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Interférence des systèmes d’activité au niveau du style de pensée (métarègles) Dans la continuité de ce que nous avons présenté dans les deux parties précédentes, nous

proposons dans cette partie de mettre en évidence une interférence des systèmes d’activité qui a lieu au niveau du style de pensée (métarègles). Pour ce faire, nous exploitons le modèle de système d’activité que nous avons développé et qui rend compte du style de pensée (§ 2.4.3).

Nous avons mis en évidence qu’une communauté est caractérisée par un certain style de pensée vu comme un système de métarègles, et nous avons également situé le style de pensée dans le modèle du système d’activité (§ 2.4.3). Nous faisons l’hypothèse que les systèmes d’activité d’un enseignant sont susceptibles de s’articuler au niveau du style de pensée (voir Figure 11). Suivant cette hypothèse, nous considérons que le style de pensée porté par une communauté particulière (par exemple la « communauté 1 ») peut se déplacer vers un autre système d’activité de l’enseignant où il sera intégré dans le style de pensée porté par une autre communauté (par exemple la « communauté 2 ») ou dans les règles employées par cette communauté. Dans ce cas, des caractéristiques du style de pensée de la « communauté 2 » ou des règles de cette communauté peuvent prendre leur source du style de pensée porté par la « communauté 1 ».

En outre, nous postulons que le style de pensée, qui caractérise une communauté avec laquelle un enseignant partage un objet particulier au sein d’un système d’activité, peut circuler vers un autre système d’activité pour être intégré au niveau des règles d’action de l’enseignant au sein d’une autre communauté. C’est le cas par exemple des règles d’action de l’enseignant, au sein de son système d’activité en classe, qui peuvent tirer leur origine du style de pensée d’une communauté à laquelle il appartient : nous supposons qu’un enseignant faisant partie d’une communauté partage et s’approprie le style de pensée porté par cette communauté, ainsi il développe lui-même des règles d’action, et au-delà des connaissances professionnelles, qui seraient imprégnées de ce style de pensée. Il s’agit donc de repérer comment un enseignant adopte un style de pensée, l’intériorise, l’assimile et le transforme en des règles d’action, et plus profondément en des connaissances qui lui sont propres, afin de les

des communautés auxquelles un enseignant fait partie peut nous donner une idée sur et nous expliquer certaines règles d’action de cet enseignant.

Par ailleurs, comme c’est le style de pensée qui se déplace d’un système d’activité à un autre pour être intégré dans un autre système d’activité, nous avons alors fait le choix de considérer que l’interférence des systèmes d’activité d’un même enseignant a lieu au niveau du style de pensée.

Figure 11. Interférence des systèmes d’activité d’un même enseignant au niveau du style de pensée

2.4.6. Conclusion

Après une présentation de quelques études portant sur le lien entre le travail collectif et le développement professionnel des enseignants, d’une part, et des formes de travail collectif, d’autre part, nous avons proposé une définition du travail collectif qui se fonde sur l’existence et le partage d’un but commun par les acteurs.

Pour l’étude des aspects collectifs du travail enseignant, nous avons fait le choix d’exploiter la théorie de l’activité pour laquelle l’activité d’un individu est orientée par un but afin d’atteindre un résultat, chaque but mettant en jeu un système d’activité. Nous avons proposé une caractérisation des communautés de l’enseignant à partir des notions de collectif de pensée et de style de pensée en considérant qu’une communauté correspond à un collectif de pensée qui partage un style de pensée, et qui se constitue par l’émergence, à un moment donné, d’un but commun. Aussi, nous avons proposé une mise en relation entre les règles de la communauté, la division du travail, les outils mobilisés, d’une part, et le style de pensée de la communauté, d’autre part, en considérant le style de pensée comme un système de métarègles rendant compte des règles spécifiques de la communauté, de la façon dont le travail est divisé et des outils exploités par cette communauté. A cet égard, nous avons proposé un nouveau modèle du système d’activité qui tient compte du style de pensée porté par la communauté.

