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L'expérience scolaire et la structuration des aspirations scolaires et professionnelles chez des élèves en classe de terminale en Côte-d'Ivoire

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Academic year: 2021

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(1)

L’expérience scolaire et la structuration des

aspirations scolaires et professionnelles chez des

élèves en classe de terminale en Côte d’Ivoire

Mémoire

Losseny BAMBA

Maîtrise en Sciences de l’Orientation

Maître ès arts (M.A)

Québec, Canada

(2)

L’expérience scolaire et la structuration des

aspirations scolaires et professionnelles chez des

élèves en classe de terminale en Côte d’Ivoire

Mémoire

Losseny BAMBA

Sous la direction de :

(3)

RÉSUMÉ

Ce mémoire vise à comprendre l’expérience scolaire des élèves et la structuration de leurs aspirations scolaires et professionnelles dans des établissements secondaires en Côte d’Ivoire. La théorie générale des systèmes de Bronfenbrenner (1979) et la théorie sociale cognitive de l’orientation scolaire et professionnelle de Lent (2008) ont été sollicitées pour apporter un éclairage à la compréhension de cette problématique. Elles mettent plus l’accent sur l’utilité des relations dans le développement des individus dans la société. Pour atteindre les objectifs spécifiques de cette recherche : (1) décrire l’expérience scolaire de ces élèves en tenant compte de ses dimensions objectives et subjectives (2) identifier les caractéristiques de ces dimensions qui auraient une influence sur les processus de structuration des aspirations scolaires et professionnelles chez ces élèves et (3) démontrer l’apport spécifique des offres de services en orientation dans la structuration de leurs choix scolaires et professionnels, un guide d’entrevue semi-dirigée et des critères de participation à l’étude ont été établis. Seize élèves de la classe de terminale de deux établissements secondaires à Abidjan ont pris part à la collecte des données. Les résultats donnent un aperçu des éléments de cette expérience qui sont en lien avec la structuration de ces aspirations. Ils montrent aussi l’influence que pourrait avoir cette expérience au niveau du développement et de la construction personnelle des élèves. Les apports des services en orientation dans le développement de ce processus chez ces élèves paraissent mitigés. Ils laissent entrevoir des dysfonctionnements au niveau des équipes éducatives et relèvent des questions liées à la professionnalisation de l’ensemble des corps de métiers dans le secteur de l’éducation en Côte d’Ivoire.

Mots clés : expérience scolaire, structuration des aspirations scolaires et professionnelles,

élèves en classe de terminale, dysfonctionnement des équipes éducatives, professionnalisation des corps de métiers dans le secteur de l’éducation.

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ABSTRACT

This thesis seeks to understand students’ school experience and the shaping of their academic and professional aspirations at Ivorian secondary schools. Bronfenbrenner’s general systems theory (1979) and Lent’s social cognitive career theory (2008) were used to provide great insight into this issue since they place greater emphasis on the utility of relationships as individuals grow in society. A semi-structured interview guide was drawn up, and the criteria for participation in the study, established in order to achieve specific objectives of this thesis, which are to: (1) describe the students’ school experience taking into account its objective and subjective dimensions, (2) identify the characteristics of these dimensions which would influence the way in which these students shape their academic and professional aspirations, and (3) show the specific contribution of career guidance services in the shaping of their academic and professional choices. 16 students in their final year in two secondary schools in Abidjan took part in the data collection phase of this study. The results give a glimpse of this elements of this study which are linked to the shaping of these aspirations. They also show the influence that this experience could have on the students’ personal development and identity. Among the students, the contributions from the career guidance services throughout the process seem to get mixed reviews. These contributions give a glimpse of the dysfunctions when it comes to the educational teams and matters linked to the professionalisation of all the education sector trades in Ivory Coast.

