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5.3 Le temps de r´eponse des bolom`etres

5.3.2 Les mesures dynamiques

Le travail pr´esent´e dans cette section est bas´e sur la premi`ere partie d’un document que j’ai ´ecrit en 2005 dont l’objectif ´etait de communiquer les performances pr´eliminaires des

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Par construction des matrices PACS, les constantes de temps ´electrique et thermique sont du mˆeme ordre de grandeur, autour de 10 Hz.

Fig. 5.12 ´Evolution de l’amplitude d’un signal modul´e en fonction de la fr´equence de modula- tion. Chaque courbe correspond `a la moyenne des amplitudes mesur´ees sur une matrice enti`ere pour une tension de polarisation donn´ee. Le flux incident est de 3 pW/pixel. Les courbes sont normalis´ees par rapport au premier point mesur´e `a 0.3 Hz. L’amplitude des modulations chute avec la fr´equence comme attendu pour un filtre passe-bas, seules les basses fr´equences ne sont pas alt´er´ees par le filtre. La ligne horizontale indique une att´enuation de 3 dB et donne en th´eorie la fr´equence de coupure associ´ee `a une tension donn´ee. Les bolom`etres sont d’autant plus rapides que la tension de polarisation est ´elev´ee.

d´etecteurs de vol aux futurs utilisateurs du Photom`etre PACS afin qu’ils puissent pr´eparer effi- cacement leurs programmes d’observations. Le rapport en question se trouve dans l’annexe A.5. Le but de la proc´edure de test que nous d´ecrivons ici est de mesurer l’´evolution de l’am- plitude d’un signal modul´e en fonction de la fr´equence de modulation. Nous cherchons `a mettre en ´evidence l’att´enuation de l’amplitude modul´ee pour en extraire la valeur des constantes de temps thermique et ´electrique. En pratique, nous chauffons deux corps noirs `a l’int´erieur du cryostat de test de sorte que l’on obtienne des flux incidents de 3 et 3.5 pW/pixel au niveau du plan focal. Nous utilisons ensuite un chopper pour moduler le flux `a une fr´equence donn´ee et nous mesurons l’amplitude du signal ´electrique en sortie du d´etecteur pour plusieurs tensions de polarisation (de 1.8 `a 3.5 V) et pour plusieurs fr´equences de modulation (de 0.3 `a 7.36 Hz). Les fr´equences du chopper ont ´et´e choisies incommensurables avec la fr´equence d’´echantillonnage pour s’assurer que le maximum des modulations soit bien ´echantillonn´e (un cycle chopper ne contient que 5 points de mesure `a 7.36 Hz). Pour chaque couple de param`etres (tension, f requence), nous reconstrui- sons un seul cycle chopper en suivant la proc´edure pr´esent´ee pr´ec´edemment et nous calculons l’amplitude de la modulation. Le r´esultat de ces mesures est r´esum´e dans la figure 5.12. Pour une tension de polarisation donn´ee, les amplitudes de modulation sont normalis´ees par rapport

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`a l’amplitude mesur´ee `a 0.3 Hz pour laquelle le filtre a un effet n´egligeable. La ligne horizontale est un indicateur qui correspond `a une att´enuation de la modulation de 3 dB (∼71 %). L’inter- section entre les courbes mesur´ees et cette ligne horizontale nous donne en th´eorie la valeur de la fr´equence de coupure globale du filtre electro-thermique.

Notez que si la modulation de flux incident ´etait sinuso¨ıdale, alors les courbes de la figure 5.12 repr´esenteraient exactement ce que nous cherchons, c’est-`a-dire le filtre passe-bas dans l’espace de Fourier. En effet, la transform´ee de Fourier d’une sinuso¨ıde ´etant un pic de Dirac, mesurer l’amplitude des modulations pour plusieurs fr´equences serait alors ´equivalent `a multiplier le filtre par un peigne de Dirac. Id´ealement, cette proc´edure reviendrait `a ´echantillonner le filtre aux fr´equences mesur´ees. Cependant, la modulation fournit par le chopper ressemble plutˆot `a un signal carr´e liss´e (cf figure 2 dans l’annexe A.5) dont le spectre contient de nombreuses harmoniques, et la pr´esence de ces harmoniques entraˆıne une sous-estimation de la fr´equence de coupure νC. Par exemple, pour une modulation `a 0.7 Hz et une fr´equence de coupure de

5 Hz, il y a 6 harmoniques qui contribuent `a l’amplitude associ´ee `a 0.7 Hz, alors que pour une modulation `a 3.52 Hz, seule la fondamentale contribue `a l’amplitude des modulations. Plus la fr´equence de modulation augmente et plus les harmoniques se d´eplacent et sortent de la bande passante du filtre, diminuant ainsi l’amplitude des modulations.

