• Aucun résultat trouvé

2.2 Dispositif expérimental

2.2.1 Elaboration des condensateurs de mesure

2.2.1.2 Réalisation des espaceurs

La seconde étape de l’élaboration des condensateurs de mesure consiste à réaliser les espaceurs qui maintiennent séparés les électrodes. Les calculs d’ordre de grandeur du signal mesuré, présentés à la section 2.1.3, montrent qu’une épaisseur de 8 à 10µm permet d’obtenir des signaux d’amplitudes optimales sans risquer de confiner les mo- lécules, ce qui ferait apparaître de nouveaux phénomènes physiques. La viscosité du diélectrique diminuant quand la température augmente, la difficulté est de maintenir constant l’écart entre les électrodes alors que le liquide va avoir tendance à couler. La technique la plus largement répandue [23,132] consiste à placer un anneau en téflon entre les électrodes. L’anneau est pressé de façon à maintenir une épaisseur constante. Ce type de système permet de réaliser facilement des condensateurs de 10µm d’épaisseur. Cepen- dant, le liquide étudié ne peut pas entrer et sortir librement du condensateur, lorsque la température varie, afin d’équilibrer sa pression. Les mesures acquises à des tempéra- tures différentes ne sont donc pas forcément réalisées à pression constante. Les premiers condensateurs conçus dans mon équipe de recherche avaient pour but de permettre la

mesure de ˆχT qui est un estimateur indirect du nombre moyen de molécules dynami-

quement corrélées Ncorr. Or, le calcul de Ncorr à partir de ˆχT nécessitant d’être dans

un système thermodynamique bien défini, l’équipe de recherche à décider de travailler à µP T constant. C’est pourquoi les premiers condensateurs que j’ai utilisés permettent au liquide de couler entre les électrodes. Nous verrons qu’il est très difficile d’obtenir des condensateurs de 10µm d’épaisseur permettant de travailler à pression constante. Pour

cette raison, nous avons finalement fabriqué des condensateurs ayant pour espaceur une couronne de mylar.

Premier génération d’espaceurs : pastilles de mylar Les premières mesures de

χ3,3(ω, T ) ont été acquises avec des condensateurs de 19.0µm et 41.0µm d’épaisseur [122]

constitués de deux électrodes de cuivre identiques de 20mm de diamètre. Une vue en coupe ainsi qu’une photographie d’un de ces condensateurs sont représentées sur la figure 2.2. Ces condensateurs ont été réalisés dans le cadre de la thèse de C. Crauste-Thibierge. Les espaceurs étaient en mylar, matériau aisé à découper et dont l’épaisseur est facilement contrôlable. Six pastilles de 2mm de diamètre et de hauteur bien définie ont été collées sur le miroir inférieur de chaque condensateur avec du vernis GeneralElectrics. Les pastilles étaient disposées sur un cercle de 14mm de diamètre.

Avantages Cette technique est simple à mettre en oeuvre. De plus, elle est robuste puisque les pastilles n’ont pas tendance à se décoller. Enfin, elle est réversible : le vernis se dissout à l’acétone sans laisser de traces, ce qui rend les miroirs réutilisables.

Inconvénients Malgré l’utilisation d’une colle très fluide et une très grande minu- tie, des amas de colle se forment. La surface des espaceurs n’est alors plus tout à fait plane, ce qui entraîne des problèmes de stabilité et leurs hauteurs finales sont supérieures à l’épaisseur de mylar de 8 microns environ. Ceci empêche d’obtenir des épaisseurs de l’ordre de 10µm.

Cette technique a donc été abandonnée et une nouvelle permettant de réaliser des espaceurs de hauteur connue au micron près a été développée. Elle consiste à déposer des plots de résine par lithographie UV.

