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Les années 1990 : la décennie de l‟ONZAE En 1992, lors de la célébration des 500 ans de la découverte de l‟Amérique par Christophe

VI. Fonds du patrimoine culturel immatériel

1. Bolivie 2 Brésil

4.1.2 Les années 1990 : la décennie de l‟ONZAE En 1992, lors de la célébration des 500 ans de la découverte de l‟Amérique par Christophe

Colomb, l‟OPIP organise une mobilisation indigène jusqu‟à Quito, à plus de 200 km du cœur de la forêt, pour demander au gouvernement la reconnaissance des droits sur leurs territoires ancestraux. Le résultat de cet événement fut la reconnaissance et la légalisation d‟environ un million d‟hectares, 60% du total des territoires demandés, aux peuples indigènes organisés politiquement dans la Province de Pastaza, dont Sápara, Shiwiar, Kichwa, Andoa et Achuar. Le territoire non octroyé, 40% du total demandé, représentait l‟espace frontalier de sécurité nationale qui avait été mis en place à cause de la guerre contre le Pérou en 1941 sous le titre de „Franja de Seguridad‟.

Le gouvernement reconnut 251.503 hectares aux Sápara, ceux qui étaient jusqu‟alors regroupés dans l‟AIEPRA, sous la dénomination « Titulo de asentamiento tradicional Zaparo ». En 1994, ils s‟éloignent de l‟AIEPRA et créent leur propre organisation politique : l‟ „Unión de centros del territorio Zápara del Ecuador‟ (UCTZE)74

.

74 Première organisation politique Sápara fondée en 1994, deux ans après l‟adjudication de 251.503 hectares que

le gouvernement équatorien a fait aux Sápara, l‟UCTZE regroupait 9 communautés, dont Alto Corrientes, Balsaura, Conambo, Cuyacocha, Imatiño, Pindoyaku, Pumayaku, Torimbo et Shiona.

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108 Par contre, quand le territoire ancestral Kichwa fut reconnu et accordé à cette „Nacionalidad‟ indigène, le gouvernement a considéré que les Sápara regroupés dans l‟OPIP75

, habitant à l‟époque une seule communauté, celle de Llanchamacocha, faisaient partie tant au niveau culturel que territorial du peuple indigène Kichwa Sarayaku. Face à cette situation, les Sápara regroupés dans l‟OPIP ont commencé à développer un processus de rétablissement territorial, culturel et linguistique. Ce processus consistait d‟abord à fonder des communautés, l‟une après l‟autre, car il fallait revendiquer leur présence dans le territoire ainsi que leur identité ethnique devenant visibles aux yeux de l‟État notamment. Ils ont fondé les communautés de Masaramu et de Jandiayaku. En 1997, avec le soutien de l‟OPIP, Bartolo et Gloria Ushigua, fils et fille du dernier chaman Sápara, ont créé une nouvelle organisation indigène, l‟Asociación de la Nacionalidad Zápara de la Provincia de Pastaza (ANAZPPA)76

. À travers cette nouvelle organisation, les Sápara habitant Llanchamacocha, Masaramu et Jandiayaku, commencent à se faire connaître en tant que culture vivante (Bilhaut, 2007, p. 31).

Hors de leur territoire, Gloria et Bartolo Ushigua ont travaillé pendant leurs premières années de résidence à Puyo dans le parc ethnobotanique Omaere. Ce parc est un lieu qui est devenu au fil du temps une référence pour les touristes qui visitent cette ville grâce à la promotion dans les guides touristiques de l‟Équateur, comme celles du Routard et du Petit Futé. Pendant cette période, au fur et mesure qu‟ils rencontraient des étrangers, ils leur faisaient découvrir le processus qu‟eux et les autres habitants des communautés regroupés désormais dans l‟ANAZPPA, développaient pour revitaliser leur culture et leur langue Sápara.

La création de ces deux organisations, l‟ANAZPPA et l‟UCTZE, a permis aux Sápara d‟envisager leur propre vision du développement. En tant que peuple indigène, les Sápara cherchaient non seulement la reconnaissance de droits sur le territoire confondu avec les Kichwa, l‟accès aux services basiques comme la santé et la scolarisation mais aussi d‟influencer les politiques d‟État. Cependant, comme l‟a signalé Bartolo Ushigua, lors d‟un entretien à Puyo en 2010, pour confronter et influencer les politiques d‟État, il fallait que les acteurs politiques indigènes fussent formés au niveau professionnel :

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„Organización de los Pueblos Indígenas de Pastaza‟ (Cf. Annexe H).

