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Après la mise en service des cinq premières « mouches » et surtout après leur succès, plusieurs initiatives sont lancées par d'autres transporteurs dans le but d'établir un service analogue. Le 19 janvier 1865, la commission de surveillance des bateaux à vapeur se réunit sous la présidence de M. Kleitz, ingénieur en chef des ponts et chaussées, pour examiner la demande formée par Salmon et Cie, « à l'effet d'obtenir pour les guêpes n°1 et 2 des permis de navigation pour faire un service d'omnibus dans l'intérieur de Lyon »4. Plus

tard, la compagnie demande des permis d'autorisation pour deux autres bateaux, L’Abeille

n°1 et 2. La commission de surveillance effectue un test sur L'abeille n°25. Elle mesure vingt-huit mètres de long sur quatre de large. Son service s'effectue du pont Napoléon au pont de Serin en passant par le pont Saint-Antoine (cf. illustration 13 p. 41). À la montée, le rapport de la commission note neuf minutes nécessaires au bateau pour remonter les 1

1 Le Sueur, Bernard, La grande batellerie, 150 ans d'histoire de la Compagnie Générale de Navigation,

XIXe-XXe siècle, Conflans-Saint-Honorine, édition des amis du musé de la batellerie 1996, p. 164.

2 A.D.R., « Sous-série 37 J, La Compagnie Générale de Navigation Havre-Paris-Lyon- Marseille », Répertoire numérique établi par Caroline NOAILLES sous la direction de Michel OLLION, conservateur et publié sous la direction de Philippe ROSSET, conservateur général, Directeur des Archives départementales du Rhône Lyon 1998, p. 8

3 Ibid.

4 342 WP 041, Dossier « Compagnie des guêpes ». 5 Ibid.

420 mètres qui séparent la station Napoléon de Saint-Antoine et dix minutes pour parcourir les 1 940 mètres entre Saint-Antoine et Serin. La vitesse du bateau est d'environ 10 km/h1

et il peut contenir 200 passagers au lieu des 100 autorisés sur les cinq premières « mouches ».

La Compagnie des guêpes est en mesure de concurrencer les « mouches », d'autant plus qu'elle ne tarde pas à développer le nombre de ses pontons en même temps que sa flotte. Le 1er février 1865, Salmon et Cie obtiennent le renouvellement des autorisations pour les pontons débarcadères situés sur les bas-ports du quai Saint-Antoine rive gauche de la Saône, sur le quai Saint-Vincent rive gauche également, en amont du pont de la Feuillée et à Vaise en amont du pont du Port mouton, rive droite (cf. illustration 13 p. 41). Plus tard, en mars 1865, elle est autorisée à établir un ponton débarcadère sur la rive droite de la Saône au port de Rochecardon2. Deux mois plus tard, la compagnie s'étend à nouveau en

obtenant l'autorisation de placer d'autres pontons à la Caille et à l’Île Barbe pour étendre le service d'omnibus de Lyon jusqu'à l'île Barbe3, imitant ainsi l'extension de la compagnie

des « mouches » vers un service de banlieue nord. Les informations sur la compagnie des « guêpes » sont peu abondantes dans les archives consultées, les bribes d'informations réunis ne nous renseignent malheureusement pas sur les détails de sa création.

Une autre compagnie, qui elle exploite depuis 1855 un service de transport au moyen de voitures tractées par des chevaux (cf. annexe 9), est amenée à s’intéresser au transport fluvial. Il s'agit de la Compagnie lyonnaise d'omnibus (CLO). Il faut dire que le service des « mouches » porte un coup terrible à la CLO En deux ans, « le succès inattendu de l'entreprise des mouches »4 ruine la ligne de Vaise, exploitée par la CLO Les bateaux

omnibus enlèvent ainsi « à partir de 1863, à la compagnie lyonnaise des omnibus, la plus grande partie de son trafic sur Vaise et sur la banlieue nord de Lyon. Le trafic de Vaise[...] s'est trouvé réduit de 930 000 à 290 000 voyageurs. Cette ligne étant la plus lucrative de toutes celles que la compagnie exploitait, elle se trouve ruinée et hors d'état de continuer son service si la ville ne l'exonère pas d'une partie de sa redevance annuelle »5. Afin de

maintenir tant bien que mal son service d'omnibus, la CLO envisage d'utiliser un service de correspondance de ses voitures entre le quai Saint-Antoine et Vaise puisque les Lyonnais se

1 Pour la première distance: (1, 420 km * 60 min) / 9 min = 9, 46 km/h. Pour la seconde : (1, 940 km * 60 min) / 10 min = 11, 64 km/h. Or (9, 46 + 11, 64) / 2 = 10, 55.

