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CONCOURANTES EN METAMEMOIRE

1. P ROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES

2.1. Population d’étude

Au total, 37 sujets se répartissant en 2 groupes distincts ont été évalués dans cette étude. Le groupe de patients cérébro-lésés incluait 20 patients indemnes d'antécédents neurologiques et psychiatriques. Tous étaient porteurs de lésions cérébrales se limitant aux seuls lobes frontaux (imagerie par résonance magnétique et/ou tomodensitométrie cérébrale). Les lésions étaient unilatérales gauches pour 8 patients, unilatérales droites pour 4 patients et bilatérales pour 8 patients. L’origine lésionnelle était traumatique pour 11 patients, tumorale pour 6 patients, vasculaire pour 2 patients et infectieuse pour le patient restant. Le délai post- lésionnel moyen était de 17.5 mois (étendue : 0.7 – 98.4 ; écart-type : 24.3). Au moment de l’évaluation tous étaient porteurs d’un syndrome dysexécutif cliniquement diagnostiqué et confirmé par les tests neuropsychologiques. Ils ne présentaient pas de déficits perceptifs visuels et auditifs, ni de troubles de nature phasique susceptibles de perturber leur compréhension des consignes, les tâches métamnésiques utilisées ici étant exigeantes (score dans la normale au Boston Diagnostic Aphasia Examination : supérieur ou égal à 12 en

exécution d’ordres, supérieur ou égal à 8 en raisonnement logique et en compréhension écrite de phrases).

Le groupe de sujets contrôles était composé de 17 sujets sans antécédent neurologique ou psychiatrique. Les principales caractéristiques socio-démographiques des 2 groupes sont résumées dans le tableau 1. Ce tableau regroupe également les statistiques confirmant l’appariement des populations.

Tableau 4.1 : Caractéristiques descriptives des 2 groupes de sujets.

Patients frontaux (n = 20) Sujets contrôles (n = 17) Valeur de p Sexe Homme Femme 11 9 10 7 Age Moyenne (écart-type) Etendue 43.6 ans (18.1) 18-75 41.4 ans (16.7) 19-75 ns ns Années d’études Moyenne (écart-type) Etendue 10.3 ans (2.5) 6-16 11.1 ans (2.8) 6-17 ns ns

Note : ns = non significatif.

2.2. Matériel

2.2.1. Fonctions exécutives

Le protocole d’investigation des fonctions exécutives incluait 7 épreuves permettant d’évaluer les principales dimensions décrites dans la littérature (Van der Linden et al., 2000) à savoir les processus inhibiteurs, la flexibilité, les processus de catégorisation, de déduction de règles opératoires, les capacités d’attention divisée, d’organisation, de planification et des capacités d’attention soutenue. Quatre de ces épreuves sont considérées comme classiques : le test de la Tour de Londres (TOL, Shallice, 1982), le Modified Card Sorting Test (MCST, Nelson, 1976), le Trail Making Test (TMT, Reitan, 1958) et le Stroop Test (Stroop, 1935). Les trois autres, de conception plus récente, étaient le Brixton Spatial Anticipation Test (Brixton, Burgess et Shallice, 1996a), le Hayling Sentence Completion Test (Hayling, Burgess & Shallice, 1996b) et la version francophone (Allain, Roy, Kefi, Pinon, Etcharry- Bouyx & Le Gall, 2004a) de la Behavioural Assessment of the Dysexecutive Syndrome (BADS, Wilson, Alderman, Burgess, Emslie & Evans, 1996).

Pour ces épreuves, nous avons retenu comme mesure d'appréciation de la performance les critères les plus classiquement utilisés dans la littérature. Pour des informations plus précises concernant la description des épreuves nous renvoyons le lecteur à Van der Linden et al. (2000).

2.2.2. Métamémoire

La dimension métamnésique a été étudiée à partir d'une mesure indépendante (QAM) et de trois mesures concourantes.

