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Les différents niveaux du contexte dans lesquels les élèves interagissent à l’école

CHAPITRE 2 : CADRE THÉORIQUE DE LA RECHERCHE

1 La théorie générale des systèmes de Bronfenbrenner (979)

1.1 Les différents niveaux du contexte dans lesquels les élèves interagissent à l’école

Selon la théorie générale des systèmes, l’individu lui-même constitue un système organisé et structuré (ontosystème). Il interagit avec quatre niveaux de son contexte ou systèmes qui sont hiérarchisés et imbriqués les uns dans les autres. Le premier niveau de ses interactions est ce que Bronfenbrenner (1979) a appelé microsystème. Ce sont les contextes où l’individu interagit directement. Selon lui, « un microsystème est un ensemble structuré d’activités, de rôles et de relations interpersonnelles vécues par la personne dans un lieu déterminé ayant certaines caractéristiques physiques et matérielles » (Bronfenbrenner, 1994, p. 39). Pour Guichard et Huteau (2006), ces microsystèmes sont caractérisés essentiellement par des activités relativement simples ayant une certaine intention et un certain sens, des rôles et des relations interpersonnelles. Pour Bronfenbrenner (1979), l’évolution de ces relations peut tendre vers ce qu’il a appelé une relation dyadique. Celle-ci se forme lorsque deux individus se prêtent mutuellement attention en coopérant ensemble. L’auteur note aussi que la relation dyadique peut prendre trois formes différentes. Ce sont : la dyade d’observation où l’un des participants observe l’autre qui a la pleine conscience d’être observé; la dyade d’activité conjointe qui se caractérise par la réciprocité, l’équilibre des pouvoirs et des relations affectives et la dyade primaire qui met en jeu des liens émotionnels forts entre les deux individus. Pour lui, ces trois formes de dyades ne sont pas mutuellement exclusives, car ce

qui se passe dans une dyade peut avoir des rapports ou des répercussions sur ce qui se passe dans une autre. Les activités et les rôles que jouent les différents acteurs dans le microsystème suscitent selon Bronfenbrenner (1979), des attentes qui selon lui, ont une place importante dans la formation des intentions d’avenir. C’est pourquoi il préconise que pour comprendre les intentions professionnelles d’une personne, il serait intéressant de porter un regard sur les différents microsystèmes dans lesquels il intervient. Dans le cadre identitaire qui nous intéresse ici, nous pouvons dire que les différents microsystèmes auxquels participe l’élève peuvent s’apercevoir dans les relations qu’il entretient avec ses pairs et les relations qu’il a avec les différents intervenants de l’école (enseignants, éducateurs, conseillers d’éducation, conseillers d’orientation, personnel administratif et la direction de l’établissement). Au niveau de ces interactions, nous pouvons remarquer que celle qui se passe entre l’enseignant et l’élève se déroule généralement dans un cadre structuré qu’est celui de la classe, où le maître donne un enseignement aux élèves auprès de qui il nourrit des attentes. Ces derniers ont également des attentes auprès de l’enseignant qui devra les conduire tout au long de leur cheminement scolaire en vue d’atteindre un niveau satisfaisant de connaissances, de savoir- faire et de savoir-être. Leur relation devra alors se bâtir dans une complicité mutuelle où peut apparaître ou non une relation dyadique. Mais, cela n’est pas toujours le cas d’après la recension des écrits que nous venons de présenter. Le groupe des pairs ainsi que certains professionnels à l’école ont aussi d’autres missions et accomplissent diverses tâches et activités avec les élèves. C’est le cas du personnel d’encadrement, du personnel administratif et de la direction de l’école. Leurs activités et tâches sont aussi nourries d’intentions et d’attentes comme ceux des enseignants. Vu que les relations dyadiques qui se créent au niveau des différents microsystèmes ne sont pas mutuellement exclusives, il n’est pas rare de constater par exemple que la dyade qui lie un enseignant à un élève peut être influencée ou peut être susceptible d’influencer celle qu’il a avec un autre élève. C’est aussi le cas de la relation que deux élèves entretiennent ensemble. Elle a nécessairement des répercussions sur celle que l’un des deux a avec un troisième qui ne fait pas partie de leur dyade. Ces relations sont influencées par les caractéristiques physiques, matérielles et structurales de ces cadres identitaires étant donné que ces établissements n’ont pas les mêmes caractéristiques sur le plan ni de leur composition sociale ni du point de vue de la personnalité des individus qui les composent.