Key words: school experience, shaping of academic and professional aspirations, students

in final year of high school, dysfunction of educational teams, professionalisation of education sector trades

(5)

TABLE DES MATIÈRES

RÉSUMÉ ... iii

ABSTRACT ... iv

TABLE DES MATIÈRES ... v

LISTE DES TABLEAUX ... ix

LISTE DES FIGURES ... x

REMERCIEMENTS ... xi

INTRODUCTION ... 1

CHAPITRE 1 : PROBLÉMATIQUE ... 4

1 Position du problème ... 4

2 Recension des écrits... 9

2.1 L’influence des variables relatives au fonctionnement des systèmes éducatifs ... 9

2.1.1 L’influence du contexte institutionnel ... 9

2.1.2 L’influence de l’organisation interne des établissements ... 12

2.1.3 L’influence de la performance scolaire des élèves ... 15

2.2 L’influence des acteurs principaux du système éducatif ... 20

2.2.1 Le rôle joué par les pairs ... 20

2.2.2 Le rôle joué par les enseignants ... 22

2.2.3 Le rôle joué par les conseillers d’orientation ... 24

(6)

4 Objectifs du mémoire ... 30

CHAPITRE 2 : CADRE THÉORIQUE DE LA RECHERCHE ... 31

1 La théorie générale des systèmes de Bronfenbrenner (1979) ... 31

1.1 Les différents niveaux du contexte dans lesquels les élèves interagissent à l’école. 32 1.2 La dynamique des individus et des systèmes ... 36

2 La théorie sociale cognitive de l’orientation scolaire et professionnelle et du counseling (TSCOSP) de Lent (2008) ... 38

2.1 Les éléments de base de la théorie sociale cognitive de l’orientation scolaire et professionnelle et du counseling ... 39

2.1.1 Les croyances relatives aux sentiments d’efficacité personnelle... 39

2.1.2 Les attentes de résultats ... 42

2.1.3 Les buts personnels ... 42

2.2 Les sous-modèles de la théorie sociale cognitive de l’orientation scolaire et professionnelle ... 43

2.2.1 Le modèle du développement des intérêts professionnels ... 43

2.2.2 Le modèle des choix professionnels liés au contexte ... 46

2.2.3 Le modèle de réalisation de la tâche ... 48

CHAPITRE 3 : CONSIDÉRATIONS MÉTHODOLOGIQUES ... 51

1 Choix méthodologique ... 52

2 Terrain d’étude, population et échantillon ... 52

2.1 Terrain d’étude ... 52

2.2 Population ciblée, échantillon et critères de participation à l’étude ... 55

(7)

2.2.2 Échantillon ... 56

2.2.3 Critères de participation à l’étude et procédure de recrutement ... 59

2.2.4 Caractéristiques des participants ... 63

3 La collecte de données ... 64

3.1 L’instrument de mesure ... 64

3.2 Le guide d’entrevue semi-dirigé ... 65

4 Considérations éthiques et déroulement des entrevues. ... 66

5 Procédure d’analyse des données ... 67

CHAPITRE 4 : L’EXPÉRIENCE SCOLAIRE CHEZ DES ÉLÈVES DE LA CLASSE DE TERMINALE EN CÔTE D’IVOIRE... 72

1 L’expérience scolaire objective des participants ... 72

1.1 Les caractéristiques de l’expérience scolaire objective chez les élèves de terminale dans le secondaire général ... 73

1.2 Les caractéristiques de l’expérience scolaire objective chez les élèves de terminale dans le secondaire technique ... 76

2 L’expérience scolaire subjective des participants ... 79

2.1 Les caractéristiques de l’expérience scolaire subjective chez des élèves de terminale ayant suivi une formation générale au secondaire ... 80

2.2 Les caractéristiques de l’expérience scolaire subjective chez des élèves de terminale ayant suivi une formation technique au secondaire ... 87

3 L’expérience scolaire dans la construction personnelle chez les élèves ... 93

3.1 Les facteurs émergents ... 93

3.2 Les retombées et/ou la portée de l’expérience scolaire chez les élèves ... 97

(8)

3.2.2 La portée de l’expérience scolaire au niveau du registre de la pensée ... 105

3.2.3 Les retombées de l’expérience scolaire au niveau du registre de l’action ... 108

3.2.3.1 Les sources d’informations qu’utilisent les élèves ... 108

3.2.3.2 Les déterminants des aspirations scolaires et professionnelles chez les élèves du lycée classique et du lycée technique d’Abidjan ... 111

3.2.3.3 Aspirations scolaires et professionnelles des élèves ... 114

CHAPITRE 5 : APPORTS SPÉCIFIQUES DES DISPOSITIFS D’ORIENTATION ... 119

CHAPITRE 6 : INTERPRÉTATION DES RÉSULTATS ... 121

1 Les implications théoriques de la recherche ... 123

2 Les implications pratiques de la recherche ... 129

3 Les limites et les avantages de la recherche ... 132

CONCLUSION ... 135

BIBLIOGRAPHIE ... 139

(9)

