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Malgré les divergences qui subsistent chez certains auteurs au sujet des limites du pays bamiléké, on note une unanimité sur la partie de la province de l’Ouest Cameroun incluse dans le pays bamiléké. Les bamiléké de l’Ouest-Cameroun se caractérisent par un contexte socio-culturel empreint de culture francophone et influencé par la longue pratique de la caféiculture sous l’encadrement de l’UCCAO et de ses coopératives.

En effet, des années 1920 jusqu’en 1985 environ, le caféier a été la principale culture de la région et les caféiculteurs bamiléké de la province de l’Ouest Cameroun ont la particularité d’avoir été chacun membre d’une des Coopératives appartenant à l’Union Centrale des Coopérative Agricoles de l’Ouest Cameroun (UCCAO). Avec une intervention forte de l’Etat, l’UCCAO et ses coopératives membres ont été jusqu’à la crise caféière des années 1980 les principaux outils de développement agricole et rural de l’Ouest Cameroun, déterminant à ce titre la vie économique, sociale et politique de la province. Par son développement, cette caféiculture a favorisé un contexte social particulier : polygamie, hégémonie de l’homme comme chef de famille et d’exploitation, forte démographie, etc.

Par ailleurs, sur le plan linguistique et culturel, les bamiléké de l’Ouest- Cameroun appartiennent à la partie dite francophone du Cameroun, celle qui fut soumise à la colonisation française. Les autres bamiléké38 sont installés dans la partie anglophone, celle ayant été sous colonisation britannique. Les bamiléké de l’Ouest- Cameroun sont de ce fait plus proches de la culture francophone, les autres étant proches de celle dite anglophone.

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Dans le cadre de cette recherche, nous avons choisi de nous limiter à la région bamiléké située dans la province de l’Ouest-Cameroun. Sur le plan de la méthode, ce choix permet d’éliminer les effets qui seraient dus, d’une part, à une différenciation dans le mode de pratique antérieure de la caféiculture et, d’autre part, aux éléments culturels issus du passé colonial. Toutefois, il reste que la zone ainsi choisie n’est pas pour autant homogène, comme nous allons le voir avec les deux localités de Fokoué et de Galim.

Fokoué (dans la Ménoua) et Galim (dans les Bamboutos)

Au regard du temps imparti pour ce travail de thèse d’environ trois ans, nous ne pouvions pas prétendre couvrir tous les villages du pays bamiléké. Nous avons décidé de nous intéresser à deux de ses sept départements : les Bamboutos et la Menoua en raison du fait qu’ils étaient les deux premiers départements en quantité de café produit et donc qui se prêtaient le mieux à une analyse des mutations intervenues suite à la crise caféière. Le tableau ci-après présente les quantités de café produites par chaque département en 1980 et illustre ainsi notre argumentation.

Tableau 1 : Quantité de café arabica produite par département du pays Bamiléké (campagne agricole 1979/1980)

Mifi Haut Plateau Koung -Khi

Département Bamboutos Menoua

Ancien département de la Mifi

Ndé

Production en tonnes

4 077 5 249 4 288 165

Source : Données de l’Annuaire des statistiques agricoles du Cameroun 1979/1980

Dans chaque département retenu, nous avons fait le choix de nous limiter à une localité restreinte afin de mieux saisir à cette échelle-là les dynamiques paysannes en émergence. En effet, les paysans ont tendance à entrer en coopération ou en contact avec les autres paysans proches d’eux qu’ils rencontrent régulièrement et avec lesquels ils ont des occasions d’échanges. De plus, le développement agricole se trouvant en lien étroit avec le développement rural, le niveau local où les populations sont mobilisées pour des actions de développement mérite d’être mieux investigué

lorsqu’on se situe dans une perspective d’analyse des dynamiques de développement. Par ailleurs, la problématique des services à l’agriculture suggère que dans une zone limitée, nous puissions bien identifier les acteurs en présence et analyser les services offerts. Enfin, saisir les changements au niveau des exploitations agricoles, appréhender les stratégies des agriculteurs, analyser le rôle ou mieux l’action des acteurs du secteur agricole exigent, si l’on veut éviter des généralisations fragiles, de rencontrer les agriculteurs, de visiter les exploitations agricoles, d’appréhender les contextes locaux.

Nous avons donc choisi de travailler au niveau de l’arrondissement. Le choix de ce niveau vise à épouser les contours de la commune (correspondant à l’arrondissement au Cameroun), ce qui permet d’appréhender les fonctionnements administratifs existants. De plus, la commune est appelée à être un des échelons où se transféreront les compétences et les ressources et s’assumeront des responsabilités dans le cadre du processus de décentralisation administrative en cours au Cameroun.

Le choix de mener des enquêtes au niveau des villages (sous ensemble de l’arrondissement) portait en soi une contrainte : celle de devoir choisir quelques cas parmi les nombreux villages du pays bamiléké qui couvre sept des huit départements de la province de l’Ouest-Cameroun. Eu égard à la durée d’une thèse de doctorat et aux moyens limités dont nous disposions39, nous avons fait le choix, après avoir exploré plusieurs possibilités, de nous limiter à deux communes. Dans un premier temps, nous envisagions de nous limiter à une seule. Cependant au cours de nos visites exploratoires sur le terrain, nous avons constaté une hétérogénéité significative entre les diverses zones rurales visitées : hétérogénéité sur le plan du micro-relief, sur le plan de la situation géographique par rapport aux marchés, sur le plan socioéconomique, etc. C’est pourquoi, choisir deux communes nous a semblé permettre de porter un regard sur des zones contrastées et de prendre ainsi du recul par rapport à certaines spécificités locales : Galim dans le département des Bamboutos et Fokoué dans le département de la Menoua ont été retenus.

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