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CHAPITRE 4. Le détournement du genre (DDG) : stratégie créative au service de la

1. La communication du DDG comme forme d’interactions humaines et sociales

Le DDG s’entend comme stratégie créative dans le cadre d’une communication persuasive et d’intérêt général, à tendance politique, et se matérialisant sur différents supports médiatiques et artistiques à tendance sociale.

Nous l’envisageons par le prisme de la « communication comme forme d’interactions humaines et sociales médiatisées » (Fourquet-Courbet, 2010), soit les interactions entre les acteur·trice·s de la production-création et le dispositif, les interactions entre les acteur·trice·s de la réception comme co-producteur·trice·s de sens et le dispositif, et enfin les interactions entre les acteur·trice·s de la production-création et celles et ceux de la réception.

L’ensemble du développement qui va suivre consiste à expliciter, d’une part, la communication médiatique comme « forme particulière d’interactions humaines et sociales médiatisées », soit le fondement de notre approche théorique. En en détaillant les concepts clés sur lesquels repose cette théorie en SIC, nous nous autorisons, d’autre part, des mises en parallèle ponctuelles avec le champ des créations artistiques et culturelles qui, selon nous, sont pertinentes et éclairent les liens de la création et de la réception médiatiques et artistiques.

Notre choix théorique autour de la communication médiatique a émergé, initialement, d’une réflexion sur la réception du DDG. Nous nous demandions, dans un premier temps, comment l’étudier ? C’est en partant de ces questionnements -quelle est la réception du DDG ? Quelle est la capacité de la stratégie créative à influencer les récepteur·trice·s dans le sens de la lutte contre les violences faites aux femmes ?- que nous avons « remonté » le fil théorique de la réception. Pour l’étudier, il sera nécessaire de s’intéresser aussi aux autres pôles, la production et le dispositif, qui sont en interaction.

1.1 Modèle interactionniste de la communication médiatique,

production, création et réception

« Etudier l’interaction consiste à étudier les champs de force agissant réciproquement et co-construisant les cognitions, affects et actions sociaux des émetteurs et récepteurs, non présents physiquement mais reliés par des médias, c’est-à-dire par des dispositifs technologiques » (Fourquet-Courbet, 2010, p. 11).

Loin des conceptions de la communication médiatique comme mécaniste ou fonctionnaliste, cette approche est interactionniste. La communication médiatique repose sur une intersubjectivité, celle des sujets sociaux en création et en réception, médiée par

le dispositif. « L’interaction désigne un champ mutuel d’influences bénéficiant d’un contexte de mise en action ; c’est un processus d’intercompréhension qui conduit à la co- construction du sens » (Fourquet-Courbet, 2010, p. 10, en référence à Matuzak et Quidot)116.

Plus précisément, pour étudier la communication médiatique, il y a trois types d’interactions qui mettent en jeu les trois pôles de la communication, toujours inscrits dans un contexte social, celui de la situation (de création, de réception) et plus largement d’un contexte socio-politique, culturel et historique :

- celles des « esprits » entre les producteur·trice·s et les récepteur·trice·s, à travers le dispositif. Ces sujets sociaux en interaction sont physiquement absents mais présents dans leurs esprits respectifs. Par cette intersubjectivité, il y a « mise en jeu de leur intentionnalité, les acteurs génèrent ou activent (…) des représentations liées aux autres acteurs impliqués ». Chaque acteur·trice·s inférant les intentionnalités de l’autre, le dispositif est une co-construction de sens.

- celles entre les producteur·trice·s et le dispositif, soit les moments de création du dispositif et du discours et la façon dont le dispositif en construction va « faire évoluer et orienter les processus cognitifs impliqués dans la conception » (Fourquet-Courbet, 2010, p. 22). Il s’agit ici du processus créatif, lequel s’envisage par des « processus socio- cognitifs et/ou socio-émotionnels de construction de sens du sujet social en production » interagissant avec le dispositif en construction et des intentions, soit « à un but ou à une volonté de produire un effet », le dispositif portant des « traces » de celles-ci ;