LISTE DES TABLEAUX

Tableau 1 : Estimation de la taille de l’échantillon théorique de la recherche et ses caractéristiques ... 59 Tableau 2 : Caractéristiques de l’échantillon réel de la recherche ... 62 Tableau 3 : Tableau récapitulatif des caractéristiques des participants ... 63 Tableau 4 : Connaissances des participants sur les formations offertes après le baccalauréat ... 103

(10)

LISTE DES FIGURES

Figure 1 : Schéma adapté du modèle théorique de Bronfenbrenner (1979) à notre étude ... 36 Figure 2 : Modèle du développement des intérêts professionnels fondamentaux au cours du temps – sources : Lent (2008)... 44 Figure 3 : Modèle des facteurs personnels, contextuels liés à l’expérience, qui affectent le comportement de choix professionnel – source : Lent (2008) ... 46 Figure 4 : Modèle de réalisation de la tâche – source : Lent (2008) ... 48 Figure 5 : Choix professionnels des participants adaptés au modèle de la carte cognitive des professions de Gottfredson (1981). ... 116 Figure 6 : Portée de l’expérience scolaire chez les élèves : mécanisme de construction personnelle et de structuration des aspirations scolaires et professionnelles ... 117

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REMERCIEMENTS

Ce mémoire n’aurait connu son aboutissement sans le soutien de certaines personnes à qui, nous voudrions rendre ici un vibrant hommage et leur témoigner toute notre reconnaissance. Il s’agit tout d’abord de notre famille (frères, sœurs, femme et enfants) à qui notre absence hors du pays a laissé un vide et causé des peines par moment. Ce mémoire est le fruit de vos sacrifices et la compensation de vos souffrances individuelles et collectives causées par mon absence prolongée.

Ces remerciements vont aussi droit au Programme canadien de bourses de la francophonie (PCBF) et au Bureau canadien de l’éducation internationale (BCEI). Grâce à ce programme, nous avons eu la chance de faire un retour aux études dans une université prestigieuse et bénéficier d’une subvention pour notre séjour au Canada. Nous voudrions vous dire un grand merci et vous féliciter pour vos efforts dans l’accompagnement des pays membres de la francophonie à aller vers l’émergence.

À la direction de programme de maîtrise en sciences de l’orientation et à tous les enseignantes et enseignants qui m’ont connu en tant qu’étudiant, qui m’ont permis d’affiner mes connaissances et qui m’ont soutenu durant mon séjour à Québec, à l’université Laval, je voudrais vous dire sincèrement merci.

L’achèvement de ce mémoire n’aurait été aussi possible sans la contribution et le soutien de notre encadreure Marcelline Bangali avec qui nous avons travaillé ces dernières années. Votre soutien n’a nullement fait défaut durant ce processus d’apprentissage et de perfectionnement qui connait aujourd’hui son aboutissement. Merci pour votre soutien, la pertinence de vos critiques et de vos suggestions.

Enfin, ces remerciements vont à l’endroit de tous les responsables du ministère de l’Éducation nationale et de l’Enseignement technique de Côte d’Ivoire qui ont accepté notre projet et qui nous ont permis de récolter nos données auprès des élèves du lycée classique et du lycée technique d’Abidjan. À toutes ces personnes et à tous les élèves qui ont pris part au projet, nous aimerions leur témoigner toute notre gratitude et notre reconnaissance à l’égard des efforts qu’ils ont consentis chacun pour la bonne tenue des activités de ce projet.

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INTRODUCTION

Dans la pensée populaire et selon plusieurs travaux de recherche (Mieyaa, Rouyer, & Le Blanc, 2012; Proteau, 1995), l’école est le premier vecteur de réussite et de promotion sociale. De par son organisation et son fonctionnement, l’on estime aussi qu’elle est un cadre

« structuré et structurant » offrant la possibilité aux jeunes de se construire et de se

développer (Guichard, 1993). Au cours de ces dernières années, avec la massification de l’école, les études portant sur les apprenants se sont multipliées (Dubet & Dumora, 1998) et l’un des champs que ces travaux abordent est lié à la notion de l’expérience scolaire. Cette notion est décrite par Dubet et Martuccelli (1996) comme une expérience de socialisation à l’école. Dans leur description, ces auteurs mettent un accent particulier sur la subjectivité de l’élève, mais aussi sur la dimension relationnelle dans le développement de ce processus.

