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Méthodologie de recherche

5.4 A PROPOS DES PARTICIPANTS A LA RECHERCHE

5.4.1 LES PROFESSEURS

Comme nous l’avons indiqué, nous avons choisi de travailler avec deux professeurs « Ron » et « Sam » avec lesquels nous avions déjà eu des contacts. Nous exposons dans ce paragraphe certains aspects de leurs parcours professionnels qui pourraient être interprétés comme influant sur leurs assujettissements aux institutions didactiques extérieures à la classe.

Remarquons qu’au Costa Rica, pour être professeur dans l’enseignement secondaire, il faut suivre une formation universitaire qui commence par le diplôme du « Profesorado » (Bac+3), suivi du « Bachillerato » (Bac+4), la « Licence » (Bac+5) et le « Master » (Bac+7) en « Enseignement des Mathématiques ». Les études en « Enseignement des Mathématiques » sont distinctes des études en « Mathématiques », où les étudiants ne font que des Mathématiques. Dans les premières, la formation est partagée, chaque année, en matières relatives aux mathématiques et en d’autres associées aux théories de l’éducation, au curriculum scolaire, à l’évaluation, la pédagogie, la psychologie, etc. Les quatre universités publiques du pays et plusieurs universités privées offrent une formation en « Enseignement des Mathématiques ».

Ron est un professeur de 29 ans, qui travaille dans l’enseignement des mathématiques depuis 11 ans76

: au Costa Rica on peut commencer, dans certaines régions éloignées de la capitale et qui ont besoin de professeurs, à enseigner dès le Baccalauréat. Il a eu son diplôme de Bachillerato en enseignement des mathématiques en 1998 à l’Université Nationale d’Etat à Distance77 (UNED). Dans cette même université, il a obtenu son diplôme de « Licence en Pédagogie » qui n’est pas spécifique aux mathématiques. Durant l’année 2003, il a commencé un master en « Education Mathématique » à l’UCR.

Il a débuté dans l’enseignement durant l’année 1995, dans un « lycée nocturne » (cours du soir). Depuis il a été embauché au Lycée SLG, où il y a travaillé durant 5 ans. Puis, il a changé d’établissement scolaire, en travaillant durant 2 ans dans un lycée privé (jusqu’en 2002), avant de reprendre l’enseignement au lycée SLG (en 2003 et 2004) où nous avons mené les observations. Remarquons qu’au Costa Rica, il est possible de travailler en même temps dans l’enseignement secondaire et universitaire. Ainsi, depuis 2000 et parallèlement à

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Ron a eu son Baccalauréat à 15 ans, car il est entré à l’école primaire en avance. 77

Pourtant, il s’était engagé pour deux ans dans le cursus du Baccalauréat en « Enseignement des Mathématiques » dans une autre université (UCR, l’université la plus ancienne du pays, ainsi que la première à mettre en place la filière « Enseignement des Mathématiques » ) ; mais qu’il a dû abandonner pour des raisons de travail. Lors de ces deux années, les cours de mathématiques suivis étaient les mêmes que la filière de « Mathématiques ».

son travail au lycée, Ron donne des cours de mathématiques à l’université : à l’UNED et/ou à l’UCR. Ces cours ont portés sur les mathématiques pour les carrières d’ingénieur, de gestion ou de certaines autres concernant le domaine de la santé. Il s’agissait la plupart des temps de cours de calcul différentiel et intégral. A l’UNED, il a aussi donné certains des premiers cours de mathématiques pour des futurs professeurs de cette discipline ou de SVT.

Signalons aussi que depuis deux années, Ron travaille dans un projet à l’UCR qui offre aux élèves des dernières années la possibilité de passer des examens de certains cours de mathématiques inclus dans le cursus de certaines carrières. Pour lui, il s’agit d’élaborer le matériel à donner aux professeurs qui préparent ces élèves, d’élaborer les examens qu’ils doivent passer et, à partir de l’année 2006, d’animer des réunions avec certains professeurs du lycée pour discuter des difficultés rencontrées lors de l’enseignement des contenus habituellement étudiés uniquement à l’université mais enseignés dans des filières spéciales, de type scientifique, au Lycée.

