• Aucun résultat trouvé

VI L'imbrication des aspects technique et identitaire La conversion

Nous pouvons supposer que les conséquences qu'implique un changement productif comme la conversion vers l'agriculture biologique peuvent révéler uniquement des aspects techniques et une rationalité qui calcule les coûts et bénéfices d'une telle décision. Néanmoins, la littérature montre aussi l'importance de l'aspect identitaire et "politique" de la démarche de conversion. Notre objectif sera donc d'observer et d'analyser les processus sociaux sous l'angle des deux aspects, technique et identitaire, imbriqués.

Un premier résultat nous montre la présence de la dimension relationnelle dans la prise de décision du passage vers une démarche de certification : dans notre population d'étude, 55% des domaines ont été convertis à l'agriculture biologique en prenant en compte l'opinion d'au moins un des 69 viticulteurs du milieu et 27% ont pris en compte l'opinion d'au moins 2 d'entre eux. Nous observons donc que dans la majorité des cas, la conversion passe par des échanges avec les pairs et qu'il s'agit donc d'un processus plus complexe et collectif que le calcul individuel coût-bénéfice.

Le passage vers l'agriculture biologique est un processus graduel et définitif : graduel, car la plupart des viticulteurs mettent en avant le temps de réflexion et les démarches progressives avant de commencer la certification qui comporte entre autres un aspect relationnel avec ses pairs dans la prise d'une tel décision pour le domaine ; et définitif, car ils n'envisagent en aucun cas de revenir en arrière après la certification.

L'aspect identitaire de la sortie d'un rôle social pour devenir un viticulteur "bio" présente des éléments décrits par Ebaugh (1988) comme la présence de doutes lors de la prise de décision, l'existence d'un temps de réflexion avant le passage vers l'agriculture biologique, la transition vers le nouveau rôle qui est assurée de manière institutionnelle, et la création d'un ex-rôle pour signaler que le changement a eu lieu. Le caractère définitif semble être un aspect identitaire car au niveau institutionnel et pratique, il est possible d’abandonner le cahier des charges et de revenir à l'agriculture conventionnelle.

Néanmoins, selon les viticulteurs interrogés, il s'agit d'une décision sans retour

J'ai eu du mal à me décider pour le bio, il y a eu quelques mois de doute, mais maintenant je ne reviendrais plus en conventionnel. (Viticulteur 69)

Ce viticulteur témoigne au long de l'interview du changement de milieu professionnel qu’a entraîné cette conversion. Le cadre de partage d'expériences mis en place par le SEDARB9

En 1994, je suis allé voir le domaine (nom du domaine A) qui est en biodynamie dans la Loire. Le domaine (nom du domaine B) faisait aussi des essais en bio et en biodynamie, et on est allé le voir également avec mon chef de culture. En biodynamie, on a vu que les vignes était plus belles, c'était vraiment intéressant. Le chef de culture m'a dit, "ça m'intéresse, on y va". En 1995, on a attaqué des essais sur 3 hectares en biodynamie, et tout le reste en biologique. Après trois ans les résultats étaient concluants. En 1998, je me suis dit que ne le faire qu'un peu n'avait pas de sens. C'était tout ou rien. Viticulteur 10

est une opportunité de s'incorporer à un milieu professionnel qui partage le même type de défis, à la fois techniques et identitaires. Le changement de type de culture est une décision dont la responsabilité repose sur le propriétaire de la vigne, mais la période de réflexion de ce dernier implique des discussions tant à l'intérieur de son organisation qu'avec les collègues d'autres domaines. Aller voir d'autres domaines et en savoir plus sur les expériences des autres est une ressource fondamentale pour prendre une décision d'une telle envergure.

