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PHASES D’UNE SÉQUENCE D’ENSEIGNEMENT ET RAPPORT DE L’ÉLÈVE A L’OBJET

2. MODÈLE DES TROIS PHASES

2.3. Trois phases

Dans notre modèle, la séquence d’enseignement s’articule en trois phases nécessairement ordonnées : 1/La phase d’immersion ; 2/La phase de conceptualisation ; 3/La phase de réinvestissement. La figure 2 permet d’avoir une vue d’ensemble de ces trois phases. Dans ce schéma, le temps didactique s’écoule de haut en bas. On voit que nos trois phases ne sont pas isolées mais qu’elles s’articulent dans des activités de transitions.

Nous allons décrire ces trois phases plus en détail en commençant par la phase de conceptualisation et en terminant par la première phase dite d’immersion. Celle-ci se comprend mieux si on la compare aux deux autres et mérite un développement plus important. Le concept d’immersion a en effet été spécialement développé à la HEP de Lausanne.

2.3.1. Phase de conceptualisation

La phase de conceptualisation est centrale dans la séquence. Dans cette phase l’enseignant problématise le savoir de manière à stimuler l’élève. Elle est caractérisée par des tâches qui créent des besoins cognitifs : études ce cas, projet de réalisation, projets de communication, situations- problèmes. Dans le cadre cet atelier, nous nous intéressons particulièrement à ces dernières. Nous les concevons au sens strict donné par Meirieux (1987) ou Arsac, Germain et Mantes (1991) et repris entre autres par Astolfi & Al. (1997). Les situations-problèmes mettent en jeu des objets et des phénomènes. Elles placent l’élève dans un rapport bien particulier à l’objet : une dialectique s’installe dans l’interaction objet-élève. L’enjeu, le défi apporté par la situation-problème conduit l’élève, parfois au travers de nombreux tâtonnements, à faire des conjectures, suivies de tests de validation, sur la nature des variables qui entrent en jeu et sur la manière dont ces variables déterminent le comportement du système étudié.

Au travers de cette démarche, l’élève (re)construit une représentation conceptuelle, ayant parfois le statut d’un modèle, qui doit être opératoire dans la situation.

Pour cela, nous dirons que dans la phase de conceptualisation, l’élève interroge l’objet.

2.3.2. Phase de réinvestissement

La dernière phase est celle des réinvestissements, recontextualisations et élargissements. C’est aussi la phase dans laquelle trouve place l’évaluation formative et, le cas échéant, en clôture, l’évaluation certificative qui aboutit à la reconnaissance (ou la non-reconnaissance) de la compétence attendue. Cette phase des réinvestissements vise à entraîner l’élève à élargir sa compétence à une famille de situations, à lui permettre de faire des transferts. L’enseignant place l’élève face à de nouveaux problèmes et à des défis. L’élève doit trouver une solution, prévoir un comportement, prévoir la valeur numérique d’une grandeur mesurable, mais il n’est pas autorisé à interagir avec les objets et phénomènes. Il ne peut pas se livrer à des « expériences », c’est-à-dire faire des manipulations sinon pour prendre des mesures quand c’est nécessaire. Chaque fois que c’est possible, l’élève valide lui- même le résultat trouvé ; il a alors le droit d’expérimenter. Enfin, l’élève procède à une analyse critique de sa manière de résoudre le problème.

Un autre rapport de l’élève à l’objet se noue dans la phase de réinvestissement puisque l’objet n’est là que pour fournir la situation et permettre à l’élève de valider la solution trouvée.

2.3.3. Phase d’immersion

La phase de conceptualisation nécessite, pour être menée à bien, que les élèves aient développé une familiarité avec les objets et les phénomènes concernés (le référent empirique).

Souvent, les enseignants tablent sur une familiarité qui aurait été acquise en dehors du contexte scolaire ou espèrent que cette familiarité se développera dans le cadre du travail de conceptualisation.

Notre modèle de construction d’une séquence d’enseignement pose comme principe que des occasions de familiarisation empirique doivent être créées et qu’elles doivent précéder la phase de conceptualisation. Nous postulons aussi que des savoirs, savoir-faire et savoir être préalables aideront les élèves dans leur travail de conceptualisation. Nous rejoignons ici les propos de Coquidé (1998) :

C'est un mode d'activités d'un registre de familiarisation pratique aux objets et aux phénomènes, et qui permet l'élaboration des concepts quotidiens de Vygotski. Dans une perspective génétique, il correspond soit à l'initiation scientifique du jeune enfant soit à l'abord d'un nouveau sujet d'étude. Dans ce mode d'activité, et d'un point de vue pédagogique, les pratiques expérimentales sont en relation avec des situations de familiarisation. Elles ont pour but de familiariser l'élève à des objets ou des phénomènes, de l'inciter à un questionnement, de constituer un référent empirique. Les activités peuvent lui faire acquérir des savoir-faire préalables ou s'approprier des techniques d'investigation (instruments et procédures). L'élève expérimente « pour voi » ; il explore et contrôle peu à peu ses actions ; il apprend à maîtriser des pratiques. (p. 113)

Enfin, il nous apparaît utile pour l’enseignant, d’observer ses élèves dans une première prise de contact avec un nouveau milieu et de capter ses conceptions (dans des situations réelles plutôt qu’imaginaires).

Cette phase d’immersion vise essentiellement trois buts :

1. Permettre à l’élève de « vivre-sentir » des objets et phénomènes de manière à pouvoir les évoquer dans la suite ;

2. Installer ou réinstaller des savoirs et savoir-faire requis dans la suite ; 3. Capter ses conceptions et ses questions.

Quand nous disons « vivre-sentir » des objets et phénomènes nous entendons qu’il s'agit de permettre à l'élève d’enrichir son capital d’expériences vécues, expériences qui pourront ultérieurement être évoquées au gré des besoins :

- lui faire sentir des « choses » qu'il n'avait encore jamais senties,

- lui faire sentir des « choses » qu’il associe, par ses perceptions, à des grandeurs physiques (la force, la pression, la tension électrique…),

- l'amener à isoler ses sensations, à discriminer celles-ci en fonction d'un projet d'observation, à obscurcir des sensations « parasites », à relativiser des perceptions « trompeuses ».

Le questionnement qui guide l’élève vise à orienter son attention mais évite de le faire entrer prématurément dans des problèmes.

C’est donc un autre rapport à l’objet qui prévaut dans cette phase d’immersion : l’élève se laisse « marquer » et interroger par l’objet.