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Les problèmes causés par la déclaration d’activité des entrepreneurs civils 289 Pour quelques-uns, la déclaration d’activité au RCCM est une formalité

Dans le document L'entreprenant en droit OHADA (Page 151-156)

Conclusion du titre

Paragraphe 2. Une formalité peu opportune pour les entrepreneurs civils au regard des problèmes engendrés à leur égard

A. Les problèmes causés par la déclaration d’activité des entrepreneurs civils 289 Pour quelques-uns, la déclaration d’activité au RCCM est une formalité

supplémentaire (1) dont les bénéfices peuvent être temporaires (2).

1. Une formalité supplémentaire

290. Avant la création du statut d’entreprenant, les entrepreneurs non commerçants

n’étaient pas tenus de se faire immatriculer mais, en fonction de la législation de chaque pays, devaient accomplir des formalités précises pour exercer légalement. C’est par exemple le cas en matière artisanale où l’inscription des artisans à un registre spécial est très souvent requise par les lois nationales. C’est le cas au Bénin où l’article 12 de la loi régissant l’activité artisanale prévoit une inscription des artisans au registre des métiers de la Chambre et l’acquisition d’une carte d’identification professionnelle auprès des structures compétentes.

Au Congo, l’article 19 de la loi n°7-2010 du 22 juin 2010 régissant l’artisanat en République du Congo, subordonne l’exercice de la profession d’artisan par des personnes physiques à l’inscription au répertoire des métiers et à l’obtention d’une carte professionnelle. L’article 20 du même texte de loi précise que le répertoire des métiers constitue, avec le registre des entreprises artisanales réservé aux personnes morales, « les

cadres légaux d’identification des agents opérant dans le domaine artisanal». Tout artisan

qui exerce sans avoir accompli cette formalité légale est réputée exercer en dehors du cadre légal, c’est-à-dire de manière informelle.

En Côte d’Ivoire l’article 33 alinéa 1 de la loi de 2014 relative à l’artisanat dispose qu’un Registre des Métiers a été institué auprès des Chambres des métiers aux fins de recevoir l’immatriculation des personnes physiques ayant la qualité d’artisan. Ces derniers doivent se faire immatriculer au plus tard trois (03) mois après leur identification par la Chambre des métiers de leur ressort territorial. Le manquement à cette obligation peut entraîner le paiement d’une pénalité de retard.

Au Cameroun, l’article 10 de la loi n° 2007/004 du 03 juillet 2007 régissant l’artisanat déclare que tous les artisans et entreprises artisanales doivent se faire enregistrer dans un répertoire tenu par la commune de leur ressort d’activités. L’enregistrement à ce répertoire est gratuit et doit avoir lieu dans les trois (03) mois de chaque année241. Sur ce

dernier point le décret camerounais n’est pas clair et on peut se demander si l’enregistrement doit se faire chaque année pendant trois mois ou une seule fois au cours des trois mois qui suivent la création de l’activité. Cette dernière hypothèse semble être la plus plausible car il est dit que le répertoire est tenu chronologiquement. Ceci a sans doute pour but de déterminer la date de création des entreprises artisanales. Quoi qu’il en soit, ceux qui exercent une activité artisanale sont tenus de se faire enregistrer auprès de la commune du lieu de leur activité. Pour cela ils doivent remplir une fiche de déclaration d’activité en fournissant les informations suivantes : les nom et prénom, les date et lieu de naissance, le secteur de l’artisanat concerné (art, production ou service), la spécification du métier, la description sommaire de l’activité, la localisation du lieu d’exercice, et éventuellement l’appartenance à une organisation de l’économie sociale du secteur de l’artisanat. Ladite déclaration est accompagnée d’une photocopie de la carte nationale d’identité. L’artisan qui la dépose se voit immédiatement délivrer une attestation d’enregistrement. Dora Hortense BEONDO NGABELA, déléguée du Ministère des Petites et Moyennes Entreprises, de l’Economie Sociale et de l’Artisanat (MINPMEESA) dans le département du Wouri en 2015 affirmait, qu’au Cameroun, l’institution d’un répertoire communal avait pour but d’identifier les artisans et de les faire sortir du secteur informel242. Comme c’est également

le cas dans les pays mentionnés plus haut, c’est cette inscription qui donne aux artisans inscrits régularité. Elle leur permet de bénéficier de certains avantages tels que l’information

241Voi a t. du d et ° / /PM du o e e fi a t les odalit s d’appli atio de la

loi n° 2007/004 du 03 juillet gissa t l’a tisa at au Ca e ou .

