 décembre 2006, sous la direction d’A. LECA,

P.U. d’Aix-en-Provence 2007, p. 353 ; le fait même de disposer une loi relative aux obligations, donne un cadre juridique à l’activité médicale.

42 F. VIALLA, Les décisions du droit médical, éd. L.G.D.J., Lextensoéditions, 2009, p. 1.

43 D’ailleurs, dans la perspective de proposer de loi relative à la responsabilité médicale à

Madagascar, il est intéressant de prendre en considération quelques réflexions de certains éminents juristes français : PORTALIS avertit : « Il ne faut point de lois inutiles ; elles affaibliraient les lois

nécessaires (en l’occurrence pour Madagascar, la loi nécessaire est la TGO) ». Et le Doyen CARBONNIER

implore de ne pas légiférer qu’en tremblant. Enfin MONTESQUIEU dans son ouvrage Les Lettres

persanes de 1721 (commentaire fait par J. CHARPENTIER etMICHEL CHARPENTIER,éd. Nathan,

1993), pose une réflexion philosophique sur la relativité des lois en raison du contexte socio-culturel. D’après le roman, les us, coutumes et règles régissant le quotidien d’une société

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voudrait-elle, la loi ne peut se porter garante de l’effectivité des dispositions qu’elle stipule 44. Cette tâche incombe aux autorités ayant qualité pour appliquer et

interpréter la loi 45, c’est-à-dire, les juges. Concernant l’application du droit médical

par le juge, la réalité jurisprudentielle à Madagascar, atteste que des efforts restent à réaliser.

3. La réalité jurisprudentielle de la profession médicale à Madagascar. — Il est possible de constater que les actions tendant à mettre en cause la responsabilité des professionnels de santé ou des établissements de santé à l’occasion d’actes de prévention, de diagnostic, n’a jamais été reconnue explicitement en droit coutumier malgache ; pas plus que dans la pratique du « droit commun » (la TGO). Ce phénomène s’explique par le fait que le droit traditionnel (coutumier) ne se permettait pas d’établir de théories générales d’obligation pour le domaine relatif à la santé car perçu comme un élément fluctuant. En effet, face à une donnée non maîtrisable par l’homme qu’est la « santé », l’institution judiciaire traditionnelle ne se lancait pas à incriminer publiquement le « guérisseur ». L’arrivée des médecins européens et missionnaires vers le XVIIIe siècle, a certes initié une avancée de la

règlementation de la pratique médicale (voir n° 7) mais très vite, on a compris que sur la question, il y a eu constamment tiraillement, dans l’esprit des juges. Ils sont partagés entre le refus d’apprécier juridiquement des faits relevant de la métaphysique et la culpabilité professionnelle du fait de laisser passer des violations à l’intégrité physique des patients. Autrement dit, d’une part, il y a le refus de sanctionner les sujets de droits sur des apparences et, d’autre part, la nécessité de protéger les patients contre un comportement dangereux 46. La réticence de condamner des faits

surnaturels a été particulièrement affirmée sur le plan pénal 47. Malgré le rôle des

donnée (en l’occurrence, les us et coutumes des occidentaux attirant l’attention de deux étrangers persans, voir : analyse de B. DE BAERE et L. ROVEDA, La satire dans Les lettres persanes,

Université Gent Belgique, 2006-2007), qui sont à priori jugés intéressants peuvent au final être

remis en question. Cette analyse sur la relativité des mœurs est reprise par MONTESQUIEU dans

De l’Esprit des lois, 1758.

44 Formule inspirée des notes de F. VIALLA, in Les décisions du droit médical, éd. L.G.D.J.,

lextensoéditions, 2009, p. 1.

45 Ibid.

46 Voir : RAMANITRA, De la répression de la sorcellerie à Madagascar, Annales de l’Université de

Madagascar-Droit, volume 8, p. 19.