Envisager la décision de passer à l'agriculture biologique comme définitive, "tout ou rien", est certes lié à des considérations techniques, mais il s'agit aussi d'un élément qui permet la construction d'un nouveau rôle en laissant derrière l'ancien. Ce nouveau rôle doit être socialement reconnu. Un passage avec de telles caractéristiques (doutes relatifs à la prise de décision, temps de réflexion et caractère définitif de la conversion) a selon Ebaugh (1988) trois fonctions : la réduction de la dissonance cognitive, l'opportunité d'annoncer la décision aux autres et la mobilisation des moyens nécessaires pour sortir de l'ancien rôle.

7 Les autres alternatives de vente pour les producteurs sont le moût, la vente en vrac ou la commercialisation des raisins. 8 Qui sont eux aussi certifiés AB.

Le métier de vigneron face à l'incertitude et l'effet cliquet

Une fois que la décision est prise et que le viticulteur s'engage dans une démarche officielle de conversion, il doit faire face à de nouveaux types de problèmes à résoudre, qui sont spécifiques à l'agriculture biologique. Pour assurer l'effet cliquet d'une conversion réussie, il est amené à constamment construire et valider collectivement l'information afin de prendre des décisions pertinentes. Le métier de vigneron, comme toute activité agricole, s'organise en grande partie autour des saisons. Des activités comme la taille ou la vendange sont déterminées par les cycles naturels, ainsi que par les particularités du terroir et les aléas météorologiques. Ainsi, les rythmes de travail sont similaires et les urgences surgissent en même temps pour les viticulteurs d'un même terroir. La principale activité pendant l'hiver est la taille de la vigne (réalisée les jours où la température le permet), qui influence le rendement et la qualité du raisin. Au printemps, le cycle végétatif redémarre, la sève remonte et la vigne "pleure" au niveau des cicatrices de la taille : l'activité centrale pendant cette période de l'année est le débourrement, qui consiste à attacher les sarments afin d'organiser la poussée de la vigne. A la même période commence le travail préventif qui vise à contrôler les maladies pouvant apparaître dans la vigne et qui auront des conséquences néfastes sur le rendement et la qualité des raisins. L'été est caractérisé par la fleuraison de la vigne et la vendange en vert, qui consiste à enlever des grappes pour limiter le rendement et augmenter la qualité des grappes restantes. La surveillance des pressions des maladies reste une activité importante jusqu'à début août. Enfin, l'automne est la saison des vendanges, activité impliquant la mobilisation de main-d'œuvre la plus importante. Le raisin récolté subira par la suite le processus de vinification. Une des particularités de l'agriculture biologique est l'interdiction d'utiliser des produits de synthèse. Or, ces produits sont utilisés principalement dans l'agriculture conventionnelle pour désherber les rangs et soigner les maladies de la vigne. Les produits utilisés en agriculture biologique ─ principalement le cuivre et le soufre ─ ont des propriétés qui permettent uniquement d'éviter ou de maintenir sous contrôle les maladies, mais une fois que la maladie est présente, il est impossible de la faire reculer avec ce type de produits. Cette situation représente un point d'incertitude majeure pour les viticulteurs. Le fait de dépendre uniquement du soufre et du cuivre pour maintenir sous contrôle l’oïdium et le mildiou implique que les décisions qui doivent être prises pour tenter de contrôler la maladie peuvent se traduire par une baisse de rendement et de qualité, et donc par des pertes financières. Il existe aussi un impact symbolique : la présence incontrôlée de maladies est associée à l’image d'un viticulteur qui ne maîtrise pas ses vignes. Une situation de maladie peut par ailleurs se propager aux parcelles voisines d'autres propriétaires.

Si le traitement est appliqué trop tôt, il le sera en vain car la maladie ne s'est pas encore répandue. S'il l'est trop tard, il sera inefficace. Les principaux facteurs à prendre en compte sont les probabilités de pluie dans les jours à venir (car contrairement aux produits de synthèse, s'il pleut le traitement devra être renouvelé), tout en minimisant les doses de cuivre afin de ne pas dépasser les doses maximales indiquées dans le cahier des charges de l'agriculture biologique et biodynamique. La conversion à l'agriculture biologique comprend donc une phase de tâtonnements et un fort degré d'incertitude lié à l'acquisition de ces nouvelles pratiques.