Enfin, remarquons que durant l’année où nous avons fait les observations, Ron a pris en charge la préparation des élèves du Lycée SLG qui participent aux Olympiades nationales de Mathématiques. Cette même année, il enseignait à quatre classes de dixième (25 leçons) et assurait des cours de calcul différentiel et intégral à l’université.

Sam est un professeur qui a 35 ans. Il a commencé ses études en « Enseignement de Mathématiques » à l’UNED à l’année 1992. Puis, il a changé d’établissement universitaire est a repris sa formation à l’UCR. Il a eu son diplôme de Bachillerato en 1998 et sa licence en « Enseignement des Mathématiques » dans ce même établissement en 2005.

Il travaille depuis 1994 au lycée SLG, où il a obtenu son poste fixe en 1999. Il y est embauché à temps complet. A l’exception de ses premières années de travail, il prend généralement en charge des classes des derniers niveaux : seconde et première. Ces classes ont 5 leçons par semaine de mathématiques, ce qui implique que, pour compléter son service, il assure l’enseignement dans 9 classes. Pour l’année 2006, quand nous avons fait l’étude de terrain, il avait 3 classes de seconde et 6 classes de première. Remarquons qu’au Costa Rica, en classe de première, les élèves doivent passer le Bac. Notons aussi, comme Sam l’indique, qu’il y a des différences à propos du temps investi pour planifier les cours pour chaque niveau, quand le professeur a 6 classes de première et 3 de seconde, que quand il en a 6 de seconde et 3 de première. En mars de cette année, Sam a assuré aussi un cours de mathématiques à l’UCR, essentiellement de révision des savoirs et savoir-faire appris au Secondaire. Enfin, signalons

que durant l’année 1998, il avait assuré le premier cours de mathématiques destiné aux étudiants de gestion à l’ITCR.

Depuis qu’ils sont enseignants, Ron et Sam ont enseigné dans les classes des cinq niveaux du Secondaire au Costa Rica ; mais ils ont eu principalement des classes des derniers niveaux.

5.4.1 LES ELEVES

Comme nous l’avons indiqué en 5.3.1, nous avons travaillé avec quatre élèves de chacune des classes de Sam observées et trois élèves pour chacune des classes de Ron. Nous présentons quelques données relevant de chacun d’eux, et qui concernent : l’âge, s’ils sont redoublants (et dans ce cas les cours qu’ils ont échoués), s’ils suivent des cours particuliers de mathématiques, ainsi que des appréciations générales sur leur travail dans la classe. A la fin de chaque présentation, nous donnons aussi leurs réponses à deux des questions du questionnaire : « Pour vous, qu’est-ce que les mathématiques ? Et pourquoi croyez-vous que leur étude est obligatoire au Secondaire ? »

Elèves participants de la 10e G, classe de Ron

• « GJ » est un élève redoublant qui a 17 ans. Il n’a pas réussi la seconde car, d’après lui, « il n’a pas beaucoup étudié et il y avait un grand nombre de révisions à faire ». Nous dirons qu’il s’agit d’un « bon » élève : d’habitude il répond correctement aux questions, anticipe des résultats, finit les travaux à temps, fait les devoirs et obtient des notes entre 85 et 100 sur 100 aux examens. Il ne prend pas de cours particuliers. R/78 Les maths sont un outil important ; on en a besoin dans la plupart des carrières.

• « GM » a 16 ans. C’est une élève légèrement en difficulté : d’habitude elle obtient des notes autour de la moyenne. Elle prend des cours particuliers et répond rarement aux questions de l’enseignant. Pourtant, elle demande souvent à Ron de re-expliquer ce qu’elle « n’a pas très bien compris ». R/ Les maths est une étude utile pour tout type de travail.

• « GB » est une élève de 15 ans en difficultés qui a besoin de beaucoup d’heures de travail pour avoir, d’habitude, des notes au-dessous de la moyenne. Elle participe rarement en classe, mais réalise tous les devoirs donnés par Ron, même ceux qui ne sont pas obligatoires. Elle

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Les réponses des élèves à : « pour vous, qu’est-ce que les mathématiques ? » et « pourquoi croyez-vous que leur étude est obligatoire au Secondaire ? » sont précédées par le symbôle « R/ ».

prend aussi des cours particuliers. R/ Les maths sont une matière qu’il faut pratiquer continuellement ; on l’utilise dans la plupart des carrières.

