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4.3 L’exploration des ponts bolom´etriques et de leurs points milieux

4.3.2 Les rapports d’imp´edance

Rappelons que, par construction, les thermistances Rbolo et les r´esistances de r´ef´erence

Rref d’une mˆeme matrice sont identiques (cf section 3.2.2). Par cons´equent, lorsque le flux est

nul et que la tension de polarisation tend vers 0 V (pas de dissipation Joule ni d’effet de champ), les imp´edances devraient tendre vers une mˆeme valeur puisque les deux r´esistances se trouvent thermalis´ees `a la mˆeme temp´erature, celle de la source froide. Nous allons maintenant utiliser cette propri´et´e pour tester la pertinence du calcul de points milieux. En effet, exprimer les points milieux sous forme de rapports d’imp´edance nous offre un diagnostique plus quantitatif que la repr´esentation des donn´ees sous forme de tensions de points milieux. `A partir de l’´equation (4.7) et des donn´ees de la figure 4.8, nous calculons le rapport d’imp´edance de chacun des ponts bolom´etriques pour chaque configuration (tension, f lux) avec la formule suivante :

Rbolo

Rref

= Vptmil Vpolar− Vptmil

Le r´esultat de ces calculs est illustr´e dans la figure 4.9. Int´eressons-nous dans un premier temps aux courbes du BFP rouge (graphe de droite).

Lorsque le flux incident sur le bolom`etre augmente, la temp´erature de l’absorbeur augmente et l’imp´edance de la thermistance Rbolodiminue, le rapport Rbolo/Rrefd´ecroˆıt. Lorsque

la tension de polarisation augmente, l’interpr´etation est un peu plus d´elicate car les effets de champ tendent `a r´eduire l’imp´edance Rbolo mais ´egalement l’imp´edance Rref, et ceci est une

caract´eristique unique aux bolom`etres du CEA. Il est donc n´ecessaire d’analyser l’´evolution du rapport Rbolo/Rref dans diff´erents r´egimes de fonctionnement des bolom`etres :

– Dans un r´egime de faibles flux et de faibles tensions (quadrant sup´erieur gauche), la dissipation Joule est faible et le flux incident apporte relativement peu d’´energie

au bolom`etre. La temp´erature de la thermistance est alors `a peine plus ´elev´ee que celle de la r´esistance de r´ef´erence, leur imp´edance est donc peu diff´erente. Le rapport Rbolo/Rref doit tendre vers 1 quand le flux et la tension diminuent.

– Dans un r´egime de forts flux et de faibles tensions (quadrant inf´erieur gauche, mais pour des flux inf´erieurs `a ∼10 pW/pixel car au-del`a le signal ne passe pas le circuit de lecture), la dissipation Joule est relativement faible mais l’absorbeur est r´echauff´e par le flux incident, Rbolo/Rref ∼ 0.5. Les deux tiers de la tension appliqu´ee au pont

bolom´etrique sont donc report´es sur la r´esistance de r´ef´erence qui voit son imp´edance chuter `a cause de l’effet de champ. Dans ce r´egime de fonctionnement, c’est-`a-dire une r´esistance de r´ef´erence froide et fortement polaris´ee et une thermistance chaude et peu polaris´ee, Rref chute plus rapidement que Rbolo (cf figure 3.8) et le rapport

Rbolo/Rref augmente l´eg`erement avec la tension de polarisation.

– Pour les fortes polarisations (moiti´e droite du graphe), la dissipation Joule apporte beaucoup plus d’´energie `a l’absorbeur que le flux radiatif. Le comportement ther- mique du bolom`etre est alors domin´e par la tension de polarisation quelque soit le flux ; les courbes se rapprochent et la r´eponse diminue (le coefficient α = ∂R/∂T s’´ecroule, cf figure 3.8). Dans ce r´egime, c’est-`a-dire quelques Volts de potentiel aux bornes de la r´esistance de r´ef´erence et une thermistance significativement plus chaude que la source froide, l’imp´edance totale du pont bolom´etrique est environ 10 fois plus petite que pour une tension de ∼1 V.

