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Chapitre 2 Les fondements théoriques et les débats sur la réglementation

1.2 La Concentration sous la forme d’intégration verticale

1.2.2 Les restrictions verticales

productrice exclusive d’un facteur de production essentiel au processus de son client. Lorsque le monopole a fixé un prix très élevé, l’intégration vers l’amont peut être rentable, ce qui peut conduire la deuxième firme à construire une usine pour fabriquer elle-même le facteur dont elle a besoin.

Cependant, si la firme choisit l’alternative de l’intégration verticale vers l’amont plutôt que de construire une usine, le problème est semblable à celui de la section précédente et, dans ce cas-là, les profits joints du fournisseur et du client n’augmentent que si la production est à facteurs substituables.

Finalement, Stigler (1951)29 et Williamson (1975) ont développé une théorie qui met en rapport le cycle de vie des entreprises et l’intégration verticale. En effet, en se fondant sur le théorème de Smith selon lequel « la division du travail est limitée par l’importance du marché », ils ont expliqué les causes pour lesquelles les firmes ont recours tantôt au marché dans ces certaines périodes, tantôt à l’intégration verticale dans d’autres (Carlton, 1998).

1.2.2 Les restrictions verticales

L’objectif des restrictions verticales est de produire un résultat semblable à celui qui a été obtenu lors de l’intégration verticale d’une entreprise. Pour cela, ajoutant aux prix de gros, les firmes négocient des contrats de distribution en imposant certaines conditions au distributeur.

Ces restrictions portent très souvent soit sur le niveau minimum d’unités vendues, soit sur la localisation des entreprises distributrices, soit sur un prix minimum ou encore, sur l’interdiction de vente de produits concurrents.

Les coûts trop élevés d’organisation de la main d’œuvre et du transport lié à la distribution sur un marché éloigné, expliquent les raisons pour lesquelles les monopoles préfèrent les restrictions plutôt que l’intégration verticale. La théorie des contrats a intégré cette problématique dans le cadre de la relation principal agent.

Quatre problèmes se posent lors de la mise en distribution d’un produit par un monopole :

29 Stigler G., 1951, The Division of Labor is Limited by the Extent of the Market, Journal of Political Economy 59, p185-93.

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i) Lorsque la production et la distribution sont contrôlées par des monopoles, le profit du monopole est prélevé deux fois. En conséquence, le consommateur paie plus cher du fait que chaque monopole, producteur et distributeur, ajoute son profit. Cette double marge pousse les firmes ou bien à l’intégration verticale ou bien à l'établissement de restrictions verticales afin d’améliorer les profits joints. Lorsqu’il existe deux monopoles successifs à la place d’une seule firme verticalement intégrée, non seulement le bien être des consommateurs mais aussi le profit des entreprises sont moins élevés, ce qui rend souhaitable l’intégration verticale.

Nonobstant, ceci n’est pas toujours possible et comme il a été déjà dit, l’intégration verticale n’est envisageable que lorsqu’elle est moins coûteuse que deux monopoles successifs. Une autre solution peut être alors la restriction verticale.

En cas de monopoles successifs plusieurs phénomènes sont envisageables car le distributeur pour sa part est incité à la fois à limiter ses ventes et à augmenter le prix. Quant au producteur, son intérêt consiste à ce que le système de distribution soit aussi efficace que possible, en d’autres termes que la marge du distributeur soit aussi faible que possible ; il n’a aucun intérêt à une réduction supplémentaire de production.

De façon générale , si la distribution est concurrentielle, le prix de détail sera proche du prix de gros, ce qui intéresse idéalement le producteur. En fait , ce n’est pas le cas dans les monopoles naturels des industries de réseaux par exemple où le producteur doit passer par un distributeur unique.

Trois types de restrictions verticales peuvent être imposées par le producteur afin que les produits soient distribués de façon plus concurrentielle : un prix de vente maximum30, un quota de vente au distributeur, des tarifs plus élaborés (une tarification en deux parties, dont l’une est une franchise par exemple).

ii) Des situations favorables aux passagers clandestins dans la distribution. Lorsque les distributeurs doivent entreprendre des efforts promotionnels de vente pour promouvoir un produit dont une partie bénéficie à tous, ceci favorise le comportement de passager clandestin.

Les restrictions verticales peuvent aider à contrôler les passagers clandestins telles que

30 C’était une solution très répandue aux Etats Unis avant 1976, après cela était illégal. Carlton 1998. p578.

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l’établissement des droits de propriété, les concessions d’un territoire exclusif, la fixation du prix du détail, le contrôle de l’effort de vente du distributeur.

iii) Le passager clandestin au niveau de la production. Quand deux producteurs utilisent le même distributeur par exemple et lorsque l’un d’eux finance des campagnes promotionnelles pour inciter les clients à consommer le produit distribué, alors l’autre est incité à agir comme un passager clandestin. Il en est de même dans le cas de la formation du personnel. Afin de résoudre ce problème la solution la plus répandue est celle du distributeur exclusif, dans laquelle le distributeur obtient le droit de distribuer à condition de ne pas distribuer le produit des autres producteurs.

iv) Les externalités dues à l’absence de coordination entre distributeurs. C’est l’intérêt d’un producteur qui passe par différents distributeurs indépendants et concurrents de coordonner ou de restreindre les efforts de cette concurrence. Dans ce cas la localisation des points de vente ou de transport doit être optimale, mais ce n’est pas forcément celle souhaitée par le producteur, ce qui nécessite l’intervention d’un autre acteur.

L’interdiction des restrictions verticales ne résout pas nécessairement le problème lorsqu’elles sont devenues indésirables. L’interdiction légale a du sens quand le coût de l’intégration est supérieur à celui des restrictions. Le producteur peut toujours opter pour l’intégration verticale de la distribution afin d’imposer ses restrictions et accroître ses profits, mais l’effet sur les consommateurs peut être positif ou négatif.

Même les lois antitrust n’ont pu empêcher l’intégration verticale lorsqu’elle se réalise par croissance interne31. Si l’intégration verticale se manifeste par des fusions qui limitent la concurrence, les lois antitrust peuvent éventuellement être invoquées, de sorte que dans le cadre des lois antitrust nord-américaines, la plupart des restrictions et intégrations verticales sont jugées au cas par cas, en fonction des circonstances particulières.

31 Le cas « United States vs. Alcoa » est une exception, car le tribunal a jugé que l’intégration verticale d’Alcoa entre la bauxite et la production d’électricité restreignait la concurrence. Carlton, 1998, p589.