Selon Courtinat-Camps et Prêteur (2012), la notion de l’expérience scolaire fait référence à un grand nombre de situations que les élèves vivent et traversent au cours de leur cheminement scolaire. Tenant compte de la subjectivité dans ce processus, Bastard-Landrier (2005) et Courtinat-Camps et Prêteur (2012) soulignent que la diversité des expériences vécues par les élèves serait liée à la manière dont ces derniers concilient ou non les trois logiques d’action de ce processus : logique d’intégration, logique de la stratégie et celle de la subjectivation. Pour Barrère et Sembel (1999), « ce processus n’est pas identique selon les classes sociales » (p. 21). Plusieurs auteurs (Bastard-Landrier, 2005; Courtinat-Camps & Prêteur, 2012 et Dubet & Martuccelli, 1996), affirment aussi qu’il serait influencé par des déterminants sociaux tels que l’origine et la position sociale de l’élève, son âge et son sexe. Cependant, ils reconnaissent que sa cohérence résulte de certains déterminants liés à l’environnement scolaire, notamment « les ressources internes de l’école (sa composition sociale), son climat, sa politique éducative, ses relations pédagogiques et sa capacité à réduire les tensions de l’expérience » (Courtinat-Camps & Prêteur, 2012, p. 3).

L’expérience scolaire que vivent les élèves et les étudiants pourrait aussi varier selon l’organisation et le fonctionnement du système scolaire dans lequel ces élèves et étudiants. La première bifurcation à l’école pouvant être précoce ou plus tardive selon ces systèmes,

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Picard, Trottier et Doray (2011) notent que cette diversité dans le fonctionnement de ces systèmes éducatifs pourrait avoir un impact considérable sur le parcours des élèves et des étudiants. En outre, du fait que certains systèmes paraissent plus ou moins flexibles les uns par rapport aux autres, cela aurait aussi un impact sur les choix de formations que ces élèves font au niveau des différents paliers d’orientation (Picard & al., 2011).

Au vu de ces constats, l’étude de l’expérience scolaire ne saurait se démarquer ni être mieux comprise si l’on ignore la structure et le mode de fonctionnement de ces systèmes scolaires dans lesquels les élèves étudient. Dans un système plus linéarisé, moins flexible à l’égard des changements de filières ou de programmes et aux retours aux études, la dimension subjective et la dimension relationnelle de l’expérience scolaire ne seraient-elles pas différentes de celles que vivent les élèves dans les autres systèmes ? N’auraient-elles pas une place plus importante et plus déterminante dans la vie de ces élèves et étudiants ? En effet, dans la mesure où les questions d’orientation et de choix de parcours sont une affaire individuelle, les élèves dans un tel système n’auraient-ils pas tendance à plus se référer à leurs propres forces et faiblesses et à recourir fortement aux soutiens que pourraient leur apporter les divers intervenants du milieu en vue d’opérer des choix qui leur conviennent le mieux au niveau des différents paliers d’orientation ? Dans une telle posture, la place et le rôle que jouent les conseillers d’orientation auprès des élèves dans un tel système ne seraient-ils pas plus déterminants ? Quels rôles jouent-ils plus spécifiquement dans le développement de ce processus chez les élèves et dans la construction de leurs choix d’orientation personnels ? De ce qui précède, la présence ou non de certains intervenants à l’école, la place et le rôle qu’ils jouent auprès des élèves dans les établissements auraient une coloration sur l’expérience scolaire que ceux-ci vivent au cours de leur cheminement. Dans le cas précis des conseillers d’orientation, il y aurait évidence à penser que leurs interactions avec les élèves ont aussi un impact sur les décisions que ceux-ci prennent à un moment donné de leur vie scolaire concernant les choix de filières de formations et les choix de carrière professionnel qui en découlent. Cependant, si cette liaison semble évidente, d’autres préoccupations liées à l’expérience scolaire méritent encore d’être plus investiguées. En effet, s’il est vrai que l’école participe indiscutablement au développement et à la construction

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personnelle des élèves et étudiants, la manière dont elle procède pour arriver à ce point d’achèvement est peu connue de tous. Le présent travail réalisé dans le cadre de notre mémoire de maîtrise en sciences de l’orientation a pour ambition de répondre à l’une de ces nombreuses préoccupations.