Le travail men´e en 2005 repose sur la simulation du filtrage des modulations dans l’espace direct plutˆot que dans l’espace de Fourier. En effet, pour repr´esenter le plus fid`element possible le comportement des bolom`etres et extraire la valeur des constantes de temps, nous simulons des signaux carr´es aux mˆemes fr´equences que celles mesur´ees durant la proc´edure de test, nous les convoluons successivement par deux filtres de la forme e−t/τ, puis nous mesurons l’amplitude du signal associ´e au couple (τth, τelec) test´e, et nous reportons le r´esultat sur la

figure 5.12 pour comparaison. Il ressort de ces mesures que le temps de r´eponse des bolom`etres ne d´epend que faiblement du flux incident. Par contre, la tension de polarisation a une influence bien plus marqu´ee sur leur rapidit´e. Par exemple, la fr´equence de coupure moyenne du BFP bleu est de l’ordre de 2 Hz pour une tension de polarisation de 1.8 V alors qu’elle vaut 6 Hz pour une tension de 3.5 V (cf annexe A.5 pour plus de d´etails). Pour un flux de 3 pW/pixel et une tension de polarisation nominale de 2.7 V, l’ajustement des courbes simul´ees donne des constantes de temps de 58.8 et 20 ms. Nous ne pouvons cependant pas d´eterminer l’origine thermique ou ´electrique de chacune de ces constantes. Il faudrait pour cela mod´eliser le comportement physique des bolom`etres du CEA et pr´edire leur ´evolution en fonction de chacun des param`etres du syst`eme (temp´erature du bain, flux incident, tension de polarisation, R(T, V ), C(T ), G(T )). Notez cependant que la capacit´e ´electrique de l’´etage haute imp´edance du d´etecteur est a priori ind´ependante de la temp´erature du bolom`etre, et que c’est l’imp´edance de la thermistance qui d´efinit enti`erement l’´evolution de la constante de temps ´electrique (τelec= RCelec). Nous savons

par ailleurs que cette imp´edance est une fonction fortement d´ecroissante de la temp´erature et du champ ´electrique (cf ´equation 3.4) ; par cons´equent, lorsque la dissipation Joule ´echauffe le bolom`etre et que la tension aux bornes de la r´esistance augmente, l’imp´edance chute et la constante de temps s’en trouve alors consid´erablement raccourcie (cf figure 5.12).

Fig.5.13 Distribution spatiale de la fr´equence de coupure des bolom`etres du BFP bleu pour un flux de 3 pW/pixel et une tension de polarisation de 2.7 V. La carte de r´eponse de la figure 5.2 est en fait la carte (( compl´ementaire )) de celle-ci. L’histogramme de droite montre la dispersion de νC sur cette carte.

La distribution spatiale des fr´equences de coupure mesur´ees sur le BFP bleu est pr´e- sent´ee dans la figure 5.13 pour un flux incident de 3 pW/pixel et une tension de polarisation de 2.7 V. Nous trouvons deux populations de pixels ayant une fr´equence de coupure autour de 3.5-4 Hz (en bleu sur la carte) et autour de 5 Hz. Il est int´eressant de comparer cette carte avec la carte de r´eponse de la figure 5.2. En effet, les pixels les plus imp´edants ont une r´eponse plus ´elev´ee (car leur point de fonctionnement sur la figure 3.8 donne un coefficient α = R1∂R∂T plus grand) et une constante de temps ´electrique plus longue (car τelec= RCelec). Cela explique

pourquoi les pixels les plus r´epondants sont ´egalement les plus lents, et vice versa ; les cartes de r´eponse et de fr´equence de coupure sont donc (( compl´ementaires )).

