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Un nouveau regard du territoire Sápara Ce réseau de communautés a commencé à se consolider quand les habitants du territoire

VI. Fonds du patrimoine culturel immatériel

1. Bolivie 2 Brésil

4.2.2 Un nouveau regard du territoire Sápara Ce réseau de communautés a commencé à se consolider quand les habitants du territoire

Sápara affectés par les projets d‟exploration et d‟exploitation pétrolière, se sont rendus compte que la capacité d‟influer sur la politique pétrolière ne dépendait pas seulement du degré d‟organisation politique (Fontaine, 2003), mais du fait d‟être présent sur les lieux envisagés par les compagnies pétrolières. Par conséquent, ils se sont dispersés le long de leur territoire. Dans cette dynamique, la première communauté Sápara fondée à cause de l‟arrivée de l‟industrie pétrolière a été celle de Conambo. Cette communauté fut fondée au début des années 1970, quand quelques familles Achuar et Kichwa se sont regroupées autour de la première piste d‟atterrissage que la compagnie Western a construite dans le territoire Sápara. Ce sont les opportunités d‟emplois et d‟accès à l‟argent apportées par cette compagnie pétrolière qui a produit ce déplacement. L‟arrivée de nouveaux habitants dans le territoire

95 Cf. Annexe H. 96

Par rapport aux ensembles sociaux, voir Descola Ph, Les lances du crépuscule. Avec les indiens Jivaros de

120 Sápara a produit des changements importants au niveau socioculturel liés au métissage mais notamment, comme le souligne Carlos Duche, à l‟évolution identitaire :

« L‟arrivée des compagnies pétrolières a produit des changements importants dans la vie des habitants de la région amazonienne de l‟Équateur. Par exemple, quand j‟étais un gamin, la compagnie Western s‟est installée chez les Sápara. J‟ai travaillé avec cette compagnie. Son arrivée a été terrifiante car tous les habitants se sont accrochés à la compagnie et celle-là leurs apportait de l‟argent. L‟argent chez les peuples indigènes n‟a rien à voir avec ce que nous connaissons. Ils ne connaissaient pas le concept d‟épargne. Tous leurs revenus étaient investis tout de suite dans ce qui était à la mode à ce moment-là. Ils ont acheté par exemple les dernières radios et appareils stéréo. Alors leurs formes identitaires commencèrent à changer. Cela ressemblait à la globalisation, c‟était une petite globalisation chez eux. A l‟époque en forêt, le fait d‟avoir une radio ou un appareil stéréo était génial. Ces appareils se sont introduits chez les peuples indigènes comme un symbole de pouvoir. Cela était comme la carabine au temps de l‟évangélisation »97

.

Lors des tentatives d‟incursion d‟autres compagnies pétrolières dans l‟Ouest du territoire Sápara au début des années 1980, des nouvelles communautés ont été fondées, dont Alto Corrientes, Jandiayaku et Masaramu. Ensuite les communautés de Cuyacocha, Chuyayaku, Pindoyaku, Pumayaku et Wiririma. Ces communautés ont été fondées autour ou tout près des puits pétroliers identifiés et marqués dans les années 1970. Ce processus d‟appropriation territoriale a été mis en valeur lors de la reconnaissance que l‟État équatorien a faite aux Sápara en 1992, en les accordant 251.503 hectares sous la dénomination de „Titulo de asentamiento tradicional Zaparo‟. Cette reconnaissance a permis d‟avoir un premier regard géoculturel et géopolitique sur leur territoire ancestral (Tableau n°7).

Avec cette reconnaissance, le territoire a été partagé d‟abord entre un espace reconnu et légalisé par l‟État, dont 251.503 hectares „Titulo de asentamiento tradicional Zaparo‟, et un espace non reconnu, dont les 124.526 hectares restantes. L‟espace non reconnu se trouvait divisé en deux : le territoire ancestral Kichwa et la „Franja de seguridad‟.

97 „La petroleras produjeron cambios sustanciales en la vida de los habitantes del territorio Sápara. Por

ejemplo, la compañía western estuvo por esos sectores. Yo trabaje en esa compañía cuando era guambra (adolecente). Lo de las compañías fue terrible, porque todos se engancharon a la compañía y el manejo del dinero para el mundo de las nacionalidades es muy diferente al nuestro, todo lo que ganaban compraron grabadoras, estaban a la moda, ósea, el concepto de ahorro no existe. En ese tiempo era el que se compraba las grabadoras mas grandes, y empieza a cambiar sus formas identitarias, como hoy la globalización. Hubo una mini globalización en el sentido de que ya se introdujo la grabadora, la moda, tener la grabadora era genial, como anteriormente tener la escopeta, era un símbolo de poder en el tiempo de la evangelización‟. Extrait d‟un

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Tableau 7 Organisation du territoire ancestral Sápara dans une dynamique multiethnique

Ensemble social Surface (hectares) Localisation État de légalisatio n Ascendance ethnique dominante Communautés Territoire ancestral Kichwa 50.000 À l‟Ouest du territoire ancestral Non légalisé, en dispute

