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Les études qui portent sur l’analyse de l’activité de l’enseignant et des élèves dans la construction d’un agir compétent

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 88-91)

L’activité et l’expérience des élèves et de l’enseignant en contexte de développement des compétences

2. Les études qui portent sur l’analyse de l’activité de l’enseignant et des élèves dans la construction d’un agir compétent

2.1. Le partage de significations entre l’enseignant et les élèves

Plusieurs études se sont intéressées à analyser les modalités d’interaction entre l’enseignant et les élèves, et la façon dont elles permettent de favoriser ou de freiner la coopération entre les élèves, qui, comme nous l’avons vu, peut être un levier intéressant dans la construction d’un agir compétent. Les interventions de l’enseignant, lorsqu’elles sont signifiantes pour les élèves, permettent notamment de favoriser l’engagement des élèves vers un projet collectif et vers l’exploitation des opportunités offertes par la situation (Guérin, Péoc’h, Guillaume, & Zeitler, 2010). Cette articulation entre l’activité de l’enseignant et des élèves peut être décrite selon plusieurs patterns de convergence et de divergence en fonction de l’engagement des élèves et de l’enseignant dans la situation de classe (Veyrunes, 2008). En effet, les interventions peuvent parfois nuire à l’activité collective des élèves ou à leur coopération lorsque l’enseignant ne prend pas en compte les préoccupations des élèves lorsqu’ils agissent (Escalié et al., 2019; Evin et al., 2013). Les préoccupations de l’enseignant et des élèves sont alors divergents et peuvent freiner la dynamique collective ou individuelle d’apprentissage. Concernant plus spécifiquement l’enseignement et l’apprentissage de compétences, le modèle de l’enseignement

« ostensif » (Wittgenstein, 2004) cherche à enseigner des règles aux élèves pour leur permettre d’agir et de développer leurs propres significations (Escalié et al., 2019). Lors d’un cycle basé sur une pédagogie intégrative des compétences (i.e., articulation entre situations ciblées et complexes), cette étude a analysé l’activité de l’enseignant et des élèves pour rendre compte d’un ensemble de règles visées par l’enseignant et de la façon dont les élèves se les approprient.

À l’aide du cadre de l’anthropologie culturaliste, il semble que ce type d’enseignement favorise le lien explicite entre une règle, une action et un résultat attendu pour qu’ensuite les élèves puissent vivre des expériences différentes à partir de cette gamme d’activités. Cependant, l’activité de l’enseignant ne fait pas toujours sens pour les élèves : ils peuvent avoir des difficultés à identifier les résultats attendus au niveau perceptif. L’activité de l’enseignant peut aussi parfois nuire à la dynamique coopérative des élèves lorsqu’il ne prend pas en compte les préoccupations des élèves au moment de leur action : cette divergence nuit également au développement des compétences visées.

Ces différentes études mettent en évidence, à travers l’expérience vécue des élèves et/ou de l’enseignant, l’importance des activités coopératives, aussi bien pour partager des expériences collectives (avec un engagement convergent ou orienté vers le même objet), que pour partager

des interprétations et des connaissances. Ce partage de connaissances au sein d’activités coopératives semble être un levier intéressant pour développer un agir compétent, à la fois comme une ressource pour la construction de connaissances mais aussi par rapport à la dimension sociale de la compétence que nous avons évoquée dans la définition minimale. Ces études permettent également de mettre en évidence les phénomènes de convergence ou de divergence qui peuvent parfois apparaitre entre l’enseignant et les élèves, et qui peuvent devenir des obstacles à la construction de compétences lorsque ce qui est dit par l’enseignant ne fait pas sens pour les élèves au moment de leur action.

Il semble donc intéressant de comprendre comment l’activité de l’enseignant, à travers ses différentes interventions, fait sens pour les élèves dans leur engagement dans les situations ainsi que dans la construction et la typification des connaissances.

2.2. L’appropriation des artefacts par les élèves

Les phénomènes de convergence et de divergence entre l’activité de l’enseignant et celle des élèves peuvent également s’exprimer dans les modalités d’utilisation des objets présents dans l’environnement de la classe (Adé, Veyrunes, & Poizat, 2009). Lorsque les préoccupations des élèves correspondent aux attentes de l’enseignant, il y a convergence sur les modalités d’utilisation des objets, tandis que lorsque leurs préoccupations divergent, un déploiement des modalités d’utilisation par les élèves peut être repéré, qui ne sont pas souhaitées par l’enseignant. Les artefacts matériels mis en place par l’enseignant dans les situations peuvent avoir un rôle médiateur dans les négociations entre l’enseignant et les élèves, notamment par leur participation à des phénomènes de ritualisation dans les interactions (Adé, 2010; Adé, Picard, & Saury, 2013). Les objets matériels sont en effet considérés comme des artefacts cognitifs caractérisés par trois dimensions : a) une dimension située, où les objets s’inscrivent dans un environnement donné et offrent un champ de possibles qui prennent sens en fonction de la dynamique de l’activité du sujet ; b) une dimension cognitive où les objets favorisent la construction et la mobilisation de connaissances et de fonctions cognitives (se représenter, comprendre, mémoriser, symboliser, imager, raisonner, …) au service de l’action ; c) une dimension expérientielle où ils participent à la transformation de l’expérience des élèves grâce à la construction de sens et où ils font émerger un « monde propre » pour chacun. La perception des artefacts révèle en effet une dimension subjective et donc personnelle : pour certains élèves, par exemple, une haie sera considérée comme une invitation à l’action, quand pour d’autres elle sera vécue comme un obstacle à éviter (Adé, Jourand, & Sève, 2010). La prise en compte de l’expérience vécue des élèves dans la façon dont ils perçoivent les artefacts est donc centrale

pour mieux comprendre la dynamique d’appropriation de ces artefacts au service de la construction d’un agir compétent.