Comment l’école contribue-t-elle au développement personnel et à une meilleure structuration des aspirations scolaires et professionnelles des élèves ? Telle est la question principale de cette recherche. Réalisé en six chapitres, ce mémoire s’inscrit dans le cadre des recherches qui traitent des questions de parcours scolaires des apprenants et a recours à une méthodologie dite qualitative visant la compréhension et la description de phénomène. Le premier chapitre présente la problématique de la recherche, fait le point sur les écrits scientifiques relatifs au sujet abordé et souligne la pertinence de l’étude conduite dans cette recherche tout en faisant. Les questions principales de la recherche ainsi que ses objectifs y sont précisés également. Le deuxième chapitre est dédié au cadre théorique. Il présente deux théories interactionnistes qui permettent de mieux comprendre le développement de la personne dans un système organisé par le biais des relations qui se créent dans cette organisation. Il s’agit ici de 1a théorie générale des systèmes de Bronfenbrenner (1979) et de celle de Lent (2008) relative à la théorie sociale cognitive de l’orientation scolaire et professionnelle et du counseling (TSCOSP). Dans le chapitre 3, les considérations méthodologiques de la recherche sont abordées. Il justifie notre choix méthodologique, présente le terrain de l’étude, sa population et son échantillon, puis explique la collecte des données, les considérations éthiques de la recherche et la procédure d’analyse de ces données. Les chapitres 4 et 5 sont consacrés à la présentation des résultats de la recherche. Le dernier chapitre s’énonce sous forme de discussion. Il présente l’interprétation des résultats de la recherche, ses implications théoriques et pratiques et se termine par des observations sur les limites, les avantages et les recommandations de la recherche.

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CHAPITRE 1 : PROBLÉMATIQUE

1 Position du problème

Au cours de ces deux dernières décennies, avec la massification de l’école et des offres de formations qui deviennent de plus en plus diversifiées et spécialisées (Dubet & Dumora, 1998), les élèves passent plus de temps à l’école que dans leurs familles respectives durant leur enfance et leur adolescence. Partant de ce constat, on pourrait se demander : comment cette institution les amène-t-elle à vivre des expériences qui contribueraient à la formation de leur identité et de leurs intentions d’avenir ? Comment leur permet-elle de penser ces intentions, de les formaliser et d’élaborer des stratégies pour réaliser les choix d’orientation scolaire et professionnelle qui correspondraient à leurs aspirations ?

Selon Dubet et Dumora (1998), pour aborder ces questions, il est essentiel de s’intéresser à la notion de l’expérience scolaire. Dans les travaux de Courtinat-Camps et Prêteur (2012), Dubet (1994) et Dubet et Martuccelli (1996), cette notion est présentée en lien étroit avec celle de l’expérience sociale que vivent les individus dans leur société. Selon ces auteurs, l’expérience scolaire fonctionnerait selon les mêmes principes que l’expérience sociale. Elle repose par ce fait sur les trois logiques d’action de cette expérience qui sont la logique de

l’intégration, celle de la stratégie et celle de la subjectivation (Dubet & Dumora, 1998 et

Dubet & Martuccelli, 1996).

Définie comme une expérience de socialisation vécue par les élèves à l’école et dans leur environnement scolaire, la notion de l’expérience scolaire répond d’abord et avant tout à une logique d’intégration de l’élève dans un groupe (Dubet & Martuccelli, 1996) visant à faciliter sa socialisation. Selon Barrère et Sembel (1999), celle-ci renvoie aussi aux mécanismes par lesquels l’élève se définit en fonction de son appartenance à une organisation scolaire, mais aussi, et surtout par rapport au monde de la culture juvénile. Elle est indissociable des deux autres logiques d’action, qui selon Dubet et Martuccelli (1996) reposent d’une part, sur des stratégies d’adaptation et de réussite scolaire et d’autre part, sur des processus de construction

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identitaire (subjectivation) nourris par une quête d’« authenticité personnelle » (Barrère & Sembel, 1999; Dubet & Martuccelli, 1996).

