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Composantes des PCK

2.3.4. Modèle de PCK retenu

Conscients de l’abondance de littérature relative aux PCK, nous avons succinctement décrit dans la partie précédente (§ 2.3.3) quelques conceptualisations des PCK mettant en exergue la difficulté de parvenir à un consensus, au sein de la communauté des chercheurs en éducation, sur les composantes qui constituent ce type de connaissances. Nous présentons dans cette partie le modèle de PCK que nous avons retenu pour notre étude.

En définissant comme seules PCK les connaissances des stratégies d’enseignement et les connaissances des difficultés des élèves, Shulman ne semble pas prendre en compte l’influence d’autres facteurs sur l’enseignement et l’apprentissage (Kind, 2009). Les modèles

composantes supplémentaires à celles proposées par Shulman (§ 2.3.3). Dans une revue de littérature portant sur les PCK, Kind (2009) suggère que le modèle de Magnusson et al. (1999) englobe le mieux les besoins de la formation scientifique des enseignants. Le cadre de Magnusson et al. (ibidem) inclut, en effet, un modèle de PCK, spécifique à la science, qui a formé la base de beaucoup de recherches récentes (Friedrichsen et al., 2011). S’appuyant sur les travaux de Grossman (1990), Magnusson et al. (1999) distinguent cinq composantes des PCK : les connaissances sur les stratégies d’enseignement, les connaissances sur la compréhension des élèves, les connaissances sur le curriculum, les connaissances sur l’évaluation, et les orientations pour l’enseignement des sciences. Selon le modèle de Magnusson et al. (1999), quatre de ces éléments de connaissances (les connaissances sur le curriculum, sur les élèves, sur l’évaluation et sur les stratégies d’enseignement) influencent et sont façonnés par les orientations pour l’enseignement des sciences, ce qui fait donc de ces orientations une composante critique du modèle (voir Figure 4). En effet, c’est la spécificité de ce modèle vis-à-vis de la science, mais plus précisément encore c’est la présence de la composante « orientations pour l’enseignement des sciences » dans une position charnière qui surplombe les autres composantes de PCK, qui ont suscité notre intérêt à l’égard de ce modèle.

Nous explicitons ci-dessous chacune des cinq composantes des PCK telles qu’elles ont été définies par Magnusson et al. (1999):

- les connaissances sur les stratégies d’enseignement : cette composante de PCK se réfère aux connaissances des professeurs en chimie sur les stratégies spécifiques qui sont utiles pour aider les élèves à comprendre un concept. Elle inclut, d’une part, les connaissances des représentations spécifiques de ce concept, ou autrement dit les connaissances des façons de représenter le concept en vue de faciliter l’apprentissage des élèves (les représentations peuvent être des illustrations, des exemples, des modèles, ou des analogies). Elle inclut, d’autre part, les connaissances des professeurs en chimie des activités spécifiques qui peuvent être mises en place pour l’enseignement de ce concept (par exemple des problèmes, des démonstrations, des simulations, des expérimentations ou des investigations) ;

- les connaissances sur la compréhension des élèves : cette composante de PCK renvoie aux connaissances que les professeurs en chimie doivent avoir sur les élèves afin de les aider à comprendre des concepts scientifiques spécifiques. Elle englobe, d’une part, les connaissances que possède l’enseignant à propos des prérequis que les élèves doivent avoir pour apprendre un contenu particulier, ainsi que les connaissances de l’enseignant des différences entre élèves, face à l’apprentissage de ce contenu, en fonction de leurs capacités. Elle englobe, d’autre part, les connaissances de l’enseignant des difficultés d’apprentissage et des conceptions alternatives des élèves relatives à ce contenu disciplinaire (les concepts que les élèves trouvent difficiles à apprendre, les types d’erreurs, etc.). L’enseignant mobilise des PCK s’il reconnaît les difficultés d’apprentissage des élèves, les problèmes du langage dans la communication des idées scientifiques et trouve des solutions pour les surmonter (Bucat, 2004).

Outre les catégories de connaissances que Magnusson et al. (1999) ont inclues dans cette composante de PCK, nous considérons que « savoir reconnaître la position de l’élève par rapport au savoir en jeu » relève également d’une PCK/compréhension des élèves. En effet, nous postulons que, au cours de DI, il est essentiel que l’enseignant sache repérer où en est l’élève par rapport à son projet didactique et à la construction du savoir pour délimiter la marge d’autonomie et la responsabilité qu’il peut lui laisser vis-à-vis du savoir. C’est donc, à nos yeux, une connaissance essentielle pour piloter la mise en place des DI et qu’il faut en tenir compte dans la composante PCK/compréhension des élèves ;

- les connaissances sur le curriculum : cette catégorie de PCK correspond, d’un côté, aux connaissances des professeurs en chimie sur le programme officiel spécifique pour l’enseignement d’un contenu particulier, aux connaissances des buts et des objectifs prescrits (normes institutionnelles), ainsi qu’aux connaissances des enseignants de ce que les élèves ont appris au cours des années précédentes et de ce qu’ils sont censés apprendre dans les années ultérieures. D’un autre côté, elle relève des connaissances des matériels qui sont pertinents pour l’enseignement du contenu ;

- les connaissances sur l’évaluation : cette catégorie de PCK se rapporte, d’une part, aux connaissances du professeur en chimie des dimensions et des aspects de l’apprentissage des élèves d’un contenu spécifique qui sont importants à évaluer (ce qui doit être évalué). Elle concerne, d’autre part, les connaissances des méthodes d’évaluation des élèves qui peuvent être employées pour évaluer certains aspects spécifiques de l’apprentissage de ce contenu (comment évaluer) ;

