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L’ UNIFICATION DE L AGOS ET DU P ROTECTORAT DU SUD DU N IGERIA , 1905-

Dans le document La notion d'Indirect rule (Page 87-91)

Egerton fut nommé haut-commissaire du protectorat du Nigeria du Sud alors qu’il était déjà gouverneur de Lagos. Il occupa les deux fonctions jusqu’au 28 février 1906, date à laquelle les deux colonies furent formellement unifiées et rebaptisées colonie et protectorat du Nigeria du Sud, avec Walter Egerton pour haut-commissaire jusqu'en 1912. La capitale devint Lagos. Dans le nouveau protectorat, l'ancienne colonie de Lagos devint la province de l'ouest, et l'ancien protectorat du Nigeria du Sud fut divisé en une province centrale avec pour capitale Warri et une province de l'est avec pour capitale Calabar. Le protectorat du sud du Nigeria était deux fois moins important que celui du nord, avec une superficie de seulement 206 888 km². Toutefois, il était très peuplé, avec une population estimée à 7 855 749 habitants en 1911.

§1. L

A PROPOSITION D

’E

GERTON POUR L

UNIFICATION

Egerton déposa le 29 janvier 1905 sa proposition afin d’unifier le protectorat du sud du Nigeria145. Toutefois, il n’envisageait pas une fusion complète, en raison des différentes

méthodes d’administration déjà en place. En effet, l’administration de Lagos correspondait à celle d’une colonie, tandis que celle du protectorat du sud était davantage caractéristique d’un protectorat. La région de Lagos était centrée sur la ville de Lagos, qui en était le centre administratif, économique, et des communications. A l’inverse le protectorat ne possédait pas de capitale centrale de la sorte. Calabar n’était que l’un des huit petits ports que comptait le protectorat, il ne possédait qu’un petit secrétariat, pas de legislative council, pas de réseau ferroviaire, et peu de Nigérians éduqués à l’occidentale. En revanche, l’administration provinciale était plus développée que dans la province de Lagos, de même que les native

councils et les natives courts, surveillés par des administrateurs, ce qui les différenciaient des

états quasi-indépendants du Yorubaland. Il choisit donc Lagos comme capitale de son protectorat unifié. Il souhaitait que la législature, de même que le budget, demeurent séparés. S’il était à la fois gouverneur et haut-commissaire, deux secrétaires travaillaient sous ses ordres, le premier à Lagos, le second à Calabar. Il proposait également de diviser le nouveau

145 NICOLSON, I. F., The Administration of Nigeria, 1900–1960: men, methods and myths, Oxford: Clarendon Press, 1969, p. 100

protectorat en trois provinces, ce qui aurait permis la nomination de trois provincial

commissioners, des officiers bien payés et expérimentés auxquels il aurait pu déléguer

nombre de missions.

La réponse du Colonial Office à son rapport ne fut émise que le 12 janvier 1906, soit près d’un an plus tard. Elle différait des propositions d’Egerton, mais principalement sur des détails mineurs. Chaque province avait un provincial commissioner, avec un assistant. L’homme à la tête du secrétariat fut nommé lieutenant-governor et colonial secretary. De plus, un financial officer fut désigné, ainsi qu’un commerce intelligence officer. Les représentants départementaux de chaque province étaient responsables vis-à-vis du provincial

commissioner. Les capitales de chaque province furent déplacées dans les terres, à Ibadan

pour l’ouest, à Benin pour le moyen-ouest, et à Calabar pour l’est. Les pouvoirs du Lagos

Legislative Council furent étendus à l’ensemble de la colonie. Le sud, grâce à son activité

commerciale, n’était pas dépendant de la taxation directe comme le Nord.

§2. C

ONSEQUENCES DU DEPART DE

L

UGARD

En septembre 1906, lors du départ de Lugard, Egerton demanda au Colonial Office le rattachement au protectorat du sud du Nigeria des provinces d’Ilorin et de Kabba146.

Toutefois, cette demande fut rejetée en raison du maintien par Lugard du règne des Fulanis dans cette région, ainsi que par la mise en place de la taxation directe sur laquelle il aurait été difficile de revenir. De plus, suite aux écrits de Lugard, l’idée était à présent répandue que les Fulanis étaient supérieurs militairement et politiquement aux Yorubas, en dépit des efforts de MacGreggor et de Moor pour démontrer le contraire. L’opinion que les Britanniques se faisaient des Nigérians était comparable à celle qu’ils avaient des Indiens : les musulmans éduqués au Nord, les peuples primitifs repoussés au sud du pays. Toutefois, cette supériorité des Fulanis sur les Yorubas, si elle était bien acceptée par le Colonial Office, ne signifiait pas pour autant à leurs yeux la supériorité de l’administration du nord du Nigeria sur celle du sud. De la coopération était attendue de la part des deux parties, notamment sur la question du réseau ferroviaire. Lugard étant considéré comme un obstacle à la coopération, son départ était attendu afin de tenter d’unifier le pays. Mais en 1906, Egerton était déjà aux prises avec l’unification du sud, et ajouter l’unification avec le Nord n’aurait pas été possible.