Elèves participants de la 10e H, classe de Ron

• « HM » est un élève de 16 ans en difficultés qui ne prend pas des cours particuliers. D’habitude il utilise des manuels pour étudier d’avance ce qui sera enseigné dans la classe. Même si, lors du travail collectif, il ne pose pas régulièrement des questions, il répond parfois aux demandes de Ron ou le sollicite pour lever les doutes qu’il rencontre lors de la réalisation des exercices. R/ Système qui permet d’interpréter des quantités ; elles sont utiles dans la vie quotidienne.

• « HR » a 17 ans et est un élève redoublant. Lors de la seconde, il n’a réussi ni les maths, ni la chimie, ni la physique, ni l’espagnol car, d’après lui, « il n’étudiait pas ». Pour nous c’est un élève qui n’a pas des difficultés pour suivre les cours de Ron. D’habitude il répond aux questions, mais il en pose rarement. « HR » suit des cours particuliers. R/ Les maths sont un instrument qui va nous aider dans l’avenir ; elles sont utiles pour ne pas nous faire tromper lors des paiements ou des prises de mesures.

• « HA » est une élève régulière qui a 15 ans. D’habitude elle pose des questions lors du travail collectif de la classe et répond aux questions de Ron. Elle ne prend pas des cours particuliers. R/ Les maths sont importantes ; elles nous « font travailler l’esprit ».

Elèves participants de la 10e L, classe de Sam

• « LS » est une « bonne » élève qui a 15 ans. D’habitude elle obtient des notes au-dessus de 85 (sur 100), réalise les devoirs donnés par Sam et finit les travaux dans le temps imparti. Lors du travail collectif, elle pose rarement des questions ou de temps en temps répond aux questions du professeur. R/ Les maths sont une étude qui nous aide à mieux développer l’intelligence, la connaissance, etc. ; il faut l’appliquer dans la vie quotidienne et dans les professions.

• « LY » est une élève redoublante qui a 16 ans. Lors du travail collectif de la classe, elle pose des questions, répond aux demandes de Sam, anticipe des résultats. Lors de la réalisation d’exercices, elle pose régulièrement des questions au professeur. Elle ne prend pas de cours particuliers. R/ Pour moi les maths sont un loisir, une nécessité et un apprentissage de tous les jours ; on les utilise dans la vie de tous les jours.

• « LJ » a 17 ans. C’est un « bon » élève qui obtient d’habitude des notes autour du 90. Il avoue avoir redoublé sa seconde par manque de travail. LJ ne participe pas beaucoup au travail collectif, mais parfois il répond aux questions de Sam. Il ne prend pas des cours particuliers. R/ Les maths sont l’apprentissage de processus qui amènent à une série de résultats.

• « LE » est un élève qui a redoublé la septième car, d’après lui, il n’étudiait pas. Il a 16 ans et est un élève qui participe beaucoup en classe. Il est considéré par l’enseignant comme un « bon » élève : réalise les devoirs demandés, suit les explications, répond aux questions, pose des questions, aide ses camarades. R/ Les maths sont une étude des nombres ; même si dans la vie quotidienne on ne les utilise pas sensiblement, elles s’utilisent quand même.

Elèves participants de la 10e M, classe de Sam

• « MS » est une « bonne » élève qui a 15 ans. Lors du travail collectif de la classe, même si d’habitude elle ne pose pas de questions, elle répond assez souvent aux interrogations de Sam. Ses notes sont au-dessus 90. Elle ne prend pas de cours particuliers. R/ Les maths sont une matière fondamentale car « tout porte sur des nombres » ; elles sont importantes pour beaucoup des activités accomplies quotidiennement.

• « MF » a 15 ans. D’après Sam, il est un élève « excellent » : il répond aux questions, demande des explications, anticipe des résultats, aide ses camarades ; etc. Il ne prend pas de cours particuliers. R/ Les maths sont un outil nécessaire pour mener plein de travaux (faire de la cuisine ou dans les chantiers) ; elles sont obligatoires au Secondaire parce qu’il faut bien qu’on les apprenne quelque part.