- celles entre les récepteur·trice·s et le dispositif, où se situe la compréhension et la co- construction de sens, inscrites dans un contexte. Les interactions se situent au niveau des processus cognitifs ascendants et descendants des récepteur·trice·s face au message : ce qui jaillit de l’esprit des récepteur·trice·s face au dispositif et ce qui est appelé, en mémoire, pour donner du sens au dispositif. Ces allers-retours répétés s’agencent pour former des hypothèses qu’ils vérifient sur le sens du dispositif et les intentions des créatifs à travers lui. Par ces interactions, « le dispositif est donc « assimilé » à la suite d’un procès complexe de re-construction et négociation des significations ». Les questions posées portent sur la manière dont sont co-construits le sens et les significations, d’après les intentions perçues et sur les temporalités (en exposition puis après), les processus socio- cognitifs et socio-affectifs de la réception et de la signification, les effets sur les attitudes et les comportements, résultant de ces processus. Fourquet-Courbet le précise : « les réponses à ces différentes questions sont d’autant plus complexes à traiter que les interactions dans ce cas sont plurielles : (…) sensorielles : il faut alors étudier le récepteur

116Matuszak, C., Quidot, S. (2008). « L’interaction et après ? Débat autour d’une notion transformée

et transformable », XVIème Congrès de la Société Française des Sciences de l’Information et de la Communication (SFSIC) – Les Sciences de l’Information et de la Communication : affirmation et pluralité,

au moment du contact avec le dispositif, (…) effets psychologiques laissant des traces dans l’esprit du récepteur ; (…) supports d’une diffusion sociale ultérieure (par les conversations) et, dans ce cas, on s’intéresse davantage aux futures interactions sociales du récepteur au sein de son groupe social de référence, qui contribueront, sous certaines conditions, à former, changer ou renforcer des valeurs, des normes et des représentations sociales et des comportements sociaux, socio-politiques ou socio-économiques » (Fourquet-Courbet, 2010, p. 24).

Si les interactions que nous étudions entre créatifs et récepteur·trice·s, sont asynchrones puisque médiées par le dispositif (les interactants ne sont pas coprésents

physiquement), elles s’inscrivent dans la logique des travaux sur les interactions, lesquels

impliquent le soi et les autres. « Le soi ne se développe qu’en interaction avec les autres êtres humains » et les « interactions sont-elles également sociales ». « Les êtres humains interagissent avec et sur les autres sur la base des intentions et significations qu’ils attribuent à leurs gestes et comportements respectifs » (Fourquet-Courbet, 2010, p. 10- 11). Ces Autres sont des composantes internalisées par les sujets sociaux, à l’instar des normes sociales. Les dimensions humaines et sociales sont ainsi inscrites dans cette théorie de la communication médiatique.

D’un point de vue opérationnel, pour étudier ces interactions, nous développons une approche empirique visant à « objectiver des phénomènes qui demeurent pétris de subjectivité », à « construire des connaissances proches de la « réalité » » (Fourquet- Courbet, 2010, p. 17) et à étudier ses processus et ses effets. « Les processus, définis comme étant une suite d’étapes qui se réalisent dans le temps, sont plus spécifiques. L'étude des processus socio-cognitifs et socio-affectifs impliqués dans la communication médiatique n'est pas antinomique à l'étude de l'interaction, mais constitue une composante opérationnelle spécifique du cadre interactionnel plus général » (Fourquet- Courbet, 2010, p. 13). Par ailleurs, s’intéresser à ces processus implique de s’intéresser aux sujets sociaux, « sans réductionnisme individualiste ». D’une part, les sujets sociaux sont au cœur de l’interaction et co-construisent du sens. D’autre part, nous nous intéressons à ce qui est partagé par eux et elles, soit ce qu’ils et elles ont en commun, et non à leur particularité.

Les effets peuvent être étudiés lorsqu’ils sont immédiats, les récepteur·trice·s étant en interaction synchrone avec le dispositif, ou différés. Ainsi, il y a un intérêt à en appeler à la mémoire mais aussi aux échanges conversationnels dont le dispositif peut faire l’objet avec d’autres sujets sociaux et aux individus avec lesquels il peut faire l’objet de conversation.

