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La notion d’activité pour décrire et comprendre le travail réel des étudiants-stagiaires

3.2 Premiers pas… premières traces d’un chemin : l’approche interactionniste située des faits d’enseignement spécialisé pour construire les

3.2.2 Les postulats sous-jacents au modèle et leurs théories contributives

Comme nous l’avons montré, le modèle initial des contingences institutionnelles et situationnelles a émergé sur un fond d’observations menées par l’auteure en classes spécialisées. Ces observations ont contribué à mettre en évidence certaines pratiques d’enseignement spécialisé, telles qu’elles se déploient en situation de classe. Ces observations ont également permis à l’auteure, de mettre systématiquement en relation les conditions d’enseignement et d’apprentissage66 présentes dans les contextes de classes spécialisées avec les comportements et pratiques des acteurs (élèves et enseignants spécialisés), montrant notamment combien certaines pratiques handicapaient l’activité d’apprentissage des élèves (Pelgrims, 2006, 2009 ; Pelgrims, Chlostova & Delorme, 2019). Parallèlement à cette démarche d’observation, les théories issues de recherches de processus-produit ancrés dans une approche catégorielle du handicap, ont été mises à l’épreuve d’autres conjectures et modèles théoriques, susceptibles de donner un sens aux phénomènes observés dans les classes. Ancré dès lors dans une approche essentiellement interactionniste et écologique de l’enseignement spécialisé que nous présentons brièvement, le modèle heuristique de Pelgrims (2016b) est sous-tendu par six postulats majeurs formulés par l’auteure. Après les avoir successivement exposés, nous les articulons ensuite aux hypothèses sensiblement similaires (même si parfois éloignées) formulées par d’autres auteurs dont les travaux sont eux-mêmes le plus souvent ancrés dans une approche située des pratiques d’enseignement67.

L’activité est un ajustement à des contingences situationnelles qui peut être épisodique ou se cristalliser si la configuration des contingences perdure

S’éloignant radicalement des approches catégorielles et dans une certaine mesure des approches différentielles, centrant leur intérêt d’étude uniquement sur les catégories d’élèves, de structures ou de professionnels concernés par l’enseignement spécialisé, le modèle de Pelgrims met en évidence, à partir d’une perspective interactionniste située des faits d’enseignement spécialisé, l’existence de contingences situationnelles et institutionnelles infléchissant l’activité dans les contextes d’enseignement spécialisé. L’activité d’enseignement est ainsi une activité sociale se déployant dans des contextes particuliers et dont les conditions de réalisation variant précisément en fonction d’une configuration de dimensions inhérentes aux situations et aux contextes de travail, eux-mêmes plus largement comprises dans des organisations de travail. Elle ne dépend dès lors pas des caractéristiques ou des dispositions personnelles d’individus, pas plus qu’elle ne s’appuie sur une logique d’enseignement, organisant et assignant aux élèves des tâches individuelles dans un espace-temps ad hoc, à partir du diagnostic des troubles, des déficiences, des handicaps ou encore des difficultés qui leur sont institutionnellement reconnues.

Pour Pelgrims, le concept d’activité est associé à la notion d’ajustement. L’ajustement correspond à l’ensemble des comportements observables de l’individu, mais également à l’ensemble des stratégies cognitives, sociales et émotionnelles, que ce dernier développe et met en place pour composer avec les contingences de la situation. Toute activité reflète ainsi l’ajustement épisodique ou cristallisé déployé par un ou plusieurs individu(s) dans une situation particulière, compte tenu des contingences agissant au travers et dans la situation. En effet, selon la durée et la fréquence avec laquelle les configurations de contingences se présentent dans les situations et contextes de travail, Pelgrims postule qu’une cristallisation des comportements, des attitudes, des gestes adoptés par les individus cherchant à composer avec les contingences imposées par la situation ou par l’institution, a lieu. Ces ajustements auront alors tendance à se cristalliser, à se transformer en routine, sans même que l’enseignant ne s’en aperçoive. À l’inverse et selon l’auteure, l’ajustement pourrait n’être qu’épisodique. Son caractère épisodique est alors le fait a) d’une explicitation par autrui de l’ajustement aux configurations de