Seconde génération d’espaceurs : plots de résine lithographiés La lithographie UV permet d’obtenir facilement des dépôts de résine photosensible d’épaisseur et de forme bien contrôlées. Toutefois, développer un protocole permettant de réaliser des espaceurs en résine a pris quelques mois. En effet, si la lithographie UV est une technique standard de dépôts de couches minces, ces dépôts se font usuellement sur des wafers de silicium de 50 ou 100mm de diamètre et de 0.5mm de hauteur. Or, nous voulions réaliser des dépôts de résine sur les électrodes en cuivre. Ces dernières sont plus lourdes et plus épaisses que des wafers de silicium. De ce fait, afin de ne pas endommager le matériel de lithographie UV, nous avons développé un outillage adapté. Nous avons ainsi fabriqué un support surbaissé (en forme de marche d’escalier) pour l’aligneur de masque et des supports pour pouvoir manipuler plus facilement les électrodes. Après avoir exposé le protocole de lithographie utilisé pour réaliser les espaceurs, nous expliquerons les principales difficultés rencontrées et les solutions apportées.

Figure 2.3 – Protocole de lithographie standard. La première étape consiste à déposer une couche de résine photosensible sur la surface d’un miroir. Ensuite un masque est positionné au-dessus du miroir. Le tout est soumis à un flux de rayons ultraviolets. Le masque est constitué d’une plaque de verre sur laquelle est déposée une fine couche de chrome. La couche de chrome est absente aux emplacements voulus pour les espaceurs car la résine choisie est dite négative, c’est à dire que ce sont les parties insolées qui vont réticuler et subsister après le passage dans le développeur. La dernière étape consiste à dissoudre la résine non irradiée dans un bain de développeur. Nous obtenons alors des cylindres de résine irradiée nommés plots dans la suite.

Protocole de lithographie Le protocole de lithographie est schématisé sur la figure 2.3. Il a été développé et utilisé dans la salle blanche du S.P.E.C.. Nous utilisons une résine dite négative qui a la particularité de se réticuler si elle est exposée à un flux de rayons ultraviolets. Il s’agit de la résine SU 8−2005, développée par MicroChem, qui est conçue pour donner des épaisseurs entre 4 et 8µm environ. Le protocole de lithographie comprend trois étapes principales :

1. Une couche de résine est déposée sur une électrode de cuivre. L’épaisseur de la résine est contrôlée par centrifugation : plus la rotation imposée est rapide, plus la couche de résine obtenue est mince. Pour améliorer l’adhérence de la résine sur le miroir, un promoteur d’adhésion est utilisé. Il s’agit de l’AP 3000 produit par DowChemicals.

2. La résine est insolée. Cette étape se fait dans un appareil nommé aligneur de masque. Le contrôle de la localisation de l’irradiation se fait grâce à un masque, qui ne permet le passage des UV qu’en certains endroits. Le masque est constitué d’un dépôt de chrome de quelques centaines de nanomètre d’épaisseur sur une plaque de verre. La couche de chrome est absente aux emplacements voulus pour les espaceurs.

3. Le miroir recouvert de résine est plongé dans un bain de développeur, produit qui dissout la résine non irradiée. Le développeur utilisé se nomme SU 8 developper, il est fabriqué par M icroChem. Nous obtenons alors des cylindres de résine irradiée nommés plots dans la suite.

L’épaisseur, la régularité et la planéité des plots sont vérifiés au profilomètre. Si leurs surfaces sont suffisament planes, ces plots pourront servir d’espaceurs. La résine est alors recuite à 170°C. Celà la rend non soluble dans le glycérol, au contraire des résines positives d’emploi plus courant. En effet, des essais ont montré que des plots de SU 8 − 2005 déposés sur un wafer de silicium n’avaient pas varié en épaisseur après deux mois d’immersion dans le glycérol à 300K. Enfin, les électrodes subissent un passage sous

0.2 0.4 0.6 0.8 1.0 0 2 4 6 8 10 12 14 Déplacement horizontal (mm) D é p l a ce m e n t ve r t i ca l ( µ m ) Déplacement horizontal (mm) 0.2 0.4 0.6 0.8 0 2 4 6 8

Etude au profilomètre d'un espaceur

D é p l a ce m e n t ve r t i ca l ( µ m )

Etude au profilomètre d'un plot malformé

Figure 2.4 – Etude au profilomètre d’un plot malformé et d’un espaceur. Graphe de

gauche : Coupe d’un plot de hauteur non constante situé sur un diamètre de 17mm. Si ce plot n’est pas utilisable en tant qu’espaceur, c’est parce que près du bord du miroir, l’épaisseur de la résine n’est pas homogène. Graphe de droite : Coupe d’un plot ayant une surface très plane. Ce plot peut jouer le rôle d’espaceur. Il mesure 7.8µm et est situé sur un diamètre de 16.5mm.

plasma d’ions afin d’éliminer d’éventuels résidus de résine. Celà abaisse la hauteur des espaceurs de 100 à 300nm environ.