Les interactions mentionnées, nous le disions, reposent sur « un champ mutuel d’influences ». Dans le cas des processus et des effets en réception, l’influence se définit comme « l’ensemble des empreintes et des changements manifestes ou latents produits (…) sur les individus (considérés sur les plans cognitif, affectif et comportemental), sur les groupes et systèmes sociaux, sur les systèmes socio-politique et économique, sur les

sociétés et les cultures. L’influence regroupe à la fois les aspects « dynamiques », comme « la réception », c’est-à-dire le processus qui se déroule au moment du contact avec des contenus (…) et les aspects plus « statiques », considérés à un moment donné, comme « les effets », c’est-à-dire les résultats à court, moyen ou long termes du processus de réception » (Courbet & Fourquet, 2003a, p. 9).

Pour conclure et amorcer ce qui suivra dans les parties dédiées à la création et à la réception, la communication comme forme d’interactions invite à s’intéresser aux trois « pôles » : la création, les dispositifs et la réception. Nous le disions en introduction, la communication médiatique comme forme d’interactions humaines et sociales médiatisées s’éloigne des approches mécaniste et fonctionnaliste. La réception s’envisage comme interaction des pôles. Les sujets sociaux en réception, dans notre approche, sont dits complexes. Ils et elles ne sont ni actif·ve·s, ni passif·ve·s, mais les deux à la fois. La réception intègre les deux niveaux, individuel et social. Les récepteur·trice·s sont des sujets « pensants » et « sociaux » (Courbet & Fourquet, 2003b), en interaction avec les autres pôles de la communication et considérant l’environnement social dans lequel ils·elles s’inscrivent et qu’ils ont intégré. Ainsi, la réception s’envisagera, à travers les processus et les effets, en s’intéressant et mettant en interaction les pôles création et dispositifs, ainsi que les contextes microsocial et macrosocial de la réception.

1.2 Lien entre modèle interactionniste de la communication

médiatique et expérience esthétique

Nous nous proposons de lier la théorie de la communication médiatique mobilisée (forme d’interactions humaines et sociales médiatisées) à l’expérience esthétique. Nous l’envisageons par les processus de réception et de création des œuvres d’art (Couchot & Lambert, 2016). Ce rapprochement entre ces deux champs tient à ce que le DDG soit une pratique mobilisée dans des dispositifs communicationnels et artistiques. Nous mettons en avant ici les convergences théoriques interactionnelles dans l’étude de la création et la réception de dispositifs de DDG, portant une visée politique, du moins critique par le genre, de lutte contre les violences faites aux femmes. Nous l’avons vu, mouvements sociaux et art peuvent échanger, réciproquement, des leviers d’action ou de création (Balasinski, 2009). Les dispositifs de DDG relèvent d’une double perspective de l’offre médiatique, tel que celles persuasives visant « à réaliser des objectifs socio-politiques de « bien public » » mais aussi celles de « divertissement des publics » (Chabrol et al., 2004), lesquelles participent à l’intérêt général en offrant des contenus visant à exposer des problématiques sur le genre et les violences faites aux femmes.

Précisons, en amont, que les questionnements philosophiques sur l’expérience esthétique empruntent volontiers aux champs de la psychologie cognitive ou des émotions par exemple (Schaeffer, 2015). L’intérêt pour les processus en création et en réception font aussi sortir l’expérience esthétique de la philosophie (Couchot & Lambert, 2016).

Notre propos est de démontrer que des liens entre disciplines scientifiques pour étudier la réception et la création en art et communication non seulement existent, mais que les théories que nous mobilisons s’entrecroisent. Ainsi, étudier conjointement des supports relevant du champ communicationnel et artistique est possible. Par ailleurs, certains dispositifs en sont des hybrides, puisqu’ils relèvent d’emprunts réciproques. En effet, les théories qui sous-tendent création et réception pointent des aspects similaires et des différences nuancées dans notre recherche. Dans l’approche exposée par Couchot et Lambert (2016, p. 25), l’œuvre d’art, l’artefact, peut être « reconnu comme une œuvre d’art, candidat à cette reconnaissance ou ignoré par la sphère de l’art, [cela] ne modifie pas la composition des constituants ».

