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4. APPROCHES POUR CONCEVOIR DU JEU SERIEUX

4.1. Serious Gaming

En nous référant au Tableau 1 et notamment au gérondif « Gaming » qui renvoie entre autres à la pratique du jeu vidéo, nous pouvons en déduire que « Serious Gaming » peut faire référence à la pratique du Serious Game et notamment à son pendant numérique, à savoir le Serious Video Game. Cependant, les travaux de certains chercheurs ouvrent d’autres perspectives en distinguant « Serious Game » du « Serious Gaming ». En s’appuyant sur les travaux de Henry Jenkins et son équipe (Jenkins et al., 2009), les chercheurs Sebastian Deterding, Dan Dixon, Rilla Khaled et Lennart Nacke nous expliquent : « Alors que le terme « serious games » désigne des jeux développés pour véhiculer du contenu éducatif pendant qu’on y joue, « serious gaming » englobe toute utilisation (éducative) du jeu au sens large – c’est-à-dire toutes les technologies, pratiques, connaissances et tous les processus sociaux entourant les jeux, comme la critique de jeux, la production de machinimas, la conception d’objets, d’avatars, de niveaux virtuels, voire de jeux entiers » (Deterding et al., 2014).

Dans cette perspective, nous nous sommes appropriés le vocable « Serious Gaming ». Il renvoie pour nous à toute utilisation d’un jeu existant à des fins autres que le simple divertissement, quelle que soit l’intention originelle de son concepteur. Le Serious Gaming concerne aussi bien des jeux dédiés au divertissement que des Serious Games existants. Le Serious Gaming vise pour un jeu ou un Serious Game existant à lui associer, a postériori, des finalités utilitaires non anticipées par ses concepteurs. Ce détournement peut prendre deux formes : le serious diverting et le serious modding (Bouko et Alvarez, 2016).

4.1.1. Serious Diverting

Le « Serious diverting » (détournement à visée utilitaire) implique un détournement d’un jeu existant, numérique ou non, par les usages uniquement. Il n’y a pas de modification de

comme U-Sing (Mindscape, 2009), SingStar (Sony, 2004) ou Lips (Microsoft Games, 2008) qui ont été détournés par des enseignants d’anglais pour améliorer la prononciation de leurs élèves au collège (Alvarez, Djaouti et Rampnoux, 2016, pp.35-38). Si nous reprenons à présent la Figure 8 et les propos de Silva, le Serious Diverting correspond à l’item suivant : « Jeu

d’énigme à résoudre (par exemple Black Stories) suivi d’une mise au point langagière ».

Précisons que les Serious games eux-mêmes peuvent faire l’objet de détournements. C’est par exemple ce que recense Virginie Marquet avec l’enseignant chercheur Antoine Taly dans le cadre du MOOC “les origines moléculaires de la vie”. Taly fait usage dans l’un de ses modules du Serious Game Foldit (Université de Washington, 2008) pour viser les objectifs didactiques suivants : « faire découvrir un jeu de découverte scientifique qui utilise l'intelligence collective,

faire sentir les forces qui s'exercent au niveau moléculaire, faire le lien entre l’observation dans le jeu des interactions moléculaires et les notions abordées dans les cours précédents »

(Marquet, 2016, pp.40-41). Ces différents objectifs s’écartent de ceux des concepteurs initiaux qui visaient à collecter des données autour du pliage des protéines (Alvarez et al., 2019).