Les rapports d’imp´edance du BFP rouge sont en tr`es bon accord avec notre compr´e- hension des bolom`etres PACS. Par contre, l’interpr´etation que nous proposons n’est correcte sur le BFP bleu que pour les forts flux et les fortes tensions de polarisation ; le probl`eme se trouve aux faibles tensions et faibles flux car le rapport Rbolo/Rref ne tend pas vers 1 comme attendu.

Mais pour quelle raison les rapports d’imp´edance des BFP bleu et rouge seraient-ils diff´erents ? Nous avons d’abord pens´e qu’une forte lumi`ere parasite sur la voie bleue du Photom`etre ´etait responsable du fl´echissement des courbes aux basses tensions ; mais aucune autre preuve ne semble indiquer l’existence d’un tel niveau de lumi`ere parasite (nous avons soigneusement noirci l’int´erieur de l’instrument pour ´eviter les r´eflexions de lumi`ere sur le plan focal, et les bancs de test de Saclay et de Garching donnent pr´ecisemment les mˆemes r´esultats pour un flux suppos´e de 1 pW/pixel). Nous savons par ailleurs que les circuits de lecture des BFP bleu et rouge sont strictement identiques, nous avons en effet v´erifi´e que les courbes d’´etalonnage de l’´electronique pr´esent´ees dans la figure 4.4 sont les mˆemes pour les deux BFPs. Par cons´equent, la diff´erence entre les rapports d’imp´edance bleus et rouges provient d’un ´el´ement qui se trouve sur le circuit de d´etection (CD), en amont du premier transistor de lecture. Par construction, les r´esistances du BFP bleu sont plus imp´edantes que celles du BFP rouge, mais cette diff´erence devrait s’ex- primer sur les courbes de la figure 4.9 uniquement par une diff´erence de forme ; les rapports d’imp´edance devraient quand mˆeme tendre vers 1 pour les faibles tensions de polarisation, le contraire ne serait pas physique. Nous sommes donc forc´es de constater que pour les faibles tensions de polarisation des bolom`etres, les points milieux que nous avons calcul´es pour le BFP

110 Chapitre 4: La proc´edure d’´etalonnage

Fig.4.9 ´Evolution des rapports d’imp´edance Rbolo

Rref moyenn´es sur une matrice enti`ere en fonction

de la tension de polarisation des ponts bolom´etriques et du flux incident. Les barres d’erreurs montrent la dispersion r.m.s. des rapports d’imp´edance sur la matrice. Les courbes de la matrice rouge (`a droite) ont un comportement tout `a fait coh´erent avec la physique du d´etecteur, `a savoir les rapports tendent vers 1 pour les faibles flux et les faibles tensions. Par contre, le fait que les courbes de la matrice bleue (`a gauche) ne tendent pas vers 1 mais fl´echissent aux basses tensions indique que pour le BFP bleu, il existe probablement un offset introduit en amont du circuit de lecture par le multiplexeur. Le calcul de points milieux ne prend pas en compte l’injection de charges `a l’origine de cet offset. Une explication plus d´etaill´ee est donn´ee dans le texte.

bleu ne sont pas repr´esentatifs de la tension aux bornes de la thermistance.