Remarquons que si nous voulons obtenir des épaisseurs supérieures à 8µm, il faut réitérer le processus. L’étape d’insolation aux UV est alors particulièrement délicate puisqu’il faut superposer la deuxième couche de plots le mieux possible sur la première. Difficultés rencontrées et solutions apportées Lors de la réalisation des es- paceurs en résine, nous nous sommes heurtés à deux principales difficultés. La première consiste à déterminer le diamètre du cercle sur lequel les plots doivent être disposés. En effet, si le diamètre du cercle est trop petit, les miroirs risquent de basculer lors d’un

cyclage thermique (montée en température de T ≈ Tg à T = 300K puis redescente à

T ≈ Tg) or ces cyclages thermiques sont nécessaires pour éviter que le glycérol ne cris-

tallise (confère section 2.4.1). D’autre part, si le diamètre du cercle est trop grand, les plots obtenus ne sont pas plats car près du bord du miroir l’épaisseur de la résine n’est pas homogène. Cette dernière oscille entre 6 et 18µm pour un diamètre compris entre 17 et 19mm. Le graphe de gauche de la figure 2.4 représente un plot ne pouvant pas être utilisé comme espaceur car sa surface n’est pas plane. Le meilleur compromis est de réaliser des plots de 0.5mm de diamètre, disposés sur un cercle de 16.5mm de diamètre. Le graphe de droite de la figure 2.4 représente la coupe réalisée au profilomètre d’un des plots ainsi obtenu.

Après avoir résolu cette première difficulté, nous en avons découvert une seconde. Cette nouvelle difficulté a rendu inutilisable le compromis trouvé. Cette seconde difficulté

Figure2.5 – Nouvelle géométrie des condensateurs. Figure a : Vue en coupe d’un conden- sateur utilisant deux électrodes de cuivre de diamètres différents. Le miroir supérieur, de 20mm de diamètre porte les espaceurs. Le miroir inférieur a pour diamètre 18mm. Son chanfrein est recouvert d’une couronne de résine dont l’épaisseur est inférieure à celle des espaceurs, per- mettant ainsi au glycérol de couler hors du condensateur. Figure b : Vue de dessus du miroir inférieur recouvert d’une couronne de résine de 16.55mm de diamètre intérieur.

provient du fait que le cuivre et l’or ont des seuils de plasticité faibles. Ainsi, nous avons remarqué que des amas de cuivre et d’or de plus de 5µm de hauteur et de quelques microns de longueur pouvaient se former à la limite du chanfrein. Des chocs ou de trop fortes pressions sont à l’origine de ces mouvements de matière. Ils peuvent se produire losque l’on saisit latéralement le miroir avec des pinces et/ou lorsque l’on plaque le miroir enrésiné sur le masque de chrome. Même si l’apparition de ces défauts de surface conducteurs n’est pas systématique, elle rend une étude au profilomètre des bords du miroir indispensable à la fin du protocole de lithographie. Or, une telle étude est longue et nous ne pouvons pas être sûr que les surfaces des électrodes ne vont pas subir des chocs lors du montage des condensateurs dans la cellule de mesure. Ces défauts conducteurs pouvant entraîner des phénomènes de claquage et des court-circuits, il faut donc s’en affranchir. Pour ce faire, nous avons décidé d’utiliser deux électrodes de tailles différentes pour réaliser un condensateur. Une vue en coupe d’un tel condensateur est représenté sur la figure 2.5. Le miroir inférieur a pour diamètre 18mm et le miroir supérieur a pour diamètre 20mm. Le miroir supérieur porte les espaceurs. Le chanfrein du miroir inférieur est recouvert d’une couronne de résine dont l’épaisseur est inférieure à celle des espaceurs, permettant ainsi au glycérol de couler hors du condensateur. Une vue de dessus du miroir inférieur est représentée sur la figure 2.5. La couronne a pour diamètre intérieur 16.55mm. Sa hauteur moyenne est constante car elle a été obtenue en diluant la résine SU 8 − 2005, ce qui a eu pour effet de diminuer l’épaisseur maximale et de rendre les effets de bords négligeables. La présence de cette couronne diminue la surface du condensateur. En effet, le calcul du champ réellement appliqué au glycérol dans la zone de la couronne montre qu’il est négligeable. En utilisant cette nouvelle géométrie, nous avons pu réaliser des condensateurs de 12.05 et 26.13µm d’épaisseur. Les couronnes de résine font respectivement 3.5 et 6µm de hauteur. Les neuf espaceurs ont 1mm de diamètre et sont disposés sur un cercle qui a pour diamètre 14mm.

