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Selon Houée (1996) cité par Violier (2008, p. 14), le développement local est une démarche globale de mise en mouvement et de synergie des acteurs locaux pour la mise en valeur des ressources humaines et matérielles d‟un territoire donné, en relation négociée avec les centres de décision des ensembles économiques, sociaux et politiques dans lesquels il s‟insère. Il est conçu comme une stratégie de diversification et d‟enrichissement des activités sur un territoire donné à partir de la mobilisation de ses ressources et de ses énergies s‟opposant aux stratégies centralisées d‟aménagement du territoire. Le développement local est donc la souplesse opposée à la rigidité des formes d‟organisation classique (Plet, 2003).

Pour réussir le développement local, il faut tout d‟abord avoir le pouvoir politique et ceci n‟est acquis qu‟avec la maîtrise du territoire (Volle, 2006). D‟après les expériences touristiques étudiées chez les Mapuche du Chili, l‟auteur a constaté qu‟un peuple indigène peut se procurer un développement local si celui-là exerce effectivement une des trois modalités suivantes : participer à la vie politique communale, c‟est-à-dire, réussir à joindre l‟équipe d‟un maire de la municipalité dont le peuple indigène appartient ou fait partie du conseil municipal ; créer des espaces de résistance à l‟intervention de l‟État, ceux-ci pouvant être des espaces politiques comme les organisations politiques indigènes, ou des espaces physiques, c‟est-à-dire des communautés ou des établissements humains qui empêchent l‟avancement des compagnies qui exploitent les ressources de leurs territoires ; ou se constituer en tant que puissance économique, se prendre en charge eux-mêmes, à partir d‟alliances, à travers l‟exploitation des ressources ou en essayant de devenir une destination touristique. Le développement local apparaît alors comme un abandon des grands desseins nationaux et une actualisation des rôles : « à l‟État la lutte contre la crise et la compétition internationale, et aux locaux de gérer les problèmes de la proximité » (Violier, 2008, p. 14).

34 On peut constater que le développement local consiste à cherche des synergies, des réseaux de services et de se voir associer à une idée de bien-être pour la population (François Plet, 2003). La question du développement local se rattache donc à une économie solidaire, flexible, capable de s‟adapter à des données changeantes, de jongler entre le local et le global, entre le court et le long terme, en conjuguant l‟économique, l‟écologique et le social. La question du développement local se rattache ainsi à la notion de développement durable. À partir du concept de développement durable, apparu en contreproposition à la consommation démesurée des matières premières, mais à la faveur de l‟utilisation de technologies qui permettent de diminuer les impacts sur le milieu naturel et la promotion du bien-être humain (Seguí Llinás, 2006), le développement local peut être conçu dans le contexte de vie des peuples indigènes comme le développement qui, produisant suffisamment de bénéfice pour les locaux, évite que ceux-ci transforment l‟environnement grâce au développement de pratiques non-traditionnelles. Le bénéfice peut être d‟ordre économique ou de l‟ordre de la conservation. Dans tous les cas, il s‟agit d‟un développement qui évite la transformation du contexte physique et culturel où les traditions indigènes sont recréées.

Le développement durable est certainement le concept le plus usité au cours de la dernière décennie et, par conséquent, en abusant de son utilisation, il a été dégradé en son sens. Selon Seguí Llinás (2006), le concept s'oppose au consumérisme qui se développe au détriment de la nature, et cherche à créer une conscience collective pour limiter l‟abus et la promotion du bien-être humain grâce à l‟utilisation de technologies qui permettent de réduire l‟impact sur l‟environnement physique, social, ainsi qu‟économique. Pour l‟auteur, tant les impacts que la mise en marche d‟un projet de tourisme produit aux niveaux social, économique et environnemental, représentent des indicateurs qui permettent de déterminer la durabilité du projet. Il s‟agira donc d‟un projet qui aura des impacts environnemental et culturel minimes sur les lieux visités et qui profite directement aux sociétés locales par le biais du financement ou de la participation à des projets de développement local, tout en favorisant une rencontre « authentique » entre les touristes et la société d‟accueil. En revanche, ces projets imaginés dans les pays de l‟hémisphère Nord pour s‟appliquer aux pays du Sud, s‟inscrivent, tout comme le commerce équitable dans un ensemble de discours et de pratiques en provenance des ONG (organisations non-gouvernementales), d‟acteurs du tourisme et du monde de la recherche plaidant pour un développement qui profite aux populations des pays pauvres, voire à la construction d‟un nouvel ordre économique et social (Sacareau, 2001).

35 Pour Aurélie Volle, (2006)16, citée par Lazzarotti (2011, p. 240), le tourisme en soi n‟est ni positif, ni négatif et la problématique des impacts n‟a guère de sens lorsqu‟elle est analysée en dehors de l‟observation et de l‟écoute des acteurs concernés. Par contre, poser le problème en termes de répartition des pouvoirs est plus éclairant. Le tourisme est un outil de développement local si son contrôle demeure aux mains des intéressés. Ainsi, sans ce contrôle, le développement local n‟a pas de signification pour un peuple indigène car il s‟agit de son développement à lui, un développement difficile à concevoir lorsqu‟on n‟est pas membres de sa société. Car les peuples indigènes ne connaissent pas un état de sous- développement à dépasser ou un état de développement à atteindre, ce qui, dans les sociétés modernes, permet d‟exprimer et de comprendre les processus d‟avancement (Acosta et Le Quang, 2009). On peut donc en déduire d‟après Philipe Violier (2008), que le tourisme est instrumentalisé, au sens où « il est utilisé comme levier de développement pour atteindre une finalité autre, la valorisation du lieu, entendue comme l‟accroissement de la valeur accordée par les individus à un lieu. Mais il est dans l‟ordre des choses que les acteurs s‟emparent des objets pour mettre en acte leurs intentions » (Violier, 2008, 24).

En se présentant face au tourisme, non pas comme de personnes pauvres ou exploités, mais plutôt comme les porteurs d‟une relation particulière avec la nature, les peuples indigènes peuvent envisager de se revendiquer comme « les porteurs d‟un modèle de relation culture-

nature qui semblait avoir été dépassé par la séparation qui s‟était imposée entre ces deux éléments depuis les Lumières » (Hiernaux, 2008, p. 143). Dans cet ordre d‟idées, le tourisme a déjà démontré son pouvoir comme facteur d‟intégration des marges territoriales et de valorisation des positions et des atouts autres que ceux exploités par l‟activité dominante du siècle. L‟agriculture, par exemple, a permis l‟enrichissement des régions les plus fertiles. L‟industrie a créé une partie de ses bastions à partir de la présence de ressources. Le tourisme à son tour, a transformé en or le sable des espaces autrefois délaissés (Équipe MIT, 2005). Cependant, la forêt amazonienne est un cas spécial : il y a des ressources, il y a une population, il y a des zones fertiles. Par contre, le tourisme se développe parce que d‟autres formes de développement économique ne peuvent pas y rencontrer de succès.

16

Volle, Aurélie (2006), « Tourisme et développement local en terre mapuche (Chili) : un approche culturelle des territoires », L‟information géographie, vol. 70, n°2 juin 2006, p. 110-115.

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Chapitre 2 : Patrimoine culturel immatériel de l’humanité :

origines, fondements et sauvegarde en Équateur

2.1 L‟origine et les fondements de la Convention sur la sauvegarde du PCI

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