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5.3 Le temps de r´eponse des bolom`etres

5.3.3 Les mesures statiques

Calculer la rapidit´e de r´eponse d’un bolom`etre `a partir de mesures statiques peut paraˆıtre pour le moins surprenant, et pourtant, dans l’espace de Fourier, nous avons acc`es `a l’´evolution fr´equentielle du signal sans avoir `a moduler le flux incident. En r´ealit´e ce sont les bruits blancs g´en´er´es par le bolom`etre qui jouent le rˆole (( d’excitation )) du signal `a toutes les fr´equences, et nous pouvons alors en th´eorie voir la signature du filtre passe-bas dans la densit´e spectrale de bruit d’un bolom`etre. Prenons par exemple le cas du bruit Johnson pour lequel l’agitation thermique des ´electrons dans la r´esistance produit un bruit constant `a toutes les fr´equences ; les variations de tension plus rapides que la constante de temps du bolom`etre se trouvent att´enu´ees, et nous pouvons interpr´eter cela comme un ralentissement des ´electrons les plus rapides. Il en va de mˆeme pour le bruit thermique auquel cas le d´eplacement des phonons rapides est frein´e par la constante de temps thermique, c’est-`a-dire par les poutres qui connectent l’absorbeur au puits de chaleur. Nous allons donc mod´eliser le comportement des bolom`etres dans l’espace de Fourier pour pouvoir en extraire l’information utile, c’est-`a-dire la fr´equence de coupure du filtre passe-bas.

D’apr`es l’inventaire des sources de bruit que nous avons dress´e dans la section 2.1.3, nous devons faire la distinction entre le bruit g´en´er´e par le bolom`etre lui-mˆeme et celui g´en´er´e par son ´electronique de lecture. La bande passante de l’´electronique basse imp´edance de PACS est de 1.5 kHz, nous consid´erons donc qu’il n’y a aucune information spectrale au-del`a de cette fr´equence. Le bruit de l’´electronique est repr´esent´e par un bruit blanc de 0 `a 1500 Hz sur lequel s’ajoute un bruit de la forme βe/ναe o`u le param`etre αe d´efinit la pente de la remont´ee de

bruit aux basses fr´equences du spectre de l’´electronique et βe donne l’emplacement du coude

de remont´ee. Le bruit du bolom`etre est mod´elis´e de la mˆeme fa¸con, c’est-`a-dire un bruit blanc et une remont´ee basse fr´equence de la forme βb/ναb, mais il est en plus multipli´e par un filtre

passe-bas dont l’amplitude est donn´ee par l’´equation (5.6). Puisqu’il s’agit de bruits non-corr´el´es, les spectres de l’´electronique et du bolom`etre sont ajout´es quadratiquement dans la bande de 1500 Hz. D’autre part, ce spectre simul´e doit ˆetre compar´e `a une densit´e spectrale de bruit dont la fr´equence de Nyquist est de 20 Hz, il faut donc le (( replier11 )) pour le rendre comparable avec

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Dans l’espace de Fourier, l’´energie pr´esente dans le signal `a des fr´equences sup´erieures `a celle de Nyquist (1/(2 × tmesure)) est repli´ee dans la bande observ´ee `a la fa¸con d’un accord´eon, c’est-`a-dire que chaque tron¸con de

20 Hz pr´esent dans le spectre de 1500 Hz est co-additionn´e, mais un tron¸con sur deux doit ˆetre retourn´e avant la co-addition.

142 Chapitre 5: Les mesures de performance

Fig. 5.15 ´Evolution des densit´es spectrales de bruit simul´ees pour diff´erentes valeurs de la fr´equence de coupure. Chaque spectre a ´et´e simul´e pour des constantes de temps ´electrique et thermique identiques, les autres param`etres qui d´efinissent le niveau de bruit et la remont´ee basse fr´equence sont les mˆemes pour toutes les courbes. Il semble que le niveau de bruit augmente avec la fr´equence de coupure, ceci est dˆu au repliement du spectre : plus la fr´equence de coupure augmente, plus l’´energie aux hautes fr´equences se replie dans la bande observ´ee.

les spectres mesur´es. Au total, nous avons besoin de 8 param`etres que nous consid´erons ind´epen- dants pour mod´eliser les spectres de bruit : 3 pour le bruit de l’´electronique, 3 pour le bruit du bolom`etre et 2 pour le filtre passe-bas (τe et τth). La figure 5.15 montre l’´evolution des densit´es

spectrales de bruit obtenues `a partir de ce mod`ele lorsque la fr´equence de coupure augmente. Ces courbes ont ´et´e r´ealis´ees avec les mˆemes param`etres de bruit, seules les constantes de temps ´evo- luent (avec τe= τth dans le cas pr´esent). Le fait d’augmenter la fr´equence de coupure νc a pour

cons´equence d’ouvrir la bande passante et d’augmenter le niveau de bruit aux hautes fr´equences.