Ces artefacts peuvent également renvoyer aux formats pédagogiques mis en place par l’enseignant. Ces formats pédagogiques impactent l’activité des élèves, et notamment les opportunités d’apprentissages qui leur sont offertes. Un format pédagogique correspond au dispositif d’organisation spatiale, matérielle et sociale mis en place par l’enseignant dans sa classe. Il se définit à partir de l’aspect dynamique de l’environnement (les élèves sont immobiles ou en mouvement), du rapport topographique entre l’enseignant et les élèves, et des objets matériels utilisés (Gal-Petitfaux, 2010). Dans une étude en gymnastique, deux formats traditionnels de l’enseignement ont été étudiés : un dispositif « ateliers » où les élèves travaillent sur des ateliers en autonomie et un dispositif « vague » où l’enseignant dirige le travail des élèves dans l’espace commun du praticable (Cizeron & Gal-Petitfaux, 2006). Cette étude a montré que le format pédagogique de travail utilisé par l’enseignant n’avait pas le même potentiel éducatif pour les élèves selon leur niveau de pratique. Les résultats révèlent un contraste dans l’activité de l’enseignant et des élèves selon les deux formats pédagogiques : a) concernant le dispositif en « vagues », l’enseignant est dans une activité de supervision avec la recherche d’une quantité importante de travail chez les élèves, qui ont un volume d’activité plutôt similaire selon les niveaux de pratique ; b) pour le dispositif en « ateliers », l’enseignant supervise à distance et fait des focales sur certains groupes selon les besoins qu’il repère, mais les auteurs observent une différence entre les élèves : ceux d’un meilleur niveau exploitent les opportunités d’apprentissage tandis que ceux de moins bon niveau n’en profitent pas autant.

Même si cette étude ne porte pas spécifiquement sur la question de la construction des compétences en EPS, elle permet d’envisager l’impact du format pédagogique mis en place par l’enseignant dans les opportunités d’apprentissage offertes aux élèves. L’approche de l’enseignement par compétences cherche à développer des formats pédagogiques où les élèves sont en action et construisent leurs propres connaissances à partir de situations complexes ou d’espaces d’actions encouragées. L’expérience des élèves dans ces espaces d’actions est donc intéressante à analyser pour mieux comprendre comment les élèves saisissent ces opportunités d’apprentissage et développent des connaissances.

Dans le cadre du badminton, une étude s’est également intéressée à l’expérience des élèves dans un format pédagogique particulier, basé sur deux situations de « jeu » : a) une situation où le système de marque était aménagé ; b) une situation où les possibilités d’intervention sur le volant étaient aménagées (Guérin, Testevuide, & Roncin, 2005). Les artefacts symboliques liés

aux règles du jeu et au comptage des points avaient pour objectif de transformer l’activité des élèves, en amplifiant certaines dimensions : par exemple des points bonus sur l’utilisation d’un coup technique préférentiel. Les résultats mettent en évidence une forme d’adaptation de l’activité de l’élève qui cherche à vérifier l’efficacité des schémas de jeu et à parer les coups adverses. Par contre selon le rapport de force que l’élève perçoit, il applique ou non la consigne : si le rapport de force lui est favorable il l’applique, s’il lui est défavorable, l’élève cherche à transgresser la règle pour ne pas perdre de points. Cette étude confirme l’équilibre précaire entre les attendus de l’enseignant dans la mise en place d’un format pédagogique particulier, et l’activité des élèves agissant au sein de ce format. À certains moments, leurs activités sont convergentes : les élèves agissent en cohérence avec ce que l’enseignant attend ; mais parfois cette activité devient divergente et les élèves sont engagés à faire autre chose que ce que l’enseignant vise. Ces moments de convergence et divergence entre l’enseignant et les élèves sont donc intéressants à étudier dans le processus de construction d’un agir compétent, à travers la façon dont les artefacts mis en place par l’enseignant permet ou non de transformer les connaissances des élèves.

Ces différentes études mettent en avant l’importance de l’environnement collectif, spatial et matériel, considéré comme un artefact cognitif : elles pointent le rôle à la fois structuré et structurant de l’environnement, qui peut modifier l’activité des élèves et impacter le développement de leurs compétences. Nous chercherons donc à caractériser les situations mises en place par l’enseignant et la façon dont il agence les différents artefacts au regard des compétences qu’il vise à faire construire, ainsi que la façon dont les élèves utilisent et s’approprient ces artefacts pour construire les compétences visées. Cette dynamique d’appropriation des artefacts nous intéresse pour comprendre la façon dont les artefacts font sens pour les élèves et comment ils contribuent à transformer leur agir compétent.

3. L’analyse de la typification des connaissances au cours de

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