Sápara Llanchamacocha, Ripano, Jandiayaku, Masaramu et Cuyacocha

Asentantamiento tradicional Zaparo

251.000 Dans le centre Légalisé en 1992

Sápara Kichwa Achuar Métisse

Ayamu, Nima Muricha, Conambo, Torimbo, Imatiño, Suraka, Alto Corrientes, Lupuna, Pumayaku, Pindoyaku et Chuyayaku Franja de seguridad 70.500 À l‟Est du territoire Légalisé en 2011

Achuar Shiona, Espejo, Nuevo

Amazonas, Garsayacu,

Wiririma et Balsaura Source: Réalisation personnelle

Le premier est un espace d‟environ 54.000 hectares localisé dans de ce que l‟État a reconnu en 1992 comme le territoire ancestral du peuple Kichwa de Sarayaku. C‟est pour quoi cet espace est objet d‟un conflit territorial entre le peuple Kichwa et les Sápara. La „Franja de

seguridad‟ est un espace d‟environ 70.000 hectares, localisé dans d‟une zone démarquée par

l‟État à la suite du conflit frontalier de 1941 avec le Pérou98.

Le „Titulo de asentamiento tradicional Zaparo‟ se trouve au milieu entre le territoire Kichwa

et „franja de seguridad‟. Il est la partie du territoire ancestral Sápara la plus importante par rapport à la surface, au nombre des habitants et à la diversité ethnique. Le centre du „Titulo de

asentamiento tradicional Zaparo‟ est la communauté de Conambo. Il y a certaines

caractéristiques qui permettent d‟identifier Conambo comme un lieu central. À cet égard, Jacques Levy (2003), définit la centralité comme « la capacité de polarisation de l‟espace et

d‟attractivité d‟un lieu ou d‟une aire qui concentre acteurs, fonctions et objets de société » (p.

139). La Centralité de Conambo est donc fondée d‟une part sur la concentration de biens et de services qui ont été mis en place d‟abord par l‟industrie pétrolière et ensuite, avec la légalisation du territoire, par l‟État. D‟autre part, sur la concentration des pratiques et

98 La „franja de seguridad‟ est un espace intangible d‟environ 20 kilomètres de longueur, établi par le

gouvernement équatorien après la guerre contre le Pérou en 1941. Cette guerre fut l‟un des conflits limitrophes que l‟Équateur et le Pérou ont maintenu depuis leur indépendance. Elle est considérée l'une des principales confrontations qui ont eu lieu en Amazonie. En 1942, ces deux pays ont signé au Brésil l‟accord de paix, d‟amitié et de délimitation « Protocole de Rio de Janeiro », lequel avait pour bout de mettre à terme cette guerre. Selon cet accord, l‟Équateur a dû concéder au Pérou une grande partie de son territoire amazonien qui représentait à l‟époque environ la moitié de son territoire national. En effet le territoire équatorien s'étend sur 470.000 km² ; après la guerre contre le Pérou, l'espace national équatorien s‟est trouvé réduit à environ 270.000 km².

122 traditions socioculturelles, toutes les activités qui concernent la vie des habitants en communauté et les relations entre les communautés sont coordonnées depuis Conambo, d‟abord sous la domination politique de l‟ONAZE (ex-UCTZE), et, à partir 2009, de la NASE (Cf. Annexe H).

Le centre du territoire Kichwa est Llanchamacocha. Cette communauté est un important lieu de référence socioculturelle et historique pour les Sápara. C‟est de Llanchamacocha que sont sortis les gens qui ont fondé les communautés de Jandiayaku et Masaramu, et c‟est par Llanchamacocha que les écoles et le système d‟éducation trilingue Sápara/Kichwa/Espagnol ont été introduits. Cependant lors de la fusion socio-culturelle et politique entre l‟ONZAE et l‟ONAZE qui a abouti en 2009 à la création de la NASE, le seul centre administratif du territoire est la communauté de Conambo. La „Franja de seguridad‟, n‟a été légalisée et en conséquence fusionnée avec le „Titulo de asentamiento tradicional Zaparo‟ qu‟en 2011. Habité au départ par des représentants de la culture Sápara, la „Franja de seguridad‟ est devenue, depuis la fondation des communautés de Wiririma, Garza Yaku et Nuevo Amazonas, un espace marqué et contrôlé fortement par les habitants issus de la culture Achuar. Toutes les communautés de la „Franja de seguridad‟ étaient regroupées dans l‟ONAZE et aujourd‟hui dans la NASE. Cependant, les habitants d‟origine Achuar se sont battus pour conserver la direction de la „Junta Parroquial Rio Tigre‟. Cela leur permet de garder une forte influence politique et économique dans la „Franja de seguridad‟. Le centre de „Franja de seguridad‟ est, par conséquence, la communauté de Wiririma, d‟où on coordonne toutes les activités qui s‟y développent au niveau de la „Junta Parroquial Rio

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Figure 9 : Le territoire ancestral Sápara en Équateur

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