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DEUXIÈME CHAPITRE: CADRE CONCEPTUEL

1.5 Un design opératoire, la modélisation et la triangulation

d’opérationnalisation entre les savoirs pratique, praxique, stratégique et appliqué, intégrant le savoir-savoir, le savoir-faire et le savoir-être dans une situation éducative. À partir de construits fondamentaux dits cognitifs, peut s’édifier un savoir scientifique et ainsi amorcer une recherche à caractère scientifique (Lenoir, 1991; Van der Maren, 2004). Plus spécifiquement pour notre recherche visant l’objectivation du concept de démarche artistique, il est approprié de penser que le savoir pratique et le savoir praxique (ou la praxis) déjà acquis, servent à élaborer un savoir de type stratégique dans la voie de rapprochement des savoirs appliqués et scientifiques. Cette appréhension de la recherche scientifique, voire le processus d’objectivation, n’est pas familier à la recherche-création et est davantage utilisé dans la recherche en éducation. Ce rapprochement se veut dialectique pour l’objet de notre recherche, et se doit de rencontrer les fondements de la connaissance. Pour mieux saisir les composantes d’un processus d’objectivation développées dans ce chapitre, il est projeté de modéliser l’objectivation de notre démarche de recherche.

1.5 Un design opératoire, la modélisation et la triangulation

La représentation du processus d’objectivation contenant les construits à travers une modélisation rencontre le design opératoire très connu qu’est celui de la triangulation de Le Moigne (1977), la modélisation de l’objet par triangulation (Cf. figure 1), déjà introduite.

La modélisation est de plus en plus utilisée dans la recherche scientifique pour objectiver la recherche en éducation, les pratiques d’enseignement et regrouper les construits qui les structurent. Cependant, selon Bru (2002a), face à la recherche scientifique qui tente de théoriser et en amont de figer les pratiques, il faut veiller à «travailler à la construction de modèles de la pratique susceptibles de fournir un cadre de lecture des pratiques enseignantes» (p. 68) et ainsi travailler, selon Lenoir et Vanhulle (2006), «[…] dans une visée heuristique la production d’une théorie de la pratique enseignante» (p. 210). Schutz (1987), renforce l’importance de modéliser l’action pour l’avancement de la recherche scientifique en éducation. C’est valable selon Bru (1998, 2002), et repris par

Lenoir et Vanhulle (2006), de modéliser la pratique dans l’idée «de produire des modèles de la pratique, à visée descriptive, compréhensive et explicative» (p. 210). De plus, selon Bressoux (2001), «[…] une connaissance scientifique ne peut se limiter à une description de la pratique; il faut qu’elle parvienne à en dégager les principes organisateurs» (p. 43), d’où l’importance d’un cadre théorique ou cadre conceptuel, qui appuie fortement la démarche. Nous rejoignons Develay (1998), qui réfléchit «sur la démarche de preuve en éducation et indique cette possibilité de réalisation dans cette triangulation permanente des valeurs, des concepts empruntés à des disciplines d’appoint et des outils qui permettent de rendre opératoire l’action» (p. 77).

La modélisation de l’objet à définir par triangulation, telle qu’introduite par Le Moigne (1977) dans la figure 1, préconise son effectuation à partir des pôles ontologique (ce que l’objet est), fonctionnel (ce que l’objet fait) et génétique (ce que l’objet devient). Plus concrètement, le processus d’objectivation s’engage à travers des situations authentiques d’apprentissage où les apprenantes et les apprenants sont actifs dans leurs démarches; ces dernières se structurant et évoluant dans l’action et la réflexion. Plus spécifiquement, au regard de l’orientation de notre recherche, comment le concept de démarche artistique ancrée dans le travail de la création, son élaboration et son articulation, peut-il se définir à travers ce qu’il est, ce qu’il fait et ce qu’il devient, cela dans le contexte de formation qu’est le projet de création que des étudiantes et étudiantes doivent réaliser? Est-ce la question adéquate à se poser pour effectuer la triangulation de l’objet à définir et l’exercice d’une objectivation?

Nous reprenons le modèle de formation selon Fabre (1994), déjà introduit par le schéma 1, qui présente les logiques psychologique (développement personnel), sociale (situation socioprofessionnelle) et didactique (contenus et méthodes). Entre ces logiques se positionnent les trois types de formation, dites professionnelle, didactique et psychosociologique. L’objet de notre recherche – comme déjà indiqué – est orienté vers l’idée que ces trois logiques soient articulées et puissent représenter la formation universitaire “idéale”. La formation professionnelle se situe entre la logique didactique et la

logique sociale, et présente un problème d’articulation entre les contenus et les méthodes et l’adaptation socioprofessionnelle, en affichant au centre le concept d’apprentissage. Pour sa part, la formation didactique se situant entre la logique didactique et la logique psychologique, présente le problème d’articulation des contenus et méthodes et du développement personnel, et affiche au centre l’instruction. Quant à la formation psychosociologique, elle se situe entre la logique psychologique et la logique sociale. Elle présente un problème d’articulation entre le développement personnel et l’adaptation socioprofessionnelle, et affiche au centre le concept d’éducation. Dans le schéma 1, les concepts d’apprentissage, d’instruction et d’éducation sont concentrés sur les côtés et convergent par la simulation de lignes vers le centre du triangle. Ces lignes créent le carrefour de la dynamique de la pédagogie, selon la logique dominante.

Plus précisément, au carrefour des logiques au centre du triangle, se joue le phénomène de triangulation déterminé par la logique dominante et, conséquemment, la position de l’objet à définir. Nous cherchons à mieux saisir les tenants et aboutissants de l’objectivation du concept de démarche artistique, qui implique trois points de vue.

Dans ce processus d’objectivation d’une réalité, il est intéressant de voir le concept de démarche artistique comme un concept intégrateur qui, selon Develay (1992), représente les concepts intégrateurs des contenus d’un enseignement en une structure cohérente. Plus précisément, «l’identification des concepts intégrateurs d’une discipline à un niveau d’enseignement donné, permet de mettre en cohérence l’ensemble des connaissances à enseigner autour de ce que certains ont nommé parfois le noyau dur d’une discipline» (Ibid., p. 41). Cette préoccupation majeure pour l’artiste professionnelle enseignante que nous sommes, à vouloir définir des concepts dans le but de donner du sens à la pratique d’enseignement, conduit à une réflexion transversale développée plus loin. La modélisation de notre démarche de recherche et son objectivation sont présentées accompagnées des variables qui gravitent autour de l’objet de notre recherche.

Comme chercheure, nous avons déjà initié une réflexion autour de concepts intégrateurs dans le cadre de la maîtrise en arts plastiques, volet éducation, autour d’une pratique artistique de l’in situ avec des étudiantes et des étudiants (Boudreault, 1991a, 1991b), et aussi dans le projet d’implantation du portfolio au CEAV offert à l’UdeS (Boudreault, 2000). Ces pratiques réflexives menant à la définition et à l’articulation de concepts intégrateurs ont permis l’articulation entre la pratique et la théorie, soit la praxis. Cette articulation a permis un enseignement plus riche et cohérent, un savoir stratégique qui fait sens et qui engage en même temps une objectivation de la subjectivité rencontrée dans le champ disciplinaire des arts visuels.

La modélisation par triangulation, déjà introduite (Fabre, 1994; Le Moigne, 1977), est le design opératoire retenu pour modéliser le processus d’objectivation médiatisé de la démarche de notre recherche et celui de la modélisation du concept de démarche artistique.

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