Pour Barrère et Sembel (1999) et Dubet et Martuccelli (1996), au cours de la scolarité, les trois logiques d’actions de l’expérience scolaire fonctionneraient de manière imbriquée, mais avec des processus dominants spécifiques à chaque niveau de la scolarité de l’apprenant. Barrère et Sembel (1999) expliquent ce processus de l’expérience scolaire de la manière suivante :

C’est à l’école primaire que le modèle de socialisation classique demeure le plus fort : la figure du maître reste centrale, le groupe de pairs enfantins n’étant pas en mesure de contester son autorité, et la transmission des apprentissages de base n’est guère remise en question. L’intégration à l’organisation scolaire est la logique dominante. Au collège, au contraire, la contestation de l’ordre scolaire, et la remise en question de l’utilité des études et du travail scolaire est bien plus forte. Soutenu par un groupe de pairs plus conscient de lui-même, l’adolescent soumet l’institution à une pression critique. L’autorité enseignante, la motivation pour les savoirs deviennent des réalités fragiles, à reconstruire au jour le jour. Au lycée, le processus de socialisation s’appuie bien davantage sur les préoccupations stratégiques des élèves, qui tentent de conférer utilité ou intérêt à leurs études, en tension parfois avec une culture juvénile vécue dans les murs de l’institution, mais sans grand rapport avec la culture scolaire. Enfin, à l’université, la stratégie reste importante et la subjectivation devient centrale, que ce soit dans le rapport aux savoirs ou dans la construction de la personnalité adulte (p. 21).

Toutefois, ces auteurs montrent que ce processus diverge selon les classes sociales. Pour Picard et al. (2011), l’organisation et le mode de fonctionnement des systèmes scolaires dépeignent aussi sur ce processus et son aboutissement, surtout aux moments où les élèves sont appelés à exprimer leurs souhaits d’orientation par rapport à la poursuite de leur scolarité.

A la lecture de la synthèse effectuée par Bastard-Landrier (2005) et Courtinat-Camps et Prêteur (2012), on peut noter que les travaux sur l’expérience scolaire se rapportent à l’analyse de variables telles que : l’investissement scolaire, le rapport aux savoirs et aux disciplines scolaires, le rapport aux enseignants, aux pairs et aux autres personnels de l’établissement, le sens accordé à l’échec et à la réussite scolaire, la durée et le contenu des

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matières enseignées et des apprentissages, le sentiment d’efficacité personnel, les attentes de résultats, le développement des intérêts et des buts, les règles de conduite et les attentes des établissements envers l’élève, la pédagogie d’enseignement, les perceptions et les représentations qu’ont les élèves de tel ou tel aspect de leur scolarité, la valeur qu’ils accordent à leurs expériences. Cependant, nous notons que la valeur subjective que l’élève accorde à cette expérience est peu traitée dans ces recherches. Or, pour Dubet et Martuccelli (1996), la question de la subjectivité est un point central dans la définition et la compréhension de ce qu’ils ont appelé : l’expérience scolaire. En effet, la manière dont l’élève intègre et vit la diversité des actions et interactions au cours de son cheminement scolaire a une dimension fondamentalement subjective (Courtinat-Camps & Prêteur, 2012; Bastard-Landrier, 2005; Barrère & Sembel, 1999 et Dubet & Martuccelli, 1996). La prise en compte de cette subjectivité est à la base d’une plus grande diversité d’expérience chez les élèves (Dubet & Martuccelli, 1996). Elle serait aussi à la base des changements ou modifications majeures que l’on pourrait constater chez un même élève au cours de son cheminement scolaire (Barrère & Sembel, 1999), car c’est par ce processus de subjectivation que l’enfant, évoluant dans un environnement scolaire, se construit en tant qu’élève.

En s’intéressant aux facteurs d’influence de ce processus de construction de soi, Bastard-Landrier (2005), Courtinat-Camps et Prêteur (2012) et Dubet et Martuccelli (1996), montrent que l’expérience scolaire vécue par les élèves serait influencée par des déterminants sociaux tels que l’origine et la position sociale de l’élève, son âge et son sexe. D’autres facteurs ou évènements pouvant survenir dans certaines régions ou sociétés peuvent aussi affecter le cheminement ou le parcours scolaire des élèves et des étudiants. C’est le cas de ceux qui fréquentent des zones en proie à des crises sociopolitiques ou des catastrophes naturelles. Cela ressort dans le rapport d’état publié en 2016 sur le système éducatif ivoirien où il apparaît que le bon déroulement du calendrier scolaire est confronté dans certaines régions de ce pays à certains risques tels que les grèves des enseignants, les inondations, les conflits pré et postélectoraux, les tensions intercommunautaires, les attaques transfrontalières et les déplacements de populations suite à des conflits. Toutefois, malgré l’influence de ces facteurs exogènes, il est indiqué que certains éléments de l’environnement scolaire tels que « les ressources internes de l’école (sa composition sociale), son climat, sa politique éducative, ses

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relations pédagogiques et sa capacité à réduire les tensions de l’expérience » (Courtinat-Camps et Prêteur, 2012, p. 3) sont les déterminants majeurs de cette expérience.

