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Du M ouvement pour l’ Habitat Groupé Autogéré à l’habitat participatif : une continuité à mettre en débat

Conclusion de la partie 1

III. Du M ouvement pour l’ Habitat Groupé Autogéré à l’habitat participatif : une continuité à mettre en débat

III. Du Mouvement pour l’Habitat Groupé Autogéré à l’habitat participatif : une continuité à mettre en débat

La définition de l’habitat participatif proposée en introduction permet de prendre en compte dans

l’analyse les expériences d’habitat groupé autogéré, initiées dans les années 1970-1980166. Une

comparaison terme à terme des définitions révèle de nets recoupements. Cependant, la filiation entre ces initiatives est à mettre en débat, notamment au regard des processus de projet.

Des définitions qui se recoupent

Une première approche comparée de l’habitat autogéré et de l’habitat participatif met en question le

caractère novateur de ce dernier, sur le plan du concept et des définitions.

« Il existe une certaine continuité entre les expériences qui virent alors le jour et celles qui fleurissent

aujourd’hui, notamment dans le cadre de l’habitat « différent » : il s’agissait et il s’agit toujours de «

vivre ensemble » au quotidien de façon moins individualiste, en développant des sociabilités renforcées

et ouvertes de voisinage, en imaginant des formes de cohabitation plus solidaires à l’échelle du lieu de vie, voire du quartier, tout en préservant l’intimité et le « chacun chez soi » » (Viriot Durandal, 2009)

Les mots d’ordre généraux des deux générations de projet se recoupent également. Ainsi, l’ouvrage

Habitats Autogérés (cf. supra, Chapitre 1, p. 31) débute par la formule « Habiter n’est pas se loger » : l’écho

au slogan « La coopérative d’habitants, c’est plus que du logement » de l’une des principales associations

d’habitat participatifest indiscutable. Les définitions que l’on peut glaner confirment ces propos. Le

tableau comparatif présenté page suivante met au jour l’existence d’un champ lexical commun entre habitat participatif et habitat autogéré : caractère collectif, participation, alternative, troisième voie. La tentation de considérer ces deux générations de projet comme similaires est forte. Toutefois, ces seuls éléments ne permettent pas de conclure à une filiation entre ces initiatives, à discuter à partir des conceptions des porteurs de projet eux-mêmes et du processus de projet.

166A partir des archives du Mouvement pour l’Habitat Groupé Autogéré, Anne d’Orazio a établi qu’au début des années 1980, l’association compte 500 adhérents. Un peu plus d’une centaine de groupes a concrétisé son projet

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Tableau 10. Comparaison des définitions de l'habitat autogéré et de l'habitat participatif

Habitat Autogéré Habitat participatif

« Les groupes d’habitat autogéré se définissent eux -mêmes par quelques critères simples : l’autopromotion, la participation active à la conception architecturale, l’autogestion du chantier, puis de l’entretien et de la vie du bâtiment, la construction de locaux communs

(salles de réunion, de jeux, ateliers, buanderie, chambres d’hôtes) » (Koestle, 1983 : 1)

« l’habitat autogéré c’est donc une autre manière d’habiter ; c'est-à-dire un essai de réponse alternative

globale aux deux dimensions essentielles contenues dans la notion d’habiter : construire et vivre […] Il ne s’agit pas seulement de se soustraire aux règles du marché immobilier, et de créer les conditions de son propre cadre de vie […] le point essentiel réside dans la démarche, non plus individuelle mais collective » (Sainte-Lagu, 1978 : 1).

« [L’habitat autogéré] est une troisième voieentre les deux modes de production de logements : celui de la promotion classique (rentabilité – profit – spéculation, etc) et celui du financement public (administration trop lourde – contraintes de normes – désengagement de l’état, etc) » (Correspondance Municipale, 1975 : 1)

« L’autopromotion ou l’habitat participatif, c’ests’approprier à part entière la construction de son logement dans le cadre d’un habitat collectif. Un groupe de citoyens devient alors Maître d’Ouvrage, construit ou rénove un ensemble de logements, de la conception à la réalisation effective » (Association Eco Quartier Strasbourg, Site Internet)