Le Serious Diverting pourrait être rapproché de la théorie de la genèse instrumentale de Pierre Rabardel (Rabardel, 1995), qui voit dans tout artefact un instrument que l’utilisateur peut s’approprier. A ce stade, le concepteur de l’artefact n’a pas le contrôle sur la manière dont chaque utilisateur va l’utiliser. Il peut en faire un usage qui sera conforme ou proche de l’utilisation prévue par le concepteur, mais l’artefact peut aussi faire l’objet d’un détournement, à l’instar du DVD-rom évoqué précédemment qui, présenté à une tribu, pourrait être utilisé comme miroir. Rabardel désigne par « catachrèse » un tel détournement. Comme les pratiques et usages d’un même artefact peuvent être, lors de son instrumentalisation, pluriels au regard du nombre d’utilisateurs et de leurs filtres de perceptions, eux-mêmes pluriels, il semble, comme évoqué précédemment, plus simple de se référer au concepteur (auteur, commanditaire…) d’un jeu pour savoir quels sont les objectifs visés par l’artefact qu’il conçoit, construit et propose. Ainsi à défaut de connaître toutes les instrumentalisations possibles que peuvent opérer l’ensemble des utilisateurs pour un même artefact, il est possible d’interroger, le cas échéant, le concepteur d’un artefact pour lui poser la question suivante : « votre artefact est-il un jeu ou plutôt un Serious Game ? ». Question qui fait écho aux écrits de Genvo abordés précédemment, qui au lieu de chercher à définir le jeu, préfère poser la question « est-ce un jeu ? » (Genvo, 2014, p.10) (cf. 1.3.). Partant de ce postulat, il est ensuite possible d’étudier l’écart dans les instrumentalisations opérées par les utilisateurs finaux pour savoir si des attitudes ludiques sont recensées ou non face audit dispositif. Attitudes qu’il conviendra

également de faire valider comme étant bien de natures ludiques auprès des utilisateurs concernés car le jeu reste subjectif. Nous reviendrons sur ces aspects évaluatifs en fin de mémoire (cf. 10.).

4.1.2. Serious Modding pour jeux numériques

Le « Serious modding » (modification à visée utilitaire) implique quant à lui une transformation du dispositif d’un jeu ou d’un Serious Game existant, numérique ou non, pour lui assigner un nouvel objectif de nature utilitaire. Le « modding » est une pratique très répandue dans le monde du jeu vidéo. On y désigne sous le terme de « mod »47 un jeu vidéo modifié de la sorte ou un élément qui permet de modifier un titre existant. Les « mods » ne sont pas autonomes, ils nécessitent de posséder le jeu de base pour fonctionner. Ils peuvent prendre diverses formes : modifications graphiques apportées au jeu (nouveaux objets, nouveaux avatars, amélioration du rendu graphique du jeu...), ajouts de nouveaux sons (bruitages, musiques...), propositions de niveaux de jeu personnalisés (cartes personnalisées, objectifs de jeu modifiés, difficulté du jeu accrue, niveaux de vie étendus à l’infini...). Dans la plupart des cas, le « modding » se cantonne à la modification de jeux à des fins de divertissement. Mais il arrive qu’il transforme des jeux vidéo de divertissement en Serious Games. Par exemple, Escape from Woomera (Kate Wild et

al., 2003) modifie le jeu Half-Life (Valve Software, 1998) en s’appuyant sur la structure ludique

de ce dernier pour alerter l’opinion publique sur les conditions de vie dans un camp de réfugiés situé en Australie. Pour notre part, nous avons été amené à expérimenter l’approche du Serious Modding avec des étudiants d’une école de jeux vidéo en 2013. Ces derniers ont eu pour défi de faire passer des messages en lien avec la non-violence dans des titres véhiculant une représentation de la violence affirmée à l’instar des jeux de stratégie Civilization V (Firaxis Games/2K Games, 2010) et Starcraft II (Blizzard, 2010) ainsi que du jeu de rôle The Elder

Scrolls V: Skyrim (Bethesda, 2011) (Alvarez, Djaouti, Louchart, 2016).

Les concepteurs d’un « mod » n’ont généralement aucun lien direct avec ceux qui ont réalisé le jeu d’origine. Il arrive toutefois que des mods soient créés à l’initiative de sociétés de jeux vidéo désireuses de prolonger la vie économique de certains de leurs jeux en diversifiant les marchés. Des collectifs d’enseignants ont de ce fait été réunis autour de titres phares comme SimCity

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Le « mod » ne doit pas être confondu avec un « add-on ». Ce dernier est une extension de jeu proposée par l’éditeur du jeu lui-même et souvent payante. Un mod est proposé, souvent gratuitement, par une personne extérieure à l’équipe de conception initiale du jeu, généralement un joueur (Alvarez, Djaouti et Rampnoux, 2016, p.39).