On se protège, on utilise plus de doses au début et on garde une marge assez importante, car on ne joue pas avec le feu : si le raisin a la maladie, c'est mort. (...) Quand l'oïdium commence on se dit : "Ouh la ce n’est pas bon". Il faut toujours faire très attention, parce qu'on ne le voit pas (l'oïdium NdA). C'est un champignon qui reste là, le raisin a alors du mal à mûrir et c'est la merde. (Viticulteur 23, en conversion)

La présence de maladies affecte le rendement ainsi que la qualité des raisins et les conséquences économiques peuvent être graves. "Jouer avec le feu" se réfère au fait que les vignerons en culture biologique font généralement des efforts pour minimiser les traitements et les doses de cuivre utilisées. Néanmoins, pendant la phase de conversion, ils préfèrent ne pas prendre ce type de risque et utiliser des doses plus élevées afin d’acquérir une maîtrise progressive des nouvelles techniques. Un autre viticulteur récemment certifié insiste sur les précautions prises dans son domaine pendant la période de conversion ainsi que sur les conséquences des erreurs décisionnelles :

Au début, pendant la période de conversion, on a commencé avec des fortes doses de cuivre : 6 kg en 2009, 4,7 kg en 2010 et 2,6 kg en 2011. Maintenant que je suis plus à l'aise avec le bio, c'est pas plus compliqué qu'avant : il faut traiter en fonction de la pluie. Il faut une rigueur dans les traitements parce qu'il n'y a pas de possibilité de rattrapage. En 2009, j'ai commencé le processus de certification et je n'ai pas le droit à l'erreur parce que je paierais cash, en termes de récolte et en termes de chiffre d'affaires. (Viticulteur 57, récemment certifié en AB)

Ces deux viticulteurs soulignent donc d'une part les précautions qu'il faut prendre pendant la période de conversion, et d'autre part les graves conséquences économiques des erreurs dans les tentatives de contrôle des maladies.

Le risque de maladies n'est pas un problème exclusif des agriculteurs en cours de conversion. Des vignerons expérimentés ont aussi souffert de la présence de maladies sur leurs vignes. Ne pas disposer de produits pour éliminer les maladies une fois qu'elles sont présentes dans la vigne peut signifier une perte de récolte même pour un vigneron qui cultive en agriculture biologique depuis plusieurs années :

Il y a eu des années difficiles où viticulteurs biologiques et conventionnels ont souffert : en 2008, j'ai perdu toute ma récolte à cause du mildiou, et tout le monde l'a vu. (Viticulteur 17, pionnier)

Il n'y a évidemment qu'une vendange par an. Un point qui va de soi, mais qu'il est important de souligner, est que la perte d'un pourcentage de la récolte ou la diminution de la qualité des raisins remet en jeu une année entière de travail et les investissements associés. Les enjeux de la prévention des maladies sont donc considérables. Les vignes sont ouvertes au regard des vignerons voisins et la présence d'une maladie nuit également au prestige du vigneron auprès de ses collègues.

Le passage vers l'agriculture biologique implique souvent une chute du rendement et une augmentation des frais de personnel. Il s'agit d'un changement productif qui va au-delà d'une innovation marginale : la conversion de l'agriculture conventionnelle vers l'agriculture biologique se fait graduellement, elle implique avant de s'engager dans le processus de certification de changer de techniques et de s’équiper en nouveau matériel.

