• Aucun résultat trouvé

D AR , VERBE DE DON

Dans le document Le verbe espagnol dar : approche sémantique (Page 113-117)

1.1 Signifié et syntaxe : le rôle du contexte

1.3. Capacités combinatoires de dar

1.3.1. D AR , VERBE DE DON

La première acception dans quasiment tous les travaux de lexicographie est celle qui fait de dar un verbe exprimant le don. Du point du vue syntaxique, cette nuance de signification se présente généralement dans une structure transitive : le verbe se construit avec les compléments que la grammaire traditionnelle appelle COD et COI. Dar aurait un sens plus ou moins proche de celui de entregar dans l’emploi signalé dans l’exemple 119 :

Cadalsito se encaró después con el sujeto aquel de la casaca, y quitándose la gorra [...] le dio la carta, diciendo con timidez: "Aguardo contestación."

et que l’on pourrait gloser ‘mettre quelque chose (ou quelqu’un) en possession ou à disposition de quelqu’un (ou de quelque chose)’. Le moteur de l’opération, le responsable du transfert, est un être animé, Cadalsito, qui met un autre être animé, el sujeto aquel de la

casaca en possession d’une entité inanimée, la lettre. L’entité mise en possession ou à

(123) Lo querían porque él era un bruto bueno y muy humano. La gente comentaba bajito lo de la mujer y las hijas, que se habían ido en un santiamén. Yo creo que me saqué el premio gordo cuando me topé con él. Me dio cariño de padre sin sangre por medio.

Miguel Barnet, Gallego, Cuba, 1981, CREA.

Cette entité que l’on conçoit comme l’objet du don dans cette acception du verbe peut renvoyer à un être humain, comme c’est le cas dans cet extrait de Zaragoza de Pérez Galdós, où l’avare Candiola ne veut pas donner sa fille en mariage à Agustín :

(124) Los insultos del Sr. Montoria no me llaman la atención y los desprecio -dijo el avaro con ponzoñosa cólera-. En vez de insultarme el Sr. D. José, debiera sujetar a su niño Agustín, libertino y embaucador, que es quien ha trastornado el seso a mi hija. No, no se la daré en matrimonio, aunque bebe los vientos por ella. Y quiere robármela. ¡Buena pieza el tal D. Agustín! No, no la tendrá por esposa. Vale más, mucho más mi María.

Benito Pérez Galdós, Zaragoza, España, 1874, CORDE.

Le moteur et l’objet du don peuvent faire allusion à des abstractions :

(125) Cuando salió, levantéme la venda y miré al campo... Vi el arco iris y me quedé asombrado, mudo de admiración y de fervor religioso... No sé por qué, aquel sublime espectáculo, para mí desconocido hasta hoy, me dio la idea más clara de la armonía del Mundo... No sé por qué, al mirar la perfecta unión de sus colores, pensaba en ti...

Benito Pérez Galdós, Marianela, España, 1878, CORDE.

Dans le cas suivant, l’entité responsable du transfert, tu deseo, l’objet du don, algo que

amas, et le destinataire, el significado, renvoient à des abstractions également :

(126) Es extraño cómo algo que amas puede invertir por completo, y de manera súbita, el significado que tu deseo le daba.

Tomás Eloy Martínez, El vuelo de la reina, Argentina, 2002, CREA.

En somme, il semble qu’il n’existe pas de restrictions quant à la nature des êtres convoqués dans le discours et représentés sous une forme nominale ou pronominale. Dar accepte que des entités animées ou inanimées, concrètes ou abstraites soient convoquées pour argumenter les trois postes que cet emploi dévoile : un moteur de l’opération du don, que l’on peut désigner dorénavant comme le MOTEUR (M) et « donneur » dans cet emploi, une ENTITÉ AFFECTÉE par l’opération AU PREMIER NIVEAU (EA 1), le « donné » dans ce cas, et un terme ou

ENTITÉ AFFECTÉE par l’opération AU DEUXIÈME NIVEAU (EA 2), soit le « récepteur » du

« don » :

MOTEUR (M) →ENTITÉ AFFECTÉE 1 (EA1) →ENTITÉ AFFECTÉE 2 (EA2)

Figure 5 : INSTANCIATION DES POSTES DE L’EXEMPLE 126 : « [A]LGO QUE AMAS PUEDE INVERTIR [...] EL SIGNIFICADO QEU TU DESEO LE DABA ».

Or, l’instanciation de ces trois postes ne se fait pas systématiquement dans les emplois de dar pour exprimer le don. Il est possible que le « récepteur » ne soit pas désigné :

(127) Hasta entonces la máscara de la cortesanía, había bastado a cubrir aquella sima de corrupción y bajeza, y como doña Beatriz no podía dar amor, tampoco lo pedía.

Enrique Gil y Carrasco, El Señor de Bembibre, España, 1844, CORDE.