47 Ceci étant, en 1960 le législateur prend tout de même l’initiative de prendre un texte réprimant

les comportements de certains individus se prévalant d’être investis de pouvoirs surnaturels et donc disposés à intervenir librement, sur l’état de santé de ses semblables. Entre alors en vigueur, l’ordonnance n° 60-074 du 28 juillet 1960 portant répression de toutes pratiques de charlatanisme, V.RAMANITRA, De la répression de la sorcellerie à Madagascar, Annales de l’Université

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parquets 48, les juridictions ont émis beaucoup de conditions avant d’asseoir leur

verdicts. Dans le cadre de l’ordonnance n° 60-074 du 28 juillet 1960 portant répression de toutes pratiques de charlatanisme, les juridictions ne se sont pas contentées de l’élément moral 49 pour décider d’une condamnation. Dans un premier

temps, elles ont exigé en plus, un acte matériel consistant en l’usage sur la victime d’une atteinte réelle troublant l’ordre public. Alors pour entrer en condamnation, il ne suffisait pas à la partie demanderesse, d’établir la relation de cause à effet entre l’acte et l’atteinte, c’est-à-dire, la preuve des faits occultes, encore fallait-il qu’elle établisse que leur pratique soit susceptible de troubler l’ordre public et de porter atteinte aux personnes 50. De cette première étape où les juridictions n’ont fait que

mettre en œuvre les principes généraux du droit pénal, il en résultait de nombreux acquittements 51. Une des rares inculpations qu’on a pu matériellement retenir 52

concerne des individus qui prétendaient guérir une femme sujette à de convulsions soi-disant provoquées par un esprit. En brandissant sur elle des tisons, ils provoquèrent la mort par brûlure et asphyxie 53. Peu à peu, les magistrats ont pris

conscience que beaucoup de pratiques illégales d’actes de soins échappaient à la répression. Ils n’ont plus alors exigé le caractère manifestement offensif de l’acte pour pouvoir incriminer. Dès lors qu’un effet préjudiciable a été constaté, l’incrimination est possible. Avec la disparition de l’exigence du caractère dangereux des moyens mis en œuvre, s’efface également le lien de causalité. La dernière étape effectuée par les juridictions en vue de sanctionner les pratiques illégales de soins, fut celle où la preuve des faits occultes suffise à elle seule pour asseoir un jugement. Le

de Madagascar-Droit, volume 8, p. 3. Sur la question de pratiques occultes, voir : M. RAMALANJAONA,étude parue dans Penant, 1967, n° 718 et n 719.

48 Le Ministère public prenant en charge de la défense de l’intérêt de la collectivité. 49 La preuve de l’intention de nuire.

50 On remarquera que « trouble à l’ordre public » et « atteinte à l’intégrité aux personnes » sont liés

par la conjonction « et » et non « ou » ; il s’agit donc là d’une condition exhaustive. Cela complique considérablement la tâche du Ministère public, lequel se retrouve obligé d’apporter simultanément, la preuve de deux faits (atteinte à l’intégrité de la personne et trouble à l’ordre public). Toutefois, on remarquera qu’il n’est pas exigé que la pratique sanctionnée ait réellement causé les faits incriminés, il suffit qu’elle eut été susceptible de les causer, voir : V. RAMANITRA, De la répression de la sorcellerie à Madagascar, Annales de l’Université de

Madagascar-Droit, volume 8, p. 6.

51 Mais peu à peu, devant les multiplications de certains phénomènes inexplicables aboutissant

souvent à des situations tragiques, les juridictions ont fini par entrer en condamnation, V. RAMANITRA, De la répression de la sorcellerie à Madagascar, Annales de l’Université de

Madagascar-Droit, volume 8, p. 19.

52 En raison de la difficulté matérielle d’accès aux documents.

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caractère de dangerosité, de trouble à l’ordre public, d’atteinte aux personnes et d’effet préjudiciable ne sont plus exigés. Avec cette logique, l’inculpé peut avancer l’hypothèse d’infraction impossible 54 pour échapper à la répression. Pour y remédier, le

législateur a décidé que du moment où l’acte est susceptible de produire effet, le délit est constitué. Bref, il n’est plus question de faute avérée du prévenu et encore moins de lien de causalité. On se retrouve sur le terrain de l’infraction virtuelle 55 supposant

une responsabilité objective 56.

Si la législation pénale a fortement contribué à l’affirmation du droit médical à Madagascar, elle n’en est pas l’unique. Outre les manifestations prétoriennes récentes que nous verrons ultérieurement (n° 103), les pratiques coutumières 57 n’étaient pas

moins indifférentes devant l’échec d’un acte médical.