Ainsi, la question des « pôles » de la communication médiatique, producteur·trice·s, récepteur·trice·s, et dispositifs, considérés dans leurs contextes sociaux macro et microsociaux (pour le dire brièvement) trouve écho en esthétique, ainsi que les interactions entre ces pôles et les questions d’intentionnalité et de co-construction de sens.

Les trois pôles de la communication (producteur·trice, dispositif, récepteur·trice) et le contexte de la réception deviennent, en esthétique, des constituants, au nombre de quatre : « la vision d’un tableau, que j’appelle « moment du voir », nécessite la rencontre temporaire d’un artefact (le tableau), d’un observateur (le regardeur), d’un « milieu » de présentation (galerie, musée, collection privée, etc.) et d’un auteur (le peintre) » (Couchot & Lambert, 2016, p. 25). Nous retrouvons ici des sujets et objets similaires en communication et en art, à la nuance près que le « milieu » est hiérarchiquement égal à celui des autres constituants (pôles), quand pour nous, il est nécessairement inclusif des pôles de la communication, le contexte socio-historique et culturel situé.

De plus, à l’instar de notre approche théorique de la communication médiatique, forme d’interactions humaines et sociales médiatisées des sujets de la production et de la réception, le « moment du voir » (l’exposition au dispositif) met en présence physique trois constituants (artefact, observateur et milieu) et en présence asynchrone le quatrième : l’auteur. Couchot et Lambert (2016, p. 25) l’expriment ainsi : « Les trois premiers constituants, l’artéfact, l’observateur et le milieu sont coprésents au moment du voir, mais la présence du peintre ne se manifeste qu’indirectement à travers certains « embrayeurs temporels » auxquels le regardeur est plus ou moins réceptif. (…) Mais si le peintre n’est habituellement pas présent au moment où le regardeur contemple le tableau, celui-ci peut en trouver la présence grâce aux embrayeurs temporels117 (…) ». En somme,

117 Si les « embrayeurs temporels » mentionnés ici correspondent par exemple à voir l’artiste en train de

faire, c’est-à-dire en créant son œuvre en direct face aux observateurs, ou filmé puis présenté aux

observateurs, ce n’est pas ce point qui nous intéresse. Plus loin, les auteurs (Couchot & Lambert, 2016, p. 30-31) explicitent ce qui nous intéresse : « comment la résonance empathique peut avoir lieu , si dans le cas de la vision d’un tableau, le peintre est absent ? Je propose l’hypothèse que la résonnance se ferait alors par le biais d’une sorte de relai, les « embrayeurs temporels » qui, gardant la trace physique des actions du peintre au moment où il a peint (…) renverraient indirectement à sa présence. C’est le partage empathique de la temporalité vécue par le peintre au moment du faire et de la temporalité vécue par le regardeur au moment du voir qui inscrit l’expérience esthétique dans le temps et ses trois directions (présent, passé,

il est ici question de l’interaction entre observateur (récepteur) et auteur (créatif), médié par l’artefact, dans le contexte d’observation, où l’auteur (créatif), bien qu’absent physiquement, est présent dans l’interaction, à travers les « traces » dans l’œuvre et de ses intentions, ce que nous voyons ci-après.

Pour ces auteurs en esthétique, ces constituants sont des systèmes auto-organisateurs qui « interagissent entre eux s’ajustant les uns aux autres » (2016, p. 28). Chacun intègre « plusieurs systèmes sous-jacents plus ou moins complexes, empilés en niveaux hiérarchiquement intégrés -une sorte de « feuilleté » systémique qui constitue un système global. Les conduites du regardeur et du peintre étant les plus complexes ». Ces éléments font grandement écho aux processus de création et de réception de notre approche en SIC.

Comme le montre l’extrait suivant, le peintre est doté d’intentions, relevant du faire, et il est aussi agi, en projetant dans son esprit l’observateur (en SIC, le récepteur), par l’idée de produire un effet sur lui. L’observateur est présent à l’esprit du peintre lors du processus créatif, par l’interaction des esprits, et l’acte créatif est un processus d’actions progressives, à l’instar de notre approche des interactions en SIC. Les créatifs, en art et en SIC, sont dotés d’intentionnalités. Celles-ci peuvent différer, mais les créatifs ont à l’esprit le public et visent à produire un effet sur lui.