76 Depuis sa création, l‟ANAZPPA regroupait et représentait au niveau politique les habitants des communautés

Sápara de Llanchamacocha, Jandiayaku et Masaramu, localisées dans le territoire ancestral Kichwa. L‟ANAZPPA n‟avait pas de reconnaissance juridique, cependant, avec sa création, les Sápara ont notamment engagé le processus de rétablissement de leur langue originale.

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« Avant, le but d‟une organisation indigène était la seule défense du territoire. On ne s‟inquiétait pas de nos droits. Au fil du temps, nous avons enrichi le processus et on a commencé à lutter pour notre éducation, notre santé et notre développement. Nous cherchions à être une organisation forte, qui représente bien nos intérêts. À partir des années 1990, les organisations indigènes sont devenues politiques et, de cette manière, nous avons pu commencer à lutter pour la reforme de l‟État équatorien (…) Dès qu‟on entre dans un plan politique et juridique, il faut que les dirigeants actualisent leurs connaissances. Cela leur permet de comprendre le processus pour ensuite prendre les meilleures décisions au moment de gouverner. Pour gouverner avec connaissance nous commençâmes à étudier un peu plus (…) Dans mon cas, je suis allé en Europe, au pays Basque, grâce à une bourse que le programme des Nations Unies pour les peuples indigènes m‟a accordé. Là- bas, j‟ai appris à avoir une vision internationale des choses, principalement par rapport aux droits humains et au droit international. Quand je suis retourné en Équateur, j‟ai regardé les choses d‟une manière tellement différente. Pour moi, tout était beaucoup plus facile à comprendre. Cette expérience a été suprêmement importante pour moi. Désormais, il est beaucoup plus facile d‟avancer. On n‟a plus peur des politiques rigides de l‟État. Ce qui nous intéresse maintenant, est de mettre en valeur notre vision des choses en tant que nation Sápara » 77.

En 1997, le gouvernement équatorien met en place le programme „Proyecto de desarrollo de

los pueblos indigenas y negros del Ecuador‟ (PRODEPINE)78 . Avec ce projet, le gouvernement cherchait à créer les conditions institutionnelles, juridiques et techniques qu‟il fallait pour que les organisations indigènes et noires formulent et mettent en œuvre leurs propres plans de développement. En 1999, l‟ANAZPPA obtient le soutien financier et logistique du gouvernement à travers le projet PRODEPINE. L‟ANAZPPA devient alors l‟ „Organización de la Nacionalidad Zápara del Ecuador‟ (ONZAE) obtenant la reconnaissance juridique de la part du Ministère de bien-être social. Cela a permis aux communautés Sápara associées à l‟ONZAE de se libérer juridiquement de la domination sociopolitique que le

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Antes las organizaciones éramos solamente para defensa del territorio y ni siquiera de nuestros derechos.

Luego en el camino hemos ido aumentando el proceso para luchar por educación, salud y por el desarrollo y todas esas cosas, y hacer así una organización fuerte y representativa, que tenga su posición firme. Hasta ahí hemos llegado. Ahora desde los años 90, las organizaciones se politizaron. Empezamos a luchar por el tema de la reforma del Estado Ecuatoriano (...) Entonces si entramos en el campo político y de ley, los lideres tienen que actualizar su conocimiento para poder entender el proceso y ver como se va a gobernar. Por eso nosotros empezamos a estudiar un poquito más, para tener conocimiento y dirigir con conocimiento (…) Yo personalmente, me fui a Europa. Me salió una beca con ONU, un programa de naciones unidas para los pueblos indígenas, sobre todo para formar los dirigentes para que tengan una visión internacional, y me forme en derechos humanos y una partecita en derecho internacional, en el país Vasco. Cuando yo regrese, ya mire las cosas de otra manera, mucho mas fácil de entender, eso fue supremamente importante para mi. Ahora es más fácil caminar hacia delante. Nosotros antes nos asustábamos al escuchar unas políticas muy duras pero ahora ya no, somos otras personas. Lo que nos interesa es de posicionar nuestro punto de vista como nación Sápara‟. Extrait d‟un entretien réalisé auprès de Bartolo Ushigua, président de NASE. Puyo, le 19 août 2010 (Cf.

Annexe F.10).

78 Le projet PRODEPINE a été financé par la banque mondiale et le fond monétaire international ce qui a été

compris comme une stratégie néolibérale pour ralentir le processus d‟organisation politique des peuples indigènes.

110 peuple Kichwa de Sarayaku exerçait sur elles jusqu‟alors. L‟ONZAE peut désormais recevoir directement les services et les aides économiques de la part de l‟État.

