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PRECONISATIONS POUR LA MISE EN PLACE D’UN SYSTEME DE PILOTAGE

1. Place des acteurs dans l’introduction du contrôle de gestion

1.2. Le rôle décisif de l’expert comptable

Un accompagnement indispensable

Dans la plupart des PME, l’expert comptable occupe un rôle central dans la vie de l’organisation. Les compétences des dirigeants sont souvent centrées sur le cœur de métier : en référence à la théorie des ressources, l’entreprise se construit autour de ce qu’elle sait faire et il lui est nécessaire d’avoir recours à des compétences externes pour la gestion de l’entreprise et ses différents aspects : fiscaux, légaux, sociaux, etc. On fait alors appel à un expert comptable, principalement parce que l’entreprise ne dispose pas à ce moment des ressources financières suffisantes pour recruter en interne un directeur administratif et financier. L’expert comptable va apporter ses compétences en gestion et répondre aux besoins des dirigeants, ce à plusieurs niveaux :

- Conseil en gestion ;

- Aspect technique de la comptabilité ; - Obligation légale de l’entreprise.

Il va rapidement devenir l’interlocuteur privilégié du dirigeant, sur lequel ce dernier va se reposer. L’Ordre des Experts Comptables24 qualifie d’ailleurs ses membres de « partenaire-conseil » ou de « conseiller permanent ». Les connaissances détenues par l’expert comptable viennent alors compenser celles manquantes aux dirigeants. Des missions d’audit pourront également être conduites par la suite. Grâce à ses capacités d’écoute, de communication, d’analyse et ses qualités de pédagogue, l’expert comptable occupe une place

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194 centrale dans la vie de l’organisation et dans son fonctionnement interne. Il doit servir d’appui aux prises de décision, en présentant les avantages et les inconvénients des différents scénarii mais il ne doit normalement pas apporter d’éléments personnels pouvant influencer la décision du dirigeant. Toutefois, une complicité nait bien souvent entre l’expert comptable et son dirigeant, et ce dernier en attend des conseils individualisés et personnalisés, prenant en compte ses attributs personnels. Il est également un acteur clé pour gérer les relations avec les établissements financiers, les organismes d’Etat, etc. Au fur et à mesure que l’entreprise se développe, l’expert comptable voit ses missions dans l’entreprise évoluer : il délègue les aspects techniques de la comptabilité concernant les écritures en cours d’exercice pour se concentrer sur celles de fin d’exercice, il conseille le dirigeant dans les opportunités de l’entreprise, en s’appuyant si nécessaire sur d’autres compétences (juriste, avocat, fiscaliste, etc.). Au niveau comptable, seules les missions de reddition et de représentation des comptes sont majoritairement confiées à l’expert comptable. Dans le cas de la rationalisation de la gestion en PME et de son instrumentation par l’implémentation d’un contrôle de gestion, c’est la fonction de conseil en gestion qui est la plus importante.

Une délégation nécessaire

Devant les limites de l’utilisation de la comptabilité générale comme outils de contrôle de gestion et afin de pouvoir mobiliser rapidement les compétences nécessaires, la PME qui poursuit sa croissance va avoir besoin de détenir ses compétences en interne. Outre l’introduction du contrôle de gestion, comme nous l’avons vu dans le chapitre 4, l’internalisation des compétences gestionnaires par la diminution du poids de l’expert comptable dans la gestion de l’entreprise au profit d’un directeur administratif et financier est également un élément constituant l’étape fondamentale de basculement d’un mode de fonctionnement de PME à celui d’une entreprise de type standard. Les besoins et attentes des dirigeants en compétence gestionnaire ne vont plus être consignés dans la lettre de mission de l’expert comptable mais dans le contrat de travail et les objectifs d’un directeur administratif et financier. Il s’agit d’une étape clé dans la vie de l’organisation dans le sens où elle va désormais internaliser les compétences dont elle a besoin. C’est un moment important pour l’organisation mais également pour l’expert comptable qui va devoir déléguer à la fois une partie des activités réalisées pour le compte de la PME, mais aussi le pouvoir et l’influence qu’il y exerçait, à un acteur interne. Cependant, il faut que cette personne ait les

195 connaissances comptables, financières, gestionnaires et organisationnelles suffisantes pour assumer cette tâche tout en apparaissant légitime aux yeux de la direction, qui a encore tendance à ne valoriser que l’ancienneté dans l’entreprise. Pour faciliter ce passage, il est conseillé que l’expert comptable participe au processus de recrutement pour deux raisons. D’une part, pour transmettre les connaissances qu’il détient sur l’entreprise (historique, fonctionnement, enjeux, etc.), il faut qu’il existe une certaine entente entre les acteurs facilitant leurs échanges. D’autre part, l’expert comptable va pouvoir choisir une personne qui correspondra aux caractéristiques de l’entreprise et aux attentes, besoins et profil des dirigeants. Dans le cas de la PME, il sera judicieux de recruter un directeur administratif et financier ayant déjà eu des expériences en PME ce qui lui permettra de connaître ce fonctionnement particulier.

L’expert comptable combine donc la légitimité, en ce qu’il a obtenu la confiance des dirigeants, et la technicité, par la maîtrise des outils comptables et financiers. Il va donc devoir agir dans le processus d’instrumentation de la gestion : favoriser une vision à long terme en aidant les dirigeants à se projeter dans le futur et aider à la délégation en participant au recrutement de ressources et compétences nouvelles en interne. Tout ceci pourra être fait si l’expert comptable accepte de faire passer la logique économique rationnelle avant la situation de pouvoir dans laquelle il se trouve.

Afin de gérer le changement organisationnel et limiter au maximum les résistances, il est nécessaire que la direction s’engage réellement dans le processus de formalisation et d’instrumentation du fonctionnement, fasse confiance aux initiateurs de la démarche et il peut leur être utile d’échanger avec d’autres dirigeants s’étant engagés dans les mêmes types de démarche. Les conducteurs de la démarche doivent apparaître légitimes pour mener une telle démarche, s’assurer que les compétences gestionnaires sont suffisantes en interne, au besoin en encourageant la formation, et identifier les contre-pouvoirs en présence dans l’entreprise. L’expert comptable offre à la PME les compétences et connaissances dont elle a besoin. Il est un acteur clé dans le développement de l’entreprise par ses conseils stratégiques et son appui dans les domaines techniques (comptables et financiers) et légaux (droit social, droit fiscal, etc.). Au moment où la formalisation du contrôle intervient, il est nécessaire que l’entreprise dispose de ces compétences en interne, notamment par le recrutement d’un directeur

196 administratif et financier ou d’un contrôleur de gestion. C’est là que l’expert comptable doit savoir transmettre son savoir et son pouvoir pour que l’entreprise puisse poursuivre sa croissance.

On vient d’analyser le rôle spécifique de l’expert comptable dans l’introduction du contrôle de gestion, notamment lors du passage d’une PME à une entreprise au fonctionnement classique. Nous allons à présent formuler des recommandations quant à la conduite du changement et à la mise en place de dispositifs de gestion.