Conclusion L’abandon de l’utilisation des pastilles de mylar au profit de la réa- lisation des espaceurs par lithographie UV, a permis de diviser par 1.6 l’épaisseur du condensateur le plus fin. Les signaux non linéaires mesurés via la technique du pont de

mesure à deux échantillons étant proportionnel à e31

f in (cf section 2.3.2.3), leurs ampli-

tudes ont été multipliées par 4. Celà a permis de réaliser une étude fine de la dépendance

en fréquence de χ3,3(ω, T ) à différentes températures. Remarquons toutefois que la réa-

lisation de ces nouveaux condensateurs a été très longue. Elle aurait pu être facilitée par l’utilisation d’électrodes en acier 440C, malheureusement nous avons reçu ces dernières un peu trop tardivement ! En utilisant ces électrodes, il devrait être possible de réali- ser facilement des condensateurs de 8 à 10µm d’épaisseur en utilisant la technique de lithographie UV. Cependant, il faudrait adapter le protocole expérimental : le promo- teur d’adhésion ainsi que les temps et les températures de recuits doivent être modifiés. Etant donné que celà peut s’avérer long, nous avons préféré développer une technique plus simple à mettre en place.

Troisième génération d’espaceurs : couronnes de mylar Afin de rendre possible les mesures de χ3,1(ω, T ) et χ3,3(ω, T ) à T < Tg, nous avons encore diminué l’épaisseur du condensateur le plus fin. Pour ce faire, nous avons utilisé les électrodes en acier 440C de 20mm de diamètre et développé une nouvelle technique de fabrication des espaceurs. Cette technique est proche de celle permettant d’obtenir des espaceurs en pastille de mylar. Nous avons fabriqué des couronnes de mylar à partir de feuilles commerciales de mylar d’épaisseur annoncée. Ces couronnes de 17mm de diamètre intérieur sont ensuite déposées entre les électrodes inférieures et supérieures des condensateurs. L’application d’un poids de 1.3Kg (via un ressort) permet de garantir que l’épaisseur reste constante lors des cyclages thermiques.

Cette technique, simple à mettre en œuvre, est analogue à celle couramment uti- lisée par Lunkenheimer [23] et Richert [132]. Comme elle ne nécessite pas l’utilisation de colle, les épaisseurs des condensateurs obtenus sont celles des feuilles de mylar dans lesquelles les couronnes ont été découpées. Ainsi, nous avons obtenus des condensateurs

de 8.25 et 26.90µm d’épaisseur. Remarquons que les mesures de χ3,3(ω, T ) acquises avec

ces condensateurs sont en accord avec celles réalisées avec les condensateurs ayant pour espaceurs des pastilles de mylar ou des plots de résine (confère section 3.1.3.2). Celà

montre que la mesure de χ3,3(ω, T ) sur le glycérol ne dépend pas de l’ensemble thermo-

dynamique considéré ; bien qu’attendu, ce résultat physique atteste de la robustesse de notre étude des susceptibilités non linéaires.