Selon Maria Augusta Hidalgo (2007), avec Bartolo comme président de l‟ONZAE, cette organisation s‟approche des plus grandes organisations indigènes politiques progressistes du basin amazonien79, dont au niveau national, la „Confederación de nacionalidades indigenas

de Ecuador‟ (CONAIE)80, la „Confederación de nacionalidades indigenas de la Amazonia

Ecuatoriana‟ (CONFENIAE)81, et le „Consejo Nacional de los pueblos y nacionalidades del

Ecuador‟ (CODENPE) 82

; et, au niveau international, la „Coordinadora de las

Organizaciones Indigenas de la Cuenca Amazonica‟ (COICA)83

. Ainsi, le peuple Sápara fut reconnu par ces organisations comme une nation, à savoir, un peuple indigène avec une langue et un territoire propres. Les Sápara ont désormais une représentation permanente dans le conseil de gouvernement de ces organisations. Cette représentation leur permet d‟envisager une nouvelle manière de rétablir tant linguistiquement que culturellement leur peuple, car leurs intérêts et attentes sont dorénavant représentés au niveau de l‟État.

En partenariat avec la CONFENAI, l‟ONZAE commence le développement du projet de récupération de la langue Sápara. En 2000, est créée la „Dirección de Educacion de la

Nacionalidad Sápara del Ecuador‟ (DIENASE) 84 . Cette institution a été reconnue juridiquement en 2000 par le Ministère de l‟Éducation et de la Culture de l‟Équateur ce qui signifie l‟attribution d‟un budget annuel. La création de la DIENAZE permettra aux Sápara d‟envisager pour la première fois, car il n‟existait pas avant les moyens ni les ressources humaines ni financières pour le faire, un processus de scolarisation trilingue

Espagnol/Kichwa/Sápara. Cela fait que cinq communautés regroupées dans l‟ „Organizacion

79 Dans son étude Marìa Augusta Hidalgo „Caracterización socio cultural de la nacionalidad Sápara del

Ecuador NASAPE: Documento para discusión‟ (2007, p. 17), l‟auteur fait un diagnostic sur la vie des habitants

des communautés indigènes de la province de Pastaza face à l‟extraction intensive des ressources. L‟information nécessaire pour la réalisation de cette étude fut recueillie lors des ateliers participatifs développés dans les communautés et à Puyo avec les dirigeants politiques des organisations indigènes.

80 Depuis 1986 la Confederaciñn de Nacionalidades Indìgenas del Ecuador CONAIE, est l‟organisation nationale

qui regroupe les „Nacionalidades‟ et les peuples indigènes de l‟Équateur, en cherchant leur consolidation politique et en luttant pour la reconnissance et le respcet de leur droits humains, l‟accès à l‟éducation et santé, et, notamment, les droits sur leurs territoires (Cf. Annexe H).

81 La „Confederación de Nacionalidades Indigenas de la Amazonie Ecuatoriana‟ (CONFENIAE), est une

organisation qui lutte pour les droits des peuples indigènes en Amazonie (Cf. Annexe H).

82

Organe de l‟État qui assure la participation des peuples indigènes dans le processus du développement social, politique, économique et culturel du pays (Cf. Annexe H).

83 La „Coordinadora de las Organizaciones Indígenas de la Cuenca Amazónica‟ (COICA), est l‟organisation

politique de la région amazonienne la plus importante regroupant toutes les organisations politiques indigènes des 9 pays qui conforment le basin amazonien (Cf. Annexe H).

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de la Nacionalidad Zaparo del Ecuador‟ (ONAZE, ex-UCTZE)85

: Cuyacocha, Pindoyaku, Shiona, Pumayacu et Conambo, s‟associent aussi à l‟ONZAE. Bien que ces communautés fussent évangéliques et métissées, le fait de s‟associer à l‟ONZAE leur a permis de bénéficier du nouveau système d‟éducation Sápara. En effet l‟ONAZE ne comptait à l‟époque aucune école bilingue, et toutes les formations se suivaient en espagnol. Sans territoire propre, l‟ONZAE regroupe à ce moment-là déjà huit communautés Sápara (Figure n°8).

