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Des savoir-faire et des savoir-être scolaires à acquérir

3.2.1. S’approprier les tâches scolaires, des nécessités intrinsèques aux écrits scolaires

Il s’agit de préparer la possibilité de suivre une formation et de réussir un examen national de niveau V pour des personnes n’ayant pas ou peu été scolarisées. La validation des six grands domaines de formation professionnelle tient en grande partie à des épreuves sur table, deux d’entre elles se présentent sous forme de QCM, ce qui requiert d’abord et avant tout des capacités de compréhension, d’analyse des questions et des items proposés. Plusieurs épreuves nécessitent des compétences de rédaction poussées : un rapport de stage, des questionnaires ouverts demandant au candidat d’expliciter ses connaissances à travers des réponses courtes et des réponses développées, un dossier de pratique professionnelle. Hormis ce dernier dossier, les autres épreuves manifestent des finalités internes au domaine scolaire, à la validation des apprentissages.

Le rapport à la scolarité génère en effet des besoins langagiers spécifiques et exigeants. Le langage verbal de manière générale dans le cadre d’une appropriation de discipline non linguistique doit être maîtrisé pour comprendre, consigner et mémoriser des informations et des concepts nouveaux, pour demander des précisions, chercher des informations complémentaires. Il est donc mis au service de fonction à la fois pédagogique, heuristique et de communication. Dans un contexte où tout passe par le langage, qu’il s’agisse de la transmission des connaissances, de leur restitution ou de la validation des apprentissages, les apprenants doivent apprendre à se représenter ce que l’on attend d’eux. Le formateur professionnel n’aura pas nécessairement l’habitude de travailler avec des publics en difficulté face à l’écrit et quoique la directrice cherchera à employer une personne sensible à la spécificité de ce public, les réflexes de transmission des connaissances demeureront peut-être forgés sur des modèles traditionnels. Les apprenants auront donc besoin de se familiariser avec des méthodes de travail qui seront considérées comme à priori acquises à l’entrée en formation professionnelle : la prise de note, la réalisation de schémas ou l’usage de tableaux à entrées multiples, la consultation régulière de sites internet, l’organisation des supports de cours de manière optimale pour une révision efficace, la mémorisation d’informations écrites en vue d’un réinvestissement dans des productions évaluées...

La dimension cognitive et stratégique des comportements attendus de la part des apprenants doit ainsi être fortement intégrée aux apprentissages de la formation linguistique et de remise à niveau.

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3.2.2. De l’oral vers l’écrit : comprendre le discours didactique et prendre des notes

La continuité entre l’oral et l’écrit n’a d’évidence que pour des lettrés. Le fait de transcrire l’oral est un exercice périlleux, la fluidité de l’oral, les marques spécifiques de reprise, les digressions demandent à opérer une sélection concomitante à l’acte de compréhension. En outre, la rapidité des modes d’expression peut-être très différente, souvent en la défaveur des apprenants en difficulté face à l’écrit. Plus lents dans leur geste graphique, moins assurés, revenant régulièrement sur leurs écrits pour vérification, ils ne peuvent pas être d’emblée aussi à l’aise et efficients à prendre en note le discours de l’enseignant que des étudiants de FLE.

Au-delà des difficultés de compréhension sémantique, l’apprenant doit articuler trois opérations mentales presque simultanées : la compréhension, la sélection et la transcription des informations. Le formateur, dans l’exposition d’un cours sur le système nerveux par exemple, l’apport des différents nutriments, les aspects psychologiques de la dépression ou encore le secret professionnel et la déontologie tient une forme de monologue long qui possède ses caractéristiques propres :phénomènes de reprise, d’explication, de digression emphatique, d’illustration, de mise en perspective, d’humour… Il s’agit donc de se familiariser avec les spécificités du discours didactiques pour repérer le plan d’une intervention orale, suivre un fil conducteur et passer au crible informations pertinentes, exemples et digressions.

