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Couplée à celles d’enaction et expérience, la notion de transformation devient significative et se développe en chemin…

La notion d’activité pour décrire et comprendre le travail réel des étudiants-stagiaires

3.3 Transformations dans le « cours » de la marche… le chemin gagne en longueur et en largeur avec les notions d’enaction et d’expérience

3.3.3 Couplée à celles d’enaction et expérience, la notion de transformation devient significative et se développe en chemin…

Appropriations… Entre transparence et expérience

Au sein du programme de recherche empirique (et technologique) du cours d’action, la notion d’appropriation et les processus qui l’entourent, traduisent l’idée de transformations (constructions) régulières inhérentes à leur activité, qui seraient induites chez les individus, notamment aux niveaux de leur monde-propre, de leur corps-propre et de leur culture-propre (Veyrunes, Imbert & San Martin, 2014).

Theureau (2011) associant effectivement l’étude de ces processus avec les hypothèses de substance du programme de recherche du cours d’action (notamment celle de l’enaction), prend au sérieux l’idée qu’à chaque instant, un acteur considéré sélectionne ce qui, dans ses interactions asymétriques avec son environnement, est pertinent, fait sens pour lui à cet instant, contribuant ce faisant à (re)construire son monde-propre, son corps-propre et sa culture-propre à chaque instant. Ces sélections consistent en des processus d’appropriation accompagnant le flux de l’activité. Ainsi, cette dynamique contribue à transformer son organisation interne, de même qu’elle transforme l’environnement de l’acteur. Ces transformations consistent en trois processus d’appropriation définissant des pôles ordonnés et cumulatifs. Theureau (2011) distingue ainsi l’appropriation 1, l’appropriation 2 et l’appropriation 3.

Le premier pôle d’appropriation (ou appropriation 1) est spécifiquement relié au monde propre de l’acteur. Au fur et à mesure que le flux de l’activité se déploie, à chaque instant, certains éléments spécifiques parmi d’autres, sont faits émergés de la situation avec laquelle l’acteur interagit, et sont intégrés au monde-propre de l’acteur. Celui-ci équivaut en quelque sorte à l’Umwelt de Von Uexküll tel que l’avons décrit précédemment. Il se rapproche également des sélections que le système vivant opère dans le cadre du couplage structurel mis en évidence par Maturana et Varela (1987). Pour Theureau (ibid.) le monde-propre correspond à « l’ensemble des ancrages possibles de perturbations de l’acteur (…) donnant lieu à conscience préréflexive » (Theureau, 2011, p.7). Ainsi, pour faire le lien avec l’hypothèse de l’activité-signe, il se rapporte à l’ensemble des ancrages possibles des chocs, réactions ou « representamen », actualisés parmi les possibles dans un cours d’expérience. Or, comme nous l’avons montré dans la sous-section précédente, selon la dynamique d’engagement de l’acteur à la situation, son actualité potentielle, son référentiel (types, relations entre types ou principes d’interprétation de types associés à ses cours d’action passés et mobilisés dans la situation à cet instant), le continuum des anticipations possibles peut varier, et contribuer dès lors à ce que le monde-propre de l’acteur varie également, suscitant ainsi une dynamique permanente de transformations de l’activité, ou comme l’avance Durand:

Elle [l’activité] est ce qui se produit pas à pas, c'est à dire un flux, un processus, toujours en cours d’occurrence. Cela en fait un objet d’étude éminemment fugace et évanescent, l’analyste étant conduit à observer et décrire une disparition. De sorte que l’activité apparaît éphémère, qu’elle n’est jamais identique à elle-même, qu’elle diffère de ce qu’elle a été : il y a toujours une petite différence qui fait qu’il n’y a pas de reprise à l’identique d’une occurrence passée. Et si, observée à cette échelle, l’activité est ‘ce qui se produit’, au sens strict elle ne se ‘re-produit’ pas. (Durand, 2017, p. 33)

Prenons par exemple un étudiant-stagiaire souriant et détendu, pénétrant dans une salle de classe spécialisée un lundi matin (registre de l’actuel, unités de cours d’expérience). Il a pour intention d’observer l’enseignant-titulaire de la classe (registre du possible, engagement). Ayant déjà eu à observer un enseignant dans une classe régulière dans le cadre de son dernier stage, celui-ci sait qu’en tant qu’observateur, il va s’asseoir au fond de la classe et prendre des notes dans son journal de bord (registre du possible, référentiel). Il s’attend dès lors à se diriger au fond de la classe (registre du possible, actualité potentielle). L’absence de chaise et de pupitre se détachant du reste du mobilier de la salle de classe, l’interpelle alors à cet instant (registre de l’actuel, representamen). Il ne remarque toutefois pas