En mai 2001, l‟ONZAE parvient à faire déclarer les « manifestations orales et culturelles des Sápara » comme Chef-d‟œuvre du Patrimoine Oral et Immatériel de l‟Humanité par l‟UNESCO. Cette déclaration a mis le conflit politique et territorial entre l‟ONZAE et l‟ONAZE dans une autre dimension car même si les Sápara regroupés dans de l‟ONZAE avaient désormais une reconnaissance internationale, ils n‟avaient pas encore de territoire propre. Par contre, les Sápara de l‟ONAZE avaient 251.000 hectares mais pas de reconnaissance de l‟UNESCO. Pendant 10 ans, les Sápara de l‟ONZAE tentèrent de s‟approprier le territoire de l‟ONAZE en espérant que ce territoire soit déclaré comme patrimoine corrélativement à la proclamation de l‟UNESCO tandis que les Sápara de l‟ONAZE essayaient de s‟approprier la reconnaissance UNESCO. Toutes leurs démarches administratives sont restées vaines. En tout état de cause, les relations entre les organisations Sápara ont été en effet changeantes et fonction d‟alliances politiques autour des déclarations d‟intentions de paix mais aussi de l‟accès à l‟éducation (Bilhaut, 2007).

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Figure 8 : Situation politique des Sápara dans les années 1990-2000

113 4.1.3 Conséquences de l‟unification politique Sápara La reconnaissance de l‟UNESCO a mis en lumière un processus de rivalité entre l‟ONZAE86

et l‟ONAZE87

par rapport à l‟appropriation politique et culturelle du territoire ancestral Sápara : Celui qui a dressé les habitants d‟un territoire les uns contre les autres, soient ceux de même origine ethnique ou des origines ethniques diverses mais liés directement ou indirectement par des alliances politiques établies au cours des évènements divers (Tableau n°6).

Tableau 6 : Processus d‟organisation politique-territorial Sápara

Période Filiation politique et territoriale

Territoire Kichwa

Asentamiento tradicional Záparo

Franja de Seguridad

Les années 1980 OPIP AIEPRA

1994 UCTZE 1997 ANAZPPA 1999 ONZAE ONAZE 2000 ONZAE - ONAZE 2009 NASE

Source : Réalisation personnelle

Finalement, ce même conflit les a unis dans une lutte contre des adversaires communs : l‟État

et les compagnies pétrolières, empêchant à d‟autres acteurs internes d‟autres rapports de

domination politique. Dans cette dynamique, l‟unification des organisations Sápara a nécessité un compromis qui a mis longtemps à se dessiner. En effet, le problème principal consistait dans le fait que les Sápara de l‟ONAZE, largement majoritaires et avec un territoire

86 Ex-ANAZPPA, L‟ONZAE (Organización de la Nacionalidad Zapara del Ecuador), fut fondée en 1999

grâce au soutien de PRODEPINE et la reconnaissance juridique du ministère de bienêtre social. Filiale de la CONAIE, la CONFENAIE, le CODENPE et la COICA, en 2000, à partir de la DIENAZE, l‟ONZAE renforce le projet de récupération de la langue Sápara. En 2001, cet organisme parvient également à faire déclarer les « manifestations orales et culturelles des Sápara » comme Chef-d‟œuvre du Patrimoine Oral et Immatériel de l‟Humanité par l‟UNESCO.

87 Ex-UCTZE, l‟ONAZE (Organización de la Nacionalidad Zaparo del Ecuador), fut créée grâce à l‟accord

ministériel 1023 de du CEDENPE en 1996. Cette organisation a été longtemps sous l‟influence évangélique à l‟écart des organisations politiques nationales, régionales et internationales. L‟ONAZE était constituée à partir de la création administrative d‟un territoire indigène de 251.000 hectares, le „Titulo de asentamiento tradicional

114 légalisé, ne souhaitaient pas que les Sápara de l‟ONZAE aient des postes importants dans une éventuelle nouvelle organisation. Ils ont décidé que si l‟on unifiait l‟ONAZE et l‟ONZAE, Bartolo Ushigua deviendrait président de la nouvelle organisation mais il sera le seul dirigeant de l‟ONZAE à en faire partie.

L‟unification de l‟ONAZE et l‟ONZAE a été finalement réalisée en 2009 pour former la „Nacionalidad Sápara del Ecuador‟ (NASE)88

