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PUBLICATIONS, CRITIQUES ET CONDITIONS DE POSSIBILITÉ La recherche sur la littérature « enfantine » ou « enfantine et juvénile » 3 a

connu, au Portugal, une grande impulsion dans les années qautre-vingt avec les travaux de Natércia Rocha et de Maria Laura Bettencourt Pires, respectivement auteurs de Brève histoire de la littérature pour enfants au Portugal et de Histoire de la littérature enfantine portugaise, mais ce sont surtout dans les années quatre- vingt-dix que paraissent plusieurs essais, résultats de travaux universitaires, qui jouent un rôle décisif dans la divulgation critique de la littérature enfantine ainsi

3. NDLR : ce sont là les adjectifs utilisés au Portugal pour désigner ce que nous nommons « littérature de jeunesse ».

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Le texte littéraire à l’école primaire au Portugal : programmes, projets, théories et pratiques

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que dans la découverte de quelques auteurs et de leurs œuvres. C’est le cas, entre autres, de Un continent poétique oublié – les rimes enfantines (1992) de Maria José Costa ; Le fil de la mémoire –Du conte populaire au conte pour enfants (1992) de Maria José Traça ; La poésie dans la littérature pour l’enfance (1993) de José António Gomes ; Aquilino Ribeiro pour les enfants –Imaginaire et Ecriture (1994) de Rui Marques Veloso ; Les fées ne sont pas allées à l’école (1994) de Maria Augusta Seabra Diniz ; La littérature pour les enfants et les jeunes chez Irène Lisboa (1994) de Violante Florêncio ; Lire Sophie (1995) de Marta Martins ; Au royaume des fées (1997) de Conceição Costa.

Petit à petit, d’autres essais ont été publiés par António Américo Lindeza Diogo (1994), José António Gomes (1997) et Fátima Albuquerque (2000) surtout, offrant ainsi au public des perspectives plus complètes et plus critiques de la litté- rature enfantine et juvénile à différentes époques.

Si nous commençons par citer ces noms et ces titres, c’est pour que soit pris en compte le fait que, bien que la littérature pour enfants existe depuis très longtemps, ce n’est qu’au cours de cette décennie que commence à émerger une réflexion critique à son propos, ce qui permet dès lors de comprendre, ainsi que l’affirme Léonor Riscado (2000), que la divulgation du livre enfantin ait été effectuée principalement à partir des catalogues des maisons d’édition « qui ne prennent pas toujours en compte des critères de goût et de qualité ».

Il existe cependant, actuellement, deux ou trois publications qui fonctionnent en faisant exception à cette règle, en particulier la revue trimestrielle Malasartes (Cahiers de littérature pour l’enfance et la jeunesse), apparue en 1999, avec des rubriques centrées sur la connaissance d’écrivains et d’illustrateurs de littérature enfantine et juvénile, sur les pratiques pédagogiques, sur la présentation de recen- sements critiques et de listes de livres publiés récemment, ainsi que sur la divulga- tion d’évènements ayant rapport avec la littérature enfantine. Outre cette publica- tion, nous devons signaler une brochure produite par le ministère de la culture et par l’Institut portugais du livre et des bibliothèques (IPLB), appelée « suggestions de lectures » (1997), et dans laquelle José António Gomes et Isabelle Ramalhete dressent la liste des livres les plus indiqués pour les enfants de trois à treize ans. En 2001, Ana Maria Magalhães a également publié une brochure où elle passe en revue toutes les œuvres publiées pour la première fois au Portugal entre 1999 et avril 2001, et qu’elle a intitulée « La littérature enfantine et juvénile au tournant du siècle ».

La divulgation confidentielle de ces publications auprès des professeurs de l’école primaire, le fait que de nombreux parents n’ont pas la possibilité d’établir une convivialité durable avec les livres4, ajoutés à une forte tradition d’adoption du manuel scolaire, ont pour conséquence que le marché éditorial dicte principa- lement les lectures à l’école, la création même de la littérature de jeunesse finis- sant par être influencée par les « ventes ». Ainsi, non seulement le niveau moyen de qualité du livre enfantin tend à baisser en fonction de l’impossibilité pour le public de rechercher d’autres œuvres, mais de plus, les œuvres de qualité passent

4. Car, comme l’affirme Luísa Ducla Soares (2001, p. 127), « seul un pourcentage réduit dispose de conditions culturelles et économiques qui les motivent pour constituer une petite bibliothèque familiale pour enfants ».

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REPÈRES N° 32/2005 L. ALVARES PEREIRA et F. ALBUQUERQUE

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souvent inaperçues, dans la mesure où les moyens de communication s’occupent généralement peu de la littérature pour les enfants.

Pour toutes ces raisons, on comprendra facilement l’importance du rôle de l’école dans la mise à disposition d’œuvres fondamentales pour les enfants portugais, mais également la difficulté à laquelle l’école est confrontée pour sélec- tionner des livres qui soient, de fait, des objets d’art avec des objectifs esthétiques et ludiques5.

S’il est vrai que la formation initiale des professeurs contient, dans de nombreux cas, la discipline « littérature enfantine », il n’en n’est pas moins signi- ficatif que, dans une étude sur « les programmes en vigueur dans de nombreux instituts de formation des maîtres » au Portugal, l’on arrive, entre autres, à la conclusion suivante :

1. On constate une très grande prépondérance de la littérature orale et tradi- tionnelle au détriment de la littérature d’auteur contemporaine.

2. L’importance des différents genres littéraires est très inégale, avec une grande part accordée au genre narratif, et dans celui-ci, au conte. Le genre poétique n’est pas abordé dans certains programmes et le genre dramatique pratiquement inexistant (Martins, 2001, p. 179).

3. Les contenus liés à la promotion de la lecture n’abordent ni les compé- tences qui facilitent son apprentissage, ni les capacités mises en œuvre dans l’acte de lire, ni les méthodologies pour son enseignement.

En fonction de ces données, la même chercheuse défend l’urgence d’établir des objectifs communs en termes de programmes de formation des futurs profes- seurs dans ces matières, en prenant soin cependant de définir un canon rigide et égal pour tous, en ce qui concerne la littérature pour les enfants.

Comme l’on peut facilement le comprendre, cette question du canon d’auteurs pour le public enfantin constitue l’une des problématiques les plus polé- miques de ce champ d’étude et, indépendamment du fait que nous y répondrons plus avant, il est important de souligner dès à présent le consensus qui semble exister autour de la nécessité de fournir la plus grand éventail possible de choix et de conquérir les élèves par l’originalité, la qualité et l’éclat de l’expression et non par des recettes faciles.

5. Cf. une information dans un des journaux les plus vendus au Portugal, daté du 17 novembre 2002, p. 3 : « Finalement, les enfants lisent » : « Les maisons d’édition portugaises investissent dans la littérature enfantine car cela rapporte. Les livres se vendent bien et aident à équilibrer les dépenses du secteur éditorial. Du côté des bibliothèques, on assiste à une augmentation du nombre de jeunes visiteurs ». Dans ce même article, on peut lire que « les livres enfantins représentent 40 % de l’ensemble des ouvrages recensés chez les personnes interrogées. »

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2. LES PRÉSUPPOSÉS DU PROGRAMME OFFICIEL

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