66 Il s’agit pour rappel notamment des dimensions pédagogiques mises en œuvre par l’enseignant (par ex : le temps effectivement alloué à l’enseignement, l’organisation sociale de l’enseignement, le matériel didactique, les interventions sollicitant la participation active des élèves) et certains comportements indicateurs d

67 Le parallèle que nous établissons entre certains auteurs et leurs propres hypothèses théoriques, que nous situons en complémentarité ou en opposition aux postulats fondamentaux avec le modèle heuristique de Pelgrims, relève le plus souvent de notre propre initiative. Ceux-ci ne sont, pour la plupart d’entre eux pas développés tels quels par l’auteure du modèle.

contingences inhérentes aux contextes d’enseignement spécialisé, et dès lors une prise de conscience permettant à l’individu de faire autrement (voir sixième postulat ci-dessous) ; b) d’une suppression de la contingence ou de la configuration de la contingence, ce qui est toutefois extrêmement rare étant donné leur caractère implicite et occulte (voir troisième postulat ci-dessous). Toutefois, nous remarquons que certaines contingences institutionnellement imposées aux enseignants spécialisés tendent à se transformer, notamment en raison de l’évolution du macro-contexte lui-même, des législations et des injonctions politiques. Ainsi, là où il y a quelques années se trouvaient des zones de liberté (voir second postulat ci-dessous), émergent progressivement de nouvelles prescriptions68. Ceci étant, il s’agit tout de même de transformations lentes et progressives, ne conférant pas à elles seules la possibilité de conférer un caractère épisodique aux ajustements des enseignants spécialisés en situation d’enseignement et apprentissage.

Ce premier postulat du modèle rejoint par ailleurs le paradigme de l’écologie de la classe lui-même ancré dans une perspective interactionniste située, et fondé sur une approche expérimentale de l’étude de la vie scolaire, menée dans un contexte dit naturel, soit directement en classe, dans « des situations préexistantes, non provoquées à des fins de recherche » (De Landsheere, 1979, cité par, Doyle, 1986, p.

437). Ce paradigme auquel se rattachent plusieurs chercheurs s’inscrivant en rupture de l’approche processus-produit, comme Doyle (1986), Gump (1964), Kounin (1970), Lortie (1975), Zeichner (1984), s’intéresse aux interactions entretenues par les individus avec leur milieu de vie (ici le milieu scolaire) prenant en compte l’écologie de la classe et notamment les contingences de l’environnement scolaire pour analyser le comportement des enseignants au sein d’un environnement particulier.

Les caractéristiques intrinsèques du contexte de la classe mises en évidence par Doyle (2005) illustrent ainsi comment certaines dimensions contextuelles incontournables et inhérentes à la vie scolaire infléchissent les pratiques des enseignants en classe. Ces six caractéristiques sont dans l’ensemble toutes associées à la dimension temporelle avec laquelle les enseignants doivent composer pour enseigner. Elles placent également au cœur des éléments contraignant l’enseignement, certains paramètres de l’action située évoqués plus haut, notamment son caractère social (et donc interactif) et dynamique.

La première des caractéristiques évoquée concerne la multiplicité des événements ayant cours dans une salle de classe, et des activités s’y déployant. Doyle fait ici référence au fait qu’une classe est généralement composée d’un effectif d’élèves qui peut être plus ou moins élevé. Or chacun de ces individus arrive dans la classe avec ses propres intérêts, ses propres antécédents, ses buts, ses capacités.

L’enseignant doit donc tenir compte de chacun de ces paramètres se multipliant en fonction du nombre d’élèves présents. La complexité réside également dans l’absence de stabilité liée à la composition des groupes, amenés à changer dans une journée, multipliant ainsi les configurations possibles d’enseignement, de tâches à préparer, conduire, etc. D’autre part, selon si les élèves travaillent en sous-groupes à des tâches identiques ou à des tâches différenciées, voire travaillent également de manière individualisée, la multiplicité des interpellations, des demandes, des réponses à apporter est évidente.