(Maxis, 1989) ou MineCraft (Mojang, 2011) pour participer à la conception de leur version éducative : SimCityEDU30 et MineCraftEdu31. Un mod peut lui-même être modifié pour être personnalisé. Stéphane Cloâtre, professeur de technologie et formateur TICE à Nantes, s’essaye régulièrement au serious modding en s’emparant des outils de création spécifiques à

MinecraftEdu. Pour utiliser le jeu en classe de 5e, il a par exemple préparé un terrain de jeu adapté à son scénario pédagogique en mettant en place des « blocs d’information » avec des consignes, des « bornes de téléportation » permettant de se déplacer rapidement entre différents lieux, en posant des « blocs frontière » pour empêcher les élèves d’aller dans d’autres biomes (ou paysages) que le leur, etc. (Alvarez, Djaouti et Rampnoux, 2016, pp.38-41).

Walt Scacchi a recensé quatre types de mods : « user interface customizations » (personnalisation de l'interface utilisateur), « game conversions » (conversion du jeu), « machinima », et « hacking closed game systems » (piratage de systèmes fermés de jeu) (Scacchi, 2011, p.3). Dans le cadre de nos propos, nous retiendrons les deux approches suivantes :

- User interface customizations (personnalisation de l'interface utilisateur) qui permet entre autres de modifier les composantes d’un personnage (titre, accessoires, habillement), la palette de couleurs de l’environnement dans lequel le joueur gravite, le contenu d’apprentissage pour les jeux éducatifs ou le type d’informations que le jeu gère sans modification des règles ou des fonctions de jeu (ibid., pp.3-4).

- Game conversion (conversion du jeu) qui peut être partielle ou complète et s’opère par l’ajout ou la modification de l’apparence et des capacités des personnages du jeu, des niveaux du jeu, de l’environnement du jeu (zones, terrains ou paysages), des règles du jeu et même de la mécanique du jeu (ibid., pp.4-5).

4.1.3. Serious Modding pour jeux analogiques

Côté jeux analogiques, nous identifions également du Serious Modding. Dans ce registre, Elisabeth Belmas, historienne du jeu, recense des déclinaisons du jeu de l’oie permettant de diffuser des messages et de servir de support pédagogique dès le XVIIe siècle (Belmas, 2006, p.133). La stratégie recensée est ici de modifier l’apparence graphique du jeu de l’oie ou de modifier le contenu de certaines cases pour servir le ou les messages souhaités. Notons que nous retrouvons l’utilisation du jeu de l’oie dans le cadre de la Figure 5 établie par Silva. Par conséquent, le Serious Modding n’est pas une approche nouvelle et peut consister à changer les

textes, symboles ou couleurs d’un plateau de jeu ou de cartes à jouer. Cela peut concerner également l’ajout de nouveaux éléments ludogènes, comme des dés, pions ou cartes supplémentaires ainsi que des règles qui modifient l’action des joueurs. Par exemple, le Réseau Ludus suggère aux enseignants d’histoire-géographie de prendre pour base le jeu du Cluedo (Miro Company / Hasbro, 1949) et de modifier le plateau de jeu pour représenter différents lieux emblématiques du Moyen Âge (château, monastère, etc.) pour aborder en classe la période médiévale48. Les joueurs n’obtiennent des indices sur le meurtre qu’à condition d’avoir répondu correctement à une question sur le lieu dans lequel ils se trouvent. Cette version modifiée du jeu permet d’évaluer en 1 à 2 heures les acquis des élèves à la fin des chapitres portant sur l’Église, les cadres politiques et la société au Moyen Âge (Alvarez et al., 2019). C’est dans ce même registre que nous pouvons positionner le jeu Taboo avec « règles adaptées et un corpus

sélectif de cartes » recensé par Silva dans le cadre de la Figure 8.