242P opos ti s de l’a ti le d’u auteu i o u i titul « Cameroun-Artisanat : un secteur peu connu et sous

et le conseil de base, l’assistance individuelle à la gestion, l’assistance technique collective, l’assistance commerciale, l’assistance technologique et des facilités financières.

291. Quand on considère ces formalités que les lois nationales prescrivent aux

entrepreneurs civils, la question que l’on se pose est celle de savoir si la déclaration d’activité prévue par l’AUDCG suffira à faire de ces entrepreneurs civils des opérateurs en situation régulière. Cela revient, en d’autres termes, à se demander si les entreprenants civils seront encore obligés d’accomplir les formalités que les lois nationales régissant leurs activités prescrivent ou s’ils en seront dispensés. Il faut signaler que rien dans la loi communautaire ne permet d’affirmer que les entreprenants civils seront dispensés d’accomplir les formalités d’inscription ou d’enregistrement qui sont propres à leur domaine d’activité. Bien au contraire, tout porte à croire que, malgré la déclaration d’activité ils devront quand même se faire inscrire conformément à ce que la loi nationale leur indique. L’exemple ivoirien l’atteste bien avec l’article 17 de la loi n° 2014-338 du 05 juin 2014 relative à l’artisanat qui dispose que « sans préjudice des dispositions des articles 62 à 65 de l’Acte uniforme révisé portant sur le droit commercial général, toute personne physique qui exerce dans le secteur de l’artisanat est tenue de s’inscrire au Registre des Métiers ». C’est dire qu’en Côte d’Ivoire, le fait pour les artisans de se déclarer au RCCM ne les dispense pas de leur obligation de s’inscrire au Registre des Métiers. Pour les entrepreneurs civils, la déclaration d’activité apparait dès lors comme une formalité supplémentaire.

2. Un assujettissement temporaire à certaines dispositions du droit commercial 292. La déclaration d’activité permet aux entrepreneurs du secteur informel de se

formaliser. Les entrepreneurs civils qui l’accomplissent acquièrent le statut d’entreprenant et, en tant que tels, sont soumis aux dispositions du droit commercial en qui concerne la preuve et la prescription des actes accomplis dans l’exercice de leurs activités. Ce qui nous intéresse ici c’est leur situation une fois qu’ils perdent le statut d’entreprenant. La loi communautaire fait clairement savoir qu’ils cesseront de bénéficier de certaines dispositions du droit commercial et ne donne aucune garantie en ce qui concerne leur régularité.

293. La fin de l’assujettissement à certaines dispositions de l’AUDCG. « Le droit OHADA accorde aux commerçants certains droits dont ne disposent pas les personnes physiques ou morales n’ayant pas le statut de commerçant, tout en leur imposant certaines

obligations et responsabilités. Dans leurs opérations commerciales, les commerçants sont notamment assujettis à des règles de preuve et des délais de prescription différents de ceux

applicables aux personnes physiques ou morales non commerçantes »243. Cette affirmation

montre qu’en principe les règles applicables aux entrepreneurs commerçants ne sont pas les mêmes que celles qui sont appliquées aux entrepreneurs civils. De manière exceptionnelle, le législateur communautaire n’a pas voulu faire de différence entre les commerçants et les non commerçants exerçant sous le statut d’entreprenant. Tous sont soumis aux règles du droit commercial régissant la preuve et la prescription244. Cette situation n’est pas sans