Il arrive également que le « donneur » ne soit pas mentionné :

(128) Mientras tanto, doña Celestina y el vicario habían decidido casar a la Shele. Como sabes, aquí los matrimonios que se hacen entre la gente del campo, atendiendo sólo al dinero, se llaman la venta de la ternera. En el caso aquel no era la venta corriente, sino la de una res estropeada y enferma, y había que dar mucho dinero encima para sacarla de casa.

Pío Baroja, Las inquietudes de Shanti Andía, España, 1911, CORDE.

Il se peut qu’aucun des trois actants ne soit déclaré et que le verbe se présente dans son emploi absolu :

(129) ESTELA: Mirá, me gusta ese primer tiempo... el descubrirse, el tantear. ¡Después vendrá la época de las peleas! Ver que el tipo era un turro y te quiso usar. Y no quedará nada. MARTA: (Entusiasta). ¡Yo no pienso igual! Para mí hay que dar, Estela. Cuanto más da uno, más queda...

ESTELA: ¿Dar? ¡Ni loca!

Alberto Daneri, Matar las preguntas, Argentina, 1981, CREA.

Dar peut se dire d’un MOTEUR qui met en marche le procès et d’une ENTITÉ AFFECTÉE

1 ou objet du don (127) ; il peut livrer l’identité d’une ENTITÉ AFFECTÉE 1, mais pas celle du MOTEUR de l’opération ni celle de l’ENTITÉ AFFECTÉE 2 (128) ; il peut enfin ne livrer l’identité

d’aucun des actants qu’il implique (129). Visiblement, la notion du don peut être véhiculée sans déclaration de ses trois actants. Pourtant, le contexte permettra, dans certains cas, de

déceler les postes passés sous silence, comme lorsqu’il s’agit des récepteurs potentiels de l’amour de doña Beatriz dans doña Beatriz no podía dar amor (127) :

DOÑA BEATRIZ (M) →AMOR (EA1) →Ø (EA2)

Figure 6 : INSTANCIATION DES POSTES DE L’EXEMPLE 127 : « [D]OÑA BEATRIZ NO PODÍA DAR AMOR ».

ou de ceux qui offrent de l’argent au futur mari de Shele dans había que dar mucho dinero

encima (128) :

Ø (M) →MUCHO DINERO (EA1) →Ø EA2

Figure 7 : INSTANCIATION DES POSTES DE L’EXEMPLE 128 : « [H]ABÍA QUE DAR MUCHO DINERO ENCIMA ».

Dans 129, le contexte linguistique et extralinguistique est incontournable pour pouvoir déceler le sens du don dans hay que dar, pour comprendre concrètement qu’il est question de l’investissement dans une relation amoureuse, de quelqu’un qui donne amour, affection, etc. à quelqu’un d’autre :

Ø (M) →Ø (EA1) →Ø (EA2)

Figure 8 : INSTANCIATION DES POSTES DE L’EXEMPLE 129 : « [H]AY QUE DAR ».

Or, il convient de préciser que, à ce stade de l’analyse, on n’a pas quitté le niveau du discours, car on vient d’identifier les actants qui se révèlent dans cette capacité expressive. Cette instanciation particulière en discours qui rend compte d’un MOTEUR associé à un

« donneur », d’une ENTITÉ AFFECTÉE 1 qui prend la forme d’un « donné » et d’une ENTITÉ AFFECTÉE 2 associée à un « récepteur » est permise grâce au contenu notionnel du verbe en

langue, où se trouvent les postes sémantiques qui commandent tous ses emplois possibles et

qui peuvent ne pas « entrer en scène » dans le discours. Les postes que l’énoncé référencié renvoie aux entités que l’on a identifiées en tant que « donneur », « donné » et « destinataire » sont des actants que cet effet de sens véhicule. Mais c’est le signifié unique du verbe qui, dès la langue, à partir du « poste de commande », déclare une opération qui rend possible l’expression du don dans le discours même lorsque tous les actants ne sont pas matérialisés.

Or, la seule porte d’accès à ce cœur notionnel est l’énoncé où ce signe comparaît et l’analyse du sens dégagé dans un contexte particulier.

L’emploi de dar comme verbe qui dit que ‘A met B en possession/à disposition de C’ pourrait être autorisé par un signifié qui dit qu’une entité A – le MOTEUR dans le discours –

fait en sorte qu’une entité B – ENTITÉ AFFECTÉE 1– existe pour une entité C – ENTITÉ AFFECTÉE 2. Cependant, à ce stade de l’analyse, il convient de passer en revue un nombre plus

conséquent d’emplois du verbe pour pouvoir constater – ou contester – l’argumentation des trois actants qu’on vient d’identifier dans le discours et pour pouvoir ensuite remonter jusqu’à son contenu en langue.

Dans le document Le verbe espagnol dar : approche sémantique (Page 113-117)