Le Serious Modding pour jeux analogiques se retrouve également dans le concept de « frame

game » (jeu-cadre) de Harold D. Stolovitch et Sivasailam Thiagarajan (Stolovitch et

Thiagarajan, 1980). L’approche consiste dans un premier temps à évider un jeu existant de son contenu, c’est-à-dire supprimer toutes les informations véhiculées par le jeu : textes, symboles, couleurs qui se trouvent en général dans les cartes à jouer et dans le plateau de jeu pour un jeu de société par exemple. Cette structure, une fois clairement isolée, nous donne le jeu-cadre, encore appelé « coquille générique de jeu » par Louise Sauvé (Sauvé, 2010). Dans un second temps, pour opérer le Serious Modding, il suffit de garnir la structure avec de nouveaux contenus pour générer un nouveau jeu à vocation utilitaire adapté à un public cible particulier. Par exemple, une équipe de spécialistes en santé mentale et physique ont adapté certaines composantes du jeu des petits chevaux ou Parchési pour créer le jeu Prévenir et mieux vivre pour une formation aux adultes. L’équipe a de la sorte inséré des images sur le plateau de jeu en lien avec les quatre thématiques d’apprentissage qui font l’objet du jeu éducatif. Sur le plan du contenu d’apprentissage, ils ont rédigé une centaine de questions et d’événements répartis entre les quatre thématiques et les ont illustrés soit avec des photos, des dessins ou des animations courtes (Alvarez et al. 2019, pp.270-272). C’est sans doute cette même approche qui a dû être opérée pour le jeu de l’oie pour « systématiser un point de grammaire » que recense Silva dans la Figure 8.

4.1.4. Serious Games et Serious Gaming

Nous venons d’aborder le concept de Serious Gaming et les deux approches connexes, le Serious Diverting et le Serious Modding. Après ce passage en revue, quelles distinctions peut-on opérer entre le Serious Game et le Serious Gaming ? Il y a plusieurs différences. Le Serious Game est un artefact, la résultante d’une réalisation spécifique qui a nécessité l’écriture d’un cahier des charges, puis d’un développement et enfin d’une diffusion associée. Le Serious Gaming concerne quant à lui un processus visant à détourner ou modifier un jeu ou un Serious Game a posteriori. Il s’agit donc de deux éléments distincts. Cependant, dans la littérature, il est possible d’identifier le vocable « Serious Gaming » employé dans d’autres sens. Par exemple dans nos propres écrits à la fin des années 2000 (Michaud et Alvarez, 2008, pp.3-5). L’explication trouve son origine dans le fait que le gérondif « Gaming » peut désigner le fait de pratiquer du jeu vidéo comme abordé précédemment. Par extension, cela représente le marché de ceux qui s’adonnent à la pratique du jeu vidéo ou tout simplement le marché du jeu vidéo. Lui accoler un autre mot comme « Online » (jeu en ligne) précise le secteur du jeu, comme nous pouvons par exemple le recenser pour le titre de l’ouvrage « Korea’s Online Gaming Empire » que l’on peut traduire par « L’empire coréen des jeux en ligne » (Jin, 2010). Dans cette même idée, le « Serious Gaming » peut désigner le marché du Serious Game. Approche que l’on trouve dans notre étude de la fin des années 2000. Précisons également que le gérondif ne se cantonne pas uniquement à la notion de marché. Le vocable « Gaming » peut venir jouer le rôle d’un objet. Par exemple, nous pouvons dire « a gaming PC », que l’on traduirait par « un PC de joueur » ou plus couramment par l’anglicisme « un PC de gamer » qui désigne les ordinateurs spécialement conçus pour faire fonctionner dans de bonnes conditions des titres vidéoludiques gourmands en ressource. Enfin, notons que les objets ne sont pas les seules possibilités d’associations, puisque l’on peut évoquer « a gaming addiction » pour indiquer une « dépendance au jeu ».

Ces propos nous rappellent la subtilité de la langue anglaise autour de « Play » et « Game » dont nous avons essayé d’apporter un aperçu avec le Tableau 1. Cela permet également de bien distinguer le Serious Game du Serious Gaming à plusieurs niveaux. Mais pourrait-on dans le même esprit identifier du « Serious Playing » qui se différencierait à la fois du « Serious Gaming » et du « Serious Play » ?