2 342 WP 041, Dossier « Compagnie des guêpes », Lettre du sénateur, le 15 mars 1865. 3 342 WP 041, Dossier « Compagnie des guêpes », Lettre du sénateur, le 15 mai 1865. 4 A.M.L., 925 WP 225, Rapport au conseil municipal, le 21 février 1866.

sont massivement dirigés vers le transport fluvial pour cette ligne.

Elle obtient alors une autorisation en novembre 1863 pour placer trois pontons : au quai Saint-Antoine, à la Feuillé et à Vaise1 (cf. illustration 13 p. 41). L'entreprise n'ayant

aucun matériel destiné à la navigation, elle passe commande auprès de Salmon, « constructeur de machine à Lyon »2. Cependant, en raison de l'urgence qu'il y a de

répondre à la concurrence des « mouches » M. Delahante, gérant de la CLO passe un accord avec Salmon afin de lui faire exploiter le service avec les « guêpes ». Le 9 décembre 1863, Delahante obtient ainsi un arrêté l'autorisant à exploiter provisoirement ce service avec les deux « guêpes » de Salmon. On fait inscrire sur les tambours des deux bateaux à aubes l'inscription : « Correspondance de la compagnie des omnibus »3.

La compagnie des guêpes est le concurrent le plus sérieux des « mouches » mais d'autres entrepreneurs se lancent dans le service de voyageurs dans la traversée de Lyon. Louis Deleste et Joseph Olivier exploitent chacun un service au moyen d'un seul bateau, le

Frelon pour l'un et le Jean Bart pour l'autre qui effectuent un service entre les pontons des

Célestins, de la Feuillé et de Vaise4. Eugène Liand5 et M. Magnard exploitent quant à eux

l'Abeille et le Jacquart. « Le Jacquart appartient au Sieur Magnard, qui a établi[...] sur la Saône, un service d'omnibus qu'il exploitait en vertu d'une autorisation spéciale. L'abeille est un vieux bateau appartenant au sieur Liand entrepreneur de terrassement, qui l'a longtemps utilisé comme remorqueur, pour les transports de sable qu'il faisait sur la Saône ». Magnard et Liant se sont associés pour « exploiter en commun avec leurs deux bateaux l'autorisation obtenue par le Sieur Magniard »6. L'existence de ces services

transparaît lorsque la compagnie des « mouches » passe un accord avec ces particuliers7.

Des entreprises concurrençant le service des mouches se développent ainsi assez rapidement après le succès de Chaize et Plasson. Elles ne sont pas toutes aussi importantes mais sont en tout cas en mesure d'enlever une partie du trafic des « mouches ». Se pose alors la question du rapport qu'entretiennent ces entrepreneurs avec la première compagnie

1 342 WP 041, Dossier « Compagnie des guêpes », rapports des ingénieurs du service spéciale du Rhône, les 24 et 26 novembre 1863.

2 342 WP 041, Dossier « Compagnie des guêpes », Lettre de Salmon, le 27 mars 1864. 3 Ibid.

4 A.M.L., 925 WP 225, Dossier « affaire du Jean Bart ». 5 Parfois orthographié « Lyot ».

6 A.M.L., 925 WP 225, Situation des omnibus par eau au 1er janvier 1866.

7 A.M.L., 342 WP 225, dossiers « L'abeille » et « Le Jacquart ». 925 WP 225, dossier « Affaire du Jean Bart ».

qui a lancé un service intérieur.

B) Les relations des « mouches » avec ces

compagnies

Alors qu'elle exploite avec succès une entreprise de transport dans la traversée de Lyon depuis 1863, la Compagnie des bateaux à vapeur omnibus est concurrencée dès l'année suivante par d'autres entrepreneurs qui voient dans le transport fluvial, et surtout avec l'exemple des « mouches », une entreprise très lucrative. Pour faire face à cette concurrence nouvelle, la société de Chaize et Plasson adopte une stratégie efficace qui lui permet progressivement de contrôler complètement le transport intérieur.