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4.3 L’exploration des ponts bolom´etriques et de leurs points milieux

4.3.1 Mesure, calcul et interpr´etation des points milieux

Maintenant que nous avons obtenu les courbes d’´etalonnage de l’´electronique de lec- ture, nous nous int´eressons au comportement des bolom`etres eux-mˆeme. Nous explorons donc syst´ematiquement le niveau de point milieu de tous les pixels en fonction de quelques param`etres judicieusement choisis que nous avons d´ej`a d´ecrit dans la section 4.1.2. L’objectif de ce test n’est pas de mesurer les performances des matrices de bolom`etres mais plutˆot de quantifier l’influence de ces quelques param`etres critiques sur le point milieu ainsi que sur le signal de sortie de la cam´era. Ces mesures sont indispensables `a la proc´edure d’´etalonnage car elles contiennent les informations n´ecessaires `a la pr´ediction du r´eglage des d´etecteurs pour l’´etape suivante qui est d´edi´ee aux v´eritables mesures de performance (cf chapitre 5).

Afin d’explorer une vaste gamme de param`etres de r´eglage sans se soucier de la saturation des convertisseurs num´eriques, nous mettons BOLC en mode de gain faible pour ´elargir sa dyna- mique `a 1.3 V (au lieu de 330 mV en gain fort) comme nous l’avons fait pour mesurer la fonction de transfert de l’´electronique. Nous fixons ´egalement les tensions secondaires du circuit de lec- ture `a leurs valeurs nominales. Le but de ces tests ´etant de mesurer le niveau de point milieu, nous choisissons le mode de lecture le plus simple pour interpr´eter et reconstruire les points milieux plus facilement, c’est-`a-dire le mode direct. La tension de r´ef´erence Vref n’est donc pas

utilis´ee pour ce test. D’autre part, en mettant BOLC en mode de gain faible, nous avons relax´e la contrainte sur la dynamique de l’´electronique chaude, il n’est donc en principe pas n´ecessaire de modifier la tension Vhbpour ajuster le signal dans la dynamique de BOLC pour chaque confi-

guration test´ee. En pratique, pourtant, nous avons toujours utilis´e les valeurs de Vhbobtenues `a

l’occasion de tests ant´erieurs qui centraient le signal dans la dynamique de BOLC.

Le signal de sortie de chacune des configurations test´ees poss`ede donc un offset diff´erent qu’il faut prendre en compte pour remonter `a la valeur de point milieu qui a engendr´e ce signal. Pour ce faire, nous utilisons les courbes d’´etalonnage de l’´electronique de lecture (fig. 4.4). En effet, la fonction de transfert est une bijection qui nous fournit un lien direct entre le signal entrant dans le CL et celui sortant de BOLC, moyennant que la valeur de Vhb soit connue. En

se ramenant `a l’entr´ee du circuit de lecture, nous corrigeons donc les gains et offsets de l’´electro- nique de lecture. Le signal reconstruit de cette fa¸con ne d´epend plus du r´eglage de l’´electronique, `a savoir Vref et Vhb, et tous les points milieux sont alors des tensions absolues, c’est-`a-dire com-

parables entre elles.

Avant de pr´esenter nos r´esultats et pour faciliter leur interpr´etation, il est utile de rappeler que l’imp´edance de la r´esistance de r´ef´erence Rref et celle du bolom`etre Rbolod´ependent

exponentiellement de leur temp´erature et du champ ´electrique appliqu´e `a leurs bornes comme d´ecrit dans l’´equation (3.4). En outre, l’´equation qui relie la tension de polarisation du pont bolom´etrique Vpolar `a la tension aux bornes de la thermistance Vptmil s’obtient facilement en

104 Chapitre 4: La proc´edure d’´etalonnage Rbolo Rref Vpolar Vh Vl Vbolo Vptmil

Fig. 4.6 Sch´ema simplifi´e d’un pont bolom´etrique. Nous rappelons ´egalement la convention d’appellation des diff´erentes tensions mises en jeu.

