• Aucun résultat trouvé

recherche sur les effets d’assomptions aveugles au genre pour la politique d’aide et développement

g EnrE , collEctE dEs donnéEs , IndIcatEurs

3. Recherche en matière de politique de genre et d’aide : aperçu sélectif

3.3. recherche sur les effets d’assomptions aveugles au genre pour la politique d’aide et développement

Comme nous l’avons déjà évoqué plus haut, une approche GAD implique en pratique que le fossé entre les sexes (surtout en matière d’opportunités) ne peut être comblé que par l’application conséquente d’une approche tenant compte des genres à travers les différentes phases d’un cycle politique/programme/projet : depuis l’analyse du problème jusqu’au suivi et à l’évaluation, en passant par l’identification de priorités, l’implémentation et la budgétisation. Ne pas le faire signifie rechercher les problèmes : soit les mesures politiques ne fonctionnent pas, ou partiellement seulement, soit elles creusent encore davantage le fossé existant (voir notamment Elson (ed), 1991 ; Kabeer, 1995 ; Palmer, 1995 ; Quisumbing and Mc Clafferty, 2006). Ceci fut par exemple l’une des conclusions qui furent avancées dans le cadre des analyses de l’échec des Programmes d’Ajustement Structurels (SAP).

L’objectif n’est certainement pas de faire ici une analyse approfondie des Programmes d’Ajustement Structurels, mais bien d’expliquer un aspect de leur échec. Un certain nombre d’économistes féministes (voir notamment Elson (ed), 1991) argumentent

que les SAP ont en partie échoué parce qu’ils étaient majoritairement basés sur des assomptions aveugles au genre. Le travail était par exemple considéré comme un facteur de production homogène facilement échangeable entre hommes et femmes. Afin de réaliser la croissance économique tout en économisant sur les coûts salariaux, les SAP ont par exemple tenté de remplacer le travail masculin par le travail féminin, en supposant automatiquement que cette substitution irait de pair avec davantage de participation des hommes au travail domestique (reproductif). La main-d’œuvre féminine a été motivée par une légère augmentation salariale (les salaires des femmes restant encore inférieurs à ceux des hommes). En réalité, les femmes ont toutefois semblé réagir beaucoup moins que prévu à ces incitants salariaux. L’analyse des causes sous-jacentes indique rapidement que la répartition du travail masculin et féminin dans une atmosphère productive et reproductive était beaucoup plus déterminée par des relations de genre sous-jacentes - l’ensemble de normes et de valeurs qui fixent les limites de qui peut faire quoi - que par des facteurs économiques. Seulement dans ces cas où les familles n’étaient financièrement pas à même de suivre les normes de « genre » existantes, on a constaté une augmentation de la participation des femmes au marché du travail. Ceci ne signifiait cependant pas que cette augmentation allait également de pair avec un mouvement inversé de plus de participation des hommes au travail domestique (activités reproductives). Là où les SAP ont augmenté la participation des femmes sur le marché du travail, ils ont du même coup installé la double journée de travail, ce qui fait que le temps de travail total (économie de marché et des soins) des femmes a augmenté.

Une deuxième assomption aveugle au genre est la conceptualisation du ménage en tant qu’unité. Lors de l’élaboration de la politique, on partait/part souvent du fait que le ménage constitue une sorte d’unité harmonieuse, où tous les membres de la famille réunissent leurs revenus et où le chef de ménage tient toujours compte des besoins des autres membres de la famille dans le cadre de ses décisions. Les responsables politiques qui considèrent le ménage comme une unité ne comprennent pas l’utilité d’adresser des mesures politiques à des individus bien déterminés (et souvent plus difficilement accessibles) au sein du ménage. Ceci implique que le flux d’informations depuis et vers les individus se déroule par l’intermédiaire du chef de ménage - dans la majorité des cas, un homme. En pratique, il apparaît cependant que le modèle du ménage unitaire n’existe bien souvent pas, et que le ménage, tout comme la société, est un lieu où cohabitent des individus qui ont souvent des préférences très divergentes, qui ne réunissent pas nécessairement leurs revenus (intégraux), qui sont chacun responsables de certaines décisions bien déterminées, ou qui arrivent à des décisions communes en négociant. Celui qui dispose du plus grand pouvoir de décision voit ses préférences se refléter dans les décisions finales. Dans de tels cas, ne prendre que le « chef de ménage » comme point d’information pour l’ensemble du ménage ne peut que conduire à une image très partielle et unilatérale du statut de

bien-être et de prospérité ainsi que des besoins des différents membres du ménage, et conduit d’autre part à ce que de nombreuses informations restent chez le chef de ménage et n’atteignent jamais le véritable groupe cible.

Enfin, les responsables politiques (et chercheurs) aveugles au genre partent également souvent du fait qu’il existe une distinction stricte entre l’économie de marché et l’économie des soins. L’économie de marché est ce qui se retrouve dans le PNB via le System of National Accounting (SNA), tandis que l’économie des soins comprend les activités productives46 qui se déroulent dans le cadre du ménage (appelées « travail

reproductif ») et qui, dans l’immense majorité des cas ne sont pas reprises dans le SNA, et donc dans le PNB. L’« invisibilité » de ce qui se passe dans l’économie des soins constitue souvent une solution, certes à court terme, pour les responsables politiques. Souvent, les économies réalisées dans le secteur social ne constituent par exemple pas une diminution effective des dépenses, mais plutôt un transfert des coûts à l’économie des soins « invisible » au sein du ménage (en d’autres termes, si on ferme des centres de soins publics, ce n’est pas que la population n’est plus malade, mais tout simplement que le coût, et surtout le temps, consacrés aux soins de santé se déplacent vers le ménage). En outre, ce qui se passe dans l’économie des soins se répercute au bout d’un certain temps sur l’économie de marché. Le travail ne constitue en effet pas un facteur de production exogène (comme on le suppose de manière simpliste dans les modèles économiques), mais est produit dans l’économie des soins. Une moins bonne qualité de l’économie des soins (par exemple en raison d’une pression trop importante sur l’économie des soins, une supposition d’élasticité infinie du travail féminin) conduit en d’autres termes à une qualité inférieure (productivité) du facteur de production « travail » ainsi qu’à une croissance et un développement économiques plus faibles.

3.4. recherche portant sur l’instrumentation servant à rendre

Outline

Documents relatifs