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Figure 1-7 Le premier schéma de la modélisation de Martinand (1994, p 119)

6.4.3. Conséquences méthodologiques de la distinction processus/produit pour rendre

compte de l’activité de problématisation des

élèves

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6.4.3.1. Quelques « points critiques » par rapport au cadre de

la problématisation en SVT

Certaines recherches menées en mobilisant le cadre théorique de la problématisation tel qu’il est développé par l’équipe de didactique des SVT du CREN, sur différents problèmes biologiques (en particulier autour des questions de fécondation ou de nutrition des végétaux : Beorchia & Lhoste, 2007 ; Desrues & Lhoste, 2008 ; Éhanno & Lhoste, 2008), nous a permis de pointer quelques points

85 Martinand a ajouté depuis un troisième registre à son schéma de la modélisation : la matrice

cognitive (2000).

86 Cette section reprend en grande partie le travail réalisé avec Brigitte Peterfalvi depuis septembre

2007 qui ont donné lieu à la production d’un texte de travail présenté dans le cadre du séminaire problématisation et de deux communications : Lhoste, Peterfalvi & Orange (2007); Lhoste & Peterfalvi (2008). Ce qui est développé ici lui doit beaucoup.

critiques par rapport à ce cadre. Nous allons les préciser. Le travail de ces points critiques sera également un objectif de notre recherche.

Considérer le produit de l’activité de problématisation des élèves ou le processus de problématisation peut conduire à mettre l’accent sur des éléments différents qui orientent les interprétations plutôt sur un volet épistémique si l’on s’intéresse principalement au produit de la problématisation ou sur un volet plus cognitif si l’on s’intéresse davantage au processus même de l’activité de problématisation des élèves. Cela a plusieurs conséquences qu’il convient d’étudier maintenant.

Lorsque l’on s’intéresse à caractériser le produit de l’activité de problématisation, on est conduit à catégoriser les interventions des élèves au cours de débats scientifiques dans le cas des problématisation scolaire ou les éléments que les chercheurs indiquent prendre en compte dans les études sur les problématisations historiques. On peut alors s’interroger sur la façon dont sont catégorisés ces éléments dans les différents registres (RE/RM) et particulièrement sur la question de la signification de ces distinctions dans le cas des problématisations scolaires87 (correspondent-elles ou non à des distinctions existantes dans l’esprit des élèves ?).

Une deuxième remarque renvoie aux liens entre cette catégorisation et le statut de contrainte ou nécessité qui leur est attribué, car il n’y a aucun automatisme entre la catégorisation d’une proposition d’un élève et d’un chercheur en fonction d’un registre et son statut épistémique (de contrainte, de nécessité)88. Orange précise que tous les éléments du registre du modèle n’ont pas automatiquement un caractère de nécessité et proposait de ne conserver dans les espaces de contraintes que celles « qui

contiennent des éléments critiques de nature empirique ou conceptuelle » (2000, p.

66). Mais cela ne lève pas le flou sur la distinction entre contrainte et nécessité, indépendamment du registre auquel réfère l’énoncé. Orange utilise le terme de

« mise en tension » qui a été utile car il permettait de mettre l’accent sur le caractère construit, à la fois des nécessités sur le modèle et des contraintes empiriques. Cela permettait d’éviter un retour à une conception empiriste de la science puisque, selon Bachelard, c’est « par l’enchaînement conçu rationnellement, que les faits

hétéroclites reçoivent leur statut de faits scientifiques » (1949/1998, p. 123). Mais

aujourd’hui, ce terme nous paraît plutôt masquant et l’on cherche à déterminer ce

87 Dans le cas de problématisations chez les chercheurs, il nous semble qu’ils sont conscients de ces

différences de statuts. Cela semble très différent dans le cas de problématisation scolaire où un des objectif de l’enseignant est justement d’aider les élèves à construire ces distinctions pour sortir du syncrétisme caractéristique de la pensée non-scientifique. Orange (2000) précise d’ailleurs que l’une des fonction du débat est de permettre ce travail de désyncrétisation (ce qui ne veut pas dire, bien entendu, que cela conduit les élèves à une distinction explicite des registres).