Malgr´e cela, la m´ethode de calcul des points milieux telle que nous l’avons pr´esent´ee dans la section pr´ec´edente reste correcte. C’est l’hypoth`ese selon laquelle la tension d’entr´ee du circuit de lecture est ´equivalente `a la tension centrale du pont bolom´etrique qui ´echoue dans certaines configurations du d´etecteur. Pour lever cette hypoth`ese, et faire une mesure plus r´ealiste de l’´equilibre du pont bolom´etrique, il nous faudrait des abaques identiques `a celles de la figure 4.4 mais qui prendraient en compte l’´etage haute imp´edance des matrices de bolom`etres. En effet, l’´etalonnage de la chaˆıne ´electronique consiste `a injecter une tension de r´ef´erence dans le circuit au niveau du Vref (`a ce niveau l’imp´edance est de ∼5 MΩ pour les deux BFPs) ; alors

qu’il faudrait injecter une tension au niveau du pont bolom´etrique. Si cela ´etait possible, nous devrions voir une diff´erence entre les courbes d’´etalonnage du BFP bleu et celles du BFP rouge car leurs imp´edances sont diff´erentes. Pour r´ealiser ce type de test, il suffirait de commander Vh = Vl, et d’explorer plusieurs couples (Vl, Vhb) de la mˆeme mani`ere que nous l’avons fait

dans la section 4.2 pour obtenir les abaques de la figure 4.4. De telles courbes d’´etalonnage devraient nous permettre de mesurer le v´eritable point milieu de chaque pont bolom´etrique, et nous devrions trouver un rapport d’imp´edance qui tend vers 1 pour les faibles tensions de

polarisation. Il n’est malheureusement pas possible d’effectuer ce test6 sur l’instrument PACS

car BOLC ne permet pas de commander des valeurs positives de Vl.

Bien que les outils diagnostiques dont nous disposons pour le moment soient limit´es, nous pouvons quand mˆeme proposer un sc´enario qui expliquerait les diff´erences observ´ees entre les rapports d’imp´edance bleu et rouge de la figure 4.9. Nous pensons que l’origine du probl`eme se trouve au niveau du multiplexeur qui injecterait des charges parasites dans l’´etage haute imp´e- dance de la matrice par couplage capacitif. En effet, en mode PEL commut´e, le MOS de lecture (contrˆol´e par VSM S, figure 3.11) d’un mˆeme pixel est allum´e pendant 1.56 ms (16×401 ), temps

durant lequel l’´electronique ´echantillonne la tension `a l’entr´ee du CL, puis il s’´eteint pendant 23.44 ms jusqu’`a ce qu’il se rallume pour mesurer `a nouveau le signal bolom´etrique et ainsi de suite (cf section 3.3.2 pour une description d´etaill´ee du s´equenceur et du multiplexeur). Le point important ici est que les MOS de lecture sont largement mis `a contribution par le multiplexeur en mode PEL commut´e ; et nous pensons que les ´etats transitoires de ces MOS lors de l’allu- mage peuvent lib´erer des charges parasites dans le circuit `a moyenne imp´edance (cf figure 3.11). Ces perturbations sont ensuite communiqu´ees `a l’´etage haute imp´edance par couplage capacitif du MOS de lecture (le mouvement des charges dans le circuit moyenne imp´edance induit le mouvement des charges dans le circuit haute imp´edance par le biais de la capacitance du MOS de lecture, dont la fonction de transfert est iCω). Des perturbations ´electroniques sont donc inject´ees p´eriodiquement dans l’´etage haute imp´edance. Rappelons que le bolom`etre agit comme un filtre passe-bas (cf section 2.1.2), c’est-`a-dire qu’il est capable de d´etecter les pics d’un signal p´eriodique si la constante de temps du filtre est beaucoup plus longue que la p´eriode des per- turbations ; dans ce cas l’injection de charges se traduit alors par un offset au niveau du pont bolom´etrique.

Suite `a cette analyse, nous avons essay´e d’ajouter diff´erentes valeurs d’offset aux points milieux du BFP bleu pour voir si cela pouvait r´econcilier les rapports d’imp´edance re-calcul´es avec le comportement attendu. La figure 4.10 montre l’´evolution du rapport Rbolo/Rref pour un

offset de 100 mV. L’am´elioration est manifeste. Les courbes deviennent coh´erentes avec celles du BFP rouge et nous retrouvons bien que le rapport tend vers 1 pour les faibles tensions de polarisation. Le ph´enom`ene d’injection de charges pourrait donc expliquer les diff´erences que nous observons entre les BFPs bleu et rouge (le BFP bleu est plus imp´edant donc poss`ede une constante de temps plus grande). Nous verrons dans la section 5.4 que le mode de lecture DDCS induit ´egalement des perturbations de ce type.

