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Une croissante presque constante du nombre annuel de campagnes

U N OUTIL POUR TOUTES LES INSTITUTIONS ?

Carte 5. Musées participant à la phase qualitative Hexagones : musées rencontrés lors des phases de test.

3.3. Perspectives des pratiques des musées

3.3.2. Une croissante presque constante du nombre annuel de campagnes

Depuis le développement des plateformes, ce qui n’était que des tentatives isolées de certains établissements s’est progressivement normalisé sur l’ensemble du territoire. Nous exploitons les données du questionnaire pour évaluer l’évolution du nombre de campagnes dans le temps.

Graphique 6. Fréquence de premières campagnes par année au sein de l’échantillon

Le graphique 6 montre une hausse tendancielle du nombre de premières campagnes à partir du début des années 2010. Une baisse significative des collectes en 2014 est très visible. Elle s’explique par le poids des décisions des élus de la

collectivité territoriale en charge de l’équipement muséal dans leur gestion (Mairesse 2014), de leur agenda politique et plus particulièrement les élections municipales qui ont eu lieu cette année-là. Dans les musées municipaux, le choix d’une collecte peut être fait par le musée en accord avec la commune ou sur demande directe de cette dernière.

« On est obligé de les [les élus] mettre au courant et d’avoir l’aval. Parce que c’est quand même une opération qui engage l’image de la ville. […] Pour l’instant ça ne pose pas de problème. Voilà bon il faut faire attention aux périodes électorales. »

(Administration générale, grande taille, zone favorisée, collection municipale, Groupe B) En période électorale, il peut paraître logique pour une municipalité en « danger »

d’éviter de demander une participation financière à ses contribuables et électeurs. Pour le musée, il semble également moins pertinent de se lancer dans une négociation et des préparatifs longs (discussion avec le service culturel de la ville, délibération du conseil municipal), sans avoir la certitude que ces efforts seront poursuivis à l’issue des élections. Pour vérifier ces hypothèses, nous avons observé le contexte politique des villes des quatre musées ayant fait une campagne en 2014. L’un des musées se trouve à Paris, sa gestion est indépendante de la municipalité, les trois autres sont dépendants d’une municipalité n’ayant pas changé de couleur depuis au moins 1995, ce qui semble valider notre hypothèse. La stagnation notée en 2016 est liée à la période de collecte des données, 272 musées ayant répondu entre mai et juillet, le nombre de campagnes n’est pas représentatif de l’activité sur toute l’année. Ainsi on peut envisager une augmentation des chiffres sur 2016.

Nombre de collectes Fréq. Part (%)

Une 36 82,61

Deux 6 13,04

Trois 2 4,35

Nombre de réponses 44

Tableau 16. Nombre de musées ayant réalisé plusieurs collectes

Deuxième chapitre

(Tableau 16). Dans notre questionnaire, si un musée avait réalisé plusieurs campagnes, la suite des questions portait sur la dernière campagne réalisée par le musée. Parmi ces huit premières campagnes, deux sont anciennes et datent de 1995 et 2005, les autres sont postérieures à 2013. Par ailleurs, 79 % des musées ayant fait une campagne envisagent de renouveler l’opération.

3.3.3. La dispersion des innovations en termes d’outils

Nous nous intéressons ensuite aux pratiques des musées lorsqu’ils s’engagent dans une campagne (Tableau 17).

Outils utilisés par les musées Fréq. Part (%)

Billet mécénat 5 10,87

Espace de don en ligne (sur votre site internet) 4 8,70

Plateforme extérieure (Ulule, Kisskissbankbank, etc.) 16 34,78

Souscription 19 41,30

Autre 2 4,35

Total 46

Tableau 17. Réponse à la question : Quel outil avez-vous utilisé ?

L’outil auquel les musées ont eu le plus recours est la souscription, utilisée dans 41 % des cas. Cependant, les données indiquent également un changement progressif de la situation. S’agissant des profils de musées utilisant ces différents outils, il apparaît que le billet mécénat est l’apanage des grands musées faisant du mécénat, puisque cet outil n’a été utilisé que par eux. Nous notons également que les petits musées sans mécénat utilise en majorité la souscription, résultat correspondant à des musées plus petits, ayant moins de moyens et étant plutôt plus traditionnels dans leur recherche de financement.

Graphique 7. Part représentée par chaque outil en fonction de l’année de la collecte

Si l’on regarde la répartition des outils employés dans le temps, on peut constater un changement de paradigme. De 2009 à 2013, le modèle de souscription est très largement dominant. Nous observons que, à partir de 2013, une diversification des outils se fait sentir. En 2016, il n’y a plus de souscription, mais une majorité de collectes réalisées sur des plateformes privées en ligne (Graphique 7)113. Cette

diversification n’est pas sans conséquence sur les sommes collectées. En effet, les souscriptions sont plus ambitieuses et rassemblent plus de fonds, avec une moyenne de 17 918,64 euros contre 8 417,31 euros pour les campagnes réalisées sur une plateforme privée. En revanche, si le ticket moyen est bien supérieur lors d’une souscription (231,31 euros en moyenne contre 73,94 euros), les participants sont plus nombreux lors des campagnes sur les plateformes, avec 113 contributeurs en moyenne contre 77 lors de souscriptions).

