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Composantes des PCK

2.3.5. Des orientations pour l’enseignement des sciences aux orientations pour les DI

Nous avons décrit dans la section précédente le modèle de PCK sur lequel nous basons notre étude. Comme nous venons de le préciser, nous avons choisi de ne pas considérer les orientations du professeur pour l’enseignement des sciences comme étant une composante des PCK. Nous explicitons dans cette partie ce point de vue, et nous donnons les arguments qui nous ont amené à dévier du modèle initial proposé par Magnusson et al. (1999). Nous proposons aussi de spécifier un cas particulier des orientations pour l’enseignement des sciences, que nous appelons « orientations pour les DI ».

Le modèle de PCK de Magnusson et al. (1999) décrit les orientations pour l’enseignement des sciences comme une vue et une conceptualisation générale de l’enseignement des sciences (§ 2.3.4). En se basant sur la littérature existante, ces auteurs

sciences : processus (process), rigueur académique (academic rigor), didactique15 (didactic), changement conceptuel (conceptual change), conduite par l’activité (activity-driven), découverte (discovery), science basée sur des projets (project-based science), investigation (inquiry) et investigation guidée (guided inquiry). Nous les présentons ici (voir Tableau 3 et Tableau 4) tels qu’ils sont proposés par ces auteurs. Chaque orientation a été décrite par rapport à deux éléments : les buts de l’enseignement des sciences qu’un professeur viserait avec une orientation particulière (Tableau 3) et les caractéristiques typiques de l’enseignement qui serait mené par un professeur avec une orientation particulière (Tableau 4).

Tableau 3. Les buts des différentes orientations pour l’enseignement des sciences (Magnusson et al., 1999, notre

traduction)

15 Le terme de didactique est ici à prendre au sens anglo-saxon (transmission de faits scientifiques) et non pas au sens français

Orientation Buts de l’enseignement des sciences

Processus Aider les élèves à développer les compétences de processus de sciences (science process skills)

Rigueur Académique Représenter un ensemble particulier de connaissances (par exemple la chimie)

Didactique Transmettre des faits scientifiques Changement

conceptuel

Faciliter le développement de connaissances scientifiques en confrontant les élèves à des situations qui remettent en question leurs connaissances naïves

Conduite par l’activité (Activity-driven)

Favoriser le contact des élèves avec le matériel, mettre la main à la pâte (hands-on experiences)

Découverte Fournir aux élèves des opportunités de découvrir par eux-mêmes des concepts scientifiques ciblés

Science basée sur des projets

Impliquer les élèves à trouver des solutions pour des problèmes authentiques

Investigation (inquiry) Représenter la science comme une investigation Investigation guidée

(guided inquiry)

Constituer une communauté d’apprenants dont les membres partagent la responsabilité de la compréhension du monde physique, en particulier à l’égard de l’utilisation des outils de la science.

Orientation Caractéristiques de l’enseignement

Processus L’enseignant introduit les élèves aux processus de pensée des scientifiques pour acquérir de nouvelles connaissances. Les élèves s’engagent dans des activités afin de développer la pensée scientifique

Rigueur Académique Les élèves sont confrontés à des problèmes et des activités difficiles. Les travaux pratiques et les démonstrations expérimentales sont utilisés pour vérifier des concepts scientifiques en démontrant les

Tableau 4. La nature de l’enseignement associé aux différentes orientations pour l’enseignement des sciences

(Magnusson et al., 1999, notre traduction)

D’après cette présentation, nous considérons qu’un enseignant peut faire preuve d’une orientation qui guide ses décisions didactiques pour l’enseignement de plusieurs notions et pas forcément d’un contenu particulier. Ajoutons aussi qu’un enseignant peut suivre de multiples orientations, et non une seule, de la liste décrite par Magnusson et al. (1999), ce qui rend ces orientations complexes à étudier. De ce point de vue, plusieurs questions émergent. Tout d’abord, peu d’études empiriques ont examiné spécifiquement la nature et les sources

relations entre des concepts particuliers et des phénomènes

Didactique L’enseignant présente des informations, en général sous forme de cours magistral ou de discussion. Les questions posées aux élèves ont pour but de les tenir responsables de la connaissance des faits produits par la science

Changement conceptuel

Les élèves sont interrogés sur leurs visions du monde et à propos de la pertinence des explications alternatives. L’enseignant facilite la discussion et le débat nécessaires pour établir des connaissances valides

Conduite par l’activité (Activity-driven)