Pour mettre `a l’´epreuve notre interpr´etation, il faut pouvoir modifier l’amplitude et la p´eriode des injections de charges. Une solution serait de modifier le nombre de charges inject´ees en changeant le courant qui alimente le MOS de lecture (PEL), c’est-`a-dire Vgget Vdd, et de voir

l’evolution des rapports d’imp´edance. Nous pourrions ´egalement changer la fr´equence d’´echan- tillonnage pour que la p´eriode des perturbations deviennent longue devant la constante de temps des bolom`etres, l’offset parasite devrait alors disparaˆıtre. Il faudrait aussi estimer la valeur de

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Il serait ´eventuellement possible d’utiliser une boˆıte d’´eclatement entre BOLC et le cryostat pour connecter Vh `a Vl et commander `a BOLC des excursions de Vl. Toutefois, le Photom`etre a ´et´e int´egr´e dans l’instrument

112 Chapitre 4: La proc´edure d’´etalonnage

Fig. 4.10 Rapports d’imp´edance de la matrice 0 du BFP bleu pour lesquels nous avons ajout´e syst´ematiquement un offset de 100 mV `a tous les points milieux. Bien que le v´eritable offset ne soit pas a priori constant avec la tension de polarisation ou le flux incident, le r´esultat obtenu est flagrant : les rapports Rbolo/Rref (( modifi´es )) ont retrouv´e une allure similaire aux rapports du BFP rouge.

cet offset lorsque les matrices fonctionnent en mode PEL statique, ou alors en for¸cant le s´equen- ceur `a n’´echantillonner qu’un seul pixel. Dans ce cas, le MOS de lecture serait toujours aliment´e et aucune charge ne devrait ˆetre inject´ee dans le circuit haute imp´edance. Mais, `a nouveau, le Photom`etre PACS ´etant livr´e `a L’ESA, nous ne pouvons pas effectuer ces tests sur le mod`ele de vol. Cependant, nous allons bientˆot recevoir le mod`ele de rechange du Photom`etre sur lequel nous pourrons changer le s´equenceur et ´eventuellement confirmer la pr´esence d’un offset dˆu aux injections de charges du multiplexeur.

Remarquez que les tests pr´esent´es dans cette section ne sont pas de v´eritables mesures de performance, leur but premier ´etait simplement de sonder sans a priori le comportement des bolom`etres, mais nous avons quand mˆeme pu extraire de pr´ecieuses informations sur le fonctionnement physique des d´etecteurs. Notez ´egalement que la pr´esence de cet offset n’a aucune incidence sur la suite de la proc´edure d’´etalonnage ni sur les mesures de performance. Nous verrons d’ailleurs dans la section 5.2 que les points milieux que nous avons calcul´es et trac´es dans la figure 4.8 contiennent des informations physiques utiles `a l’´etalonnage des matrices de bolom`etres, notamment sur la non-lin´earit´e et la r´eponse des d´etecteurs (mˆeme pour le BFP

Fig. 4.11 Dispersion des points mileux en fonction de la tension de polarisation des ponts bolom´etriques. Cette dispersion est la d´eviation standard calcul´ee sur chaque matrice du BFP bleu pour un flux incident de 2 pW/pixel. Pour les fortes tensions de polarisation, la d´eviation pic-`a-pic peut d´epasser 300 mV, c’est-`a-dire la dynamique totale des convertisseurs num´eriques de BOLC.

bleu). L’existence de cet offset repr´esente uniquement une limitation pour interpr´eter et mesurer les param`etres physiques des bolom`etres.