le nombre limité de pupitres et la présence de grandes tables rectangulaires sur les côtés latéraux. Étonné, voire légèrement déstabilisé, il s’arrête à l’entrée de la classe et cherche du regard l’enseignant titulaire, en même temps qu’il invalide la connaissance construite lors de son stage précédent. L’étudiant-stagiaire construit ici une nouvelle connaissance : « dans cette classe spécialisée, il n’y a pas de place réservée à l’étudiant-stagiaire ! » (registre du virtuel, interprétant). Dans cet exemple, nous pourrions dire que l’environnement au sens de l’Umgebung de l’étudiant-stagiaire est bien la salle de classe. Toutefois, c’est l’absence de pupitre et d’une chaise se détachant du reste des pupitres, qui lui seraient explicitement destinés, qu’il fait immédiatement émerger à cet instant où il pénètre dans cet Umgebung qu’est la salle de classe. C’est ce qu’il sélectionne comme élément pertinent à cet instant compte-tenu de ses préoccupations, attentes et connaissances et qu’il intègre pour la construction de son monde-propre à cet instant. Reprenons le même étudiant-stagiaire quelques jours plus tard, qui se dirige, le regard déterminé, vers l’une des deux grandes tables situées sur les côtés dès son entrée en classe, puis qui sans hésiter y dépose son sac. Il s’agit bien de la même salle de classe, dont la disposition spatiale n’a pas varié. L’activité de l’étudiant-stagiaire et plus particulièrement son monde-propre s’est pourtant transformé : il a à présent intégré à son monde-propre les deux tables latérales. D’invisibles le premier jour, celles-ci appartiennent à présent à son monde propre. Or, en accord avec l’hypothèse de l’enaction et des analyses conduites par Theureau, les distinctions de spécifications d’éléments selon la situation, contribuant à construire le monde-propre de l’acteur à chaque instant, ne peuvent en aucun cas être prédéterminées a priori, ce qui confirme effectivement la difficulté annoncée par Durand (2017) à anticiper les transformations d’activité d’une part, à agir dessus d’autre part.

Le second pôle d’appropriation (ou appropriation 2), consiste en une « intégration, partielle ou totale, d’un objet, d’un outil ou d’un dispositif au corps-propre de l’acteur accompagnée (toujours) d’une individuation de son usage, et (éventuellement) de transformations plus ou moins importantes de cet objet, de cet outil ou ce dispositif lui-même. » (Theureau, 2011, p. 7). Ce processus est également désigné par Theureau comme processus d’in-corporation (Ibid.). Bien qu’il s’y réfère, la notion de corps-propre de l’acteur ne renvoie cependant pas uniquement au corps matériel et physique de l’acteur.

En écho avec la notion de monde-propre, le corps-propre comprend en effet « le système des actions naturelles, possibles de l’acteur » (ibid., p. 7). La notion de couplage de l’objet à une situation où le corps de l’acteur est spécialement mobilisé demeure en effet présente. Il s’agit ainsi de l’intégration d’un objet, d’un outil ou d’un dispositif à un système d’actions en cours, sans que cette intégration ne nécessite de la part de l’acteur une suspension de l’action en cours ou l’élaboration d’une action nouvelle (Ibid.). Steiner (2010) propose la notion de « transparence » de l’objet pour souligner à quel point le corps de l’acteur peut devenir ainsi à un moment donné un prolongement de l’objet, en quelque sorte à l’insu de l’acteur. Les patins à glaces du patineur artistique peuvent ainsi être in-corporés au corps-propre de l’acteur, lorsque celui-ci ne ressent plus leur lourdeur, leur emprise, leur dangerosité, etc., lorsqu’il patine, lorsque patins, pieds et jambes se situent dans le prolongement d’une même action, celle de d’évoluer sur la glace, lorsque l’acteur perçoit les aspérités ou au contraire la netteté de la glace au travers de ses patins.

San Martin & Veyrunes (2015), dans une étude portant spécifiquement sur l’appropriation du tableau noir, recourent en se référant alors à l’objet théorique du cours d’in-formation (Theureau, 2006) fondé sur le cours d’expérience de l’acteur, pour documenter ces instants ou périodes durant lesquels certains éléments et/ou événements deviennent transparents, l’empêchant ainsi d’en rendre compte à un observateur-interlocuteur moyennant des conditions malgré tout favorables. Dans ce cas, le recours à des données d’enquête complémentaires (observations de type ethnographique), permettent précisément d’accéder à ces éléments incorporés au corps-propre de l’acteur.