« La coopérative permet d’accéder à un logement d’autant plus adapté aux besoins du locataire qu’il a participé à sa conception. La coopérative d’habitants permet la mise en commun d’espaces et de services (salle polyvalente commune, buanderie) pour favoriser la solidarité. La coopérative d’habitants permet le développement de la vie sociale et des solidarités de voisinage » (Habicoop, Site Internet)

« Cette alternativeà la promotion privée ou sociale et à l’habitat individuel est une manière plus qualitative, plus économique et plus durable de fabriquer de l’urbain mixte avec un voisinage convivial et harmonieux» (Association Eco Quartier Strasbourg, Site Internet) « Cette troisième voie du logement, entre propriété et location, est fondée sur la non spéculation, l’implication des habitants dès la conception du projet et la propriété collective » (Habicoop, Site Internet)

Source : Documents et sites Internet des associations, élaboration personnelle

Photographie 2. Le Lavoir du Buisson Saint Louis (Paris, 10ème arrondissement), réalisation du MHGA

Vue de l’entrée Vue de la cour intérieure

Source : MHGA

Une filiation à mettre en débat

L’appréhension qu’ont les acteurs-habitants des initiatives des années 1970-80 est un premier élément

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une partie d’entre eux s’est constituée sans les connaître. Au moment de leur constitution en effet, les

différentes associations pionnières ne connaissaient pas ou très peu les expériences d’habitat groupé

autogéré. En ce sens, toute filiation ne peut qu’être une reconstruction a posteriori, sur la base d’éléments jugés communs. Ainsi, l’association lyonnaise Habicoop, l’une des principales associations du mouvement

« est née de la rencontre entre plusieurs personnes […] [qui] ont découvert l’habitat coopératif suite à différents voyages d’études à l’étranger » (Habicoop, « Histoire de la création d’Habicoop », Site Internet). « Habicoop a été créée il y a maintenant bientôt quatre ans, avec l'idée de transposer l'exemple suisse ou l'exemple allemand, ou l'exemple québécois en France » (Accompagnateur, Chargée de mission, Lyon, Entretien n°4, 20/03/09)167. L’association Eco-Quartier Strasbourg s’est quant à elle « inspirée depuis sa création en 2001 de la démarche mise en place dans le quartier Vauban à Fribourg en Allemagne, exemplaire du point de vue environnemental et de la participation citoyenne » (Eco Quartier Strasbourg, site Internet),

ce que rappelle l’un de ses adhérents, lors d’un rassemblement national :

« Alors on est très heureux de présenter dans le cadre de ces rencontres ce projet qui touche à sa fin ou à sa presque fin, notre chantier se termine au moment de ces rencontres et pour nous ça marque un aboutissement de 10 années de tentatives pour essayer de transposer le modèle des Baugruppen allemands dans un modèle français et nous l'avons découvert en marchant, de renouer avec des expériences dont nous ignorions presque tout à l'époque, on pensait inventer les herbes folles de

l'habitat autogéré des années 70 et 80 »

Association, Strasbourg, réunion publique n°6, 19-21/11/11 Certains groupes se sont même constitués indépendamment de toute référence :

« Au départ, on n’avait pas du tout prévu de monter une coopérative, il s’agissait d’acheter les locaux d’un atelier par exemple qu’on aurait divisé en lots et espaces individuels et auxquels on aurait adjoint

des espaces collectifs, des lieux supports du collectif […]au moment où le groupe s’est constitué on ne

savait même pas que ça existait ; c’est en cherchant un peu qu’on est tombés sur ce qui se faisait en

Suisse et qu’on en est arrivés au constat que ce qu’on voulait faire devait se rapprocher de ces

« coopératives d’habitations »[…]On a donc découvert l’existence des coopératives après, le groupe n’est pas né du concept, on est plutôt un groupe de besoin »

Habitant, Villeurbanne, Entretien n°1, 5/02/09

« On connaissait pas vraiment le MHGA, pour moi, ça se limitait à un bouquin que j’ai acheté dans les

années 80. En gros, je savais que j'avais un livre dans un coin, mais c'est bien tout »

Association, Paris, Entretien n°7, 23/10/09 En ce sens, la majorité des groupes et associations a été traversée par un processus d’acculturation à ces initiatives, permettant de mieux les appréhender, sans toutefois nécessairement s’en revendiquer. Les

contacts entre les différentes générations d’associations s’initient au fil du temps :