Le deuxième niveau du contexte dans lequel interagit l’individu est appelé mésosystème. Il désigne l’ensemble des interrelations entre les différents microsystèmes dans lesquels interagit l’individu (Bronfenbrenner, 1979). Selon lui, l’ensemble de ces microsystèmes serait interrelié. Ces interrelations se caractérisent aussi par des activités, des relations et des rôles. À la différence des microsystèmes, ici, ces relations ne se passent pas dans un seul cadre. Elles se caractériseraient plutôt par la nature des échanges entre les différents milieux ou microsystèmes et leur consistance. Pour Bronfenbrenner (1979), la participation de l’individu à ces différents milieux implique des transitions écologiques ou des changements de rôles. C’est le cas par exemple de l’élève qui garde son statut d’apprenant lorsqu’il est en classe en face de l’enseignant et qui devient « consultant » lorsqu’il se rend dans le bureau des conseillers d’orientation pour une guidance. L’auteur mentionne aussi que le mésosystème jouerait pleinement son rôle dans la mise en place des projets d’avenir de l’individu si un accent particulier est mis sur la communication, l’échange d’informations et d’expériences entre les microsystèmes auxquels il participe. Dans le cadre identitaire qui nous intéresse ici, nous avions indiqué dans notre recension d’écrits que de plus en plus de projets impliquent l’ensemble du personnel des établissements dans le cadre de l’accompagnement des élèves dans la structuration de leurs aspirations professionnelles. C’est le cas de l’approche orientante au Québec et des approches centrées sur l’ADVP en occident. En Côte d’Ivoire, même si de tels programmes n’existent pas encore, nous notons cependant la tenue de quelques rencontres régulières entre les différents microsystèmes auxquels participent les élèves. Ce sont par exemple, les réunions de rentrée, les conseils de classe, les conseils de discipline et les conseils d’orientation. Lors de ces rencontres dirigées généralement par le chef de l’établissement, les questions relatives à la réussite des élèves sont abordées. Nous pouvons aussi noter par ailleurs que lors de ces rencontres de partage et de communication entre les différents intervenants, la présence des élèves n’est admise que pour le conseil de discipline. Dans les autres cas de figure, un compte rendu leur ai fait par le biais du professeur principal ou à l’occasion des visites effectuées par le chef d’établissement dans les classes.

Le troisième milieu ou système défini dans la théorie écologique de Bronfenbrenner est

il n’est pas actif dans ces milieux, mais ce qui advient dans ceux-ci peut l’affecter dans la formalisation de ses projets. Dans la relation que nous établissons entre les différents concepts de cette théorie et le cadre de notre recherche, l’exosystème serait représenté ici, par les directions régionales de l’éducation nationale ou DREN. Chaque DREN couvre une parcelle du territoire et est dirigée par un directeur régional qui assure les fonctions de représentant du ministre de l’Éducation dans sa zone. Elle abrite aussi des écoles primaires et secondaires qui sont sous sa responsabilité. Malgré le fait que l’élève ne prenne pas part directement aux activités d’une autre DREN ou d’un établissement situé dans une autre DREN, il peut en être informé par l’intermédiaire de ses pairs ou des professionnels qui y travaillent. Ainsi, l’élève peut être informé du contenu d’un devoir, de l’organisation d’une manifestation à caractère social ou éducatif ou même de l’initiative d’une grève qui serait en vue. Par ces échanges d’informations, les exosystèmes peuvent aussi influencer les représentations, les perceptions, les projetions d’avenir des apprenants et la manière dont il les structure dans le système.

En ce qui concerne le macrosystème, selon Bronfenbrenner (1994), il regroupe l’ensemble des microsystèmes, des mésosystèmes et des exosystèmes. Dans le rapprochement que nous faisons avec notre étude, il correspondrait au ministère responsable de l’éducation dont les décisions prises seraient teintées de la lecture qu’il fait de la situation actuelle du pays et de ses projections futures en matière de politique éducative. Dans l’ordre hiérarchique, un évènement ou une décision administrative prise au niveau du ministère affecte nécessairement les exosystèmes qui influencent à leur tour les mésosystèmes et les microsystèmes. Cependant, nous pouvons constater dans certains cas spécifiques que des décisions émergent de la base et remontent vers le sommet. La représentation de ce modèle théorique adapté à notre étude est illustrée par le schéma ci-contre.