D’autre part, nous avons mesur´e des densit´es spectrales de bruit pour diff´erentes ten- sions de polarisation dans le but de mettre en ´evidence l’´evolution de la constante de temps des bolom`etres. La figure 5.16 pr´esente nos r´esultats pour des tensions comprises entre 1.8 et 3.5 V sur le BFP bleu. Pour obtenir ces spectres, nous avons pris des sous-´echantillons de 4 mi- nutes extraits de mesures de 3 heures, nous avons co-additionn´e les 45 spectres calcul´es, puis nous avons moyenn´e les spectres des pixels fonctionnels d’une mˆeme matrice du BFP bleu. Les spectres produits poss`edent donc des fluctuations statistiques tr`es faibles qui laissent apercevoir le d´eplacement de la fr´equence de coupure vers les hautes fr´equences lorsque la tension de po- larisation augmente (cf figure 5.16). Pour d´eterminer la valeur de la fr´equence de coupure de chacun de ces spectres, nous les avons ajust´e avec le mod`ele pr´esent´e pr´ec´edemment grˆace `a la

Fig.5.16 ´Evolution de la densit´e spectrale de bruit mesur´ee en fonction de la tension de polarisa- tion. Ces spectres sont obtenus sur des mesures de 3 heures pour un flux incident de 2 pW/pixel, ils sont de plus moyenn´es sur un BFP entier pour r´eduire les fluctuations statistiques. Les courbes du haut montrent que le bruit basse fr´equence est ind´ependant de la tension. Le graphe du bas met en ´evidence le d´eplacement de la fr´equence de coupure du filtre passe-bas des bolom`etres. Plus la fr´equence de polarisation augmente, plus les d´etecteurs sont rapides.

144 Chapitre 5: Les mesures de performance

Tension de polarisation [V] 1.8 2.6 3.0 3.5

Bruit blanc ´electronique [µV/√Hz] 0.013 0.011 0.013 0.028

Bruit blanc bolom`etre [µV/√Hz] 0.87 3.92 3.63 0.89

βe : Coude 1/f ´electronique [µV/ √ Hz] 4.36 2.39 2.35 3.38 βb : Coude 1/f bolom`etre [µV/√Hz] 3.02 1.85 1.62 1.73 αe : Exposant 1/f ´electronique 0.47 0.78 0.81 0.87 αb : Exposant 1/f bolom`etre 0.74 0.79 0.84 0.81

τe : Constante de temps ´electronique [ms] 177 42 10.6 1.28

τth : Constante de temps bolom`etre [ms] 21 1.9 11.0 4.79

νc: Fr´equence de coupure globale [Hz] 0.88 3.78 9.49 31.2

Tab.5.1 R´esultats des ajustements de densit´es spectrales de bruit en fonction de la tension de polarisation. Nous donnons les 8 param`etres n´ecessaires au mod`ele pour reproduire les spectres, anisi que la valeur calcul´ee de la fr´equence de coupure globale des bolom`etres. Voir le texte pour le d´etail des ajustements et l’interpr´etation de ces chiffres.

m´ethode du Simplex (Nedler and Mead 1965). Nous n’allons pas d´ecrire le principe de fonction- nement du Simplex, le lecteur pourra se r´ef´erer `a l’article de Caceci and Cacheris (1984) pour plus de d´etails, mais notez toutefois que le Simplex permet de converger plus rapidement qu’une simple minimisation de χ2 qui, elle, s’est av´er´ee trop gourmande en temps de calcul dans notre

cas d’´etude. Le tableau 5.1 r´esume les r´esultats d’ajustement obtenus pour les quatres spectres pr´esent´es dans la figure 5.16.

Les fr´equences de coupure calcul´ees `a partir des valeurs de τe et τth semblent en ac-

cord avec les spectres de la figure 5.16. Toutefois, il semble que les 8 param`etres soient d’une certainement mani`ere d´eg´en´er´es. Par exemple, une baisse de niveau de bruit blanc du bolom`etre pourrait ˆetre compens´ee par une l´eg`ere hausse du niveau de bruit blanc de l’´electronique qui, lui, est repli´e 75 fois (1500 Hz repli´e dans une bande de 20 Hz).

Nous avons de plus identifi´e une raison pour laquelle le mod`ele ne peut reproduire exactement les spectres de bruit : les 8 param`etres ne sont pas ind´ependants comme nous l’avons suppos´e. Il faudrait donc affiner ce mod`ele simpliste en y injectant les relations physiques qui existent entre le niveau de bruit et la valeur de la constante de temps via les r´esistances thermique et ´electrique, par exemple, pour mieux contraindre les ajustements et remonter `a des valeurs de bruit plus fiables. Remarquez ´egalement que notre approche ne peut ˆetre appliqu´ee que pour des spectres dont les fluctuations statistiques sont tr`es faibles. En effet il est difficile d’ajuster des spectres de pixels individuels comme celui pr´esent´e dans la figure 5.3, cette approche ne permet donc pas d’obtenir des cartes de constantes de temps ou de niveaux de bruit comme c’est le cas pour les mesures dynamiques.

Les mesures de constantes de temps par ajustement de densit´es spectrales de bruit re- pr´esentent une approche originale et potentiellement int´eressante pour extraire des informations quantitatives globales des matrices de bolom`etres. Toutefois, dans son ´etat actuel, le mod`ele nous permet seulement de confirmer l’´evolution de la fr´equence de coupure avec la tension de polarisation.