« Dans le paysage d'aujourd'hui, chacun a un peu ses caractéristiques, ses envies de structuration, tout

en ayant des partenariats les uns avec les autres. Dans nos relations par exemple avec Habicoop, que l'on a commencées à avoir sur le plan des échanges seulement depuis quelques mois, puisque chacun

était sur ses propres préoccupations »

Association, Président d’Eco Habitat Groupé (EHG), réunion publique n°3, 4-6/12/09 Une partie des groupes et associations clame même sa différence vis-à-vis de ces réalisations :

« On s’inscrit en opposition par rapport au système des années 70 où tout reposait sur une confiance

infinie, sans règle, ni loi, anticipation du conflit. On n’est pas dans cette optique, tout est clair, il y a des

règles »

Habitant, Villeurbanne, Entretien n°1, 5/02/09

167Le président de l’association expose ainsi la genèse de l’association : « L'association a été créée en décembre 2005 suite à une rencontre de citoyens, on s'était tous on va dire ressourcés entre guillemets à l'étranger, on revenait tous d'un voyage à l'étranger, pour certains c'était la Suisse où le mouvement coopératif est assez bien développé, pour d'autres c'était le Canada où on a un mouvement qui est né début des années 70 et qui aujourd'hui compte à peu près 70 000 habitants en coopérative [...] et pour ma part moi c'était suite à un voyage à Freiburg en Allemagne, quartier Vauban» (Président d’Habicoop, Vidéo n°3, 15/06/10)

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« Nous ne sommes pas dans une conception communautaire de l'habitat telle qu'elle a pu être

pratiquée dans les années 70 »

Association Habicoop, Président, Interview presse, 7/10/09

« Moi j’étais un peu jeune en 68, mais j’ai connu les expériences communautaires, à Villeneuve d’Ascq,

la ville nouvelle, j’y connaissais des gens, enfin pas directement mais par mes aînés j’ai un peu connu

ça. Moi je suis pas dans cette logique-là, j’ai pas du tout envie de vivre avec des gens à 100%, je veux

avoir des espaces rien qu’à moi [...] c’est vraiment l’articulation entre des espaces collectifs et privés

que je trouve super »

Habitant, Lyon, Entretien n°3, 20/02/09

Cette démarcation ne témoigne cependant pas d’un désintérêt pour ces opérations. Leur connaissance

peut amener les associations à définir leur propre projet non pas en référence à l’habitat autogéré mais

par différenciation. L’une des critiques récurrentes a notamment trait à la composition des groupes, jugés

trop homogènes. Ce dernier aspect est particulièrement travaillé par les groupes actuels qui cherchent, à la différence de leurs « aînés », à anticiper les conditions du vieillissement des habitants.

La création des associations pionnières s’est en fait réalisée parallèlement au renouveau des expériences

d’habitat autogéré des années 1980. Comme exposé précédemment, une centaine de réalisations d’habitat

autogéré a vu le jour entre le début des années 1970 et le début des années 1990. Dès 1977, les porteurs de projet ont souhaité se donner une instance de représentation concourant à améliorer leur visibilité par

l’intermédiaire de l’association du MHGA. Si son activité a été importante jusqu’au début des années 1990,

elle a connu une période de sommeil jusqu’en 2008. A cette date, des représentants du MHGA annoncent

la refondation de leur mouvement, sous le nom Eco Habitat Groupé (EHG):

« Créer un habitat qui permette de « Mieux vivre ensemble aujourd'hui et demain » ?

C'est notre projet, notre démarche au M.H.G.A. depuis plus de trente ans !

Mais cette question a pris une autre dimension depuis que nous avons pris conscience des risques

courus par la planète et de l’urgence à changer le mode de développement et notamment le mode d’urbanisation.

Aussi, le temps nous paraît venu de mettre l’expérience de tous ceux qui ont la pratique de ce nouveau

mode d’habitatau service d’un renouveau des méthodes d’urbanisation, afin de répondre aux attentes

et aux besoins de nos concitoyens.

Beaucoup de jeunes couples avec enfants, beaucoup de personnes approchant de l’âge de la retraite,

mais aussi beaucoup de personnes dans la force de l’âge recherchent maintenant un habitat groupé

convivial.