4. La conception traditionnelle de la responsabilité médicale. — Dans la conception ancestrale malgache, les maladies sont produites par les maléfices jetés par quelqu’un de la maison (mosavy an-trano) ou par des faiseurs de sortilèges à travers ce que l’on mange. La maladie tout comme la mort, n’est pas naturelle. Si par exemple, un membre de la famille tombe brusquement malade, s’il a des coliques, de la fièvre, de l’ictère, ou de la lèpre, il ne faut pas chercher ailleurs la cause que dans un sort jeté par le sorcier 58. Pareil, si une personne est brusquement prise de

convulsions (d’ambalavelona), de contractions tétaniques (ramanenjana), d’épilepsie

54 Terme pénal signifiant une tentative infructueuse, une infraction manquée

55 V.RAMANITRA, op. cit., p. 9.

56 Responsabilité objective dans le sens de « responsabilité de plein droit », voir : G. VINEY, Traité

de droit civil, sous la direction de J. GHESTIN, Introduction à la responsabilité, 3e éd., L.G.D.J. 2008,

p. 29. G. VINEY parle de « l’affaiblissement du rôle de la faute dans la mise en œuvre de la réparation ». Sur le même sujet, voir : G. RIPERT, La règle morale dans les obligations civiles, 4e éd.,

L.G.D.J., 1949, n° 89 et s., R. SAVATIER, Les métaphores de la responsabilité, sixième Journées R. SAVATIER,Poitiers le 15 et 16 mai 1997, Puf n° 277 et s., ATUNC, La responsabilité civile, 2e éd,

Paris Économia, Coll. Études juridiques comparatives, 1989, p. 2.

57 De nombreuses doctrines ont tenté de décrire la coutume : « La coutume exprime avec le maximum

d’authenticité les aspirations, les goûts, les tendances des hommes qui l’ont patiemment forgée »,

P. CHEVALLIER, Introduction à l’étude de droit coutumier malgache,

http://madarevues.recherhces.gov.mg. ; elle est « La source la plus ancienne du Droit, chez tous les

peuples (mos majorum, consuetudo°) » ; RMONIER, Histoire des institutions et des faits sociaux, des origines à

l’aube du Moyen âge, Paris 1955, p. 193 ; « La coutume est l’ensemble d’usages déjà pratiqués par les Ancêtres, qui se transmettent oralement, à une époque où l’écriture est inconnue, ou du moins, peu répandue.

D’après le jurisconsulte ULPIEN,« La coutume tire sa force obligatoire, de ce qui a été en vigueur pendant longtemps et avec le consentement tacite de tous».En somme, la coutume est un corpus de principes bien élaboré. Elle est le fruit de l’expérience et le génie de plusieurs générations. Ainsi par essence, la coutume fait partie intégrante de l’évolution de la société.

58 V. RAMANITRA, De la répression de la sorcellerie à Madagascar, Annales de l’Université de

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(androbe) ou d’hystérie (le tromba) c’est certainement le fait du sorcier 59. La maladie et

l’échec d’un acte de soin s’expliquent également par le mépris des Ancêtres suite à une transgression des tabous (non-respect des interdits) 60. Et dans l’hypothèse où

aucun reproche ne peut être établi à l’égard de celui dont la santé est altérée, l’échec des soins trouve sa raison dans l’oubli des rituels qui auraient dû être observés : cérémonie préparatoire, offrande… Partant, la faute incombe à la victime 61.

La conception surnaturelle de la maladie oblige le malade et sa famille à recourir au guérisseur ou au devin (mpisikidy) qui sont présumés être investis du pouvoir d’expier le sort 62. Le devin va consulter le sikidy 63 (divination, magie) qui est un

moyen de prédire les causes de la maladie et les remèdes (ody) à y apporter. L’œuvre

59 Ibid., p. 19.

60 B. N.RICHARD, Hôpital et système de santé à Madagascar, l’Harmattan, 2005, p. 16. « Si les vivants se

dérobent à leurs devoirs envers les Ancêtres, ils s’attireront des malheurs, d’où la nécessité de respecter scrupuleusement les règles cultuelles destinées à apaiser les mânes (les âmes) des Ancêtres, à se les rendre favorables, à obtenir leur aide et leurs conseils par des sacrifices appropriés », P. CHEVALLIER, Introduction à

l’étude du droit coutumier malgache, http://madarevues.recherhces.gov.mg, p. 97.