« Le peintre est lui aussi un système auto-organisateur intentionnel extrêmement complexe analogue à celui du regardeur, mais doté d’intentions différentes visant le faire plutôt que le ressenti. Il définit lui-même ses propres objectifs au cours de l’acte de création, les corrige, les adapte, en vue de produire un artefact destiné à provoquer chez autrui une activité cognitive produisant un plaisir esthétique. (…) le tableau peut faire système si, comme le veut sa fonction, il interagit avec le système cognitif du récepteur. (…) C’est donc en tant qu’il est couplé à un système auto-organisateur complexe doté d’une intentionnalité (le peintre) que l’artefact participe indirectement à l’émergence d’une forme qui ne préexiste ni en lui ni dans l’esprit du regardeur » (Couchot & Lambert, 2016, p. 26).

Après les intentions, nous considérons la question des traces dans l’œuvre (ou dans le dispositif) de l’auteur (le créatif), l’interaction entre l’observateur et l’œuvre et enfin, les interactions entre l’observateur et l’auteur. (Pour cette dernière interaction, nous l’avons vu plus tôt mais dans le sens auteur-observateur). Pour finir, nous voyons qu’à l’instar de l’auteur (créatif), l’observateur (devenant « regardeur ») s’envisage aussi selon un processus de réception complexe.

Nous les avons cités, les deux systèmes complexes sont ceux de l’auteur et de l’observateur, ce dernier produisant notamment une activité cognitive durant le « moment du voir ». Quant à la composante de l’espace-temps, « il agit fortement sur les conditions de perception et de réception (…) et se réinscrit » dans le système plus global

futur) instaurant ainsi un lien intersubjectif puissant entre l’auteur et le récepteur, au-delà de l’écart temporel qui les séparent ».

social, à l’instar de l’approche en SIC. Il n’est pas dit « complexe » ici, ni ne l’est le « tableau ».

Premièrement, les interactions entre observateur, œuvre et auteur : l’artefact, i.e. le tableau (ou le dispositif) est ainsi « composé en tant qu’objet physique d’élément stimulant la perception : des formes (…) diversement organisées, mais incapables d’une quelconque évolution autonome ». Or nous l’avons lu, il est destiné à produire un plaisir esthétique, issu des choix du créatif, sur l’observateur. Il en comporte donc des traces. L’artefact est l’objet de la médiation entre les créatifs et observateurs, comportant des « formes » issues de l’acte créatif des premiers et visant des effets sur les seconds. « Le tableau peut faire système si, comme le veut sa fonction, il interagit avec le système cognitif du récepteur ». (Couchot & Lambert, 2016, p. 27) « C’est donc en tant qu’il est couplé à un système auto-organisateur complexe doté d’une intentionnalité (le peintre) que l’artefact participe indirectement à l’émergence d’une forme qui ne préexiste ni en lui ni dans l’esprit du regardeur ».

Deuxièmement, comme l’envisage en SIC les interactions humaines et sociales médiatisées, non seulement le regardeur suit un processus de réception, complexe -où il n’est ni passif, ni actif, mais les deux à la fois-, mais il est de plus en interaction avec l’auteur. « Contrairement à une idée très répandue qui veut que la perception d’un tableau se réduise à une contemplation passive, qu’elle n’engage aucune action de la part du regardeur, la perception est toujours un processus mental étroitement lié à l’action. La perception est un phénomène exploratoire ». Non seulement le regardeur regarde « avec une certaine attention et une certaine intention », mais il est en interaction avec les autres systèmes auto-organisateurs. « Du couplage regardeur-tableau émerge un état cognitif et physiologique –l’empathie- qui incite le regardeur à partager certains états mentaux et corporels propres à l’auteur de l’artefact », même si celui-ci n’est pas physiquement présent (…) Une simulation mentale de la subjectivité d’autrui » (Couchot & Lambert, 2016, p. 28-29). Ainsi, les sujets sociaux en réception, regardeurs ou récepteur·trice·s, dans ces approches en art et en communication, sont en interaction avec celles·ceux en création.

2. Etudier les processus créatifs et les intentions d’influence