C’est pourquoi le Mouvement de l’Habitat Groupé Autogéré va prendre le nom de ECO HABITAT

GROUPÉ et organise un FORUM DE L’HABITAT GROUPÉ […] »

EHG, Communiqué de presse, 16/10/08 La montée en puissance des enjeux écologiques donne ainsi le ton de cette association « suite du MHGA ». La volonté de partager des expériences de « plus de trente ans » est elle aussi mise en avant et signe le caractère indiscutable de la filiation, et ce d’autant que les mêmes individus se retrouvent. Toutefois, bien

d’autres associations ont également été créées, pour la plupart avant 2008168. Les relations avec EHG se

tissent pour la plupart au fil du temps. Si les groupes actuels sont nombreux à s’intéresser de près à ses

réalisations – elles constituent un socle sur lequel s’appuyer dans la conduite des projets– leur conduite est-elle pour autant semblable ?

Des processus de projet différents

Si l’on ne peut dégager de filiation « intellectuelle » entre les projets du MHGA et les projets actuels169, une

comparaison de leur processus révèle elle aussi des différences, en termes de contexte, de populations

concernées, de valeurs et d’ambitions politiques et, enfin, de montage170.

168 Eco Quartier Strasbourg a été fondée en 2001, Habicoop (Lyon) en 2005, Hesp’ère 21 (Paris) en 2007, Habitat Ecologique Partagé

(Lille) en 2007, Parasol (Rennes) en 2008

169 Nous optons pour une acception large du terme « projet » qui ne se limite pas au seul dispositif technique, mais comprend

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Le premier élément de différenciation sur lequel nous n’insisterons pas est tout d’abord celui du contexte

dans lequel agissent les porteurs de projets. Par exemple, le thème du développement durable, qui

s’exprimait de façon très marginale dans les années 1970-1980, a aujourd’hui tout d’un nouveau

paradigme de l’action publique. A l’inverse, l’analyse des caractéristiques des ménages engagés dans les projets révèle des similitudes entre les deux générations. Sur le plan de l’initiative tout d’abord, les mêmes

catégories socioprofessionnelles se retrouvent. Ainsi, les groupes d’habitat autogéré sont composés

principalement de cadres moyens, de professions libérales, d’enseignants, de travailleurs sociaux, ou

encore de techniciens de l’aménagement (Correspondance Municipale, 1975 ; Bourdon et al., 1984 : 44)

tandis que dans leur majorité, les groupes d’habitat participatif sont engagés dans des métiers aux

dimensions sociales, éducatives ou artistiques171. Ils appartiennent aux couches moyennes et intellectuelles (Bacqué, Biau et al., 2010 : 31) tout comme les porteurs de projet des années 1980 (Bacqué, Vermeersch, 2006). Toutefois, il semble que la proportion de ménages moins aisés financièrement est plus importante dans les projets actuels, plus hétérogènes. Cette hétérogénéité est d’autant plus vraie en

termes de composition familiale. En effet, les groupes d’habitat autogéré sont principalement animés par

de jeunes ménages avec enfants, ces derniers constituant d’ailleurs souvent le centre névralgique du projet. Aujourd’hui, la mixité intergénérationnelle, en plus d’être érigée au rang de valeur incontournable,

se retrouve effectivement dans la plupart des projets, à l’exception de ceux constitués autour du vieillissement. Les retours d’expériences du MHGA semblent là jouer un rôle dans la mesure où les groupes de cette époque sont aujourd’hui confrontés à la question de leur renouvellement, les enfants

étant, pour la plupart, partis. En outre, si les deux générations se caractérisent de façon globale par leur militantisme, une analyse fine conduit à en distinguer plusieurs formes. Les groupes actuels se distinguent par la diversité de leurs engagements, associatifs comme politiques. Ils sont ainsi membres d’associations

liées à l’écologie comme les Associations pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne (AMAP) ou les

jardins partagés, à l’éducation par l’intermédiaire des associations de parents d’élèves ou de pédagogie

alternative, au logement comme le mouvement du Droit Au Logement (DAL) ou encore de réseaux comme les Villes en transition ou Sortir du nucléaire. La diversité de ces engagements tranche avec une certaine homogénéité militante caractérisant leurs prédécesseurs, essentiellement proches du PSU ou de

l’humanisme chrétien (militance au sein de Vie Nouvelle par exemple)172.

