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Hypothèses de recherche

3.3. La construction du terrain de recherche

La méthodologie de recueil de données que nous venons de présenter (§ 3.2) est mise en œuvre sur des terrains d’étude au cours de plusieurs périodes de suivi. Nous présentons d’abord dans cette partie nos choix par rapport à ces terrains d’étude suivant deux angles de vue : le premier concerne le choix des enseignants qui ont participé à notre travail de recherche (§ 3.3.1) et le second relève du choix du contenu chimique (§ 3.3.2). Ensuite, nous abordons la présentation des deux études de cas (§ 3.3.3) en décrivant la méthodologie mise en œuvre sur chaque terrain d’étude.

3.3.1. Le choix des enseignants

Nous portons un regard spécifique sur les interactions collectives de l’enseignant, dans la perspective de DI, au sein de communautés variées. Ceci suppose naturellement deux conditions nécessaires : d’une part, il faut que les enseignants participant à notre étude soient impliqués dans un travail collectif au sein de communautés « naturelles » ou « intentionnelles » (§ 2.4.3) ; d’autre part, il faut que ces enseignants pratiquent les DI dans leur enseignement.

Pour pouvoir choisir des enseignants répondant à ces deux critères, nous avons conçu un questionnaire de présentation personnelle qui porte, entre autres, sur le parcours professionnel des enseignants, leur implication dans le travail collectif et les DI (voir Annexe 5). Nous avons proposé ce questionnaire à des professeurs de SPC participant, le 18 novembre 2009, à

une journée d’étude, à l’INRP19, intitulée « Expérimentations d’enseignements scientifiques rénovés en classe de seconde20 ». Cette journée d’étude qui réunissait un nombre de professeurs de SPC (dix sept professeurs de SPC étaient présents) était plus particulièrement centrée sur les DI, ce qui justifie ainsi notre choix de passation de ce questionnaire lors de cette journée d’étude en particulier.

Comme le programme de cette journée d’étude était chargé et que les enseignants ont effectivement besoin de temps pour répondre aux questions, nous avons simplement annoncé notre questionnaire à tous les participants à cette journée d’étude, et nous avons demandé plus particulièrement aux professeurs de SPC de nous communiquer leurs adresses électroniques pour leur envoyer le questionnaire, par mail, à la suite de cette journée. Nous avons également profité de notre participation à cette journée d’étude pour expliciter aux professeurs présents notre objectif de recherche et discuter avec eux à propos de leur travail collectif enseignant et des DI. Le questionnaire a été ensuite diffusé, par mail, auprès des dix sept professeurs de SPC qui se sont réunis à l’occasion de cette journée d’étude, mais en retour, onze enseignants seulement y ont répondu. Soulignons que ce questionnaire nous a essentiellement servi pour le choix des enseignants.

Nous exploitons dans cette thèse les données que nous avons recueillies pour deux enseignants qui ont participé à notre étude. Nous présentons en détail ces enseignants que nous nommons Lucien et Sarah (pseudonyme) dans une partie suivante (§ 3.3.3). Ces deux enseignants pratiquent les DI dans leurs classes. Les interactions collectives de Sarah se font essentiellement au sein de son lycée alors que Lucien entretient des relations de travail fortes qui vont au-delà de la communauté de son lycée pour concerner d’autres communautés. Le système d’interactions de Lucien se distingue alors de celui de Sarah par une plus grande diversité de systèmes d’activité impliquant des communautés variées. Nous considérons de fait que le caractère complémentaire du profil de ces enseignants pourrait fournir un cadre intéressant permettant d’organiser notre questionnement, d’où le choix de ces enseignants en particulier.

Il est, cependant, intéressant d’évoquer les « perturbations » de la mise en place de notre méthodologie, notamment la difficulté à choisir des enseignants prêts à participer à notre travail de recherche. En effet, notre étude a débuté à un moment « critique » de l’enseignement des sciences induit par l’arrivée des nouveaux programmes en lycée, en particulier en classe de seconde, une arrivée qui appelle à un renouveau de l’enseignement des sciences à travers la généralisation des DI. Ceci peut donc expliquer la réticence de certains enseignants quant à leur participation à notre étude, mais en même temps ceci constitue un moment intéressant pour notre étude dans la mesure où des « perturbations », induites par ce renouvellement, sont susceptibles de toucher les systèmes de ressources et les systèmes d’activité des enseignants et d’impliquer de nouveaux équilibres qui seraient sans doute intéressants à saisir.

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Institut National de Recherche Pédagogique ; depuis 1er janvier 2011, il a intégré l’Ecole normale supérieure de Lyon et il est devenu « Institut Français de l’Éducation » (IFÉ).

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3.3.2. Le choix du thème de la quantité de matière en chimie

Comme nous nous intéressons aux PCK de l’enseignant qui sont, par définition, liées à un contenu disciplinaire particulier (§ 2.3.3) et comme nous visons l’analyse d’un savoir en jeu d’un point de vue didactique, nous avons fait le choix de focaliser notre regard sur un contenu chimique spécifique : la « quantité de matière » et son unité la « mole » enseignées en classe de seconde. Deux considérations motivent ce choix.

La première raison réside dans le fait que la quantité de matière constitue le cœur de l’enseignement de la chimie au lycée et que cet enseignement est bien souvent reconnu comme étant difficile. En effet, beaucoup d’élèves éprouvent des difficultés à comprendre et à appliquer le concept de la mole (Tüllberg et al., 1994 ; Dori & Hameiri, 1998 ; BouJaoude & Barakat, 2000). En outre, de nombreuses recherches (Tüllberg et al., 1994 ; Furió et al., 2000) mettent en évidence des incompréhensions de ce concept de la part des enseignants. Donc de réelles difficultés se posent dans l’enseignement de la quantité de matière et de la mole qui constitue, de ce fait, un véritable enjeu pour le professeur en chimie. Ainsi, ces difficultés pourraient induire un travail documentaire et des interactions collectives plus soutenus des enseignants. Quant à la seconde raison, elle est est liée au fait que le thème de la quantité de matière est un objet d’étude en chimie qui se prête à la mise en œuvre de DI. Ceci appuie donc notre choix de cette notion dans la mesure où notre recherche se situe dans le contexte de DI.

Par ailleurs, il convient de noter que, dans notre travail, nous portons notre regard sur les situations d’enseignement qui exploitent la quantité de matière et la mole mais ne se limitent pas à leur introduction. En d’autres termes, nous ne privilégions pas seulement les situations d’enseignement qui introduisent le concept de quantité de matière, mais aussi celles qui suivent son introduction et l’utilisent (par exemple, des situations d’enseignement portant sur la réaction chimique, la concentration, le bilan de matière) et pour lesquelles la mise en œuvre de DI est pertinente.

Ainsi, les interactions collectives du professeur en chimie pourraient conférer à celui-ci la possibilité d’accéder à des ressources qu’il peut mobiliser afin de faire face aux difficultés d’enseignement du thème de la quantité de matière et de mettre en place des DI, ce qui aurait en retour des conséquences sur ses PCK. La quantité de matière s’avère donc un thème chimique propice pour étudier nos questions de recherche.

3.3.3. Les deux terrains d’étude, présentation et méthodologie

Cette section se centre sur les deux terrains d’étude que nous avons explorés. Il s’agit du suivi de la documentation et du système d’interactions des deux enseignants : Lucien et Sarah. L’étude de cas de Lucien a été réalisée pendant deux années consécutives (année 2009/2010 et 2010/2011) alors que celle de Sarah a été menée au cours d’une seule année (année 2010/2011).