´ecrivant la loi d’Ohm4 aux bornes du pont bolom´etrique et de la thermistance (cf figure 4.6 pour un rappel sur les notations utilis´ees). Nous obtenons la formule suivante en ´egalisant les courants :

Vptmil =

Rbolo

Rbolo+ Rref × Vpolar

(4.7) Cette formule exprime la fonction (( pont diviseur de tension )) du bolom`etre. En effet, pour une tension d’entr´ee Vpolar donn´ee, le rapport RboloRbolo+Rref d´efinit compl`etement la tension de sortie

Vptmil (Vptmil est toujours inf´erieure `a Vpolar).

La distribution spatiale des points milieux du plan focal bleu du PhFPU est donn´ee dans la figure 4.7 pour une tension de polarisation de 1.8 V et un flux de 2 pW/pixel. Les espaces inter-matrices y sont repr´esent´es en noir. Ils ont ici une largeur par d´efaut de 1 pixel mais des mesures plus pr´ecises effectu´ees lors de la campagne d’´etalonnage montrent que l’espacement est l´eg`erement plus grand qu’un pixel. Environ 2 % des pixels ont des points milieux aberrants, nous les appellerons par la suite les pixels morts. Ces pixels ne sont pas fonctionnels pour diverses raisons. D’apr`es les rapports de test du LETI, certains pixels poss`edent des poutres coll´ees, dans ce cas la grille absorbante se trouve thermalis´ee `a la temp´erature du bain et le bolom`etre ne peut d´etecter aucun flux incident, d’autres ne sont tout simplement pas connect´es ´electriquement au circuit de lecture, ceux-ci sont alors totalement inutilisables. En ce qui concerne la colonne morte de la matrice en haut `a droite de la figure 4.7 qui porte le nom de SMD N◦05-07 (cf annexe D),

elle a ´et´e sacrifi´ee pour sauver le reste de la matrice. En effet, nous avions s´electionn´e cette matrice pour ses bonnes performances, elle a donc ´et´e int´egr´ee dans le plan focal du mod`ele de

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Fig.4.7 Distribution spatiale des points milieux du BFP bleu pour une tension de polarisation des ponts bolom´etriques de 1.8 V et un flux incident de 2 pW/pixel. Les pixels morts repr´esentent seulement 2 % de la totalit´e des pixels. L’histogramme de droite montre que la dispersion des points milieux pour cette tension de polarisation est de l’ordre de 150 mV.

vol d´ebut 2005. Cependant lorsque nous avons test´e le plan focal complet, cette matrice n’´etait pas fonctionnelle, la tension VSM S qui contrˆole le multiplexeur n’atteignait pas le circuit de lec-

ture. Le LETI a alors entrepris une op´eration tr´es d´elicate de pontage, c’est-`a-dire qu’une ligne ´electrique d´edi´ee `a la lecture d’une colonne de pixel a ´et´e d´etourn´ee pour acheminer le signal du multiplexeur du BU vers le CL. Le choix de la colonne s’est port´ee sur celle qui ´etait la plus proche physiquement de la ligne du multiplexeur `a ponter (sinon nous aurions choisi une colonne externe du BFP). L’op´eration s’est pass´ee comme pr´evu et nous avons r´ecup´er´e les 15 autres colonnes de la matrice SMD N◦05-07 fonctionnelles en Septembre 2005.

Les pixels fonctionnels montrent une distribution relativement lisse des points milieux sur chaque groupe. Toutefois les deux matrices du groupe 4 (SMB N◦04-32 dans l’annexe D, ou

bien en haut `a droite sur la figure 4.7) n’ont pas les mˆeme offsets et leurs niveaux de points milieux se trouvent d´ecal´es d’environ 100 mV. ´Etant donn´e que les tensions de r´eglage sont appliqu´ees `a chaque groupe et non `a chaque matrice, le groupe 4 est particuli`erement d´elicat `a r´egler puisque soit l’une, soit l’autre des matrices se retrouve proche de la limite de saturation de BOLC. La dispersion des points milieux de la figure 4.7 s’´el`eve `a environ 150 mV, mais elle peut atteindre plus de 350 mV pour les fortes tensions de polarisation des ponts bolom´etriques (cf fig. 4.11). Notez que la dynamique de BOLC en gain fort n’est que de 330 mV.