. Basée à Puyo, Capitale de la Province de Pastaza, la NASE fonctionne selon quatre niveaux. Le premier niveau est le congrès formé par des représentants de toutes les communautés Sápara. Il est considéré comme la principale autorité de la nationalité. Au deuxième niveau, on trouve l‟Assemblée générale constituée par le Conseil de gouvernement et les dirigeants politiques de chaque communauté. L‟assemblée générale étudie les rapports d‟activités et les projets envisagés par la NASE, fait de réclamations aux dirigeants politiques et, si nécessaire, peut les démettre de leurs fonctions. Le troisième niveau est le Conseil de gouvernement constitué par le président et le vice- président. Élus tous les quatre ans, ils dirigent et contrôlent toutes les activités administratives et financières de la nationalité. Le quatrième niveau regroupe les commissions spéciales de territoire, éducation, santé, femmes et communications. D‟après mes observations, la commission du territoire était chargée de résoudre les conflits frontaliers et de conduire le processus de légalisation ; celle de l‟éducation, s‟occupant d‟instaurer l‟éducation trilingue Sápara/Kichwa/Espagnol et de chercher ou créer des outils pour y réussir ; celle de la santé, devait mettre en valeur les connaissances de la médicine traditionnelle locale en se réappropriant la médicine occidentale ; celle des femmes, chargée de défendre les droits de femmes et de mettre en valeur leur place face à une société traditionnellement masculine ; et celle des communications, chargée d‟assurer la transmission de toute sorte de messages entre les communautés Sápara et entre celles-ci et la NASE. Il y avait d‟autres personnes qui travaillaient à la NASE. Une secrétaire et un économiste notamment. Il y avait aussi une autre commission importante, celle chargée de conduire le programme „Socio Bosque‟.

La création de la NASE a entraîné des conséquences importantes car des nouvelles formes de domination à grande influence politique ont vu le jour. D‟un côté, Gloria Ushigua, la sœur de Bartolo, très active, qui assure être la responsable de l‟unification des deux organisations Sápara :

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« J‟ai dit à Luis Armas, qui était à l‟époque le président de l‟autre organisation Sápara, qu‟il fallait qu‟on trouve une solution, car il ne prenait pas sérieusement les paroles de mon frère Bartolo ni celles de mon autre frère Felipe par rapport au besoin d‟unifier nos organisations. Je lui ai dit que pour cela il fallait parler, lui en tant qu‟homme et moi en tant que femme, sans aucun document à signer mais en soutenant nos paroles » 89.

Gloria, qui aurait bien aimé être dans la direction de NASE, crée donc une nouvelle organisation indépendante : l‟association des femmes Sápara. Gloria et d‟autres membres de l‟organisation des femmes Sápara signalent leur désaccord avec cette décision politique, car pour elles, c‟est aussi Gloria qui a réussi l‟unification :

« C‟est Gloria qui a permis que les Sápara soient aujourd‟hui regroupés dans une seule organisation. S‟ils peuvent se déplacer librement dans leur territoire, c‟est grâce à cette seule femme »90

.

D‟un autre côté, certains ex-dirigeants ou membres de l‟ONAZE, notamment ceux d‟origine ethnique Achuar, liés par mariage interethnique aux Sápara et habitant notamment la communauté de Conambo depuis longtemps, avaient des difficultés à s‟assurer une place dans la nouvelle organisation Sápara sortie de l‟unification. Ils se sont donc déplacés et ont fondé de nouvelles communautés. En même temps, ils cherchaient à tenir la „Junta Parroquial Rio

Tigre‟ (JPRT)91. En effet, cette institution territoriale de l‟État leur permettrait de maintenir le

pouvoir sur les nouvelles communautés fondées par eux-mêmes et de chercher la domination sur d‟autres auparavant établies, mais toujours à l‟écart de l‟idée d‟une unification territoriale

89 „Le dije a Luis Armas que era el presidente de la organización, que debíamos encontrar una solución. El no

tomaba en serio a mi hermano Bartolo ni a mi otro hermano Felipe en su idea de unificar. Yo le dije que teníamos que hablar, sin firmar documentos, el como un hombre y yo como una mujer, solo manteniendo nuestra palabra‟. Extrait d‟un entretien réalisé auprès de Gloria Ushigua. Puyo, le 6 septembre 2010 (Cf.

Annexe F.12).

90 „Fue Gloria la que logro que los Sápara estén hoy unidos en una sola organización. Si hay un libre

movimiento en el territorio es solo gracias a esta mujer‟. Extrait d‟un entretien réalisé auprès de Rosa Dagua,

l‟une des dirigeantes de l‟organisation de femmes Sápara d‟Équateur. Puyo, le 6 septembre 2010 (Cf. Annexe F.12).

91 La „Junta Parroquial‟ exerce un pouvoir sur une zone rurale qui renferme des communautés d‟origine

ethnique divers où plusieurs territoires ancestraux sont concernés. Le représentant ou président de la „Junta

Parroquiale‟ est élu par vote populaire. Il doit suivre les attributions et responsabilités déterminées par la loi et

en concordance avec les gouvernements du canton et de la province (Art. 255). L‟élu doit notamment assurer la construction et l‟entretien des infrastructures physiques, des équipements et des espaces publics dans une zone déterminée pour la Parroquia. Il doit aussi organiser et promouvoir le développement des activités de production

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