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Une présence grandissante des accords d’intégration économique

LES ORIGINES DE L’ADAPTATION CONSTITUTIONNELLE SUD- SUD-AMERICAINE AU DROIT INTERNATIONAL

A. Une présence grandissante des accords d’intégration économique

Une fois que le régionalisme ouvert fut lancé au sein des Etats de l’Amérique du Sud, de nombreux accords virent le jour. La CEPAL a identifié trois types d’accords destinés à libéraliser le commerce : le premier est consacré aux accords d’intégration subrégionale tels que l’accord de Cartagena, la communauté du caraïbe et le Mercosur, le deuxième concerne les accords bilatéraux conclus entre les Etats que ce soit dans le cadre d’un Traité de coopération tel que l’ALADI ou pas ; et le troisième est relatif aux engagements de libéralisation de commerce souscrits par des groupes d’Etats, tels que ceux conclus entre les membres de la communauté des Caraïbes et le Venezuela ou encore entre les pays centraméricains et la Colombie.

Miguel Izam, précise que l’élément commun de ces accords est une exonération douanière sur une liste de produits dont l’objectif sera sa libéralisation grâce à l’abattement ou la réduction des taxes qui sont habituellement imposés à ce genre des produits et qui seront toujours en vigueur pour les Etats tiers117.

Bien que tous ces accords participent activement à la consolidation de relations entre les Etats, la nature des accords bilatéraux qui se limitent à encadrer les taxes douanières de certains produits et n’envisagent pas l’adoption, même lointaine, de taxes externes communes ne s’avèrent pas déterminants pour la construction d’une intégration régionale. Cela fut compris par les Etats, qui depuis les années soixante, essaient d’adopter une vision régionale ; cependant, il est vrai qu’en Amérique du Sud, l’intégration subrégionale a eu jusqu’à présent davantage de succès. Alberto Van Klaveren justifie ceci en affirmant qu’à différence des intégrations régionales, les intégrations

117 IZAM Miguel, “ Análisis comparativo de algunos acuerdos de integración latinoamericanos”. Santiago de Chile, CEPAL. 1993. P. 172

72 subrégionales sont plus homogènes et cohésives, « les nouvelles initiatives- d’intégration- sont

étroitement liées aux politiques de réforme structurelle et d’ouverture au commerce ainsi qu’à l’investissement international, et pour cela elles prévoient la création de zones de libre commerce et des marchés communs ainsi que l’adoption de mécanismes de coordination économique. Ces mesures ont été adoptées par des organismes traditionnels tels que le pacte Andin et le Marché Commun Centroaméricain ainsi que pour des nouvelles structures telles que le Mercosur »118. Effectivement, dans le processus d’intégration régionale de l’Amérique du Sud, il y a eu deux grandes tentatives pour aller au-delà d’une simple exonération douanière et réussir une intégration régionale. La première, le Pacte Andin connu également comme l’accord de carthagène qui fut créé en mai 1969 avec l’objectif d’instaurer une union douanière entre ses Etats membres. Durant les premières années, ce pacte fut considéré comme le processus d’intégration le plus avancé en Amérique Latine, car il fut conçu avec un schéma institutionnel très proche de l’ancienne Communauté Européenne. Hélas, les contradictions entre les efforts de consolidation de l’intégration régionale et l’adoption de politiques plus flexibles que les engagements des états membres du Pacte dans le cadre des négociations bilatérales avec des états tiers ont eu raison de l’objectif majeur de l’accord de Carthagène et ont donné lieu à un éloignement progressif des Etats membres. Ainsi, par exemple, la Colombie et le Venezuela, dans un premier temps, ont préféré conclure un accord de libre commerce bilatéral en dehors du Pacte Andin. Puis, ils se sont associés au Mexique pour créer le groupe des trois119. Le Pérou et l’Equateur ont dû faire face à un conflit frontalier ce qui les a profondément éloigné du pacte Andin et la Bolivie a préféré concentrer ses efforts commerciaux avec le Brésil et l’Argentine dans le cadre d’un plus récent accord d’intégration régionale : le Mercosur.

Le Mercosur créé avec le Traité d’Asuncion en 1991, à l’égal du Pacte Andin, avait pour objectif de faciliter le libre commerce entre ses membres avec la création d’une union douanière qui était censée se transformer progressivement en un marché commun pour s’ouvrir une véritable place dans le marché mondial économique. Initialement, il était composé par quatre Etats

sud-118 VAN KLAVERE Alberto, “América latina: hacia un regionalismo abierto”. Estudios internacionales, Ano 25, No. 100, Numero especial Octubre-Diciembre 1992. Chile. P. 71.

73 Américains : l’Argentine, le Brésil, le Paraguay et l’Uruguay. En 2012, le Venezuela fut intégré puis cinq autres Etats furent associés : le Chili, la Colombie, La Bolivie, le Pérou et l’Equateur. Bien que son objectif principal soit loin d’être achevé, -d’ailleurs, nombreux sont ceux qui surnomment le Mercosur comme « l’union douanière imparfaite »- il constitue l’accord d’intégration régionale le plus abouti de l’Amérique du Sud.

Le premier article du traité d’Asuncion où sont consacrés les objectifs du Mercosur fait apparaître la différence entre le Mercosur et les autres processus d’intégration régionale. Parmi ces objectifs, se trouve la libre circulation des biens, services et facteurs productifs entre les pays. Il prévoit également l’adoption d’une taxe commune externe, une politique commerciale commune et une harmonisation de la législation des Etats parties. D’après cet article, le Mercosur ne se limite pas à un accord économique, il s’agit d’un véritable traité d’intégration, au même sens que le Traité de Rome de 1957.

Conscients de l’impact de cette intégration, les Etats parties ont prévu une période de transition jusqu’au 31 décembre 1994. Pendant cette période, il fallait faire évoluer l’union douanière en marché commun et pour cela une structure institutionnelle fut créée et composé par un Conseil du Marché commun, le Groupe Marché Commun, la Commission de Commerce du Mercosur, le Secrétariat administratif du Mercosur, la Commission parlementaire et le forum économique et social à caractère consultatif.

Le premier obstacle rencontré par le Mercosur fut l’application de ses normes. Le Mercosur a choisi le principe d’application simultanée, comme condition sine qua non à l’entrée en vigueur de la norme dans l’ordre interne de chaque Etat. Hélas, l’asymétrie constitutionnelle des Etats parties n’a pas facilité cette application car au sein de chaque Etat le processus d’approbation et ratification du droit dérivé du Mercosur est sensiblement différent.

Le deuxième obstacle fut la résolution des conflits. En effet, dans un premier temps le Mercosur avait prévu la conciliation comme seul moyen pour résoudre les conflits. Or ce système s’est avéré rapidement insuffisant. Face à cet échec, le Mercosur a créé des Tribunaux arbitraux qui ont apporté un peu de sécurité juridique.

74 Le dernier obstacle du Mercosur fut la période de transition instaurée en principe pour quatre ans, car à ce jour elle est toujours en vigueur. Dès lors, le Mercosur n’a pas encore réussi à transformer l’union douanière en marché commun.

Ainsi, malgré la présence grandissante d’accords d’intégration économique dans le cadre des politiques d’un régionalisme ouvert, nous pouvons constater que l’intégration régionale n’a pas été un processus simple en Amérique du Sud et il semble qu’une des causes de ces échecs soit la limitation des accords à un champ exclusivement économique, ce qui implique d’exclure des accords de véritables politiques de solidarité et d’harmonisation.

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