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3.1.1. L’enseignement par les tâches

L’approche actionnelle, reprend tous les concepts de l’approche communicative et y ajoute l’idée de «tâche» à accomplir dans les multiples contextes auxquels un apprenant va être confronté dans la vie sociale. Si dans l’approche communicative, l’apprenant était perçu comme usager de langue, l’approche actionnelle invite à le concevoir comme un acteur social, ayant à accomplir des tâches (qui ne sont pas seulement langagières) dans des circonstances et un environnement donnés, à l’intérieur d’un domaine d’action particulier. « Si les actes de parole se réalisent dans des actions langagières, celles-ci s’inscrivent elles-mêmes à l’intérieur d’actions en contexte social qui seules leur donnent leur pleine signification ». (CECR, p.15) L’action doit susciter l’interaction qui stimule le développement des compétences réceptives et interactives. Le principe de simulation globale s’est développé avec la nécessité de mettre l’accent sur les tâches à réaliser à l’intérieur d’un projet global.

3.1.2. Des mises en situation proches de la simulation globale fonctionnelle

La simulation est un terme générique désignant toute construction imitant un système réel, dès lors qu’il s’agit d’enseigner des notions et des savoir-faire professionnels à des néophytes. Les simulations reproduisent la réalité ou sont très proches d’elle, à des fins d’apprentissages divers. A la fin des années 70, la didactique des langues a construit ce nouveau objet pédagogique de « simulation globale » pour lequel Francis Debyser défendait la « réalité de l’illusion » plutôt que « l’illusion de la réalité » (Debyser, 1974). Puis au cours des années 80, une approche plus fonctionnelle et les premières réflexions sur le Français de spécialité ont fait naître les Simulations Globales Fonctionnelles (SGF) élaborées pour des milieux professionnels. Les contextes professionnels spécifiques invitent à relativiser la notion de créativité dans la construction du cadre et des identités fictives pour se concentrer davantage sur la pertinence des productions au regard d’un modèle visé.

Nous ne voulions pas nous en tenir au niveau des jeux de rôle. En effet, centrés sur une interaction improvisée sur un canevas entre plusieurs participants, ils n’offrent pas une grande épaisseur contextuelle ou identitaire ; ils restent toujours plus fragmentaires qu’une simulation. Dans les jeux de rôles, les comportements souhaités sont clairement soulignés, mais les simulations sont plus complexes et denses. Dans la simulation : « L’objectif premier est de permettre une compréhension objective de la réalité, ce qui la distingue nettement du jeu de rôle où c’est la subjectivité qui domine » (Chamberland, Lavoie et Marquis, 1995 : 82).

Nous ne voulions pas non plus d’une simulation globale qui se fonde sur la construction avec les participants du cadre et des identités déterminés par le lieu-thème choisi. La simulation globale propose une identité précise à chaque apprenant, ce qui laisse beaucoup de place à la

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créativité pour dresser une galerie de portraits de personnages, amenés à interagir entre eux pour faire vivre le lieu. Or dans le cas qui nous occupe, les apprenants visent tous à devenir AVS, et il n’existe pas de lieu clos où les AVS interagissent entre elles, hormis les réunions professionnelles et les temps de transmission. Les AVS sont amenées à interagir d’abord et avant tout avec les Personnes Aidées et il ne nous semblait pas pertinent d’inviter les apprenants à incarner ou du moins à se représenter en tant que personne dépendante. Aussi avons-nous gardé le principe d’une simulation fonctionnelle qui ne soit pas ponctuelle comme peut l’être un jeu de rôle mais permette de s’identifier à un personnage d’auxiliaire de vie sociale et de suivre l’évolution de la relation d’aide que cette AVS entretient avec une personne âgée dépendante. Ce projet fictif pouvait ainsi fédérer le travail des différentes compétences : linguistiques, socio et interculturelles, des savoirs de base et de culture générale… et rendre leur apprentissage nécessaire. En effet, les apprenants ont des tâches à réaliser qui conditionne l’exécution d’une série d’activités conçues en tant qu’étapes vers la réalisation de chacune des tâches.

L’accent est ainsi placé sur l’utilisation de la langue en tant qu’outil permettant de satisfaire des besoins authentiques, sur les objectifs communicationnels et non plus sur l’apprentissage de points de langage dans un vide non contextualisé. En travaillant à la réalisation d’une tâche professionnelle simulée, le langage est immédiatement employé dans le contexte de la réalité d’aidant de l’AVS en devenir, conférant ainsi une véritable authenticité à l’apprentissage.

3.1.3. Donner du sens à l’écrit : des écrits fonctionnels.

Les apprenants peuvent être mis en situation de produire de l’écrit, quelles que soient leurs habiletés, quels que soient les systèmes d’écriture employés (cursive, capitales d’imprimerie, ou attaché). Et ces écrits doivent avoir du sens en s’inscrivant dans le cadre de situations de communication crédibles et motivantes. Les objectifs communicatifs invitent alors à mettre en œuvre à la fois des règles lexico syntaxiques et des compétences pragmatiques pour produire des formes linguistiques par rapport à un contexte et des intentions d’écriture. Les compétences pragmatiques (expressions, prise en compte d’un destinataire et cohésion référentielle) doivent presque primer sur les compétences structurales (diversité lexicale, erreurs morphologiques, complexité syntaxique).

Concernant le public pressenti, au-delà d’une grande variabilité interindividuelle au niveau pragmatique, il existe évidemment un déficit important au niveau de maîtrise formelle de la langue (en particulier pour la morphosyntaxe), l’efficience de la communication est en effet surtout amoindrie par le manque de maîtrise ou l’approximation dans le recours aux formes linguistiques. Il ne s’agit donc pas de négliger le développement des compétences linguistiques mais comme le souligne J.F. Halté :

« Pour que s’effectue un apprentissage, il faut qu’un obstacle cognitif

soit repéré, à l’occasion par exemple d’une tâche non aboutie positivement, analysé et

rapporté à tel ou tel domaine et à l’état de l’élève, décomposé éventuellement en obstacles

plus simples et réinvesti dans une forme et une qualité de problème telles que son

franchissement soit possible ». (Halté, 1192 : 83 – 84)

D’où l’intérêt de procéder par tâches, quand l’écriture procède par résolution de problèmes, il s’agit bien de mettre en place des savoirs et savoir-faire dans une situation contextualisée pour faire aboutir une tâche complexe. Le scripteur est ainsi mis en situation de produire un texte « pour de bon », et non plus seulement de faire des gammes. C’est en écrivant qu’on apprend à écrire, en mettant en œuvre les compétences de base que l’on peut les acquérir.

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Finalement, les tâches peuvent être professionnelles ou scolaires, l’école est un contexte social où interagissent les acteurs selon des modalités propres. Comme le souligne Robert Bouchard quant aux compétences scolaire en lecture écriture : « Apprendre l’écrit en français en classe de FLS, ce n’est donc pas seulement apprendre à lire-écrire mais aussi apprendre à utiliser fonctionnellement cet écrit en situation de classe. » (Bouchard, 2010 : 2) Il convient pour notre formation d’envisager tant les contextes professionnels que les contextes scolaires, afin que les apprenants s’approprient les tâches scolaires, les nécessités intrinsèques aux écrits scolaires que nous étudierons plus avant.