Par ailleurs, lors de l’inspection visuelle des matrices du mod`ele de vol, nous avons re- p´er´e plusieurs corps ´etrangers sur certains pixels. Ces particules sont probablement maintenues en place par des forces ´electrostatiques et elles resteront (( accroch´ees )) au pixel tout au long de la mission. Ces r´esidus sont de taille et de forme variables, ils proviennent tr`es certainement de r´esidus de r´esine ou de colle utilis´ees lors de la fabrication des matrices. Ces r´esidus sont relativement petits, quelques dizaines de microns en g´en´eral, mais leur capacit´e calorifique n’est pas forc´ement n´egligeable et elle s’ajoute quoi qu’il en soit `a celle des absorbeurs. Nous nous attendons alors `a ce que la constante de temps thermique (τth = Cth/Gth) de ces pixels soit

rallong´ee. La figure 5.14 montre deux photographies d’un tel pixel (( alourdi )) ; nous voyons une vue rapproch´ee du corps ´etranger sur celle de droite, et sur l’autre nous avons une vue plus g´en´erale de la matrice qui nous permet de localiser le pixel10 sur la carte de bande passante de

la figure 5.13 ; sa fr´equence de coupure est effectivement plus courte et semble aberrante par rapport `a celle des pixels voisins.

Les mesures de constante de temps se sont av´er´ees relativement difficiles `a effectuer, et

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La matrice en question se trouve en haut au centre-gauche. En partant du pixel en bas `a gauche de la matrice, le pixel lent est le septi`eme `a droite et le quatri`eme en haut.

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Fig. 5.14 Ces photographies ont ´et´e obtenues lors de l’inspection visuelle du BFP bleu avec une loupe binoculaire. Celle de gauche montre une matrice sur laquelle nous avons rep´er´e un corps ´etranger accroch´e `a un pixel (zoom sur la photographie de droite). Ce r´esidu augmente sensiblement la masse de l’absorbeur de sorte que la constante de temps du pixel s’en trouve rallong´ee (cf matrice du haut centre-gauche de la figure 5.13). Les reflets blancs visibles sur les murs inter-pixels sont tr`es probablement des r´esidus de r´esine, leur pr´esence ne change rien `a la constante de temps des bolom`etres.

nous devons maintenant prendre un peu de recul pour estimer la fiabilit´e de nos r´esultats. La difficult´e majeure que nous avons rencontr´ee durant ces tests concernait le contrˆole de la tem- p´erature du plan focal. En effet, nous utilisons un moteur cryog´enique pas-`a-pas pour actionner le chopper. Ce dispositif fonctionne parfaitement pour les faibles fr´equences de modulation, par contre, il est n´ecessaire de sur-alimenter le moteur (∼ 20 V) pour pouvoir moduler le signal `a des fr´equences sup´erieures `a quelques Hz. Le probl`eme est que, dans ce cas, le moteur dissipe beaucoup trop d’´energie au niveau du plateau optique. L’´el´evation de temp´erature qui s’ensuit est significative (plusieurs dixaines de mK) et perturbe les mesures de la fa¸con suivante :

– L’imp´edance des bolom`etres diminue selon l’´equation (3.4), et la constante de temps τelec = RCelec se trouve alors involontairement raccourcie. Ceci m`ene `a une sur-

estimation de la fr´equence de coupure.

– Le point de fonctionnement des r´esistances se d´eplace sur la courbe R(T ) de la figure 3.8 , le coefficient α = R1 ∂R∂T diminue. La r´eponse des bolom`etres est donc plus faible lorsque le moteur ´echauffe le plan focal aux fr´equences ´elev´ees. Ceci m`ene `a une sous-estimation de la fr´equence de coupure.

– Nous avons aussi observ´e une ´el´evation de temp´erature d’un des deux corps noirs d’environ 1-2 K lorsque le chopper tourne trop vite (νc &5 Hz). Une telle diff´erence de

temp´erature changerait significativement le flux incident. Nous suspectons toutefois que cet ´echauffement ne soit pas r´eel mais plutˆot dˆu `a un probl`eme de la sonde de temp´erature.

D’autre part, la d´etermination des constantes de temps suppose que la modulation de flux soit carr´ee. Or, nous savons que ce n’est pas exactement le cas, elle est plutˆot lisse et asym´etrique entre les deux plateaux chopper (cf figure 2 de l’annexe A.5). Ceci m`ene encore une fois `a une sous-estimation de la fr´equence de coupure.

Au bout du compte, nous estimons l’erreur des mesures pr´esent´ees dans la figure 5.12 `a environ 10-30 %. Les mesures dynamiques r´ealis´ees `a Saclay n’´etant manifestement pas tr`es fiables, nous nous tournons vers les densit´es spectrales de bruit pour en extraire la fr´equence de coupure du filtre.