88 Précisons que c’est la construction des nécessités sur les solutions possibles qui distingue la

qu’il recouvre. Avant de mettre en œuvre ces distinctions dans des études de cas, il convient de préciser un peu ce qui permet de distinguer les statuts de contrainte et de nécessité. Nous considérons comme contrainte un déjà-là convoqué dans un raisonnement actuel, alors qu’une nécessité serait un construit nouveau, sur la base d’un raisonnement. Deux remarques : une nécessité relève de l’apodictique, au sens de « il ne peut pas en être autrement » et c’est par-là qu’elle a un caractère généralisant en venant contraindre les solutions possibles. Cela nécessite la mise en œuvre d’un raisonnement qui a une prétention à une certaine généralité. Seconde remarque : le raisonnement formulé par les élèves ou les scientifiques qu’il soit complet ou incomplet doit être explicite pour une communauté donnée, même si un raisonnement a toujours une part d’implicite, particulièrement à l’oral ce qui sera le cas dans nos études empiriques. Souvent les raisonnements mis en œuvre par les élèves sont incomplets, dans le sens ou tous les éléments qui le constituent (les points de départ, les types de raisonnements mobilisés, la conclusion) ne sont pas explicités. Il conviendra alors d’indiquer comment nous pourrons réaliser certaines inférences et, comme nous avons mis en avant une « épistémologie de la découverte », il faudra mettre en relation les inférences réalisées par les élèves avec le processus de problématisation et son contexte problématique. Par exemple, les contraintes peuvent être le résultat d’une problématisation préalable (dans le cadre d’un changement de contexte problématique). Ces articulations nous semblent déterminantes pour attribuer le statut de contrainte ou de nécessité aux propositions des élèves ou des scientifiques.

Enfin, la centration sur le produit de l’activité de la problématisation a conduit à minorer provisoirement le questionnement sur les concepts de problème et d’obstacle et de leur traitement didactique alors que ces questions sont à l’origine du travail sur la problématisation (Fabre, 1993, 1997, 1999 ; Orange 1993 ; Orange & Orange, 1993 ; Fabre & Orange, 1997). Cette minoration provient d’un déplacement du travail de recherche sur ce que veut dire problématiser (ou construire des

problèmes). Ainsi, alors que l’idée de « construction du problème » est au cœur des

élaborations du CREN, celle de « formulation du problème » tend à disparaître. Si bien qu’il est souvent difficile d’identifier précisément le problème dont il est question. Nous pensons qu’en déplaçant notre attention sur le processus de problématisation, nous allons pouvoir identifier plus précisément les problèmes auxquels s’attaquent les élèves et leur évolution au cours du débat. Nous pourrons les comparer avec les problèmes scientifiques sur lesquels les enseignants veulent faire travailler les élèves. De la même façon, même si la question des obstacles dans la problématisation a souvent été réintroduite dans les discussions par la participation de Brigitte Peterfalvi aux séminaires du CREN (2005, 2006), la centration sur le

produit de l’activité de problématisation89 a conduit à faire passer cette question en second plan. Nous avons déjà évoqué la question d’un type d’obstacle qui empêche l’engagement dans le processus de problématisation, mais il nous semble qu’il y a d’autres types d’obstacles qui pourront être identifiés si l’on s’intéresse au processus de problématisation. Les obstacles peuvent être différents, aussi bien dans leur nature que dans la façon dont ils se manifestent dans l’activité de problématisation (en empêchant l’identification du problème, par la mise en œuvre de raisonnements non pertinents dans le champ scientifique…).

Ces différents points critiques nous conduisent maintenant à faire des propositions qui devront être mises à l’épreuve de problématisations sur des problèmes biologiques précis. Nous le ferons dans la suite de la recherche.

Afin d’avancer par rapport aux différents « points critiques », nous proposons de déplacer notre l’attention du produit de l’activité vers le processus même de problématisation. Afin de mieux rendre compte de ce déplacement de point de vue, nous avons introduit une représentation modifiée des « espaces de contraintes » présentés par Orange que nous désignerons sous le vocable d’« espace contraintes et nécessités »(Lhoste & Peterfavli, 2007 ; Lhoste & Peterfalvi, 2008).

6.4.3.2. Des « espaces de contraintes » aux « espaces

contraintes et nécessités »

Repartons de l’exemple d’un « espace de contraintes » construit dans le cadre de notre travail de DEA (repris dans Lhoste, 2005, p. 159). Il s’agit d’un « espace de contraintes » qui rend compte de la problématisation conduite par des élèves d’une classe de 3e sur le thème de la nutrition humaine (figure 1-8).

Figure 1-8. Espace de contraintes en jeu dans un débat sur la nutrition en

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