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3.2.2.1) Volet 1: Dimension écologique

Pour analyser la cohérence écologique, nous nous inspirons des quatre critères d’évaluation définis par l’« OSPAR » (OSPAR 2007) que nous adaptons aux habitats continentaux terrestres et aquatiques que vise la TVB.

Comme vu précédemment, ces critères sont définis sur la base du triptyque structure-composition- fonction généralement reconnu pour décrire la biodiversité, du gène à l’écosystème (Noss 1990; Burel et Baudry 1999). Les travaux de Thompson et al. (2014)qui synthétisent différents types de connectivité guident également notre définition de ces critères.

Ces critères sont :

 le bien-fondé/viabilité des CE :

Ce critère apprécie la « qualité » des CE, c’est-à-dire leur « état écologique et chimique » - au sens de la directive européenne cadre sur l’eau - et leur « état de conservation » - au sens de la directive « Habitats, faune, flore » -.

Ce critère concerne en particulier la superficie et la forme des CE. Au niveau du paysage, cela permet d’apprécier l’hétérogénéité spatiale de configuration des CE (Fahrig et al. 2011). Ce critère s’appuie sur la notion de superficie minimale critique d’un habitat pour qu’une population puisse répondre à ses besoins vitaux (Thompson et al. 2011, 2014). Mais cela peut être nuancé avec le concept de métapopulation qui permet de relier des populations issues de taches d’habitat de superficies variables, même très réduites (cf. 1.1).

Concernant la forme des CE, de multiples paramètres peuvent être considérés. La littérature admet généralement que l’augmentation de la compacité des taches d’habitat, en se rapprochant de la forme d’un disque, préserve l’intérieur des habitats des perturbations

extérieures et augmente la « qualité » des habitats des espèces y vivant ou s’y déplaçant (Burel et Baudry 1999). Il en va de même avec l’augmentation de la largeur des corridors (Noss 1987; Baudry 1988). Mais cela peut être nuancé selon les types d’habitats et selon les espèces. Par exemple, si l’intérêt de la compacité est généralement vérifié pour des habitats forestiers, cela peut être bien différent pour des habitats à dominance agricole où des « habitats allongés » pourront être préférables, en favorisant les interfaces pour des espèces qui utilisent différents types de cultures à différentes périodes de l’année. C’est le cas pour les éléments semi-naturels autour des parcelles agricoles (haies, bandes enherbées) (Al Hassanet al. 2013).

La superficie et la forme des CE sont à analyser au regard du contexte territorial. C’est une variété de superficies et de formes qui peut être privilégiée pour répondre aux besoins divers des différentes espèces et des situations (Lizée et al. 2012; Maciejewski et Cumming 2016).  la représentativité des écosystèmes dans les CE :

Ce critère concerne la composition des CE d’un point de vue qualitatif, en termes d’espèces, d’habitats et de processus écologiques. La biodiversité « remarquable », « commune », potentielle et avérée est considérée.

La représentativité permet d’apprécier l’hétérogénéité de composition du paysage (Fahrig et

al. 2011).

Elle s’appuie sur la complémentarité entre les espèces et donc entre leurs habitats (Thompson et al. 2014).

Les espèces, les habitats, les processus écologiques ne sont pas représentés dans les mêmes proportions. Cela dépend en particulier de leur rareté et de leur vulnérabilité (naturelles ou liées à des phénomènes anthropiques).

 la redondance des caractéristiques des CE :

Ce critère concerne la composition et la structure des CE d’un point de vue quantitatif. La redondance des caractéristiques des CE, en termes de composition et de configuration, est importante pour la stabilité des espèces, des habitats et des processus écologiques, dans le temps et l’espace. La redondance assure des alternatives et donc facilite l’adaptation lors de l’évolution du paysage, lors de perturbations plus ou moins aléatoires, naturelles ou anthropiques (Baudry et Merriam 1988; Poiani et al. 2000; Elmqvist et al. 2003).

Ce critère renvoit également à la notion de densité des réseaux de CE. Maciejewski et Cumming (2016)notent que “an increase in network density increases network connectivity

and should make the network more resilient to node removal”. Mais nous nuançons cela avec

le risque de dispersion d’espèces envahissantes et donc une perte de résilience.

