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Le panorama juridique de l’harmonisation du droit des contrats publics dans une perspective transnationale implique d’envisager les scénarios juridiques suivants:

a) le droit des contrats publics au sein de l’Organisation mondiale du commerce (OMC ou WTO578);

b) l’harmonisation du droit des contrats publics dans le cadre des organisations régionales et sous-régionales;

c) l’harmonisation du droit pénal étatique contre la corruption aux contrats publics; et d) l’harmonisation du droit des contrats publics dans le cadre des accords de libre-échange (ALE).

Dans ce scénario quadruple, il convient de préciser les définitions à utiliser en perspective géographique, surtout pour différer entre « région » et « sous-région ».

Précisément la professeure Laurence Boisson de Chazournes explique que la sous-région est un espace « imbriqué » dans une région.579

Le régionalisme et la sous-région sont deux éléments très importants en ce qui concerne l’harmonisation parce que, dans les deux cas, on peut identifier certains ordres juridiques qui ont développé un régime propre en matière de contrats publics comme, par exemple dans le cadre des sous-régions, l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) ou le Marché commun du Sud (MERCOSUR).

La région « peut être constituée à l’échelle d’un continent, sans que cela ne soit une obligation ».580 Dans ce sens, l’UE peut être considéré comme une région en vertu de la dimension géographique du territoire des États des membres dans le continent européen.

578 Lire « Word Trade Organisation ».

579 BOISSON DE CHAZOURNES (L), « Les relations entre organisations régionales et organisations universelles », R.C.A.D.I, vol. 347, 2010, p. 131.

580 Idem.

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Dans le cadre du régionalisme et du sous régionalisme, il est nécessaire de retenir que chaque harmonisation crée un régime juridique en fonction du champ d’application de ses règles et des États concernés. Donc, si chaque harmonisation crée un régime juridique pour les contrats publics, la conséquence est très évidente: il y a une multiplicité d’harmonisations à tel point que, à la pratique, une entité publique pourrait être concernée par trois ordres juridiques différents dans le cadre d’un appel d’offres publics:

le droit de l’OMC, le droit d’une organisation internationale régionale581 ou sous régionale et les règles d’un ALE. Dans ce même contexte, il est très important de remarquer qu’un ALE peut dépasser la terminologie classique des « accords régionaux » (ACR). Effectivement, comme il est reconnu, « ce que l’OMC qualifie simplement d’ACR n’a souvent aujourd’hui, du régionalisme plus que le nom »582 parce qu’un ALE peut concerner des États de différents continents.

Si on parle de l’harmonisation du droit des contrats publics dans une perspective transnationale, l’OMC est un ordre juridique incontournable. Parmi la doctrine, l’OMC a été identifiée comme une organisation internationale qui « contribue à la redéfinition de la souveraineté ».583 En ce qui concerne le droit des contrats publics, on peut dire que l’OMC constitue un espace pour le dialogue et pour l’harmonisation des règles de ce secteur. Dans ce sens, le professeur Arwel Davies remarque que ces règles occupent « a central position as the most significant international instrument of procurement market liberalization today… Procurement at the WTO is therefore first the most an issue of the liberalization, market access and the avoidance of protectionism ».584

581 Dans les grandes lignes, il faut noter ici que, comme la professeure Alberta Fabbricotti décrit: « les organisations commerciales régionales ne semblent concerter ou coordonner leurs activités avec celle de l’OMC », FABBRICTOTTI (A), « Universalisme-Régionalisme dans les Échanges Commerciaux Internationaux », Select Proceedings of the European Society of International Law (CRAWFORD (J) et NOUWEN (S) éditeurs) Oxford / Portland, Hart Publishing, 2012, vol. 3, 2010, p. 309.

582 CARREAU (D), JUILLARD (P), BISMUTH (R) et HAMANN (A), Droit international économique, Paris, Dalloz, 2017, p. 511.

583 KIEFFER (B), L’Organisation Mondiale du Commerce et l’évolution du droit international public, Bruxelles, Larcier, 2008, p. 99.

584 DAVIES (A), « The Evolving GPA: Lessons of Experience and Prospects for the Future », in Internationalization of Government Procurement Regulation (GEORGOUPOULOS (A), HOEKMAN (B) et MAVROIDIS (P) éditeurs), Oxford University Press, 2017, p. 23.

157 Dans le cadre de l’OMC, le droit des contrats publics constitue un processus évolutif qui comprend deux accords: l’Accord plurilatéral sur les marchés publics de 1994 (AMP 1994)585 et l’Accord plurilatéral sur les marchés publics du 2012 (AMP 2012). Ces accords demandent une précision terminologique en langue française avant de continuer.