4.1.5. Serious Playing

Dans le Tableau 1, nous n’avons pas évoqué de gérondif associé à « Play », à savoir « Playing » contrairement à « Gaming » pour « Game ». « Playing » en tant que participe présent « jouant » est recensé par Lexico.com et dictionnary.com pour exprimer une action en cours à l’instar de « He is playing » qui signifie « Il est en train de jouer ». En revanche, ces deux dictionnaires en ligne ne répertorient pas de nom associé au gérondif « Playing » contrairement à « Gaming ». Nous notons cependant l’existence du vocable « Playing cards » qui désigne le jeu de cartes standard ou bien encore un titre de jeu de société Playing Gods (Balls-out, 2008) dont la société éditrice semble avoir disparu.

En explorant des articles de recherche anglophones, nous recensons des écrits convoquant « Serious Playing ». En 1973, les écrits de Barbara B. Varenhorst évoquent le vocable : « Lorsqu’ils sont conçus pour du jeu sérieux (Serious Playing), les jeux peuvent combiner une

réflexion analytique sur des problèmes avec une activité émotionnellement expressive »

(Varenhorst, 1973, p. 227)49

. Nous pouvons également recenser « Serious playing » dans le titre d’une conférence dispensée par Etienne-Armand Amato en 2015 intitulée « serious gaming &

serious playing »50

, dans une présentation multimédia de Vanessa Lalo51

ainsi que dans les écrits de Georg Spöttl et Sven Schulte, de l’Institut de Technologie et Education de Brême (ITB). Dans ces écrits, l’emploi de « Serious Playing » se rapproche de la notion de « Serious Play », à savoir le fait de jouer dans un but utilitaire. Notons cependant que Spöttl et Schulte mettent entre guillemets « serious » devant « playing » (Spöttl et Schulte, 2015). L’approche semble donc être avancée au second degré ou avec prudence.

Dans la majorité des écrits, le vocable « Serious Playing » est plutôt employé au sens de jouer de manière assidue et appliquée. Ce que l’on pourrait effectivement traduire par « une pratique sérieuse du jeu » au sens de jouer de manière concentrée, mais qui cependant ne vise pas un objectif externe au jeu lui-même comme une visée utilitaire. Cette utilisation se retrouve dans

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Traduction de l’auteur. Texte original : « When constructed for serious playing, games can combine analytical thinking

about problems with emotionally expressive activity. »

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AMATO, E-A. (2014), Gamer Assembly, Poitiers,

http://ifpbretagne.org/dokuwiki/doku.php?id=jeux_serieux:gamers_assembly_poitiers_20_avril_2014 (consulté le 13 Août 2019)

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LALO, V. (2017), « Etre parents au 21ème siècle Jeunes connectés », https://www.reseau-canope.fr/atelier-yvelines/IMG/pdf/etre_parents_au_21eme_siecle.pdf (consulté le 13 Août 2019)

plusieurs écrits comme ceux de Guillermo Campitelli et Fernand Gobet sur les jeux d’échecs. L’emploi de « Serious Playing » évoque ici les périodes durant lesquelles les joueurs s’adonnent au jeu d’échecs de manière assidue et appliquée (Campitelli et Gobet, 2008). Jonas Linderoth et Ulrika Bennerstedt évoquent le jeu vidéo World of Warcraft et la difficulté que représente pour des enfants de dégager suffisamment de temps pour y jouer de manière assidue (Linderoth et Bennerstedt, 2007, p.28 et p.42). La majorité des écrits recensés convoquant « Serious Playing » dans ce même sens, sont ensuite en lien avec la pratique artistique comme l’emploi d’un instrument de musique ou le jeu théâtral notamment.

Après ce passage en revue, il semble que « Serious Playing » désigne plutôt l’idée de jouer de manière appliquée, assidue ou concentrée (objectif interne). Ce qui le distingue de « Serious Play » qui désigne l’activité consistant à jouer dans une visée utilitaire (objectif externe). Cependant, nous noterons qu’il existe quelques recensements de « Serious Playing » embrassant la même signification que « Serious Play » mais semblant plutôt minoritaires pour l’instant.

Si nous avons évoqué le Serious Gaming comme approche visant à concevoir du jeu sérieux, il convient également d’évoquer les autres méthodes existantes. Quatre approches ont été recensées par nos soins à ce jour : le Serious Game Design, la Gamification, la Dégamification et le Serious Gaming (Alvarez et al., 2019). Abordons tour à tour de manière plus détaillée les trois approches qui se détachent du Serious Gaming.