Ce critère repose en particulier sur l’hypothèse « d’assurance biologique » proposée par

Loreau, Mouquet, et Gonzalez (2003). Cette hypothèse suppose que la biodiversité augmente la résilience des écosystèmes face aux perturbations, du fait des compensations et des redondances fonctionnelles entre les espèces (Gonzalez, Mouquet, et Loreau 2009). Selon l’OSPAR (2007), la redondance doit être plus forte dans les paysages soumis à de fortes perturbations. Elle doit également cibler les espèces, les habitats et les processus qui sont peu connus ou avec peu de données.

 la connectivité assurée par les CE :

Ce critère concerne la fonction des CE, c’est-à-dire la connectivité du paysage. La connectivité s’apprécie au niveau des déplacements des individus, au niveau de la dynamique spatio-temporelle des populations et au niveau de la réponse des espèces aux changements à long terme (Thompson et al. 2014).

C’est la connectivité « structurelle » qui est souvent privilégiée car les données sont plus faciles à collecter que pour la connectivité « fonctionnelle ».

Ce crière rejoint en particulier celui sur le bien-fondé/viabilité des CE

Par ailleurs, la « matrice » environnante est souvent perméable au mouvement de certaines espèces. L’analyse de ces critères doit « déborder » des limites administratives des terrioires en se positionnant au niveau d’entités plus cohérentes d’un point de vue écologique, tels que les domaines biogéographiques, les éco-régions, les bassins versants, les massifs montagneux, etc. (Thompson et

al. 2014).

Le Tableau 1 présente des indicateurs associés à ces quatre critères. Ces indicateurs sont inspirés en particulier de ceux définis dans le cadre de l’Observatoire national de la biodiversité (ONB) et dans le cadre du groupe de travail national portant sur l’évaluation des SRCE. Ils peuvent reprendre et être complétés par certains indices paysagers définis dans la littérature, qui s’appuient majoritairement sur les théories des graphes et des circuits et qui sont calculés via divers logiciels (e.g., Conefor, Circuitscape, Graphab, Chloe51).

Tableau 1 : Critères et indicateurs pour la dimension écologique de la cohérence interterritoriale.

Critères Indicateurs Données disponibles

Bien-fondé/ viabilité

- Superficie et compacité des CE, par type d’habitat et dans l’ensemble

- Etat écologique des eaux de surface pour les CE aquatiques (indicateur directive cadre sur l’eau)

- Couches SIG localisant les CE - Couches SIG localisant les habitats ou à défaut l’occupation du sol ; couches SIG localisant les espèces

Exemples : cartes Natura 2000, inventaires d’aires protégées, Corine Land Cover, images issues de la télédétection, BD TOPO et CARTO IGN, registre parcellaire graphique, système d’information sur la nature et

les paysages, données

d’associations de protection de l’environnement, etc.

- Mesures de la qualité de l’eau

- Couches SIG localisant les

obstacles aux déplacements des espèces

Exemples: ROE (référentiel des

Représentat ivité

- Part des habitats présents dans les CE par rapport à ceux présents sur le territoire*

- Part des espèces présentes dans les CE par rapport à celles présentes sur le territoire* - « Complétude qualitative du réseau d'aires protégées issues de la Stratégie de création d’aires protégées - SCAP » (indicateur ONB) Redondance

- Distribution des différents types de CE sur le territoire, en termes d’habitats et d’espèces présentes*

Connectivité

- Distances entre réservoirs de biodiversité, par type d’habitat et dans l’ensemble

- Niveau de fragmentation des habitats : indice « effective mesh size » (Jaeger 2000; Moser et al. 2007)

51

Le logiciel libre évolutif Conefor, basé sur la théorie des graphes, est développé par Saura et Torné (Université de Lleida et Institut Polytechnique de Madrid). Le logiciel libre Circuitscape, mis au point par McRae et Shah (The Nature Conservancy et Interactive Supercomputing, USA) est basé sur la théorie du circuit et modélise les liens entre les taches comme des résistances (à la différence des chemins de moindre coût). Le logiciel libre Graphab est proposé par l’équipe de Foltête (Université de Franche-Comté) et est proche de Conefor (mais n’offrant pas tous les mêmes indices). Le logiciel libre Chloe est proposé par Baudry et Boussard (INRA de Rennes) pour calculer divers indices de paysage.