61 Il arrive que la faute de la victime contribue à la réalisation du dommage ou en constitue la cause

exclusive. Si la victime est la seule responsable de son dommage, elle n’a droit à aucune indemnisation. En revanche, si sa responsabilité concourt avec celle du défendeur, on procède à un partage de responsabilité. Le droit romain adoptait sur ce point, une position absolue à travers la règle dite pomponienne (formulée par le jurisconsulte Pomponius). La règle pomponienne interprétée en latin Quod si quis ex culpa sua sentit, non intelligitur damnun sentire, consiste à dire qu’un demandeur est déchu de son droit à réparation dès qu’une irrégularité est susceptible de lui être reprochée. Autrement dit, du moment où la victime participe par sa faute à la réalisation du dommage, elle ne peut rien réclamer, même si sa faute n’a été que l’une des causes du dommage. Avec, le développement de l’individualisation de la responsabilité et de l’atténuation des mécanismes de présomption de responsabilité, la règle pomponienne a été écartée. Dans un arrêt rendu le 17 janvier 2008, la Cour de Cassation rappelle les effets de la faute de la victime dans le domaine médical : « Seule une faute du patient peut exonérer, totalement ou

partiellement, le praticien de sa responsabilité. », Cass. civ 1ère . 17 janvier 2008, Q MAMER,

N. GOMBAULT, C. PALEY VINCENT, La faute de la victime, cause exonératoire de responsabilité du

médecin ?, in. Responsabilité, revue de formation sur le risque médical, septembre 2009, p. 9 à 11. La faute de

la victime revêt un intérêt particulier lorsque la responsabilité du défendeur est présumée ; elle permet de combattre la présomption. Ainsi, présente-t-elle, un intérêt pratique considérable ; d’autant plus qu’il n’est pas rare que la victime ait, par sa maladresse, contribué au dommage, M. HALLER, Essai sur l’influence du fait et de la faute de la victime sur le droit à réparation, Th. Paris, 1926.

62 L’attendu d’un arrêt de la Cour d’Appel de Tananarive en date de 1960, relate quelques détails

permettant d’identifier les actes du devin guérisseur : « Attendu qu’il est établi que M. X., après avoir

consenti à guérir Mme Y., est allé chercher dans la forêt des plantes qu’il fait cuire et données sous forme de bouillon au patient, qu’ayant marqué une croix les articulations, l’épigastre, les tempes et d’autres parties du corps de l’intéressé avec la poudre d’une plante obtenue par frottement, il a provoqué la guérison instantanée du malade… ».

63 Le sikidy consiste à l’interprétation de graines disposées suivant des règles compliquées.

L’interprétation de l’arrangement des graines indique en outre, tout ce qu’il faut observer pendant le traitement (cérémonie préparatoire, offrande…).

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du guérisseur conçue comme l’œuvre de Dieu 64 le mettait à l’abri de tout reproche

pour faute 65. Pour cette raison il n’a pas été aisé de traiter l’indemnisation dans le

droit coutumier.

5. Les modalités d’indemnisation de l’époque —. Il a été extrêmement difficile

de trouver des traces de contentieux médical dans l’ancien droit malgache66. Aussi, il

a fallu dans un premier temps dégager l’esprit général du droit coutumier en matière de réparation. Le déploiement de la réparation repose sur une double tradition coutumière, à savoir, la primauté accordée aux anciens et le rôle conféré aux groupes sociales intermédiaires que sont les Fokonolona 67.

Concernant les anciens, en particuliers les Ancêtres que les malgaches nomment

Razana ; ils restent présents dans l’esprit collectif et ils constituent l’instance morale

supérieure dont la personnalité réclame l’obéissance la plus déférente des vivants. Si ces derniers se dérobent à leurs devoirs, ils risquent de s’attirer des malheurs, d’où la nécessité de « réparer » en cas de comportement offensif. Concrètement, cela implique de multiplier les sacrifices de réparation dont l’importance est

64 Malgré les coutumes diverses et particulières du peuple malgache, le pays véhicule une même

croyance, l’existence d’un Dieu Unique que le peuple nomme Andriamanitra (littéralement le Roi parfumé) et à l’intercession des Ancêtres ou Razana, http://r.doziere.pagesperso-orange.fr.

65 Dans l’histoire du droit médical français, il fut un temps où la spiritualité et la médecine ont été

souvent mêlées. On pense en particulier au rôle tenu par certains personnages dans les civilisations anciennes, tels les druides, les guérisseurs et autres rois thaumaturges ; « Dans

l’antiquité, les hommes pour guérir leurs maux, imploraient l’assistance de la divinité et celle des médiateurs sur la terre : les prêtres. Il ne leur serait point venu à l’esprit de demander à ces prêtres réparation d’une faute commise contre une science qui était un privilège sacré » P. NEGRE, La responsabilité civile dans la pratique de la

médecine, Th. Aix-Marseille, éd. Bosc frères, M. et L. Riou ; Lyon 1939, p. 1 et s.