conséquence car ce n’est qu’en tant qu’entreprenants que les professionnels civils peuvent bénéficier des dispositions de l’AUDCG encadrant ces deux dernières matières. Une fois qu’ils perdent ce statut, on cesse de leur appliquer les règles du droit commercial et c’est aux règles du droit civil qu’on devra se référer pour traiter les litiges les concernant. Ces entrepreneurs qui se sont vus appliquer les dispositions du droit commercial, seront dorénavant soumis à des dispositions différences issues du droit civil. Pour des litiges du même genre, les mêmes entrepreneurs se verront appliquer des règles différentes. Cela ne justifie pas, surtout si l’on veut considérer le statut de l’entreprenant comme un statut intermédiaire par lequel les entrepreneurs sont censés se familiariser avec les règles. D’un point de vue juridique, ce changement est également critiquable car il établit une différence de traitement entre les professionnels civils. Pour des situations similaires, des entrepreneurs qui exercent pourtant la même activité seront soumis à des dispositions différentes pour la simple raison qu’ils n’ont pas le même statut. A l’un on appliquera les dispositions de l’AUDCG parce qu’il est inscrit au RCCM en tant qu’entreprenant ; à l’autre on imposera les dispositions du droit civil parce qu’il exerce sous un statut classique d’entrepreneur individuel. C’est à juste titre qu’Akodah AYEWOUADAN affirmait que des disparités ont été renforcées au sein même de la catégorie d’entreprenant245. Une telle incohérence invite

à se demander si ces entrepreneurs civils conservent au moins un statut légal une fois qu’ils ne peuvent plus être entreprenants.

294.

Un retour possible à l’informalité. Il est important de toujours se rappeler que le

243 B. MARTOR, N. PILKINGTON, D. SELLERS et S. THOUVENOT, Le droit uniforme africain des affaires issu de

l’OHADA, Paris, Lexis Nexis, 2009.

244A t. de l’AUDCG.

245A. AYEWOUADAN, L’e t ep e a t en Droit uniforme OHADA, in RRJ Droit prospectif, (2013-1), p. 321, n°

statut de l'entreprenant a principalement été créé afin d'attirer les opérateurs du secteur informel vers le secteur formel. Il a pour but de doter ces entrepreneurs d’un statut légal grâce auquel ils pourront se prévaloir des dispositions relatives à la preuve, à la prescription et au bail à usage commercial246. La jouissance de ce statut est conditionnée et l’entrepreneur qui ne remplit plus les conditions prévues par la loi ne peut plus se prévaloir du statut d’entreprenant. En effet, il est dit aux alinéas 4 et 5 de l'article 30 de l'AUDCG que « Lorsque, durant deux années consécutives, le chiffre d'affaires de l'entreprenant excède les limites fixées pour ses activités par l'Etat Partie sur le territoire duquel il les exerce, il est tenu, dès le premier jour de l'année suivante et avant la fin du premier trimestre de cette année, de respecter toutes les charges et obligations applicables à l'entrepreneur individuel. Dès lors, il perd sa qualité d'entreprenant et ne bénéficie plus de la législation spéciale applicable à l'entreprenant. Il doit en conséquence se conformer à la réglementation applicable à ses activités ». D’après cet article, il n’est pas possible de conserver le statut d’entreprenant lorsqu’on dépasse le plafond du chiffre d’affaires fixé par la loi. L’entrepreneur qui se trouve dans une telle situation est tenu de se conformer à toutes les obligations qui incombent à son nouveau statut. Il doit, entre autres, accomplir les formalités d’enregistrement prescrites pour son domaine d’activité. Le législateur montre ainsi qu’il appartient à l’entrepreneur de se mettre en règle quel que soit son nouveau statut. Il s'agira, pour un entrepreneur dont l'activité est commerciale, de se conformer à la réglementation applicable au commerce, c'est à dire aux dispositions régissant le statut du commerçant. Il devra se faire immatriculer au RCCM. Les entrepreneurs civils, eux, devront accomplir la ou les formalités indiquées par la loi encadrant leurs activités. A défaut d’accomplir ces formalités, ils risquent à nouveau de se retrouver en situation irrégulière, dépourvus de statut légal. Ils risquent de retourner dans l’informalité. Cette situation met en exergue la précarité du statut de l’entreprenant. La légalité qu'il confère à ses titulaires est menacée une fois que ceux-ci dépassent le seuil du chiffre d’affaires prévu par la loi. Pour éviter un tel retour en arrière, le législateur aurait pu prévoir des solutions qui permettraient aux entrepreneurs de garder basculer automatiquement vers un autre statut légal.

B. Des solutions envisageables pour remédier aux problèmes soulevés

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