- Densité d’obstacles à l’écoulement des eaux - Connectivité structurelle des réservoirs, par type d’habitat (méthode de la dilatation-érosion)

obstacles à l’écoulement), BD TOPO et CARTO IGN

* En particulier pour les espèces et les habitats bénéficiant déjà d’un suivi et ceux identifiés dans les orientations nationales TVB (critères de cohérence nationale pour les espèces et les habitats).

3.2.2.2) Volet 2 : Multifonctionnalité

Pour analyser la multifonctionnalité, nous nous appuyons sur deux critères :  la complémentarité entre les différentes fonctions associées aux CE

Ce critère apprécie la complémentarité ou au contraire l’antagonisme des différentes fonctions identifiées, voire sélectionnées, sur les espaces de CE (Groot et al. 2007; Willemen

et al. 2010).

La multifonctionnalité des espaces CE, négociée entre les acteurs, peut faire l’objet de compromis sur un territoire (Ahern 1995), compromis qui doivent être cohérents avec ceux faits à un autre niveau de gouvernance.

 la contribution du concept de « services écosystémiques »

Ce critère apprécie la contribution du concept de « services écosystémiques » dans le discours porté par les acteurs des territoires, compte tenu de son utilisation régulière dans les politiques environnementales. Les services écosystémiques renforcent-ils, en les explicitant, les interdépendances sociétés-nature ? Au contraire, sont-ils des leurres laissant croire au consensus où le vague, le mou et le tout font, de fait, oublier la fonction de préservation de la biodiversité ?

Le Tableau 2 présente des indicateurs qualitatifs associés à ces deux critères. L’analyse documentaire est complétée par des entretiens avec les acteurs des territoires.

Tableau 2 : Critères et indicateurs pour le volet multifonctionnalité de la cohérence interterritoriale.

Critères Indicateurs Données disponibles

Complémentarité entre les fonctions

- Diversité des fonctions identifiées dans les espaces de CE, par type d’habitat et par type de CE

(réservoir ou corridor) - Projets de CE

- Entretiens semi- directifs

Contribution du concept de « services écosystémiques »

- Fréquence d’utilisation du concept de « services écosystémiques » associés aux espaces de CE - Diversité des services écosystémiques associés aux espaces de CE, par type d’habitat et par type de CE 3.2.2.3) Volet 3 : Processus de gouvernance territoriale

Pour analyser les processus de gouvernance, nous avons fait le choix d’un seul critère qualitatif. Il s’agit de la pertinence des outils d’aide à la décision et des processus de gouvernance territoriale. Ce critère, ambitieux, cherche à décrire à la fois le dispositif mis en place (instances de gouvernance, outils mis à disposition) et les acteurs et leurs interactions (« Qui fait quoi ou qui veut faire quoi ?

Pourquoi ? Dans quel(s) but(s) ? Comment ? » -Gumuchian et al. 2003; Rey-Valette et Mathé 2012).

Cela doit permettre de comprendre pourquoi et comment les choix ont été faits et consignés dans les documents finaux.

Le Tableau 3 présente des indicateurs qualitatifs associés à ce critère. L’analyse documentaire est complétée par des entretiens avec les acteurs des territoires.

Tableau 3 : Critères et indicateurs pour le volet gouvernance de la cohérence interterritoriale.

Critères Indicateurs Données disponibles

Pertinence des outils et des processus de gouvernance

- Caractérisation des instances de gouvernance : nombre, pertinence des missions et du pilotage, cohérence des moyens et efficacité de l’articulation entre les instances et entre les niveaux

- Caractérisation des outils d’aide à la décision : nombre, pertinence des objectifs, fréquence d’utilisation

- Caractérisation des outils pour l’animation des échanges, en particulier ceux facilitant l’accès aux ressources informationnelles et aux débats : nombre, pertinence des objectifs, fréquence d’utilisation

- Caractérisation des acteurs invités aux échanges et de ceux venus : représentativité des acteurs par rapport à ceux présents sur le territoire, diversité des compétences individuelles et institutionnelles, diversité des représentations et des intérêts, fréquence de la participation aux échanges

- Caractérisation des interactions entre acteurs : présence/absence et « qualité » de l’organisation en réseaux de certains acteurs, des tensions et des conflits, des processus de coopération et de négociation, des positionnements institutionnels

- Projets de CE - Entretiens semi- directifs

NB : Illustration en particulier via des

chronogrammes et

des sociogrammes

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