C'est un changement dans les méthodes de culture qui peut nuire au rendement. Le passage en bio a signifié pour moi 20% de perte la première année. C'est une perte cash, parfois on est juste au niveau économique. Pour beaucoup c'est le crack. (Viticulteur 2, en conversion)

En contrepartie, les viticulteurs témoignent d'un sol plus vivant, d'une meilleure qualité du raisin et d'un accès à de nouveaux marchés. Le sol constitue aussi l'autre grand "chantier" de la conversion vers l'agriculture biologique. Nous avons préféré détailler davantage la description de la maîtrise des maladies du végétal car les produits de synthèse qui sont appliqués à la vigne sont souvent le dernier élément chimique à laisser de côté avant la conversion, alors que les désherbants liés au travail du sol sont souvent abandonnés plus tôt dans le processus de conversion.

La conversion comporte une innovation radicale par rapport à l'agriculture conventionnelle. Une nouvelle situation se présente pour les agriculteurs en conversion qui doivent gérer des incertitudes liées à la prévention des maladies et à la qualité des raisins, deux facteurs qui ont des conséquences économiques sur toute une année de travail. Les viticulteurs doivent apprendre à maîtriser une

nouvelle forme de culture qui comporte un changement dans les gestes quotidiens et les matériels utilisés ainsi que dans la structure de coûts et le rendement du domaine.

Les interdépendances et l’élaboration de l'information

La question qui se pose alors est de savoir comment les producteurs peuvent prendre une décision informée (Lazega Emmanuel, 1992) pour contrôler la présence de maladies dans les vignes et produire un vin de bonne qualité. L'observation et l'interprétation de ce qui se passe dans la vigne sont encore plus importantes qu'en culture conventionnelle pour les raisons mentionnées plus haut (traitements uniquement préventif et conséquences économiques des maladies). Les viticulteurs en phase de conversion et ceux qui sont plus expérimentés doivent prendre dans un temps limité des décisions concernant les traitements et les conséquences d'une erreur sont irréversibles. Afin de prendre la décision la plus pertinente, les producteurs confrontent leur vision à celle de leurs collègues. La connaissance qu'ils élaborent est praxéologique (Lazega Emmanuel, 1992) : les communications ont comme objectif de résoudre un problème concret lié aux tâches productives. Ils confrontent donc leur perception de la situation avec celle des autres pour construire une information qu'ils jugent pertinente.

Dans notre cas d'étude, les échanges de conseil ou d'avis concernant la résolution de situations problématiques liées au travail de la vigne conforment un réseau d'une densité de 4,8%. Ces interdépendances sont conformées d'un cœur épistémique, où se produisent une grande partie des échanges, et d'une périphérie moins dense. Onze viticulteurs sont isolés, c'est-à-dire qu'ils ne demandent pas d'avis à leurs collègues du milieu et ne sont pas non plus consultés par eux. Une analyse structurale des échanges de ce réseau10

À partir de l'ethnographie, nous retrouvons cette dimension sociale dans la co-construction et validation de l'information, notamment à partir de la reconnaissance d'un statut particulier pour certains viticulteurs, et également dans la construction de niches sociales entre viticulteurs.

indique la création de liens transitifs, révélatrice d'une tendance à travailler en groupe : si A demande conseil à B, et B demande conseil à C, A aura une probabilité élevée de demander conseil à C. Cet aspect collectif ou "tryadique" de l'apprentissage montre la dimension sociale de la co-construction d'information pertinente pour résoudre les questions techniques.

Toutefois, nous pouvons constater que certaines définitions de la réalité peuvent être concurrentes ou contradictoires. En conséquence, le viticulteur doit faire l'effort de "trier" l'information en évaluant la pertinence de chacune des versions de la réalité qui circulent. La confiance, le partage d'une vision commune sur le métier et la personnalisation des relations sont des facteurs qui vont jouer dans l'évaluation des différents jugements. Quelques exemples du travail ethnographique peuvent éclairer ce processus de co- construction collectif de l'information appropriée :

