• Aucun résultat trouvé

L’étrange lien entre littérature et enseignement

Résumé : Le besoin de réviser le statut de la littérature est en soi-même un indice évident du contraste qu’il y a entre la conception théorique des études littéraires,

2. LA COMPLEXITÉ DE L’ÉDUCATION LITTÉRAIRE

2.3. L’étrange lien entre littérature et enseignement

Le traitement didactique de la littérature est toujours complexe et délicat lorsque la littérature devient objet d’étude : inévitablement, on lui fait perdre une partie de son essentialité. La multiplicité de variantes qui s’accumulent renvoyant à l’auteur, à l’œuvre ou au récepteur, fait que la littérature ne peut être une matière qui supporte un « apprentissage » homogène et modélisé. Et, pourtant, la didac- tique de la littérature doit établir que l’objectif essentiel et spécifique de l’éduca-

19. Cette citation nous permet de reconnaitre comment nous réagissons devant une succession de stimulations de signe littéraire et de certaines autres de type encyclo- pédique ou simplement de référence culturelle. L’intentionnalité du fragment – et avec elle la signification du texte – ne peut être saisie que si les références des personnages et de leur fonction dans l’œuvre correspondante sont archivées dans notre intertexte. C’est-à-dire, pour interpréter de manière adéquate ce commentaire critique (un texte, finalement), il faut que l’intertexte lecteur active les référents qui correspondent à chaque une des mentions intertextuelles qui apparaissent dans le texte.

Repères32.indb 174

De l’enseignement de la littérature dans le cadre scolaire espagnol…

175

tion littéraire des élèves a un caractère intégrateur : apprendre à lire et à inter- préter (évaluer et apprécier) et apprendre à jouir des créations à valeur esthético- littéraire. La réussite de cet objectif exige que les compétences essentielles que l’élève devra développer s’orientent vers deux directions :

a. les compétences qui permettent de comprendre et reconnaitre les conven- tions spécifiques du discours littéraire, ce qui passe par l’apport d’une poétique élémentaire et des éléments de rhétorique littéraire ;

b. les compétences qui permettent de prendre en compte l’historicité qui traverse le texte, et par ailleurs les savoirs nécessaires et intermédiaires pour pouvoir découvrir l’évaluation interprétative et la construire.

En réalité, le problème vraiment important au départ est la mise en connexion étrange entre deux concepts littérature + enseignement : Que peut bien vouloir dire enseigner les œuvres littéraires qui, dans leur ensemble, intègrent et compo- sent ce que nous appelons littérature ? De fait, il est possible d’apprendre de la littérature; mais c’est très difficile d’enseigner la littérature. Avons-nous jamais eu l’idée d’admettre – il est bien possible que oui, même si nous n’avons pas trouvé d’autre choix – qu’en principe, le but de la littérature ce n’est pas que ses œuvres deviennent l’objet d’analyse en classe ? Cet ensemble de lambeaux historiques, biographiques, de caractérisations d’écoles, d’époques et de genres, assaisonnés d’opinions critiques qui composent le programme traditionnel de la discipline « littérature », n’est-ce pas finalement qu’un succédané simpliste et fallacieux de la littérature?

La réception littéraire d’un lecteur autonome et doué d’une grande compé- tence lecto-littéraire, qui le rapproche du modèle de « lecteur implicite » est l’effet de l’activation des connaissances (pertinentes) de sa compétence littéraire. À son tour, l’activation de telles ou telles connaissances dépend des caractéristiques du texte objet de réception (de l’usage littéraire de la langue, de la nature du texte, du style, du genre, de l’intentionnalité, etc.), de sorte que le lecteur devra convo- quer, avec plus ou moins d’intensité et d’efficacité, ses connaissances préalables – ce qui oblige à prendre en compte l’expérience et le niveau de formation du lecteur. Si sa compétence littéraire est très limitée, le lecteur se trouvera dans une situation d’infériorité pour l’interaction avec le texte. C’est pour cela que la capacité d’interprétation du lecteur dépend de son autonomie de lecture et elle est en rapport avec la formation spécifique de sa compétence lecto-littéraire ; or, bon nombre des connaissances dont on a besoin font partie des différents blocs qui constituent la compétence littéraire, dans l’activité de lecture, et c’est justement ici que les difficultés pour élaborer l’ébauche d’une nouvelle approche apparaissent.

La formation littéraire exige que les processus de construction de signifi- cations se renforcent, que l’on développe l’habileté et l’expérience de lecture, que la compétence lecto-littéraire et l’intertexte du lecteur s’élargissent depuis les niveaux de l’éducation primaire. Et à partir de là, le problème didactique dont il est ici question commence à déployer la diversité de ses aspects.

Les aspects spécifiques étudiés par la théorie littéraire et la critique, qui fonc- tionnent comme des règles et comme des références pour aider au développe- ment interprétatif, peuvent être – en fait, ils le sont – des apports d’où surgissent des orientations susceptibles de déterminer une option didactique qui permette de

Repères32.indb 175

REPÈRES N° 32/2005 A. MENDOZA et A. DÍAZ-PLAJA

176

profiler une perspective, des clés méthodologiques et même de produire certaines ressources didactiques et, surtout, quelques règles pour cerner la question de savoir comment l’éducation littéraire peut aider à former le lecteur compétent, capable de goûter, apprécier, interpréter, évaluer l’œuvre littéraire. Il s’agit de déterminer si la formation consiste à former à des objectifs qui sont ceux de la théorie et de la critique philologique (analyser, systématiser, justifier…) ou bien si, en réalité, l’essentiel pour les niveaux de l’enseignement obligatoire – depuis les premiers cycles jusqu’au collège ou même au lycée –, n’est pas la formation progressive des lecteurs à comprendre et interpréter et, surtout, à jouir du texte – sans qu’ils aient nécessairement à agir comme des analystes textuels ou des dissecteurs de textes à la recherche exclusive des particularités du discours litté- raire –, même si la compréhension du texte exige implicitement l’application de connaissances qui interviennent dans la pratique de l’analyse.

Outline

Documents relatifs