- les orientations pour l’enseignement des sciences : dans le modèle des PCK de Magnusson et al. (1999), les orientations sont placées dans une position centrale : elles influencent les autres composantes de PCK et sont influencées, à leur tour, par ces composantes (voir Figure 4, supra). Les orientations pour l’enseignement des sciences représentent les connaissances des enseignants des buts et des objectifs de l’enseignement des sciences à un niveau donné : « an orientation represents a general way of viewing or conceptualizing science teaching. The significance of this component is that these knowledge and beliefs serve as a “conceptual map” that guides instructional decisions about issues such as daily objectives, the content of student assignments, the use of textbooks and other curricular materials, and the evaluation of student learning » (Magnusson et al., 1999, p. 97). Donc, selon la définition donnée par ces auteurs, les orientations semblent jouer un rôle fondamental dans le pilotage des choix didactiques et professionnels d’un enseignant relatifs à la conception, à la mise en œuvre et à la réflexion sur son enseignement.

Dans le cadre de notre recherche, pour étudier les connaissances professionnelles qui pilotent la conception et l’usage de ressource-fille de l’enseignant, nous nous référons au concept de PCK issu du modèle élargi de Magnusson et al. (1999). Cependant, nous avons fait le choix de nous distinguer de ces auteurs en ne considérant pas les orientations pour l’enseignement des sciences comme spécifiques d’un contenu disciplinaire particulier. En effet, nous suggérons que les orientations font partie des connaissances professionnelles en interaction avec les PCK pour un sujet d’étude, mais elles ne peuvent pas être incluses dans les PCK en tant qu’une de leurs composantes. Nous explicitons nos arguments concernant ce point de vue dans la section suivante (§ 2.3.5). De ce fait, les PCK se réduisent, selon notre perspective, à quatre catégories : PCK/stratégie, PCK/compréhension des élèves, PCK/curriculum et PCK/évaluation.

Nous portons une attention particulière à deux catégories des PCK parmi ces quatre, à savoir les connaissances sur les stratégies d’enseignement d’un contenu et les connaissances sur la compréhension des élèves vis-à-vis de ce contenu. Ce choix n’est pas anodin : en effet, nous considérons que les DI correspondent à des méthodes d’enseignement auxquelles l’élève n’est pas très habitué. D’une part, au cours de la préparation de sa ressource-fille, un professeur en chimie est censé anticiper les réactions éventuelles des élèves, leurs préconceptions, leurs incompréhensions, les types d’erreurs, et leurs difficultés possibles. Il doit aussi choisir des problèmes qui sont pertinents vis-à-vis des objectifs d’apprentissage, et qui aident les élèves à comprendre un contenu chimique spécifique (§ 1.3). De ce fait, les PCK/compréhension des élèves et les PCK/stratégie sont des connaissances essentielles qui guident le travail de préparation et de conception de ressource-fille par l’enseignant. D’autre part, au cours de la mise en œuvre de DI en classe, ce n’est plus l’enseignant qui expose le

savoir, mais c’est plutôt l’élève qui est mis en activité et qui est censé construire la méthode qu’il va utiliser pour résoudre son problème. De ce fait, l’élève peut être confronté à des difficultés d’apprentissage surtout qu’une responsabilité importante lui est laissée vis-à-vis de la construction de son savoir. En l’occurrence, l’enseignant est supposé identifier la position de l’élève par rapport au savoir en jeu, inférer et interpréter les difficultés d’apprentissage qui émergent au cours des séances fondées sur les DI. Ce faisant, l’enseignant met en jeu des PCK/compréhension des élèves. Par ailleurs, quand l’enseignant a su repérer où en est l’élève par rapport à la construction du savoir et ce qui lui pose problème, il est censé mettre en jeu des PCK/stratégie pour maintenir l’engagement de l’élève dans la démarche et l’aider à surmonter les difficultés qu’il rencontre. Par conséquent, les PCK/compréhension des élèves et les PCK/stratégie sont également des connaissances centrales qui pilotent la mise en œuvre de la ressource-fille en classe basée sur les DI.

Ainsi, nous avons présenté dans cette partie le modèle de PCK que nous avons retenu pour notre étude. Pour examiner les connaissances professionnelles mobilisées par la conception et la mise en œuvre de ressource-fille dans la perspective de DI, nous exploitons le concept de PCK proposé dans le modèle de Magnusson et al. (1999). Cependant, nous nous distinguons de ces auteurs en restreignant les PCK à quatre composantes (PCK/compréhension des élèves, PCK/stratégie, PCK/évaluation, PCK/curriculum) et en excluant donc les orientations pour l’enseignement des sciences de la catégorie des PCK. Parmi les quatre composantes des PCK, nous avons précisé que deux retiennent particulièrement notre attention dans notre étude : les PCK/compréhension des élèves et les PCK/stratégie. Nous avons, en outre, considéré que « savoir reconnaître la position de l’élève par rapport au savoir chimique en jeu » est une connaissance cruciale pour guider la mise en œuvre des DI et qui relève d’une PCK/compréhension des élèves. Plus largement encore, nous avons mis en évidence que les PCK/compréhension des élèves et les PCK/stratégie sont des connaissances essentielles pour piloter l’implémentation de DI, d’où notre intérêt particulier à l’égard de ces deux composantes de PCK dans notre travail de recherche.

2.3.5. Des orientations pour l’enseignement des sciences aux