La seconde caractéristique à laquelle Doyle rend attentif concerne la simultanéité avec laquelle se déroule ces multiples événements au sein de la classe. En effet quiconque demeure ne serait-ce que cinq minutes à l’intérieur d’une classe, aboutirait au constat d’une absence de chronologie linéaire des événements. Ainsi pendant qu’un enseignant donne son cours, celui-ci prête simultanément attention aux bavardages, aux regards échangés entre les élèves, aux éventuels signes d’incompréhension. Ce faisant il peut être amené à répondre également à une question posée par l’un des élèves, à accorder ou refuser la parole à l’autre, tout en maintenant le fil de son enseignant. L’ensemble de ces phénomènes se dédouble inévitablement par ailleurs, lorsque des modalités de co-enseignement sont par ailleurs employées dans la classe. Après la simultanéité, il est question de l’immédiateté. Cette troisième caractéristique renvoie à l’instantanéité des réponses étant le plus souvent apportées, l’ensembles des micro-décisions devant être prises, quasiment « on line », contraignant l’enseignant à agir, comme le disait Perrenoud également, « dans l’urgence ». Doyle ayant dénombré en effet plus 500 interactions avec les élèves par jours dans le but, notamment de soutenir l’intérêt des élèves et de faire avancer

68 Nous pensons ici particulièrement à la liberté de moyens, ou à la liberté de programme elles-mêmes fortement infléchies par les contraintes liées à l’intégration scolaire d’élèves en classe régulière. Celle-ci requiert en effet de plus en plus de la part des enseignants spécialisés une activité de soutien et de préparation à l’intégration en amont, alignée sur les objectifs du PER et mobilisant également les MER.

l’enseignement, il relève que de fait, l’enseignant, n’a pas toujours le temps de réfléchir avant d’agir.

L’imprévisibilité, quatrième caractéristique de la classe correspond à l’impossibilité d’anticiper, de prévoir l’ensemble des événements susceptibles de se produire au sein de la classe. Par ailleurs, Doyle souligne que même en ayant préparé et planifié les différentes tâches, il demeure complexe de prévoir entièrement la manière dont la tâche va se dérouler, selon le moment de la journée, selon le groupe d’élève, etc. La notoriété, fait référence au fait que la plupart des événements se déroulent dans la classe aux sus et aux vus de toutes les personnes présentes. Cette cinquième caractéristique renforce ainsi la dimension scénique de l’enseignement et renforce la pression que l’enseignant peut ressentir. En effet, tout ce qu’il dit ou fait est soumis à observation directe, susceptible d’être rapporté à l’extérieur de la classe. Par ailleurs, Doyle rend également attentif au fait que le caractère public et notoire du comportement d’un seul élève peut également perturber l’ensemble de la classe, dans la mesure où celle-ci en est le témoin direct. Finalement, l’ensemble de ces événements contribuent à forger l’histoire de la classe. C’est en effet la sixième et dernière caractéristique évoquée par Doyle. L’historicité renvoie à l’histoire commune construite et développée par des élèves et un ou plusieurs enseignants qui se côtoient quotidiennement plusieurs heures par jours, plusieurs jours par semaine, tout au long d’une année scolaire, voire sur deux années scolaires. La classe vit et accumule dès lors des expériences communes, et adopte des manières d’agir, des rituels, des normes définissant son fonctionnement et contribuant en quelque sorte à lui conférer une identité. Doyle avance dès lors que l’ensemble de ces caractéristiques de cet environnement particulier qu’est la classe, créent une pression constante infléchissant fortement la tâche de l’enseignant.

Ce paradigme de recherche s’est certes construit en réaction aux recherches expérimentales sur l’enseignement (Research on Teaching) essentiellement réalisées en laboratoires et en dehors du milieu naturel de travail de l’enseignant, mais il peut néanmoins demeurer complémentaire aux recherches de type processus-produit, ou processus médiateur (Doyle, 1986) dans la mesure où il tente de saisir ce qui pourrait, en situation naturelle, contribuer à améliorer l’efficacité et la qualité de l’enseignement fourni aux élèves et dès lors l’amélioration des apprentissages par ces derniers. Outre le fait que Doyle &

Ponder (1975) considèrent la possibilité que les conditions en présence dans l’environnement de la classe puissent influencer le comportement de l’enseignant, ils signalent également l’existence d’autres recherches orientées par le même paradigme qui montrent que les exigences de la situation de classe (notamment la manière dont les élèves se comportent en classe et les influences de leurs comportements sur ceux des enseignants), pourraient interférer dans l’adoption de certains modèles de comportement de l’enseignant. Ils identifient un certain nombre de contingences environnementales infléchissant les comportements des enseignants en classe, parmi lesquelles les caractéristiques des élèves, le caractère non volontaire de leur présence à l’école, le nombre d’élèves que compte une classe, le caractère temporellement défini dont l’enseignant dispose pour faire cours. L’ensemble de ces facteurs indiquent clairement, d’après ces auteurs que les exigences de la gestion du groupe classe sont inhérentes à la situation d’enseignement, et concluent à partir de leurs travaux que la situation contrôle bien plus souvent l’enseignant, que l’enseignant ne contrôle lui-même la situation.