Comme on peut lire dans le même nom des accords, la version française se sert du terme

« marchés publics ». Cependant, l’utilisation du terme « marchés publics » de l’OMC ne coïncide pas avec la signification du terme « marchés publics » des directives d’harmonisation de l’UE. Il s’agit d’une question terminologique. Effectivement, d’abord, dans le cadre des deux accords de l’OMC, une définition de « marchés publics » n’existe pas (ni de « contrats publics »); mais cette omission n’est pas un obstacle pour assumer que le terme « marchés publics » de l’OMC comprend les contrats publics en matière des biens, services et services de construction, en fonction des listes de couverture de chaque accord.586 C’est-à-dire, le terme « marchés publics » peut comprendre, dans le cadre de l’OMC, des concessions aussi (dans le cadre du droit de l’UE, les contrats de concession sont légiférés par une directive spécifique et non par la directive sur les « marchés publics »).587 C’est un bon exemple de la disparité terminologique existante dans une macro-perspective.

Après les précisions géographiques et terminologiques, il est très important de retenir que la transparence et la lutte contre la corruption occupent un lieu spécial au droit de l’OMC des contrats publics. Dans ce sens, l’AMP 2012 reconnaît « qu’il est important…

que les marchés soient passés d’une manière transparente et impartiale, et que les conflits d’intérêts et les pratiques frauduleuses soient évités, conformément aux instruments…,

585 Sur cet accord, voir: LOWENFELD (A), Economic International Law, Oxford University Press, 2008, pp. 88-91; GHÉRARI (H), « Les marchés publics », in Droit de l’économie internationale (DAILLIER (P) et al, directeurs), Paris, Pedone, 2004, pp. 493-504.

586 Voir le paragraphe 4 de l’art. II de l’AMP 2012, qui utilise le terme « marchés couverts ».

587 Comme nous savons, dans le cadre de l’UE, les contrats sont essentiellement légiférés à travers de trois directives: 23/2014 sur l’attribution de contrats de concession, 24/2014 sur la passation des marchés publics et 25/2014 relative à la passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux. Dans le cadre de l’UE, la concession est un concept juridique autonome.

158 tels que la Convention des Nations Unies contre la corruption ». Le texte de l’OMC renvoi aux au droit international en matière pénale.

Pour évaluer l’effet de l’harmonisation du droit des contrats publics sur le droit international, il faut connaître l’harmonisation du droit des contrats publics au plan mondial (un chapitre 1) et la variété de rythmes et de régimes dans le cadre du sous-régionalisme, du régionalisme et du transrégionalisme (chapitre 2).

159 Chapitre 1. Les bases de l’harmonisation du droit des contrats publics à l’échelle mondiale

L’harmonisation du droit des contrats publics dans le cadre de l’OMC, c’est l’unique harmonisation contraignant des règles de ce secteur de l’économie à l’échelle planétaire.

Il s’agit d’une harmonisation limitée à l’ouverture du marché (Section 1) qui remarque l’importance de la transparence, et de la lutte contre la corruption aux contrats publics das le cadre de la libre concurrence.

La lutte contre la corruption implique non seulement la criminalisation de certains comportements, mais aussi celle-ci demande une coopération interétatique pour la sanction pénale et la récupération de l’argent public dans le cadre des instruments juridiques contre la corruption. Les instruments internationaux contre la corruption588 présentent certains problèmes techniques en matière de compétence judiciaire (« jurisdiction ») à la lumière des droits de l’homme. Dans une macro perspective, nous percevons des progressions très importantes en matière de lutte contre la corruption;

cependant, nous percevons aussi une difficile harmonie législative dans le cadre du droit des États contre la corruption (Section 2).

Section 1. Les contrats publics dans le cadre de l’OMC

Le professeur Giorgio Sacerdoti décrit l’OMC comme un ordre juridique « de droits, d’obligations et d’organes prévus par le traité instituant l’OMC ».589 Il note que c’est un

« ensemble » de règles « qui doit être considéré comme un sous-système dans le droit international public ».590 En tant qu’organisation internationale, un objectif de l’OMC

588 Sur ce sujet, voir les articles du livre BALMELLI (T) et JAGGY (B) (éditeurs), Les traités internationaux contre la corruption. L’ONU, l’OCDE, le Conseil de l’Europe et la Suisse, Lugano, Edis, 2004.

589 SACERDOTI (G), « La contribution de l’organe d’appel de l’OMC à la construction du droit international économique: système commercial multilatéral, des accords régionaux, un droit des investissements internationaux », Revue général de droit international public, numéro 4, 2016, p. 723.

590 Idem.

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