113 Par ailleurs, depuis la réalisation de cette enquête, certains musées de la ville de

Paris, dont la visite des collections permanentes est gratuite, comme le musée d’Art moderne de la ville de Paris ou le Petit Palais, ont proposé aux visiteurs de s’acquitter

Deuxième chapitre

Outils envisagés par les musées Proch. (%) Prob. (%) NSP (%) Moy. (%)

Billet mécénat 0 22 15 15

Espace de don en ligne (sur votre

site internet) 11 11 16 14

Plateforme extérieure (Ulule,

Kisskissbankbank, etc.) 37 38 33 35

Souscription 42 19 29 28

Autre 0 3 3 2

Ne sait pas (NSP) 11 5 4 6

Total (en nombre d’observations) 19 37 75 131

Tableau 18. Réponse à la question « Quel outil utiliseriez-vous ? »

NB. Proch. : Prochainement/Prob. : Probablement/NSP : Ne sais pas/Moy : moyenne de tous les cas

Tout en gardant en considération la nature déclarative des données recueillies et les aléas liés à la gestion d’une institution muséale, 154 (sur les 298) gestionnaires ne se déclarent pas opposés au lancement d’une campagne (ou dans l’impossibilité de le faire). Parmi eux, 131 ont répondu à la question « Quel outil utiliseriez-vous ? » (Tableau 18). Pour les campagnes envisagées prochainement, la souscription semble être encore l’outil préféré, suivi de près par la plateforme en ligne. Cependant, en observant les préférences des musées qui déclarent lancer une campagne

« Probablement » ou ne sachant pas, le choix se tourne plutôt vers la plateforme. Il est

donc possible de penser que la tendance observée actuellement se prolonge dans le futur, c’est à dire un progressif abandon du modèle classique de souscription pour un modèle organisé par les plateformes de financement participatif.

Les projets financés par les musées grâce à ces outils sont, en France, centrés autour des œuvres et du patrimoine. Les plus courants sont les restaurations d’œuvres (38,10 % des projets), suivi de près par les acquisitions (35,71 %). Plus rarement, les musées financent des expositions temporaires (7,14 %), ou la rénovation d’une partie du musée (10,90 %). Seuls deux établissements ont financé le fonctionnement opérationnel du musée (soit 4,76 %) et un seul a lancé une campagne liée à la création d’un jeu de société éducatif. Selon les déclarations des musées qui envisagent le lancement d’une campagne, les proportions semblent demeurer globalement similaires. Les musées ne semblent pas modifier les projets

produits et financés, on note seulement une légère baisse du nombre d’acquisitions financées grâce à ces outils au profit des expositions et de la rénovation des locaux. Les musées ne déterminent donc pas quel moyen utiliser en fonction du sujet de leur campagne. La stabilité des projets financés témoigne d’une absence de corrélation entre le choix des outils et le projet en lui-même et montre que si les modes de financement évoluent et changent, les besoins et les projets demeurent les mêmes, dans la continuité des missions fondamentales du musée.

Cette sous-section nous a permis de présenter un état des lieux des pratiques de mécénat individuel des musées, en ligne et hors ligne. Une multitude d’outils est donc utilisée par les musées. Pour mieux comprendre le choix de l’un ou l’autre, nous analysons les représentations que les musées ont de ces outils, en comparant les espoirs et les préjugés de ceux qui n’ont jamais lancé de campagne et les expériences de ceux qui l’ont fait.

Deuxième chapitre

4.

LES

DÉTERMINANTS

DU

LANCEMENT

D’UNE

CAMPAGNE

DANSLES

MUSÉES

DE

FRANCE

4.1.I

NTRODUCTION

Nous analysons ici les comportements à partir de données objectives, leurs structures budgétaires, leurs pratiques de mécénat, leur expérience du financement participatif ainsi que celles qui sont issues de leurs territoires.

Cette section questionne les déterminants du financement participatif au sein des musées de France : pourquoi un musée, plutôt qu’un autre, lance-t-il une campagne de financement participatif ? Nous ne distinguons pas ici les différents types de financement décrits dans les sections précédentes. En effet, pour obtenir des résultats statistiquement significatifs, eu égard aux nombres d’observations, il est impossible de séparer les différents outils. Nous simplifions donc le modèle principal par un modèle binaire (de type probit) : « a lancé une campagne » ou « n’a pas lancé de

campagne ». Nous précisons ensuite ce modèle en ajoutant un modèle catégoriel (de

type probit multinomial) qui se concentre sur les prévisions à court et moyen terme des musées sur leur usage de ces outils.

Nous présentons la méthodologie et les données puis détaillons la mise au point des hypothèses avant de présenter les modèles et ses résultats.