Sans s’inscrire dans le paradigme de l’écologie de classe, Bucheton, auteure du modèle théorique de

« l’agir enseignant et ses ajustements » considère également qu’il n’y a pas de théorisation de l’ajustement du geste professionnel sans référence à la notion de couplage de l’action à la situation (Bucheton & Jorro, 2014, p. 16). Celle-ci développe le concept d’ajustement du geste professionnel en s’appuyant sur les cadres théoriques de l’action située et de la cognition distribuée (Lave, 1989 ; Suchman, 1987 ; Hutchins, 1995) et plus largement sur des approches interactionnistes, micro-sociologiques, ethnographiques et anthropologiques. Or, lorsqu’elle évoque l’ajustement, comme principe fondateur du geste professionnel, cette notion se décline à des niveaux distincts : la pertinence du geste et sa nature. L’auteure insiste tout d’abord beaucoup plus sur les critères d’adéquation, de pertinence du geste déployé par l’enseignant en situation, que sur les critères d’adaptation ou de composition tels qu’ils se dégagent du premier postulat du modèle de Pelgrims. En effet, « est essentielle, la capacité de l’enseignant à voir, à entendre ses élèves dans leur singularité, dans l’immédiateté et la dynamique de l’action partagée et des savoirs en jeu » (Bucheton, 2014, p. 62).

L’ajustement est dès lors ce qui confère au geste sa professionnalité. Du point de vue de sa nature, l’ajustement est « la manière dont l’agir langagier et corporel de l’enseignant se règle sur la situation spécifique de la classe et plus encore sur l’évolution de cette situation pendant la leçon ». La situation spécifique de la classe comprend quant à elle, les ajustements réciproques de chacun des élèves aux

ajustements de l’enseignant lui-même, à ceux de leurs pairs, et à ceux du milieu didactique (Bucheton, 2014, p.64). Si nous repérons donc clairement les traces des approches interactionnistes situées dans cette conception de l’ajustement de l’enseignant, le lien avec d’éventuelles contraintes de l’environnement semble en revanche plus flou, à moins de considérer les élèves et les contenus enseignés comme des contraintes de situation, ce que Bucheton ne semble pas évoquer explicitement, mais implicitement seulement, lorsqu’elle mentionne la notion d’empan d’ajustement. Celui-ci consiste en l’ensemble des variables prises en considération par l’enseignant pour interpréter et agir en situation, mais il comprend également l’ensemble des préoccupations, leurs configurations, leur intensité et la régularité avec laquelle celles-ci interviennent dans l’action. Cette notion lui est toutefois davantage utile pour qualifier le degré de souplesse, versus de cristallisation des gestes et donc d’ouverture ou de fermeture de l’empan d’ajustement, que celui d’une cristallisation en regard des contingences inhérentes à la situation.

Finalement, nous trouvons dans les travaux de certains auteurs également inscrits dans une perspective interactionniste des sciences humaines et sociales, une mobilisation de la notion d’ajustement situationnel ou contextuel, que nous souhaitons confronter à la position soutenue dans ce premier postulat, étant donné à la fois la proximité dont elles font preuve, et en même temps leur distance.

La notion d’ajustement situationnel à laquelle ceux-ci se réfèrent, peut à certains égards, se rapprocher de la notion d’activité telle que portée par Pelgrims. Il y est en effet question des stratégies d’adaptation (quelles qu’en soient les finalités) à une situation particulière déployées par un ou plusieurs individus au travers de ses/leurs actions. Elle s’en écarte toutefois dans la mesure où Pelgrims ne rapporte pas littéralement et directement l’ajustement à la situation, mais plus spécifiquement à un système de contingences, qui elles sont situationnelles, car étroitement liées à la situation de laquelle, voire au contexte duquel elles émergent.