« Le groupe est diversifié. Il y a des militants c’est sûr, mais c’est pas la majorité. Il y a beaucoup de

personnes qui sont sensibles aux questions écologiques et qui font par exemple la promotion du vélo ou

s’intéressent aux AMAP, qui font partie des associations de proximité, des parents d’élèves. Donc il y a

des pratiques associatives mais elles sont plutôt variables. Il y en a d’autres qui bossent ; des plus

timides ou qui n’en parlent pas. C’est un projet militant qui ne s’adresse pas qu’à des militants » Habitant, Villeurbanne, Entretien n°1, 5/02/09

Toutefois, cette diversification des formes d’engagement n’a pas semble-t-il pour corollaire une

amplification de l’échelle du changement souhaité par les groupes. Il semble même qu’à l’inverse, les

ambitions de changement national sont plutôt l’apanage des groupes d’habitat autogéré. Les mêmes échelles – lieu de vie/échelle locale, échelle nationale – sont bel et bien mobilisées par les deux générations, mais leur enchaînement diffère. Les groupes d’habitat autogéré souhaitaient « changer les

rapports sociaux en habitant autrement » (Collet, 2012), « changer la vie au quotidien dans l’espoir d’une

part, d’essaimer ce changement et de le diffuser aux autres couches sociales et d’autre part, d’impulser ainsi

170Il n’est pas de notre objet de présenter une réflexion approfondie sur cette question. Se référer pour cela aux travaux d’A. d’Orazio 171 Nous ne disposons pas de données quantitatives sur cet aspect. Toutefois, nos investigations de terrain conduisent à de telles conclusions

172Toutefois, la diversité des formes d’engagement caractérise aussi certains membres du MHGA. Collet (Collet, 2012 : 40) indique

ainsi à propos de l’un des fondateurs d’un groupe de Montreuil : « [il] va largement s’investir de manière militante, dans son quartier : il se mobilise contre l’évitement scolaire et met en place une aide aux devoirs bénévole, participe à la création de la Maison de quartier et s’implique auprès des familles mal-logées de son voisinage »

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un changement social plus large, en montrant qu’il était possible de vivre autrement » (Viriot Durandal,

2009). La volonté de s’inventer comme groupe social apparaissait également (Bidou, 1984, in Collet,

2012 : 40)173. A l’inverse, les groupes actuels construisent leur quotidien à partir d’une dénonciation de

faits nationaux, dans la perspective non pas d’initier un changement global, mais d’y contribuer à leur

échelle en faisant « simplement [leur] petite part du travail » (Village Vertical, discours en conférence de presse, 16/11/11). La montée en généralité politique (Viriot Durandal, 2009) semble ainsi atténuée. Toutefois, ce constat est à nuancer selon les groupes174. Ces différentes formes de militantisme ont pour corolaire des valeurs et des ambitions qui ne se recoupent pas toujours, principalement concernant les notions de propriété et de non-spéculation. Une ambition reste néanmoins commune, tout comme dans les années 1980 : « changer le monde en changeant le quotidien » (Pattaroni, 2011).

Schéma 4. Les échelles d'action des groupes d'habitat autogéré et des

groupes d’habitat participatif

Source : élaboration personnelle

Sur le plan du montage des projets en termes d’acteurs, une différence centrale est à relever : la présence

des collectivités. Alors qu’elles étaient, sinon absentes, ni associées ni véritablement intégrées aux opérations des années 1970-1980, elles manifestent aujourd’hui un intérêt qui se traduit par des

engagements concrets (cf. infra, Chapitre 9, p. 365). Un ensemble de points communs en termes d’acteurs

peut être relevé. Concernant les organismes d’HLM, plusieurs opérations ont été menées en locatif social à

la fin des années 1980. Leur intervention dans le cadre des projets actuels n’est donc pas une nouveauté.

Au même titre, la question de l’accompagnement professionnel des groupes, posée dans les années 1980,

est centrale dans les projets actuels. Les deux générations de projet se heurtent également à un ensemble de problématiques similaires, sans qu’elles ne soient propres aux opérations participatives dans l’habitat.

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