Pour l’étude de l’ensemble des interactions collectives de l’enseignant au sein de différentes communautés, nous avons proposé le concept de système d’interactions qui tire parti de la notion de système d’activité : le système d’interactions de l’enseignant est défini comme étant composé d’une diversité des systèmes d’activité liés à l’enseignement et des liens qui les articulent. Nous avons également suggéré une modélisation du système d’interactions où nous avons mis en évidence des interférences des systèmes d’activité et deux types d’interactions collectives : des interactions synchrones et des interactions asynchrones. Nous avons supposé que l’interférence des systèmes d’activités d’un enseignant peut s’effectuer au niveau des ressources, des règles et du style de pensée. L’interférence des systèmes d’activité au niveau des ressources, pensée en relation avec le cycle de vie d’un document, témoigne d’une articulation entre la théorie de l’activité et l’approche documentaire du didactique.

La modélisation du système d’interactions et l’identification des interférences devraient fournir un cadre permettant d’étudier les relations qui se nouent entre les systèmes d’activité de l’enseignant et la façon dont ceux-ci sont liés ainsi que les implications que cela génère pour le développement du système de ressources et des connaissances professionnelles de l’enseignant, en particulier ses PCK et ses orientations pour les DI.

2.5. Conclusion de la construction théorique

Un cadre théorique n’est pas susceptible d’éclairer, seul, les phénomènes complexes que nous examinons dans notre recherche. Ce qui importe c’est bien la cohérence que l’on construit entre objet d’étude, cadre théorique et méthodologie. C’est ainsi que nous avons été amenés dans ce chapitre à justifier, à chaque fois, le choix et la pertinence du cadre théorique au regard de notre objet de recherche.

Partie de la problématique de l’impact des interactions collectives d’un professeur en chimie sur sa documentation tournée vers les DI (§ 1.5), nous avons procédé à la construction d’un cadre théorique dont la « triade » : connaissances, activité (dans un contexte de DI), ressources, constitue le cœur. Nous avons également introduit de nouveaux concepts et proposé une mise en relation entre différentes approches théoriques.

Nous synthétisons l’ensemble de cette construction théorique sous forme d’une représentation schématique pour mettre en évidence l’interaction entre les éléments de la triade (connaissances, activité et ressources) (voir Figure 12). Nous exposons aussi dans cette représentation schématique les concepts fondamentaux qui fondent les cadres théoriques que nous avons exploités pour approcher cette triade et le travail collectif. Afin de mettre en évidence notre apport théorique, nous distinguons par une couleur rouge les concepts que nous avons introduits ou les articulations que nous avons proposées.

Nous faisons l’hypothèse que le travail collectif pourrait être un levier du développement professionnel des professeurs en chimie tourné vers les DI. Or selon notre perspective théorique, le développement professionnel désigne l’ensemble des évolutions conjointes des

développement de cette triade, et plus profondément encore, c’est le développement de l’interaction entre les éléments de cette triade qui sous-tend le développement professionnel d’un enseignant. Il s’agit donc de repérer les effets du travail collectif sur chacun de ces éléments. Dans ce qui suit, nous précisons notre questionnement initial (§ 1.5) à l’aune de cette construction théorique.

Figure 12. Représentation schématique de la construction théorique

2.6. Questions et hypothèses de recherche

L’ensemble de nos questions de recherche porte sur la triade « activité - connaissances - ressources ». Il s’agit, à travers un premier angle de vue, d’interroger l’activité de l’enseignant, et plus particulièrement les connaissances qu’il mobilise lors de la mise en place de DI. Le deuxième angle de vue que nous abordons dans nos questions de recherche est celui d’une ressource-fille de l’enseignant conçue dans la perspective de DI. Plus précisément, nous examinons le cycle de vie de cette ressource-fille et nous étudions les moments d’intervention et d’influence du travail collectif sur ce cycle, et plus largement sur le système de ressources de l’enseignant, d’une part, et sur les connaissances professionnelles de cet enseignant, d’autre part. Le troisième angle de vue que nous attaquons cible, en particulier, l’interférence des systèmes d’activité de l’enseignant afin de comprendre l’effet du système d’interactions de celui-ci sur son développement professionnel tourné vers les DI. Nous présentons, dans ce qui suit, nos questions de recherche ainsi que nos hypothèses de recherche.