66 En étudiant les pratiques coutumières de l’époque, a pu être établi, l’inventaire des règles

constituant l’ancien droit malgache (règles qui ont été très vite influencées par le droit français) : l’état des personnes (état civil), les contrats, l’enregistrement des actes de toute nature, le droit d’immatriculation, le droit des successions qui règlemente et modifie l’ordre des successibles ; il traite en outre, le régime matrimonial du « Kitay telo an-dalàna » dans décret du 5 novembre 1909 ; H. VIDAL, La Cour d’Appel d’Antananarivo et les coutumes de 1897 à 1960, p. 27, 28. Pour information, le « Kitay telo an-dalàna »signifie la règle des tiers des acquêts communs, c’est-à-dire qu’en en cas de séparation, les bien acquis pendant le mariage (les acquêts) sont répartis de 2/3 pour le conjoint et de 1/3 pour la conjointe. Aujourd’hui la règle qui s’applique est le « Zara-mira », les biens communs reviennent aux deux conjoints pour moitié. On remarquera, que l’inventaire ne relève aucune mention relative à l’encadrement normatif de l’activité médicale.

67 Les anciens tant vivants que morts représentent pour les malgaches le socle de la cohésion

sociale et la référence par rapport à la notion de parenté. Quant au « Fokonolona » constitué de groupement de personnes composant une ethnie, elle représente une institution sociale régulatrice de la vie des personnes par le biais de ses représentants, voire P. CHEVALLIER, op. cit., p. 96.

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proportionnée à la gravité de la faute 68. Dans les cas les plus habituels, quelques

volailles immolées et de quelques invocations sobres vont suffire. Le vrai sacrifice concerne les bœufs; ils tiennent une place dominante dans les cultes malgaches 69.

Dans l’ensemble, l’estimation du sacrifice correspond à l’étendue réelle de l’offense subie par la victime, en l’occurrence les anciens. C’est l’application du principe de la « réparation intégrale » 70.

Après les anciens, la deuxième entité qui intervient dans la mise en œuvre de la réparation est le Fokonolona 71. Le Fokonolona est une forme de collectivité

intermédiaire entre les anciens et le peuple dont les membres sont considérés comme de véritables juridictions traditionnelles. Ils forment les instances garantes de l’effectivité des rites sacrificiels 72. En tant que garants de la paix sociale 73,

les membres du Fokonolona privilégient le rétablissement de l’équilibre rompu en cas d’offense vis-à-vis des anciens. A cet effet, ils s’assurent que le responsable ait accompli son devoir de réparation, soit la compensation en nature (bœufs, produits alcoolisés, poulets) 74. De toute cette réalité sociologique, on peut dire qu’en cas de

contentieux médical, le Fokonolona en sa qualité de garant de l’équilibre social 75, va

68 H. DUBOIS,La Religion malgache, Essai de synthèse, extrait de l’ouvrage consacré à Madagascar par les

Cahiers Charles de Foucauld, Paris 1950, p. 97.

69 Ibid.

70 Le droit civil français va dans le même sens. À travers le principe du rétablissement de l’équilibre

rompu, la Cour de cassation française a depuis longtemps, défini l’objet de la responsabilité civile. Pour elle, Le propre de la responsabilité civile est de rétablir aussi exactement que possible l’équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime, aux dépens du responsable, dans la situation où elle se trouverait si l’acte dommageable ne s’était point produit. Cass. civ 2e, 1er avril

1963, D., 1963, p. 453, H. MOLINIER ; J.C.P. 1963-II-13408.

71 « Fokonolona » signifie groupement de personnes composant une ethnie.

72 Dans une civilisation très attachée au formalisme (dans le sens protocolaire) et où le droit est

resté essentiellement oral, les représentants du Fokonolona (Ray aman-dReny, Olondehibe) en tant que figures de notables, sont des témoins indispensables lors de la conclusion d’acte juridique.