Bien sûr, dans le cas de la formation DEAVS, il ne s’agit pas d’un cours magistral universitaire et, la formatrice professionnelle, consciente de la spécificité du public, devrait pouvoir se donner la discipline d’inscrire son plan au tableau et de baliser son discours. Néanmoins, elle ne fonctionnera assurément pas comme une enseignante de primaire ou secondaire marquant à gros traits la passage à un autre point de la leçon et indiquant de souligner en rouge les titres principaux, et en vert les sous-titres.

La prise de note requiert un travail spécifique : écrire rapidement et lisiblement, s’approprier des abréviations et contractions qui puissent être stabilisées. Il faut ensuite pouvoir mettre en forme sa prise de note pour mettre en évidence les points essentiels et les points de détails, afin de faire apparaître le plan. Par ailleurs, la prise de note s’associe souvent avec la réalisation de schémas pour mettre en évidence et expliciter rapidement des relations logiques entre des phénomènes. L’enseignant peut proposer des schémas au tableau que les apprenants devront comprendre rapidement afin de verbaliser pour eux le contenu de la représentation schématique, lors de leurs révisions. Ils devront recopier des schémas efficacement, mais également sans doute, gagneront-ils du temps parfois à se proposer des schémas pour transcrire des explications du formateur. En particulier, lorsqu’il donne des explications techniques de manipulation des personnes ou d’entretien du linge qui seront jouées et commentées. Les manuels ne représentent pas toujours ces manipulations, les apprenants souhaiteront peut-être pour mémoriser ces gestes, les nommer ou les représenter à leur manière, mais encore faut-il savoir modéliser schématiquement.

Les compétences écrites devront donc être travaillées en production sous différentes formes, à la fois analytique pour savoir développer un écrit rédigé et synthétique pour savoir concentrer et mettre en exergue les informations essentielles pour pouvoir les mémoriser plus facilement. Elles devront en outre être travaillées souvent en tension avec les compétences orales.

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3.2.3. Savoir s’organiser et planifier

Les représentations de l’apprentissage classique considèrent l’élève comme un sujet passif qui reçoit un enseignement. Les stagiaires cette année entraient avec le désir de « se compléter » d’une part manquante, B. a pu déclarer ainsi « nous, on n’a pas eu la chance de faire vraiment les bancs, il y a des connaissances qui nous manquent ». Mais ils attendaient souvent de pouvoir « être complété » et n’envisageait pas de pouvoir étudier par et pour eux-mêmes. Pour que l’élève prenne une posture active d’apprenant, il doit être accompagné dans le développement de son autonomie et notamment dans l’organisation de son matériel d’étude et dans la planification de son travail.

Outre le fait que la capacité à classer et archiver des documents est une compétence que l’AVS doit posséder pour accompagner les Personnes Aidées dans la gestion de leurs documents administratifs, les apprenants doivent dans un cadre scolaire et pour pouvoir travailler en autonomie, garder trace de leurs apprentissages, savoir rassembler leurs documents de cours et les mettre en ordre, selon leur progression. Les apprenants devront être à même d’organiser le matériel accumulé. Nous ne savons pas comment procédera le formateur, mais puisqu’il existe des manuels et que la directrice de l’organisme de formation s’est déclarée favorable à en doter chaque apprenant, on peut présumer que le formateur complétera le manuel avec des photocopies. Ces dernières devront pouvoir être mises en ordre afin de pouvoir faire sens les unes par rapport aux autres et permettre un temps de révision et un apprentissage personnel efficace. Le travail linguistique se menait cette année avec le groupe « DELF » avec des photocopies, chacun possédait un cahier, si moi et mon binôme tâchions de regrouper les photocopies par séquence et de proposer des petits fascicules, il nous arrivait néanmoins souvent de proposer des photocopies complémentaires et volantes, les apprenants avaient souvent l’impression d’être submergés de papiers, les perdaient souvent et n’y revenaient à peu près jamais.

Concernant la planification, il s’agit d’aider l’apprenant à se fixer des buts réalistes, de prévoir les étapes à suivre et estimer avec justesse le travail à faire pour organiser son temps. Les apprenants auront à développer une compétence stratégique de gestion de leur temps et des ressources qu’ils auront à disposition.