Légende

Ontosystème (l’élève)

Microsystèmes (les pairs et les intervenants de l’établissement)

Mésosystème (espace d’échanges entre les microsystèmes ou établissement) Exosystème (DREN ou direction régionale de l’éducation nationale)

Macrosystème (ministère de l’Éducation)

Figure 1 : Schéma adapté du modèle théorique de Bronfenbrenner (1979) à notre étude

1.2 La dynamique des individus et des systèmes

Dans la plupart des systèmes éducatifs, les enfants commencent généralement leur scolarité à l’âge de 6 ans. La Côte d’Ivoire ne reste pas en marge de cette règle communément admise. La scolarisation des enfants débute à cet âge à l’école primaire, au cours élémentaire première année ou CP1. Cependant, il n’est pas rare de voir certaines familles envoyer leurs enfants

très tôt avant cet âge à l’école. À l’âge de trois ou quatre ans, ceux-ci entament l’école maternelle, à la petite, moyenne ou grande section pour ensuite continuer au cours élémentaire première année. Durant tout leur parcours, ils subissent des transformations tant au niveau physiologique, corporel, cognitif, affectif et comportemental. Tous ces changements qui expliquent la dynamique au niveau de l’individu traduisent aussi son évolution au sein de la société dans laquelle il vit. Selon la théorie écologique du développement humain, les transformations successives qui se mettent en place au niveau de l’individu ne restent pas sans influence sur l’environnement dans lequel il se trouve qui, est aussi en perpétuel changement. Par rapport au cadre identitaire dans lequel nous nous situons, la dynamique des systèmes peut être observée à plusieurs niveaux. De façon générale, nous observons que le passage d’un degré ou d’un cycle d’enseignement à un autre nécessite le plus souvent un changement d’école et/ou de lieu de résidence. C’est le cas lorsqu’après avoir été admis au CEPE (examen final de la dernière année du primaire), l’élève se sent obligé de quitter son école pour aller soit dans un collège, soit dans un lycée après la décision finale d’affectation rendue par la commission nationale d’orientation en 6ème. Ce genre de

mouvement est aussi observé lors des affectations en seconde après la classe de 3ème et après la réussite au baccalauréat. Au niveau des microsystèmes, il n’est pas rare de voir aussi des élèves changer de compagnons ou d’encadreurs durant leurs parcours scolaires. Les rapports de voisinage en classe et les changements qui interviennent au niveau des listes de classe en début d’année témoignent de cette dynamique qui intervient dans le microsystème (pairs) dans lequel l’élève interagit. Au niveau des microsystèmes constitués par l’ensemble des enseignants, le personnel d’encadrement, le personnel administratif et la direction de l’école, les mouvements de ces professionnels à la fin de chaque année (exéat, innéats) et leur répartition dans les classes et selon les niveaux en début d’année scolaire font aussi que les élèves ne sont pas toujours suivis par les mêmes intervenants. Vu que ces microsystèmes sont en perpétuel mouvement, la nature de leurs interrelations et leur consistance peuvent subir aussi des modifications plus ou moins significatives. Les exosystèmes et le macrosystème qui influencent les deux premières cités peuvent subir eux aussi des changements considérables (Bronfenbrenner, 1994). En référence à la crise postélectorale de 2010 et la crise militaro-politique que la Côte d’Ivoire a traversée de 2002 à 2010, le système éducatif ivoirien avait subi le plus lourd préjudice. Des écoles sont restées fermées pendant plusieurs

mois dans certaines régions, tandis que d’autres malgré la crise fonctionnaient plus ou moins normalement. Les élèves et étudiants des zones assiégées étaient obligés soit de migrer vers les zones paisibles pour continuer leur formation, soit d’abandonner l’école ou de se contenter de bénévoles qui n’avaient, dans la plupart des cas, ni la formation requise ni l’expérience nécessaire pour les encadrer. Aussi, les changements qui interviennent souvent au sommet de l’État, des ministères et des structures sous-tutelle (DREN et les établissements) modifient-ils aussi de façon considérable la conduite et le comportement des individus. Bronfenbrenner (1979) considère que dans la conceptualisation de ses projets, autant l’individu agit sur le contexte, autant, celui-ci agit aussi sur l’individu. C’est pourquoi il avance l’idée d’un bon ajustement des relations entre individu et contextes pour que cela profite aussi bien à l’individu qu’aux contextes. Pour ce faire, cela nécessiterait chez l’individu, une mobilisation de ses attributs personnels et un repérage des traits saillants de son environnement pour pouvoir mieux s’accommoder et s’ajuster.

L’influence du contexte et de ses interrelations avec l’individu sur la formation de ses aspirations professionnelles est plus approfondie dans la deuxième théorie que nous allons aborder maintenant. Elle prend en compte la complexité de ces relations dans le sens où elles engendreraient des processus qui sont déterminants dans le choix d’une formation et celui d’une carrière professionnelle.

2 La théorie sociale cognitive de l’orientation scolaire et professionnelle et du