Afin de tester le comportement des bolom`etres, nous explorons 24 valeurs de Vh, Vl

et Vhb ainsi que 16 valeurs de flux incident. L’objectif est de tester les matrices pour des flux

compris entre 0 et 7 pW/pixel (par pas de 1 pW/pixel) sur chacun des BFP ; mais puisque les sources de calibration du banc de test PACS n’ont pas le mˆeme spectre d’´emission que le t´elescope Herschel, nous mesurons en plus des flux de 0 `a 0.2 pW/pixel sur le BFP bleu (ce qui correspond `a des flux de 0 `a 7 pW/pixel sur le BFP rouge), et de 8 `a 32 pW/pixel sur le BFP rouge (ce qui correspond `a des flux de 0 `a 7 pW/pixel sur le BFP bleu). Les points milieux

106 Chapitre 4: La proc´edure d’´etalonnage

Fig.4.8 ´Evolution des points milieux moyenn´es sur une matrice enti`ere (matrice bleue `a gauche et rouge `a droite) en fonction de la tension de polarisation des ponts bolom´etriques. Chaque courbe correspond `a une temp´erature de la source de calibration. Les barres d’erreur repr´esentent la dispersion r.m.s. sur la matrice enti`ere en fonction de la tension de polarisation. Elles ne d´ependent que faiblement du flux incident, c’est pour cela que nous ne les tra¸cons que sur une seule courbe. Plus nous polarisons les ponts bolom´etriques et plus le point milieu augmente jusqu’au point o`u la dissipation ´electrique et les effets de champ font chuter l’imp´edance des r´esistances. Ces points milieux ont ´et´e obtenus en mode de lecture direct avec le gain faible de BOLC.

reconstruits `a partir des mesures en gain faible sont pr´esent´es dans la figure 4.8.

Chaque point de cette figure repr´esente la moyenne spatiale des points milieux d’une mˆeme matrice5pour une tension de polarisation et un flux donn´es. En utilisant la moyenne, nous choisissons de montrer le comportement g´en´eral d’une matrice enti`ere, et nous v´erifions que ces r´esultats restent repr´esentatifs du comportement individuel de la plupart des bolom`etres. Chaque courbe illustre l’´evolution des points milieux pour un flux incident constant.

La figure 4.8 montre que pour des tensions de polarisation comprises entre 1 et 2 V, Vptmil augmente avec Vpolar (cf ´equation 4.7). Toutefois, pour les tensions de polarisation plus

´elev´ees, l’imp´edance du pont bolom´etrique s’effondre, et ce pour deux raisons. D’une part, la dissipation ´electrique par effet Joule ´echauffe la thermistance et son imp´edance chute exponen- tiellement en suivant l’´equation (3.4). D’autre part, l’effet de champ augmente avec la tension aux bornes de la r´esistance, ce qui engendre ´egalement une chute exponentielle d’imp´edance.

Pour une tension de polarisation donn´ee, le point milieu diminue avec le flux incident. En effet lorsque le flux augmente, la temp´erature de l’absorbeur s’´el`eve ce qui engendre une chute de l’imp´edance de la thermistance, et donc une diminution de la tension aux bornes de celle-ci. Une ´etude plus approfondie de l’influence du flux sur l’´evolution des points milieux est

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pr´esent´ee dans la section 5.2.1 qui est consacr´ee `a la non-lin´earit´e des bolom`etres.

Ces courbes de points milieux nous donnent d´ej`a une premi`ere indication, `a savoir que les performances des bolom`etres se trouvent limit´ees aux fortes polarisations. Nous voyons en effet que toutes les courbes semblent converger vers une mˆeme valeur de point milieu pour les fortes polarisations quelque soit le flux incident. C’est d’autant plus flagrant sur le BFP bleu (graphe de gauche sur la figure 4.8) sur lequel la tension de polarisation est explor´ee jusqu’`a 3.5 V (3 V sur le BFP rouge). Si les courbes de point milieu se (( rapprochent )), cela signifie que l’influence du flux incident diminue avec la tension de polarisation, c’est-`a-dire que la r´eponse des d´etecteurs diminue. Nous aborderons ce sujet plus en d´etail dans la section 5.1.1.