Prenons tout d’abord Becker (1964). Dans son intention de comprendre et d’expliquer les processus à l’origine de la transformation des comportements humains à l’âge adulte, cet auteur a recours, dans une perspective sociologique, à la notion d’ajustement situationnel. Becker, considère à l’époque tout en reconnaissant la nécessité d’approfondir les analyses d’une conception encore à l’état brut, qu’il s’agit de l’un des mécanismes les plus courants du développement de la personne à l’âge adulte. En effet, selon lui, l’individu traverse une grande variété de situations éminemment sociales, et apprend à faire face aux exigences nécessaires pour persévérer et surmonter chacune d’entre-elles. Si le souhait de persévérer en situation est suffisamment fort, pour évaluer avec précision ce qui est attendu de lui, et être en mesure de réaliser la performance attendue, l’individu devient alors « la personne requise pour la situation 69» (p.44). Becker avance alors que pour expliquer ce qui amène un individu d’âge adulte à se développer et à se transformer de telle ou telle manière, il s’agit de considérer les caractéristiques de la situation au sein de laquelle celui-ci se trouve et non les caractéristiques individuelles de la personne. L’auteur cherche ainsi à comprendre ce qui dans la situation, exige de la personne l’adoption d’un comportement particulier ou encore celle de certaines croyances. Ce chercheur prend uniquement en considération l’intérêt de la personne à continuer à s’engager dans la situation et à faire en sorte de réussir à réaliser ce qui est attendu d’elle, en postulant que celle-ci fera alors tout ce qu’il est nécessaire de faire pour se maintenir et réussir dans la situation en question.

Pour Becker (1964), l’ajustement situationnel est également mis en relation avec la notion de contingences situationnelles spécifiques aux institutions au sein desquelles les situations se déroulent, mais à nouveau, sans que l’on puisse complètement superposer la définition de contingences situationnelles de cet auteur à celle de Pelgrims. Pour Becker, si certaines institutions revêtent en effet un caractère relativement stable dans leur organisation et offrent dès lors une certaine stabilité situationnelle aux individus qui s’y engagent, d’autres se révèlent en revanche beaucoup plus dynamiques et instables provoquant ainsi des changements situationnels réguliers. Pour continuer à s’engager et à réussir dans ces nouvelles situations, les individus sont donc inévitablement contraints de développer régulièrement de nouvelles manières d’agir et d’adopter de nouvelles croyances. Ces changements situationnels deviennent dès lors des contingences situationnelles auxquelles les individus

69Traduction personnelle de : « the individual turns himself into the Kind of person the situation demands », Becker, HS (1964), p. 44.

sont confrontés et auxquelles ils s’ajustent, selon Becker. En outre, les perspectives développées par les individus en fonction de l’ajustement situationnel vont également dépendre de la durabilité de leur engagement dans la situation. En effet, selon que ceux-ci s’y engagent durant un temps long ou de manière temporaire, les perspectives se transforment et contribuent à modifier les croyances et les manières de se comporter au sein de la situation. Si nous retrouvons bien ici la dimension temporelle de l’ajustement proposée dans une conception d’un ajustement situationnel susceptible d’être épisodique ou cristallisé selon si la configuration des contingences persiste ou pas (Pelgrims, 2016), nous relevons toutefois que dans le modèle développé par Pelgrims, l’origine des contingences situationnelles ne relève pas uniquement de changements intervenant dans la situation.

Howard S Becker développe finalement l’idée selon laquelle l’ajustement situationnel ne relève pas uniquement de la dimension individuelle, mais s’avère le plus souvent le fruit d’un processus d’ordre collectif. Il ne s’agit donc uniquement pas du processus de changement en cours d’une seule personne mais celui d’une cohorte ou d’un groupe entier de personnes introduites dans une nouvelle institution et passant collectivement au travers du processus de socialisation institutionnel. Cette dimension collective

Howard S Becker développe finalement l’idée selon laquelle l’ajustement situationnel ne relève pas uniquement de la dimension individuelle, mais s’avère le plus souvent le fruit d’un processus d’ordre collectif. Il ne s’agit donc uniquement pas du processus de changement en cours d’une seule personne mais celui d’une cohorte ou d’un groupe entier de personnes introduites dans une nouvelle institution et passant collectivement au travers du processus de socialisation institutionnel. Cette dimension collective

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