A quelqu’un qui débute je recommande de demander conseil aux anciens parce que quand on commence, on a peur. On s'appelle, c'est le téléphone arabe : il s'agit d'écouter ce qui se raconte, de comprendre quelles sont les tendances. Mais après il faut trier. Cela se fait beaucoup au cas par cas. Je tiens beaucoup compte des conseils de mon beau-frère et du SEDARB, mais il faut aller au bout de ses convictions et rester dans son idée. (Viticulteur 23, en conversion)

Le viticulteur 23 met en avant l'incertitude à laquelle sont confrontés la plupart des vignerons en conversion face à une situation inédite où une nouvelle forme de production doit être mise en place. Il laisse également entrevoir le système d'interdépendances autour de la construction de la connaissance et l'effort de sélection et d'évaluation de l'information : il existe une forme de reconnaissance de statut (demander conseil aux anciens et au SEDARB) afin de s'incorporer efficacement au milieu et d'obtenir des conseils pertinents qui viennent d'une autorité épistémique ou de viticulteurs qui, s'ils ne bénéficient pas forcement d'un statut particulier, ont une relation privilégiée avec eux.

Dans notre cas d'étude, nous avons fait la distinction entre les échanges relatifs à la résolution de situations problématiques liées à la production et les discussions plus générales sur la profession, dans un contexte d'une réflexivité sur le métier liée notamment aux aspects environnementaux.

Le réseau de discussion professionnelle présente une densité trois fois plus élevée (15,7%) que celle des échanges de conseil technique avec seulement un acteur isolé.

Pour explorer la question de l'imbrication ou séparation des sphères technique et identitaire de manière quantitative sur l 'ensemble du milieu, nous faisons le chevauchement des deux réseaux. Nous constatons que parmi les 214 liens dirigés présents dans le réseau de conseil, 207 sont accompagnés d'un lien dirigé dans le même sens dans le réseau de discussion professionnelle, ce qui représente un chevauchement de 97% des liens de conseil technique avec ceux de discussion professionnelle. Cette observation confirme l'idée présentée par Lémery (2011) selon laquelle les discussions professionnelles dans le milieu agricole agissent comme un support, comme une toile de fond sur laquelle se produisent l'échange et la construction collective de l'information permettant la prise de décisions techniques liées aux tâches de production.

Nous retrouvons cet aspect général du milieu dans le récit des viticulteurs qui mettent en avant l'aspect identitaire accompagnant l’exercice de tri d'information, et le besoin de personnaliser les relations pour s'assurer de la pertinence des informations récoltées.

On se rencontre entre viticulteurs selon les affinités, et on échange des conseils en bio et en biodynamie. Certains en Bourgogne ont une solide expérience, mais il y a beaucoup de discours et de réponses faciles. Certains essaient seulement de se vendre, alors que d'autres veulent vraiment travailler différemment, ils sont sincères et ont envie que les gens autour d'eux adhèrent. Pour tenir compte des conseils d'un viticulteur, je dois lui faire confiance, il faut qu'il s'agisse d'un ami, comme ça je suis sûr qu'il dira vraiment ce qu'il fait et ce qu'il pense. Je me souviens d'une conversation avec un viticulteur qui était vraiment dans les vignes, il parlait de la grêle et ça sentait le vécu. Le monde viticole est petit et le discours de quelqu'un peut être différent de ce qu'il fait. J'aime aller voir les vignes et goûter le vin. (Viticulteur 69, en conversion)

Ce qui montre ce viticulteur est la multiplexité de ressources qui sont en jeu dans le partage d'avis techniques. L'amitié, la confiance et une identité commun lié aux affinités professionnels sont des éléments qui sont prises en compte par les acteurs. Ainsi, l'échange purement professionnel, sans une personnalisation des relations est très improbable dans le cas des viticulteurs.

Il ne s'agit pas uniquement d'écouter l'avis d'un collègue lambda, mais de dévoiler des secrets. Ces expériences montrent aussi que la

Outline

Documents relatifs