146 NICOLSON, I. F., The Administration of Nigeria, 1900–1960: men, methods and myths, Oxford: Clarendon Press, 1969, p. 105

§3. L

A POLITIQUE D

’E

GERTON AU

N

IGERIA DU

S

UD

Après avoir défini son système administratif, Egerton s’évertua à développer les moyens de communication au sud du Nigeria, ainsi qu’à favoriser le commerce.

A. L’

ADMINISTRATION

L’approche d’Egerton consistait à développer les avantages matériels pour les gens, ainsi qu’à répandre la civilisation147. Pour lui, l’amélioration morale viendrait avec le confort

matériel. Cette vision s’opposait à celle de Lugard, pour qui le confort matériel était l’affaire des commerçants, en parallèle à l’action du gouvernement.

De même, concernant les punitions corporelles, Egerton s’opposait à Lugard, en effet, alors qu’en 1906, dans son Political Memoranda, le second recommandait d’être plus sévère, Egerton signifiait lui sa désapprobation face à ce type de condamnation.

Chaque année, Egerton émit un rapport dans lequel il nota le rapide progrès d’ouverture du pays. Il espérait qu’après quelques années d’assistance, les native councils seraient capables d’assumer par eux-mêmes les fonctions de gouvernement local, libérant du temps pour les gouverneurs afin qu’ils se consacrent à des tâches plus globales.

Dans l’hypothèse d’une unification, Egerton prévoyait d’adopter le code pénal indien, ainsi que d’unifier les administrations du sud, qui étaient très variées, allant de l’Etat quasi indépendant d’Egbas aux House rule rudimentaires. En effet, il estimait qu’il était nécessaire de mettre en place une loi suffisamment claire afin de régler la relation du gouvernement central avec les gouvernements locaux.

B. L

ES MOYENS DE COMMUNICATION

Concernant les communications, le contraste entre la politique d’Egerton et celle de Lugard est particulièrement marqué148. Egerton créa la première route automobile entre

Ibandan et Oyo, et favorisa l’utilisation de bus. Le développement du réseau routier fut conséquent également dans la région de Lagos. Le réseau ferroviaire de Lagos atteignit Oshogbo en 1907, et Ilorin, dans le protectorat du Nigeria du Nord, en août 1908.

147 NICOLSON, I. F., The Administration of Nigeria, 1900–1960: men, methods and myths, Oxford:

Clarendon Press, 1969, p. 107

148 NICOLSON, I. F., The Administration of Nigeria, 1900–1960: men, methods and myths, Oxford:

Le port de Lagos fut également le théâtre de nombreux travaux visant à son amélioration, mais les travaux furent retardés en raison de leur coût et du peu d’argent disponible.

C. L

E COMMERCE

Commercialement, le café et le coton, qui étaient les richesses initialement convoitées par les Britanniques au Nigeria, se révélèrent être des échecs149. En revanche, la recherche de minéraux révéla des sources potentielles d’enrichissement, tels que des gisements de charbon brun et le lignite d’Asaban, de l’or à Ilesha, et du charbon à Udi, du plomb et du zinc furent également découverts à Abakiliki, ainsi que des gisements calcaires utilisables pour le ciment. Du pétrole et des gaz naturels en quantité furent également trouvés. Malheureusement, le pétrole se révéla être très épais, et de fait impossible à commercialiser. Les recherches concernant le pétrole au Nigeria furent par la suite arrêtées par Lugard.

En dépit des velléités de changements des successeurs de Lugard, l’Indirect rule demeura le système de gouvernement du nord du Nigeria. Le sud du pays avait continué à opter pour un autre mode d’administration. Cependant, en 1912, le Colonial Office souhaitait unifier le Nigeria et décida de rappeler Lugard afin de réaliser cette mission. Il convient donc de s’intéresser à la réaction de Lugard à son retour au Nigeria vis-à-vis des quelques modifications survenues au nord du pays, ainsi qu’à la façon dont il compte unifier le Nigeria.

149 NICOLSON, I. F., The Administration of Nigeria, 1900–1960: men, methods and myths, Oxford:

Chapitre III -

Dans le document La notion d'Indirect rule (Page 87-91)