Nous avons trouv´e dans la section 4.2 la limite de fonctionnement de l’´electronique de lecture, et il est crucial que le signal d’entr´ee du CL respecte cette limite. En effet, si le r´eglage et les conditions d’illumination des bolom`etres occasionnent une tension d’entr´ee du CL inf´erieure `a 250 mV, alors le signal bolom´etrique ne sera pas transmis correctement et le calcul de points milieux n’aura aucune signification physique, il ne nous renseignera donc pas sur l’´etat du pont bolom´etrique. D’apr`es la figure 4.6, nous trouvons la relation suivante entre le signal d’entr´ee du CL, Vbolo, et la tension aux bornes de la thermistance, Vptmil :

Vbolo= Vptmil+ Vl (4.8)

Pour une valeur de Vptmildonn´ee, c’est-`a-dire pour un flux et une tension de polarisation donn´es,

nous pouvons choisir la valeur de Vl de sorte que la tension d’entr´ee du CL soit sup´erieure `a

250 mV. Cependant, avec l’´electronique chaude du photom`etre PACS, Vl ne peut prendre que

des valeurs n´egatives. Dans certaines conditions d’utilisation, le niveau de point milieu est alors trop bas pour passer au-dessus de la barri`ere des 250 mV, mˆeme avec un Vl maximum de 0 V.

C’est par exemple le cas dans la figure 4.8 pour les faibles tensions de polarisation et les forts flux du BFP rouge (graphe de droite). De 0 `a 7 pW/pixel, aux basses tensions de polarisation, les courbes de points milieux sont parall`eles ; par contre, pour les flux sup´erieurs `a 10 pW/pixel, nous voyons que les courbes convergent vers 200 mV quelque soit le flux incident. Cela signifie que le signal d’entr´ee du CL n’est pas suffisamment ´elev´e dans ces conditions d’illumination, et que les transistors du CL commencent `a saturer. Nous devons donc rejeter ces points milieux qui ne sont pas repr´esentatifs de l’´etat des ponts bolom´etriques. Il en est de mˆeme pour les tensions de polarisation inf´erieures `a 1 V o`u le point milieu est le plus souvent inf´erieur `a 300 mV (points non-visibles sur les graphes de points milieux).

Il existe par ailleurs une limitation sur la pr´ecision des courbes de la figure 4.8, et cette incertitude est li´ee `a la d´erive basse fr´equence des d´etecteurs. En effet, les courbes d’´etalonnage de l’´electronique permettent de corriger le signal de sortie uniquement pour les gains et offsets du circuit de lecture `a un instant donn´e ; mais les d´erives basses fr´equences de l’´electronique et du bolom`etre lui-mˆeme ne sont pas corrig´ees lors du calcul des points milieux. La mesure des

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168 configurations de tensions et flux pr´esent´ees dans la figure 4.8 a n´ecessit´e plus de 30 heures de test ; les gains et offsets du syst`eme ont effectivement eu le temps de varier librement au cours de ces mesures. En extrapolant la courbe de la figure 4.2 pour laquelle les r´eglages sont constants, nous estimons la d´erive du syst`eme `a un maximum de quelques mV pour une dur´ee de ∼30 heures. Rappelons tout de mˆeme que l’objectif de ces mesures en gain faible n’est pas de mesurer les performances des bolom`etres ni de quantifier leur stabilit´e, et qu’une pr´ecision de quelques mV reste tout `a fait compatible avec notre objectif premier d’automatiser le r´eglage des d´etecteurs (ces quelques mV sont `a comparer avec la dynamique des ADC).

Le but de ces quelques remarques sur la stabilit´e des d´etecteurs est simplement de pr´evenir le lecteur que les d´erives basses fr´equences affectent les courbes de points milieux. Nous pr´esentons une analyse plus d´etaill´ee de ces d´erives dans les sections 5.2 et 6.3 ; nous verrons par la suite que, malgr´e les lentes fluctuations de signal inh´erentes `a tout instrument de mesure, la reconstruction des points milieux est un calcul suffisament pr´ecis pour pr´edire le r´eglage des bolom`etres, et que nous pouvons de plus extraire la r´eponse des bolom`etres `a partir des courbes de points milieux avec une pr´ecision tout `a fait raisonnable de 10 %.