73 En toutes circonstances les membres du Fokonolona, doivent assistance et protection à la Société,

A. DANDOUAU, Manuel de géographie de .Madagascar, Paris, 1920, p. 57.

74 P. CHEVALLIER,op. cit., p. 97.

75 Le Fokonolona a de nombreuses attributions : chargé de la police du quartier, prête son concours

en cas d’événements calamiteux, veille à la salubrité et à la sécurité de la collectivité, prend en charge les infrastructures, sert d’arbitre dans les affaires qui lui sont soumises. Même si sa fonction reste variable, quelques principes communs s’en dégagent : le Fokonolona est le gardien traditionnel de la paix des familles et il est chargé d’arbitrer les conflits. Il est compétent pour trancher sur de nombreuses causes aussi importantes que le mariage, la répudiation, le divorce, la filiation, l’adoption et le rejet d’enfant, la vente, l’installation sur une terre appartenant à la communauté, l’admission de gens venus de l’extérieur et la mise en culture de nouveaux domaines. Pour aller plus loin, voir les textes capitaux de la période coloniale sur le Fokon’olona : le décret du 9 mars 1902 portant organisation de l’Administration indigène de l’lmerina, et l’ordonnance n° 60-173 du 3 octobre 1960 sur les dinampokonolona (contrat social) qui attribuent

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solliciter l’auteur du fait dommageable, à apporter une contribution en nature au profit de la victime. Si la réparation en nature participe considérablement au respect des victimes souvent repliées sur elles-mêmes, le besoin d’instaurer des sanctions à caractère répressif s’est aussi exprimé.

6. Option pour la sanction répressive. — Les pratiques médicales ont commencé

à être réglementées au XVIIe siècle quand la justice royale a pris le dessus sur la

justice clanique. Si, généralement, la justice clanique se basait sur le principe de réparation en nature, la justice royale faisait preuve d’une philosophie plutôt punitive axée sur le châtiment corporel 76 vis-à-vis de toute pratique médicale mettant en

danger la santé des personnes. C’est ainsi que le Roi Andrianampoinimerina (1745-1810, Roi de 1787 à 1810) a instauré l’épreuve du tangaina 77 pour l’autorisation

d’exercer de la profession médicale. Cette épreuve consistait, pour les prétendants guérisseurs, à boire un breuvage élaboré à partir des feuilles d’une plante mortelle. Ceux qui avaient supporté victorieusement le défi avaient la permission d’exercer la fonction de guérisseur. Le tangaina attribuait à l’époque, l’équivalence d’un diplôme d’État de docteur en médecine octroyant une légitimité à l’exercice de la profession médicale. Bref, l’épreuve du tangaina attribuait une légitimité à la profession de guérisseur. Que le tangaina repose sur des croyances ancestrales et non sur des données acquises de la science, n’enlève rien à l’intérêt préventif et normatif qu’il représente. La réussite de l’épreuve du tangaina tout comme l’obtention du diplôme d’État permettant de sélectionner les « bons médecins » 78, atteste la qualité du vrai

guérisseur 79. Cet aspect sélectif lui confère une fonction de régulateur. En outre, le

tangaina présente un aspect préventif dans le sens où la dangerosité de l’épreuve

permet une élimination naturelle 80 des faux guérisseurs. Si, toutefois, ces derniers

force exécutoire aux conventions collectives. Pour aller plus loin voir L. SERMET,

Une anthropologie juridique de Droits de l’homme. Les chemins de l’océan Indien de L. SERMET, p. 115.

76 B. N.RICHARD, Hôpital et système de santé à Madagascar, l’Harmattan, p. 18.

77 Le « tangaina » est une plante à sécrétion mortelle que l’on trouve dans les campagnes malgaches. 78 Par la certification de la compétence professionnelle de l’impétrant. « La garantie du public réside

dans les études et les épreuves par lesquelles, doivent passer les docteurs pour obtenir leurs diplômes », Docteur

DOUBLE, Rapport lu à la séance de l’Académie de médecine le 28 septembre 1829. En droit malgache, en application de l’article 72 du Nouveau Code de la santé publique, « Nul ne peut

exercer la profession de médecin, d’acupuncteur (trice), d’odontostomatologiste et de sage-femme s’il n’est de nationalité malagasy, titulaire des diplômes ou certificats requis, reconnus par l’État malagasy, et inscrit au Tableau de l’Ordre ».

79 La réussite d’une épreuve aussi éminemment dangereuse que le tangaina présume que le monde

des Ancêtres a accepté à l’impétrant, la qualité de guérisseur. Autrement dit, sans l’aval des Ancêtres, il est impossible de réussir l’épreuve du tangaina.

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416 Pour plus d’information dans ce domaine, le Commissaire du Gouvernement Didier chauvaux cite dans ses conclusions sur l’affaire Senanayake plusieurs jurisprudences étrangères

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