• « ML » a 15 ans. C’est un élève qui, lors du travail collectif, répond aux questions de Sam, mais ne pose pas de questions pour lever ses doutes au cours des recherches d’exercices. D’habitude ses notes se trouvent entre 80 et 90. Il ne prend pas de cours particuliers. R/ Les maths sont l’étude de quantités et les diverses opérations qui les font augmenter ou diminuer ; elles sont importantes car la plupart des filières les utilisent.

• « MK » a 16 ans. C’est une élève en difficulté qui parfois répond aux questions de Sam, mais qui, timidement, lui demande d’expliquer davantage certains thèmes qu’elle « n’a pas compris » lors du travail collectif de la classe. D’habitude elle pose ses questions à ses camarades ou au professeur de manière privée. MK prend des cours particuliers. R/ Les maths

sont des nombres et des nombres ; elles sont obligatoires parce qu’on les utilisera dans la vie quotidienne.

Remarquons que nous avons travaillé avec deux élèves redoublants des classes de chaque professeur. A l’exception de « MK », les élèves de Sam réussissent d’habitude leurs contrôles. Deux élèves de Ron sont considérés en difficulté et obtiennent difficilement une bonne note à un examen, même s’ils accomplissent régulièrement les tâches demandées.

Voici quelques traits des rapports aux mathématiques qu’ils semblent avoir établis. Tous les élèves reconnaissent « la valeur » des mathématiques dans la société ; mais cette valeur se rapporte soit au rôle des mathématiques élémentaires apprises à l’école primaire (opérations de base, calculs de pourcentages, mesures), soit à un emploi qu’ils ignorent mais qu’ils croient trouver à l’Université ou dans la réalisation de pratiques professionnelles. Enfin, notons que la plupart des réponses données par les élèves sur les mathématiques et leur caractère obligatoire sont très imprécises, et éloignées de certaines caractéristiques que leur attribuent des théories épistémologiques sur l’activité mathématique.

5.5 RESUME

Dans ce chapitre, nous avons précisé la démarche méthodologique mise en oeuvre afin de recueillir les données à partir desquelles nous avons construit des éléments de réponses à nos questions de recherche. Il s’agit d’une étude utilisant à la fois une approche ethnographique et de type clinique pour l’observation des phénomènes de mémoire.

Trois phases ont été mises en place. La première concerne l’installation des conditions de l’étude : la détermination des professeurs, des classes et des élèves participant à la recherche, ainsi que certaines spécifications sur ce que nous attendions de leur participation. La deuxième phase correspond principalement à l’observation clinique menée dans les quatre classes de dixième et aux entretiens avec les professeurs et les enseignants. Enfin, la troisième phase est relative à la mise en place des outils pour recueillir des éléments complémentaires sur le fonctionnement des classes.

Enfin, nous avons décrit certaines caractéristiques des participants à l’étude : les professeurs Ron et Sam, et les 14 élèves des classes observées.

Dans les cinq chapitres que nous venons de présenter, lors de la première partie de ce travail, nous avons décrit les principaux aspects qui définissent le « cadre de la recherche » : l’état des lieux où nous indiquons les études antérieures sur le thème en Didactique des Mathématiques, le cadre théorique adopté pour modéliser une partie de la réalité didactique, ainsi que les outils théoriques de description et d’analyse de données, la problématique qui nous occupe portant sur la gestion mémorielle par le professeur dans la classe et enfin, la démarche méthodologique conçue pour tenter de donner des éléments de réponses à nos questions. Lors de la prochaine partie, Deuxième partie : présentation et discussion des résultats, nous exposons et discutons les données et les éléments de réponse construits, à partir desquels nous avons élaboré une typologie des gestes mémoriels accomplis par les professeurs, ainsi que le modèle du micro-cadre institutionnel de la mémoire dont les éléments sont sollicités lors de l’accomplissement des gestes. Nous abordons aussi les effets sur la gestion de la mémoire didactique qui relèvent de la vie institutionnelle dans chacune des quatre classes observées.

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EUXIEME 

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