Prenons à titre d’illustration du processus d’in-corporation, l’appropriation du tableau noir comme objet et outil pédagogique approprié, appropriable (ou pas) par les étudiants-stagiaires, celui-ci ayant fait l’objet d’une étude spécifique consistant précisément à décrire et à comprendre l’appropriation du tableau par les enseignants (San Martin & Veyrunes, 2015). D’après Nonnon (2000) citée par les auteurs, « le tableau est une interface entre l’écrit et l’oral qui sert de support à un geste incontournable et routinier, la notation » (San Martin & Veyrunes, 2015, p. 50). Dans l’étude de cas présentée par ces auteurs, le tableau noir et son utilisation (inadéquate, peu efficace) s’avèrent complètement transparents aux yeux de l’enseignante. Celle-ci y a recours sans même considérer que la manière dont elle l’utilise peut avoir des incidences sur les difficultés et/ou facilités de compréhension rencontrées par les élèves.

Le tableau noir est ainsi totalement incorporé, ne mobilisant aucunement une attention particulière de l’acteur dans la continuité de ses actions. Suite à des échanges contractualisés au préalable dans le cadre du contrat de recherche, entre l’enseignante et la chercheure, le tableau noir est « dés-in-corporé » du corps-propre et reprend son existence, sa présence, son importance ou encore sa visibilité dans la situation, l’enseignante ayant été amenée à y être désormais attentive. Lorsqu’elle y a à nouveau recours dans le cadre d’une nouvelle leçon, la documentation de son cours d’expérience montre que celle-ci y est cette fois-ci attentive, pense à l’usage qu’elle est en train d’en faire au cours de l’action, témoignant ainsi de la transformation d’activité résultant de la mise à distance de l’objet matériel de son corps propre, tout en l’intégrant également comme un élément pédagogique dans son monde-propre.

Theureau relève finalement que le processus d’appropriation 2, peut également consister en des

« aménagements personnels ou collectifs en général minimes, opérés sur cet objet, cet outil ou ce dispositif » (Theureau, 2011, p. 7). L’étudiant-stagiaire pourrait ainsi avoir réglé le tableau noir à une hauteur lui correspondant. Des aménagements organisationnels en termes d’espaces réservés à certaines fonctions particulières du tableau noir auront pu être effectués (par ex : partie centrale généralement vierge et destinée à la notation des consignes ou toute autre explication liée à la leçon en cours ; panneaux latéraux consacrés respectivement à la date et à la phrase du jour sur la partie de gauche ; les devoirs de la semaine, la roue des responsabilités, étant eux systématiquement placés sur la partie droite du tableau, etc.). Ces aménagements personnels et spécifiques à l’usage de certains objets renvoient à une notion d’appropriation s’apparentant à une individualisation à travers laquelle l’acteur développe un « style » d’usage particulier du tableau noir (Ibid.)

Le troisième et dernier pôle d’appropriation (ou appropriation 3) est également désigné comme un processus d’in-culturation (Theureau, 2011, p. 11). Il s’agit alors d’une « intégration partielle ou totale d’un objet, d’un outil, ou d’un dispositif à la culture propre de l’acteur, accompagnée (toujours) d’une individuation de son usage et (éventuellement) de transformations plus ou moins importantes de cet objet, de cet outil, ou de ce dispositif lui-même » (ibid., p.11). La culture-propre d’un acteur correspond à l’ensemble des connaissances, expériences, valeurs, normes d’actions, autrement dit, à la part symbolique de la culture. Theureau la nomme « le système des savoirs symboliques préalables de l’acteur (…) fait de toutes les sortes de formes symboliques et comprend donc, outre le langage et les formalismes, les gestes et les icônes symboliques. » (ibid.p.11). En effet, ce dernier considère que la culture au sens large comprend une part non symbolique qui elle, est présente dans les trois processus d’appropriation, tandis que la part symbolique est limitée au processus d’in-culturation. L’auteur précise également que cette part symbolique de la culture de l’acteur, soit sa culture-propre est toujours en partie partagée avec d’autres acteurs (ce qui est également vrai du monde-propre et du corps-propre).

Ainsi, nous pouvons supposer qu’un étudiant-stagiaire ait partiellement ou totalement intégré au terme de sa formation, des outils de pensée et d’action partagés avec d’autres de ses collègues ainsi qu’avec les enseignants chevronnés. Une in-culturation du jargon professionnel de l’enseignant spécialisé genevois pourrait ainsi lui permettre d’employer et de comprendre sans autre effort, en « toute transparence » des termes tels que le « PEI », la « synthèse », les « équipes pluri », ou encore de recourir à des gestes, attitudes ou postures tels que le fait de « contenir un élève », « créer du lien », « faire alliance avec les parents », mais également de comprendre et d’être en mesure de mobiliser des notions ou concepts didactiques telles la « planification », la « séquence (didactique) », la « régulation », le

« lancement de la tâche et la clôture de la tâche », la « transposition », etc.

