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Comment tester les défaillances de marché ?

Avant de pousser plus en avant le raisonnement, il convient de s’intéresser au concept de défaillance de marché au sens faible. La théorie microéconomique standard nous enseigne qu’en cas d’imperfection du marché, on peut observer une défaillance du marché. Cette relation n’est cependant pas automatique. Une imperfection de marché n’entraîne pas nécessairement une défaillance de marché. En revanche, il ne peut y avoir de défaillance de marché sans imper- fection. Les études américaines parlent de défaillance du marché de l’assurance dépendance dans la mesure où ce marché est très peu développé par rapport à d’autres marchés de l’assu- rance comme celui de l’assurance santé. Le contexte institutionnel français, fortement marqué par l’assurance sociale, rend plus di¢ cile le recours à ce concept. En e¤et, que ce soit sur la santé ou la dépendance, l’assurance sociale propose une prise en charge quelque soit le niveau de revenu. Il n’existe donc en France que des marchés de la complémentaire santé ou de la complémentaire dépendance. Il serait donc plus juste de parler de défaillance de marché de la complémentaire dépendance. Plutôt que de recourir au concept de défaillance de marché qui, s’il est poussé au bout de sa logique, doit mener à la destruction du marché, nous préfèrerons parler de développement limité du marché, ou d’accès restreint au marché. Le concept de défaillance de marché semble en e¤et trop fort lorsque l’on cherche à caractériser le faible développement du marché de l’assurance dépendance en France.

Les imperfections du côté de l’o¤re peuvent entraîner un prix plus élevé de l’assurance comme l’illustre la …gure 4-1. La courbe d’o¤re va donc être modi…ée. Par conséquent l’o¤re et la demande ne vont se croiser que pour une quantité moindre et un prix plus élevé. C’est dans ce sens que l’on peut parler d’un rationnement du marché.

Les coûts de transaction ainsi que la concurrence imparfaite sont tous les deux susceptibles d’augmenter les prix au-dessus du taux actuariel. Les coûts de transaction proviennent la plupart du temps des coûts de commercialisation ainsi que des coûts de gestion de sinistre2. On est alors

2

p(q)

q

Offre 2

Offre 1

D

Offre et Demande d’assurance dépendance pour une prime

Fig. 4-1 –O¤re et Demande d’assurance dépendance pour une prime donnée

en présence d’une ine¢ cience-X qui pèse sur la productivité de la compagnie d’assurance. Ces coûts de transaction élevés peuvent également provenir des coûts de recherche d’information nécessaires pour lutter contre les asymétries d’information.

Ces coûts peuvent être exacerbés en cas de concurrence imparfaite. Dans ce cas, l’assureur va alors pro…ter de son pouvoir de marché pour pratiquer un prix supérieur à ce qu’il serait en situation de concurrence pure et parfaite. Or le marché de l’assurance dépendance n’est pas très concurrentiel aux Etats-Unis. En e¤et, la société la plus importante représentait un quart du marché et les cinq compagnies les plus importantes représentaient les deux tiers du marché en 2002 (LIMRA 2002). On observe une situation comparable sur le marché français3.

Les coûts de transaction ou la concurrence imparfaite sont donc susceptibles de limiter la demande d’équilibre par l’augmentation des prix qu’ils entraînent. Cependant, ils ne peuvent entraîner un rationnement par les quantités tel que nous l’avons dé…ni précédemment.

La présence d’asymétrie d’information et notamment l’antisélection dynamique (Hendel & Lizzeri 2003) peut également augmenter le prix au-delà du prix actuariel calculé sur la population entière (Finkelstein, Garry & Su… 2005a). La troisième partie sera exclusivement consacrée à l’étude de ce phénomène.

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La présence d’un risque agrégé peut également contribuer à augmenter le prix de l’assurance si les compagnies d’assurance ajoutent une prime supplémentaire qui correspond au fait de supporter un risque agrégé4 (Froot 1999) (Friedberg & Webb 2006) (Brown & Orszag 2006).

Un prix de l’assurance supérieur au prix actuariel ou un niveau de couverture du risque limité sont tous deux des indices de l’existence d’une défaillance de marché. Ces phénomènes empiriques ne sont pas su¢ sants en eux-mêmes pour opérer une distinction entre les di¤érents types de défaillance de marché. Cependant, en présence d’un rationnement par les quantités, cela nous suggère l’existence d’asymétrie d’information ou d’un problème de contrat dynamique. Par ailleurs, si nous n’observons pas des prix de l’assurance majorés, cela nous laisse à penser que les coûts de transaction ou que la concurrence imparfaite ne sont pas présents sur ce marché. Il est par ailleurs di¢ cile d’e¤ectuer des distinctions plus …nes à partir des données utilisées. Par exemple, le fait que l’on observe des prix majorés mais pas de rationnement par les quantités sur le marché de l’assurance dépendance n’exclut pas nécessairement la possibilité d’asymétrie d’information ou des problèmes de contrat dynamique. Tout dépend en fait de la nature exacte des asymétries d’information ou des problèmes de couverture des risques longs. Ils peuvent, selon leur forme, produire soit des prix majorés, soit un rationnement des quantités, soit les deux. Brown et Finkelstein ne cherchent pas à e¤ectuer des distinctions aussi détaillées. Ils essaient de manière plus générale de véri…er si les défaillances du côté de l’o¤re existent sur ce marché et si elles sont su¢ sament importantes pour expliquer la faible taille du marché de l’assurance dépendance.