Les élèves participent à des activités où ils mettent la main à la pâte (hands-on activities) à des fins de vérification ou de découverte. Les activités choisies peuvent ne pas être conceptuellement cohérentes si les enseignants ne comprennent pas le but des activités particulières et, par conséquent omettent ou modifient leurs aspects critiques Découverte Centré sur l’élève. Les élèves explorent le monde naturel en fonction

de leur propre intérêt et découvrent des modèles permettant de décrire comment fonctionne le monde lors de leurs explorations Science basée sur des

projets

Centré sur un projet. L’activité de l’enseignant et des élèves est centrée sur une question de conduite (driving question), qui organise les concepts, les principes et les activités au sein d’un sujet d’étude. A travers l’investigation, les élèves développent un certains nombre d’artefacts (des productions) qui reflètent leurs compréhensions émergentes

Investigation (inquiry) Centré sur l’investigation. L’enseignant aide les élèves à définir et investiguer des problèmes, tirer des conclusions et évaluer la validité des connaissances issues de leurs conclusions

Investigation guidée (guided inquiry)

Centré sur une communauté d’apprentissage. L’enseignant et les élèves participent à définir et investiguer des problèmes, construire des modèles, inventer et tester des explications, et évaluer l’utilité et la validité de leurs données et l’adéquation de leurs conclusions. L’enseignant étaye les efforts des élèves pour utiliser le matériel et les outils intellectuels de la science jusqu’à leur autonomie.

orientations théorisées dans la littérature et proposées par Magnusson et al. (1999) ne peuvent pas soutenir une description précise des orientations manifestées par les enseignants. Par exemple, l’étude de Friedrichsen & Dana (2000), portant sur des enseignants du primaire, a révélé un décalage entre les orientations de ces enseignants et les catégories des orientations identifiées dans la littérature. Ces auteurs ont affirmé que les enseignants participant à leur étude ne suivaient pas des orientations pour l’enseignement des sciences spécifiques aux sciences. Les enseignants ont fait preuve d’une orientation pour l’enseignement, plus générale, qui a guidé leurs décisions didactiques et leur processus d’enseignement des sciences. Selon ces auteurs, la prise de décision des enseignants n’était pas fondée sur leurs connaissances des buts et des objectifs pour l’enseignement des sciences à leurs élèves du primaire, mais plutôt sur une connaissance non spécifique, une théorie générale sur la façon dont les élèves apprennent. D’autres chercheurs ont d’ailleurs critiqué la prise en considération des orientations en tant qu’une composante des PCK. Par exemple, Abell (2007) souligne : « the inclusion of « orientations » in the PCK model is problematic. First of all, an orientation is theorized as a generalized view of science teaching, not topic-specific knowledge. Second, these general views of science teaching and learning are often studied as an interaction among knowledge, beliefs, and values, not strictly as knowledge structures. Furthermore, these general views have been called by a number of different names in the literature » (p. 1124). Nous partageons ces points de vue. Plus précisément encore, étant donné que ces orientations correspondent, par définition, à une vue globale des approches générales de l’enseignement, nous considérons qu’elles ne sont pas spécifiques d’un contenu disciplinaire. En ce sens, les orientations pilotent les actions de l’enseignant indépendamment d’un contenu spécifique, ce qui explique donc notre position de les écarter des composantes de PCK. Pour autant, on peut penser que ces orientations font partie des connaissances professionnelles qui s’amalgament avec les PCK pour l’enseignement d’un contenu donné.

Si les orientations pour l’enseignement des sciences jouent un rôle influent, tel que le modélisent Magnusson et al. (1999), il est important d’examiner de près ce type de connaissance. Dans leur étude, Brown et al. (2009) ont élargi la définition de Magnusson et

al. (ibidem) des orientations pour l’enseignement des sciences afin d’inclure les dimensions

suivantes : les objectifs et les buts des enseignants pour l’enseignement des sciences, les vues sur l’enseignement et l’apprentissage, les vues sur les rôles de l’enseignant et des élèves dans la classe de sciences, ainsi que les vues sur la nature de la discipline. Comme dans notre travail nous portons une attention spécifique aux DI, nous considérons, de fait, un cas particulier des orientations pour l’enseignement des sciences qui est vu sous l’angle des DI. Nous proposons alors de spécifier une des « orientations pour l’enseignement des sciences » que nous nommerons « orientations pour les DI ». Ce que nous appelons « orientations pour les DI » correspond donc à des orientations pour l’enseignement des sciences, spécifiques, à une vue et à une conceptualisation générale de l’enseignement fondé sur les DI. Ce sont les orientations pour les DI que nous examinons effectivement dans notre recherche. Mais comment définit-on ces orientations ? Comment les caractériser ? Nous tentons dans le paragraphe suivant de répondre, entre autres, à ces deux questions.

2.3.6. Caractérisation des connaissances professionnelles : du modèle