Ces notions, connaissances, valeurs, modalités et normes d’action pourraient être issues d’un ou de plusieurs dispositifs de formation initiale, contribuant à apporter comme nous l’avons vu dans les chapitres précédents, ces outils de pensée et d’action, par ailleurs communs aux étudiants-stagiaires en enseignement spécialisé du canton de Genève, mais également communs aux étudiants-stagiaires des cantons romands et alémaniques, ainsi qu’aux étudiants-stagiaires étant formés outre atlantique. Le processus d’appropriation 3 concerne toutefois également l’intégration d’objets, d’outils ou de dispositifs « symboliques pour soi-même » à la culture-propre de l’acteur, soit propres uniquement à l’acteur (Ibid.). Nous pensons par exemple, aux connaissances, valeurs, concepts, normes d’action, in-culturés lors d’un stage réalisé dans un contexte culturel distinct de ceux prévus par l’institut de formation (par ex : un stage dans une classe de 60 élèves en Afrique), susceptibles à chaque instant de se mêler aux connaissances théoriques issues d’un cours universitaire sur la compréhension et

l’interprétation des comportements manifestés par les élèves en classe spécialisée ainsi qu’aux savoirs symboliques issus d’une formation personnelle sur la discipline positive.

Mimésis et transformations … une autre forme de transparence dans la transformation

Dans une prolongation de la notion d’in-culturation développée par Theureau (2011), et celle de transparence développée par Steiner (2010), la notion de mimésis, nous apparaît comme intéressante à mobiliser. De fait, ce phénomène intervient également dans l’appropriation des gestes culturels et symboliques, ou apprentissage culturel (Wulf, 1998, 2014) ou encore dans une approche sémiotique de la notion de geste professionnel (Duvillard, 2014 ; Jorro, 2002 ; Pana-Martin, 2015). En effet, certains dispositifs de stage prévoient comme mentionné plus haut, un accueil d’une durée variable des étudiants-stagiaires au sein de classes tenues par des enseignants spécialisés titulaires, enseignant eux-mêmes tout au long de l’année dans ces classes. Ces dispositifs de formation prévoient des temps d’observation des titulaires par les étudiants-stagiaires, mais également des temps d’entretiens et d’échanges entre étudiants et enseignants chevronnés. Durant ces temps de formation particuliers, des occasions (au sens du kaïros, sur lequel nous reviendrons ci-après) de transformation d’activité, d’appropriation et d’in-culturation de gestes, postures et micro-gestes professionnels85 comportant une signification particulière relativement aux monde-propre, corps-propre et culture-propre des enseignants chevronnés, sont rendues possibles, notamment du fait qu’elles offrent aux étudiants-stagiaires des supports d’engagement mimétiques (Durand et al., 2013). En effet, l’apprentissage mimétique86, précisément « fondé sur le corps et les sens, permet l’apprentissage d’images, de schémas, de mouvements relevant de l’action pratique ; il s’effectue de façon largement inconsciente, ce qui induit des effets durables dans tous les domaines de l’évolution culturelle » (Wulf, 2014, p. 123).

L’auteur reprend à la suite d’Aristote et de Platon, l’idée selon laquelle l’être humain, aurait dès son plus jeune âge, une capacité ou une aptitude mimétique lui permettant d’approprier - et assimiler - un savoir culturel, notamment à travers l’imitation des personnes (le plus souvent adultes) appartenant à son groupe social. Cette capacité suppose selon lui, un désir mimétique, soit le désir de ressembler, d’égaler, de devenir comme l’adulte. En outre, pour Wulf (ibid.), c’est également la relation mimétique qui permet une certaine forme d’appropriation et de transformation de mondes (culturels), car sans cette relation mimétique, ceux-ci ne représentent qu’un potentiel mimétique, leur sens ne se déployant qu’au cours de la formation. De plus, « parce qu’elles transforment le monde donné à l’origine, les relations mimétiques comportent toujours un aspect créateur » (ibid, p. 127). Il s’agit dès lors, malgré l’intention mimétique, toujours d’une réinterprétation personnelle, d’une transformation personnelle du monde symboliquement copié, produisant ainsi une transformation constante du monde d’une génération à une autre, ou au sein d’un groupe social (si la relation mimétique ne se réalise pas selon une logique de transmission générationnelle). Aristote, évoqué par l’auteur avançait en effet déjà l’idée selon laquelle

