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Dans un contexte de marchés globalisés, les consommateurs sont de plus en plus à la recherche de produits de qualité unique. Les dénominations géographiques peuvent y avoir une partition à jouer : reposant sur « des facteurs locaux uniques fruits de la tradition, du savoir-faire, et de ressources agro-écologiques particulières », les dénominations géographiques bénéficient d’atouts « pour asseoir leur réputation et valoriser leurs qualités un peu comme dans le cas d’une marque » (Giovannucci et al., 2009 : 34). Aussi, les dénominations géographiques rassurent les consommateurs non seulement en termes de qualité, mais aussi de traçabilité et d’innocuité des aliments, puisqu’elles respectent des normes précises – suivant un dispositif d’assurance qualité –

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établies dans le cahier des charges du produit désigné. Elles peuvent donc constituer pour les producteurs un outil supplémentaire pour identifier leurs produits comme étant de qualité satisfaisante et ainsi ouvrir de nouveaux marchés potentiels (Philips, 2003).

Les dénominations géographiques, contrairement aux autres propriétés intellectuelles (brevet, licence, etc.), ne confère le monopole que sur un nom (ou terme) mais dont le droit n’est pas exclusif à un individu. Le droit sur un nom géographique n’appartient pas à une seule entreprise mais à tous les producteurs d’un territoire donné qui respectent un cahier des charges spécifique (des droits collectifs). Ce monopole collectif ainsi conféré par l’enregistrement d’une dénomination géographique se limite à interdire à des producteurs situés à l’extérieur du lieu géographique couvert par la dénomination (ou ceux à l’intérieur de la zone mais qui ne respectent pas le cahier des charges du signe) d’utiliser le nom (ou terme) désignant la dénomination pour leurs produits. Cette particularité offre théoriquement aux producteurs ou entreprises regroupés en coopératives ou groupements, qui autrement seraient en concurrence les uns avec les autres, de nouvelles économies d’échelle, en réduisant les coûts de transactions, et améliorant la qualité des produits, voire en facilitant la gouvernance de la chaine d’approvisionnement (Giovannucci et al., 2009)234.

Par ailleurs, les consommateurs sont à la recherche d’informations sur la qualité (composants, goût, etc.) des produits qu’ils demandent, mais cela est particulièrement difficile – notamment pour ce qui est de la qualité gustative, intrinsèque à la texture du produit – à vérifier ou examiner avant l’achat, et donc après une prise de risques. Une récente enquête (26593 répondants) montre que 67% des citoyens européens vérifient, à l’achat, si les produits bénéficient d’un label de qualité indiquant des caractéristiques spécifiques liées à l’origine, mais seulement 22% vérifient à chaque achat, pendant que 45% ne vérifient qu’occasionnellement (CE, 2012a). La dénomination géographique bénéficie à ce titre d’une confiance des consommateurs qui l’identifient comme refermant un produit de qualité unique, ce qui leur permet de choisir le produit qui répond le mieux à leurs attentes personnelles

234 Toutefois, dans des cas où les producteurs possèdent des chaînes de production et d’approvisionnement modestes

(par exemples dans les pays pauvres, ou pays à faible revenu), les économies d’échelle sont difficiles à réaliser et l’accès au marché peut s’en trouver limité du fait de l’incapacité à satisfaire aux normes publiques et privés tentaculaires imposées par les marchés plus développés (Giovannucci et al., 2009 : 35).

quant à la qualité et aux caractéristiques recherchées (Cornish et Llewelyn, 2010).235 Ainsi, comme le

concluent Van Ittersum et al. (2007 : 18): « regional certification labels [protected denomination of

origin (PDO)] help to increase the market transparency of regional product-quality, enabling consumers to make better choices and in this way increase consumer welfare », même si ces

considérations peuvent varier d’un pays à l’autre.

Graphique 1: Évolution des ventes du fromage sous AOP « Comté ».

Source : Comité Interprofessionnel du Gruyère de Comté [CIGC] (2012).

La promotion commerciale d’une dénomination géographique est généralement liée à la mise en avant de la notion « qualité » du produit désigné, alors que dans certains cas, la dénomination (de par le terme, le signe ou vocable utilisé) peut en elle-même constituer un intérêt à la consommation du produit qu’elle désigne, indépendamment de la qualité (Hughes, 2003). Ainsi, grâce aux caractéristiques particulières que renfermerait le vocable (ou terme) de la dénomination et qui trouvent un écho favorable chez les consommateurs, une dénomination géographique peut accorder au produit désigné « a selling-power above that of the underlying goodwill » (Rovamo, 2006 : 13). Le

235 Selon une enquête auprès des consommateurs européens réalisée en 1999: 37% des répondants perçoivent les

dénominations géographiques comme garantissant bien l’origine du produit, 37% des européens leur confient une garantie de la qualité du produit désigné, et 56% perçoivent ces signes comme rendant bien compte du lieu et des méthodes de production (Berenguer, 2004).

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consommateur chercherait dans ce cas, outre la qualité et la sécurité alimentaire, des plus-values psychologiques, symboliques, émotionnelles et hédoniques que le nom (ou terme) géographique est supposé garantir (Giraud et Trabelsi, 2005).

Ainsi, au regard de ce qui précède, les dénominations géographiques sont un atout important d’accès au marché car elles peuvent permettre aux producteurs de « unlock value by capitalizing on

consumer desire for diversity, typical, quality products » (O’Connor, 2004 : 374), ce d’autant plus que

les produits identifiés AOP/IGP sont perçus par les consommateurs européens comme des produits de meilleure qualité : ce faisant, la différenciation des produits AOP/IGP par rapport à leur concurrent constitue un moyen d’envoyer un signal fort de qualité (caractérisée par des spécificités du terroir) aux consommateurs (London Economics, 2008)236. Une majorité (71%) des européens affirment

effectivement que l’origine des produits est un critère important dans leur décision d’acheter, même si les critères de qualité et de prix restent déterminants chez, respectivement 96% et 91% des répondants (CE, 2012a).