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DE LA COMMUNICATION À L'INFORMATION : LES VOIES DE LA GOUVERNANCE LOCALE

4.3 ANNÉES 1980 : UN TOURNANT POLITIQUE, GÉNÉRATIONNEL ET MÉDIATIQUE

4.3.2 L'ancrage des problèmes sociaux et la médiatisation du territoire

Le retrait des quatre communes précitées prive la Ville Nouvelle d'une partie de ses ressources issues des zones d'activité. Ainsi, malgré un redressement rapide, les années 1984 et 1985 sont considérées comme difficiles sur le plan économique. L'uniformisation du taux de la taxe professionnelle, fixé par le SAN à un niveau très élevé de vingt points, freine l'implantation de nouvelles entreprises et provoque même le départ de certaines. En décembre 1984, la libéralisation de l'implantation des activités économiques s'accompagne de la fin du régime de faveur dont bénéficiait le territoire, notamment l'exonération de la redevance sur les locaux tertiaires et de recherche. La fermeture de la société Unic-Iveco en 1984 entraîne le licenciement de 846 salariés, la plupart habitants de Trappes et d'Élancourt.

Dans la deuxième moitié des années 1980 sont entrepris, à l'initiative des municipalités, les premiers travaux de réhabilitation de certaines cités HLM fortement dégradées comme l'ensemble des Merisiers à Trappes où s'accumulent chômage, délinquance, difficultés scolaires et problèmes de cohabitation. Pour le maire de Trappes, « il s'agissait avant tout d'inverser la mauvaise image de ce quartier en améliorant la qualité des logements et en contrôlant les attributions ». L'ouverture des squares sur la ville, la recréation des rues, la réfection des façades

Doc. 48 LES BORÉALES, VOISINS-LE- BRETONNEUX

et la restructuration du centre commercial s'accompagnent « d'actions sociales de prévention de la délinquance »17. Des associations d'habitants sont consultées pour définir les différentes

phases d'une réhabilitation architecturale et sociale qui devait s'achever en 1993.

Le cas de la cité du Bois de l'Étang à La Verrière permet de montrer un mode de médiatisation d'une partie du territoire à travers l'audiovisuel national, d'une part, et local, d'autre part. Les espaces extérieurs de la cité sont réaménagés dans le cadre d'une opération « Banlieue 89 », soutenue par le SAN, la Région et l'État au titre d'une convention pour le développement social des quartiers. La cité avait fait l'objet, quelques années auparavant, d'un reportage sur FR3 intitulé « Le Bois de l'Étang, Chicago en Yvelines » montrant les problèmes de conflits entre bandes du quartier et des communes voisines, les actes de dégradations volontaires sur le bâti, les caves pillées, les problèmes de drogue... Le quartier a encore du mal à se défaire de ce qui n'était malheureusement pas qu'une image, malgré d'importants efforts de communication entrepris notamment dans le cadre du dispositif de développement social urbain (DSU), dont l'originalité, comme le montre un mémoire sur les associations et la vie culturelle au Bois de l'Étang18, réside dans l'attention particulière portée à la communication interne et externe.

En 1991, un film vidéo d'une vingtaine de minutes intitulé « Un quartier au cœur » est réalisé, mettant en scène les habitants et les principaux acteurs de la réhabilitation (société HLM, chef de projet, architecte, directrice de la maison de quartier...). Un article des Nouvelles de Versailles évoque le succès de la prestation du groupe de rap de la cité19 précédant la projection du film aux

habitants en avril 1991 : « Ce rap (...) qui décrit sans complaisance le quartier et la vie de ses habitants (...) a remporté un énorme succès, probablement dû à son réalisme acide teinté d'espoir ».

La Maison de quartier devait devenir le lieu de diffusion privilégié de réalisations diverses comme la maquette présentant le futur quartier réhabilité, ou une exposition sous forme de panneaux retraçant les grandes étapes de la cité. Comme le note Hamza Haura (1991), ces supports, qui véhiculent de l'information, sont en même temps porteurs de culture et peuvent « préfigurer des tests qui indiqueraient quels supports de communication sont les plus adaptés à la population ou à certaines tranches de la population ». L'auteur soulignait en outre qu'un trop plein d'attention réservé au Bois de l'Étang pouvait risquer d'aggraver les problèmes de communication entre ce quartier et celui d'Orly-Parc.

« En 1985, l'objectif était de commencer à construire une image pour Saint-Quentin-en- Yvelines, ou plutôt une personnalité reflétant celle des habitants »20. La campagne de

communication lancée en 1984 par le SAN était destinée à faire connaître Saint-Quentin-en- Yvelines et à valoriser et développer le marché de l'immobilier, tant dans le domaine du

17 N.B. : Le terme de « prévention » implique une action en amont en matière d'éducation qui peut être efficace sur les plus jeunes. Préféré au mot « lutte » contre la délinquance qui s'est imposé par la suite dans des discours plus radicaux, le mot prévention semble occulter le danger réel déjà existant au profit d'un risque potentiel.

18 Haura H., 1991. Associations et vie culturelle au Bois-de-l'Étang, La Verrière, 92 p. 19 Le rap du Bois de l'Étang, Rap Attack, Gérard Mendi auteur-interprètre.

logement que dans celui de l'entreprise et des activités tertiaires. Le choix se porte sur une agence qui propose l'utilisation de la télévision, au moment où FR3 Régions s'ouvre, à partir de janvier 1986, à la publicité. Le budget de cette campagne promotionnelle21 était de 3,4

millions de francs, avec une participation des promoteurs de logements à hauteur de 1,7 millions de francs. Le message « Saint- Quentin-en-Yvelines, la ville au naturel » se déclinait sur les thèmes du travail, du logement, des loisirs et permettait de toucher une clientèle au-delà du département des Yvelines. Renforcé par des messages sur la station de radio RTL et par un affichage routier mais aussi dans les hypermarchés, le film montrait des instants « pris sur le vif » de tranches de vie exprimant le quotidien des habitants [Doc. 49].

Comme on le voit sur l'affiche, seule une partie de la population du territoire de Saint-Quentin-en-Yvelines peut se reconnaître dans une telle image. On peut s'interroger sur les effets d'une telle campagne de communication destinée à attirer des cadres d'entreprises et valorisant un certain style de vie. Les exemples précédents montrent que le problème de l'animation demeure crucial et doit accompagner tout projet d'urbanisation.

21 Comme le rappelle Frédéric Theulé (2004) : « Il n'est pas anodin de signaler qu'elle a été élaborée par Jacques Séguéla, publicitaire alors très en vogue, père de la "force tranquille" de François Mitterrand lors de la campagne présidentielle de 1981 ».

Doc. 49 CAMPAGNE DE COMMU- NICATION LANCÉE PAR LE SAN AU MILIEU DES ANNÉES 1980

Source : EPA

La présence, à droite de l'affiche, d'une équipe de télévision, rappelle que la campagne de publicité a lieu également sur le petit écran et renforce l'idée d'un lien entre la Ville Nouvelle et les moyens modernes de communication. Le bébé, la raquette de tennis et le bouquet de fleurs portés respectivement par le père, l'enfant et la mère, à gauche de la photographie symbolisent les valeurs auxquelles est censé se rattacher le territoire : vie familiale, place des loisirs et de la nature.

4.3.3 Animation culturelle et information des citoyens : priorité à l'identité

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