« les actions mimétiques ne créent pas une copie de la réalité où disparaîtrait la différence entre le modèle et son imitation. Les processus mimétiques peuvent conduire à l’imitation et au changement » (ibid, p. 128). Ceci nous permet dès lors de comprendre la double transformation d’activité que ces occasions de formation permettent. Tout d’abord l’activité de l’étudiant-stagiaire est sujette à transformation au travers de phénomènes mimétiques, celui-ci faisant siennes tout en les transformant des dispositions à agir initialement incarnées et mobilisées par les enseignants titulaires (Muller &

Plazaola Giger, 2014). Ce faisant, et selon une logique de « transmission-acquisition87 » de gestes professionnels appropriés selon un processus mimétique, dans le cadre d’une situation de formation (observation de l’enseignant titulaire, échanges formels et informels avec l’enseignant titulaire), ces

85 Les gestes professionnels des enseignants, contrairement à d’autres professions davantage techniques, s’entendent au-delà de la mobilisation de techniques du corps (au sens de Mauss, 1950). Il s’agit également de gestes symboliques dans la mesure passant par le langage.

86 Nous sommes consciente de l’incompatibilité théorique de cette notion, qui présuppose l’existence d’un sujet, avec les hypothèses de l’enaction et de la conscience préréflexive. Nous y avons tout de même recours en tentant de transposer ce que l’auteur affirme relativement à un sujet, à l’activité humaine, c’est-à-dire en nous référant pour ce faire plutôt aux sélections pertinentes opérées à chaque instant par un acteur humain dans son couplage asymétrique à la situation.

87 Nous utilisons les guillemets afin de souligner toute la prudence que le recours au couple « transmission et acquisition » requiert dans la mesure où il est précisément postulé l’impossibilité de prédéterminer l’acquisition d’une culture découlant directement d’une transmission volontaire par autrui selon les hypothèses de substance du programme de recherche du cours d’action énoncées précédemment.

gestes, postures, attitudes peuvent voir leur signification originelle être transformée. De même, ils peuvent ainsi subir eux-mêmes des transformations.

Ainsi, dans un engagement mimétique à la situation d’observation de l’enseignant-titulaire en train de suspendre la manifestation d’un comportement intempestif d’un élève, l’étudiant-stagiaire pourrait être amené à in-culturer un geste d’autorité ayant fait signe pour lui à l’instant où l’enseignant titulaire l’a produit, puis à le reproduire lui-même dans un processus mimétique, dans une classe de situation lui semblant similaire, avec un engagement également estimé similaire à celui de l’enseignant-titulaire, mais qui du point de vue de l’auteur l’ayant initialement produit, s’en écarterait sensiblement, voire largement.

Or, comme le spécifie Wulf (ibid.), à travers l’idée d’une inconscience des acteurs88, la plupart de ces processus mimétiques sont difficilement accessibles à la conscience préréflexive des acteurs. Ils sont en ce sens transparents, les acteurs aspirant à se comporter et se comportant comme d’autres, sans même s’en rendre compte. L’auteur, y associe par ailleurs la notion de contagion des processus mimétiques allant jusqu’à leur attribuer une contribution importante aux phénomènes de violence sociale. Celui-ci rend en effet le lecteur attentif au fait que ces phénomènes mimétiques s’ils sont en effet le plus souvent inconscients et donc transparents pour ceux qui y ont recours, ne passent en revanche pas inaperçus aux yeux des personnes imitées, ce qui ne va pas sans engendrer certaines formes d’incompatibilité paradoxale en lien avec des enjeux de pouvoir, susceptibles de déboucher sur des situations de violence :

Or, comme le spécifie Wulf (ibid.), à travers l’idée d’une inconscience des acteurs88, la plupart de ces processus mimétiques sont difficilement accessibles à la conscience préréflexive des acteurs. Ils sont en ce sens transparents, les acteurs aspirant à se comporter et se comportant comme d’autres, sans même s’en rendre compte. L’auteur, y associe par ailleurs la notion de contagion des processus mimétiques allant jusqu’à leur attribuer une contribution importante aux phénomènes de violence sociale. Celui-ci rend en effet le lecteur attentif au fait que ces phénomènes mimétiques s’ils sont en effet le plus souvent inconscients et donc transparents pour ceux qui y ont recours, ne passent en revanche pas inaperçus aux yeux des personnes imitées, ce qui ne va pas sans engendrer certaines formes d’incompatibilité paradoxale en lien avec des enjeux de pouvoir, susceptibles de déboucher sur des situations de violence :

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