• Aucun résultat trouvé

1978-1981 150 000 provisoires et 80 000 autres déplacés

1.1.2. Dégâts indirects

Tout en restant dans le cadre de l’approche microéconomique ou individuelle, passons maintenant aux pertes indirectes. L’évaluation de pertes économiques indirectes n’est pas une tâche facile surtout dans le cas du Liban à cause du manque des données et des études faites sur ce sujet. D’une façon générale, les effets les plus importants sont les pertes de stock, les pertes de moyens de production, les pertes en main d’œuvre, les pertes au niveau des marchés, sachant que les pertes de stock, des moyens de production et de la main d’œuvre affectent négativement le marché de production. Quant aux marchés financiers, les pertes se traduisent par le manque de liquidité ou aussi par la baisse des valeurs de certains actifs.

En ce qui concerne les pertes au niveau des marchés, il s’agit de la baisse de la production. Cette dernière est affectée par la baisse de la demande à la fois interne et étrangère et par les pertes subies dans les moyens de production. Les pertes en main d’œuvre ont aussi entrainé une baisse de la production. En effet, le nombre de travailleurs qualifiés a baissé suite à l’émigration d’un grand nombre d’entre eux en échappant à la guerre. La productivité de la population active restante dans le pays et qui est relativement moins qualifiée est affectée négativement. Tous ces facteurs ont conduit ainsi à la baisse des salaires réels et des revenus et par la suite à la baisse de la demande intérieure.

La demande intérieure s’est ralentie durant la guerre pour plusieurs raisons. D’abord, le revenu d’une grande partie de la population a baissé. En effet, le pouvoir d’achat

du salaire minimum a baissé dès la première année de la guerre. Cette baisse était de 11,3 % en 1977, de 48 % en 1986 et de 33,70% en 1990. Mais, c’est à partir de 1983 que le salaire minimum a commencé sa chute et passe de deux cent quarante trois dollars à quarante cinq dollars en 1990. Pareil, le pouvoir d’achat du salaire moyen s’est dégradé depuis le déclenchement de la guerre et sa dégradation n’a pas cessé tout au long de la guerre (17,5% en 1977 et 76% en 1986). Cette baisse de revenu a entrainé à son tour un refrènement de la consommation et donc de la demande intérieure. Ensuite, la suspension de l’embauche dans le secteur privé et la hausse du chômage ont agi négativement sur la demande intérieure. En dernier lieu, la rupture des communications entre les régions libanaises et la hausse du coût des transports ont à leur tour affecté la demande intérieure à la baisse. Pendant la guerre, les barrières230 et les zones de péages231 ont augmenté entre les régions diminuant ainsi

l’afflux de biens et de services entre les régions. La baisse de la mobilité des facteurs de production a entrainé une baisse de la productivité et de la production puisque les ressources ne sont pas allouées d’une façon optimale ni entre les secteurs et ni entre les régions.

Quant à la baisse de la demande extérieure, elle est due à la baisse de l’exportation des biens et services et à la baisse de l’attractivité touristique. Dès le déclenchement de la guerre, les exportations du Liban ont chuté. Cette chute était de 16% en 1975, de 46 % en 1983 et de 22% en 1989. La variation des exportations du Liban durant la période de la guerre est représentée dans le tableau ci-dessous.

230 On a recensé au cours la guerre des dizaines de passages entre les mohafazats et à l’intérieur de chacune: 12 passages à

Tableau No 4.1.6- Les exportations libanaises en millions de dollars entre 1974 et

1990

Année Exportations (en millions de dollars)

1974 748 1975 621 1976 278 1977 771 1978 732 1979 933 1980 1,211 1981 1,262 1982 1,111 1983 595 1984 378 1985 n.d 1986 n.d 1987 n.d 1988 6292 1989 4853 1990 4945

Source : de 1974 à 1983 : Chaib A. (1985), « Déficits budgétaires et dette publique : 1964-1984 ». De 1988 à 1990 : calcul personnel à partir des données figurées dans : Sinno A. (2008), « Les Guerres du Liban », Tome 2, p.1040 (en arabe)

D’après ce tableau, nous remarquons que les exportations du Liban ont fortement baissé durant les deux premières années de guerre suite aux durs combats qui ont eu lieu. Ensuite, elles ont repris leur cours normal durant la période de calme relative (1977-1981) avant de rechuter après la seconde invasion israélienne. Ce sont surtout les exportations industrielles qui ont le plus baissé à cause de la guerre ; en 1990 elles ne représentaient que 24,6% du total des exportations. Avant la guerre, les exportations libanaises ont connu une hausse spectaculaire à un taux annuel moyen de 28% entre 1964 et 1974. Ce taux a baissé durant la guerre pour atteindre 6% entre 1975 et 1984.

231 Les principales zones étaient: la zone de démarcation entre Beyrouth-Est et Beyrouth-Ouest, la zone du Chouf, la zone du

Durant la guerre, le tourisme a été fortement affecté. La guerre a bouleversé l’infrastructure d’accueil du pays et les habitudes de sa clientèle. En 1974, l’aéroport international de Beyrouth avait enregistré 2,75 millions de passagers, à égalité, à l’époque, avec le trafic de l’aéroport Atatürk d’Istanbul ou d’Oslo et devant l’aéroport de Bangkok. Durant la guerre, le trafic de l’aéroport de Beyrouth fut fortement réduit. Le nombre de passagers est descendu à 0,5 millions de passagers en 1984 et de nouveau à 0,5 millions en 1989. Depuis la fin de la guerre, le trafic est en augmentation de 9% par an en moyenne232. En 2002, il s’est situé légèrement en deçà

de 1974 (2,606 millions de passagers)233. Il faut attendre 2003 pour que l’aéroport

international de Beyrouth retrouve son nombre de passagers d’avant guerre. Plusieurs pays au Moyen-Orient, tels que la Syrie, la Jordanie, la Chypre et la Turquie, ont développé leur infrastructure aéroportuaire durant la guerre libanaise et ont mis en place les moyens nécessaires pour absorber la clientèle arabe et européenne. Le transit à l’aéroport de Beyrouth a baissé suite à la guerre. En 2009, il ne compte que 6% du mouvement total des passagers au Moyen-Orient alors qu’il représentait 20% des mouvements de passagers avant la guerre. Le Liban se trouve aujourd’hui face à une dure concurrence dans la région, ce qui n’était pas le cas avant la guerre.

La guerre du Liban a duré quinze ans et elle a eu de profondes répercussions sur la production, la distribution et l’utilisation de la richesse. Le potentiel productif s’est affaibli au niveau de la population active et au niveau du capital. La population active a baissé à cause des atteintes physiques (les morts, blessés, handicapés, disparus et enlevés), de l’émigration et de la baisse du niveau de qualification. La destruction du capital productif se situe au niveau des destructions en équipements et en capital productif en général. En conséquence, la production a baissé. La distribution des revenus a été modifiée. Le rôle économique, régional et international du pays a été fortement affaibli. Les principales conséquences de la guerre au Liban selon l’approche microéconomique ou individuelle sont présentées dans le tableau ci- dessous.

Tableau No 4.1.7- Récapitulatif de l’approche microéconomique

Nombre Valeur en dollars Pertes directes

Pertes humaines des civils et

miliciens 68,571 763,631,156

Blessés (civils et miliciens) 83,900 464,551,107 Pertes humaines militaires 2,927

Blessés militaires 4,234 Déplacement de la population 1,000,000

Emigration 900,000

Destruction du capital physique 6,046,000,000

Total 7,274,182,263

Pertes indirectes Baisse de la production Recul du tourisme