2.2.2.1. QAM

Le Questionnaire d’Auto-évaluation de la Mémoire (QAM, Van der Linden et al., 1989) a été utilisé comme mesure indépendante. Le QAM comprend 62 questions groupées en 10 rubriques (conversation, films, distractions, etc.) traitant de différentes situations de la vie courante dans lesquelles des oublis peuvent survenir. Ce questionnaire comporte 2 versions, l’une est remplie par le patient et l’autre par un informant fiable, proche du patient au quotidien. Chaque question est cotée sur une échelle de Likert en 6 points (allant de "Jamais" à "Toujours" soit de 1 à 6). L'échelle 10 (questions générales) n'a pas été conservée lors du traitement des données puisqu'elle n'aborde pas spécifiquement des troubles mnésiques. La confrontation des auto- et hétéro-évaluations permet d'apprécier la conscience des troubles mnésiques et de juger de la présence et de l’importance de l’anosognosie. Pour ce faire, nous avons utilisé le score de métamémoire proposé par Trosset et Kaszniak (1996). Ce score correspond à la différence entre 2 évaluations (sujet et proche) multipliée par 100. Un score bas, proche de 0, signifie que le sujet ne présente pas de troubles de métamémoire ; un score élevé signifie qu’il connaît des difficultés à émettre des jugements appropriés sur ses propres capacités mnésiques résiduelles (sous-estimation des troubles si le score est supérieur à 0).

2.2.2.2. Mesures concourantes

Les trois mesures concourantes étaient issues d’un test d’apprentissage de 12 couples de mots, construit pour la circonstance. Les couples de mots étaient issus du sub-test « Mémoire Implicite - Paires, Liste 2 » de la batterie d’évaluation de la mémoire Côte-des-Neiges (Belleville, Chatelois, Fontaine, Lussier, Peretz, Pineau & Renaseau-Leclerc, 1992), la moitié des paires avaient un lien sémantique. Nous avons contrôlé la fréquence lexicale des mots sélectionnés dans la langue à partir de la base de donnée BRULEX (Content, Mousty & Radeau, 1990).

L'épreuve reprenait la procédure utilisée dans le sub-test "mots couplés" de la forme révisée de l'Echelle Clinique de Mémoire (WMS-R) de Wechsler (1991). Ainsi, 12 couples de mots étaient présentés au sujet qui devait ensuite rappeler le deuxième mot (mot cible) de la paire après présentation du premier (mot indice). L'épreuve utilisait au maximum 6 présentations et 6 rappels. Néanmoins, le test était interrompu lorsque le sujet avait restitué 80% des items cibles (soit 9 mots).

- La première mesure concourante était une prédiction de l'apprentissage à chacun des 6 essais. Les sujets devaient prédire le nombre de mots qu'ils pensaient pouvoir rappeler après chaque essai (« dites-moi combien de mots vous pensez rappeler au premier essai, puis au second essai, etc… »). Les scores retenus pour l'analyse des résultats étaient les nombres de mots prédits à chaque essai.

- La seconde mesure concourante était une mesure de prédiction de rappel différé. Les sujets devaient prédire le nombre de mots qu'ils rappelleraient 20 minutes après la fin du test (« dites-moi combien vous pensez pouvoir rappeler de mots 20 minutes après la fin du test »). La mesure retenue ici était un indice de prédiction de rappel obtenu en soustrayant le score prédit du score effectif (Hertzog et al., 1990). Par exemple, un sujet qui prédisait pouvoir rappeler tous les mots du test à 20 minutes (soit 12 mots cibles) et qui en rappelait effectivement 8, avait un indice de prédiction de 4.

- La troisième mesure concourante était une mesure de jugement FOK que nous avons établie en reprenant les 2 mesures de précision les plus décrites dans la littérature sur la métamémoire, à savoir l’indice Gamma (Nelson, 1984) et le coefficient Hamman (Schraw, 1995) (voir les modalités de calcul chapitre 2 partie 3.2.1.3).

Ces 2 scores de précision du jugement FOK sont compris entre –1 et +1. Une valeur positive élevée correspond à une association forte entre les performances en reconnaissance et la prédiction de jugement FOK. Une valeur proche de zéro correspond à l’absence d’associations, discordances et concordances étant équivalentes en nombre. Dans cette situation, la précision du jugement FOK est indéterminée. Enfin, une valeur négative correspond à une relation inverse, le nombre de discordances étant supérieur au nombre de concordances. Dans ce cas, on parlera d’imprécision du jugement FOK.

3. RESULTATS

Les comparaisons des performances exécutives des patients frontaux et des contrôles ont été réalisées au moyen du test de Mann-Whitney au seuil p < .05, les conditions d'application des techniques paramétriques n’étant que rarement réunies (la normalité des distributions de performances recueillies a été éprouvée à l'aide du test de Kolmogorov-Smirnov). Les écarts entre les auto- et les hétéro-évaluations des problèmes mnésiques au quotidien ont été étudiés à l'aide du test de Wilcoxon au seuil de significativité p < .05. Les relations entre les mesures de métamémoire ont été appréciées en utilisant le test de corrélation de Spearman au seuil p < .05. La régression linéaire multiple (seuil p < .05) a été utilisée pour étudier les relations entre scores métamnésiques et performances aux tests exécutifs.

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