Par ailleurs, les travaux de Dumora (2004) et de Guichard et Huteau (2006) montrent que l’orientation et le choix de carrière font partie intégrante de l’expérience scolaire. Cela émergerait du processus de subjectivation en lien avec les réflexions probabilistes et implicatives qui seraient à l’origine de la formation des intentions d’avenir chez les adolescents. Pour Guichard (2012), « l’école contribue de manière explicite et implicite à la préparation des jeunes à orienter leur vie adulte » (p. 24). Il présente l’école comme « un

miroir structuré et structurant » qui offre la possibilité au jeune de « vivre des expériences

particulières, d’élaborer des images de soi, des manières de voir les professions et certaines représentations d’avenir, le tout le conduisant à mettre en forme ses projets » (Guichard, 1993, p. 33). Grâce au processus de subjectivation, l’élève accorde un sens et une signification plus personnelle à ce qu’il vit et à ce qu’il fait durant son parcours scolaire (Dubet & Martuccelli, 1996). C’est ainsi qu’il parvient à se forger et à se construire une identité. C’est là un des éléments centraux de l’élaboration des choix scolaires et professionnels comme le soulignent certains auteurs (Bastard-Landrier, 2005; Guichard, 1993, 2008 et Savickas & al., 2010).

Ces travaux mettent en évidence la complexité des processus sous-jacents à la structuration de l’expérience scolaire et son importance dans la construction des choix d’orientation scolaire et professionnelle. Cependant, force est de constater que peu d’études s’intéressent à une analyse approfondie de ces aspects. Parmi les travaux recensés dans la littérature scientifique, certains prennent en compte seulement quelques variables de l’expérience scolaire et les mettent en relation avec les souhaits, les vœux d’orientation ou les conditions d’orientation (Bastard‑Landrier, 2005; Berthelot 1987; Cosnefroy, 2007, Kouadio, 1996; Merle, 1996 et Nguiambo, 2011). D’autres ciblent un moment particulier de la vie scolaire des apprenants (Bastard‑Landrier, 2005; Courtinat-Camps & Prêteur, 2012; Dumora, 1990, 2004). Or, comme souligné précédemment, l’expérience scolaire ne fait pas seulement référence à une partie du vécu scolaire de l’apprenant. Elle englobe toute l’expérience que ce

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dernier a acquise durant sa scolarité, son vécu et les processus sous-jacents à la structuration de cette expérience.

Ce mémoire vise à apporter une contribution pour pallier ce manque d’études approfondies sur les processus sous-jacents à la structuration de cette expérience et son importance dans la construction des choix d’orientation scolaire et professionnelle chez les élèves. Tout en accordant une place centrale à la question de la subjectivité, la notion de l’expérience scolaire sera étudiée en portant un regard sur le parcours scolaire individuel des apprenants évoluant dans des écoles secondaires en Côte d’Ivoire. L’étude de cette problématique dans un tel contexte revêt un caractère et une importance particulière. En effet, la Côte d’Ivoire est un pays situé en Afrique de l’ouest. Étant une ancienne colonie française, son système scolaire fut calqué sur le modèle français de l’époque. Malgré ses nombreuses réformes, l’école ivoirienne a encore de multiples défis à relever dont celui crucial de l’encadrement des élèves dans la construction d’un choix d’orientation scolaire et professionnelle adapté aux réalités spécifiques à son contexte socioculturel et socioéducatif où le taux d’achèvement du primaire à la dernière classe du secondaire (terminale) est seulement d’environ 13,9 % (Ministère de l’Éducation nationale et de l’Enseignement technique, 2015). En outre, dans ce rapport publié par la direction des stratégies, de la planification et des statistiques du ministère de l’Éducation nationale et de l’Enseignement technique (2015), sur les 5 049 496 élèves inscrits au titre de l’année scolaire 2014-2015, (2,9 %) sont au préscolaire et 66,8 % au primaire. Sur les 30,4 % restant de cet effectif total, 73,4 % se retrouvent au premier cycle du secondaire tandis que 26,6 % sont inscrits dans le second cycle. Ce rapport indique également que la proportion des filles dans cet effectif est respectivement de 46,7 % au primaire, (41,4 %) au premier cycle du secondaire et 40,1 % dans le second cycle du secondaire. Au vu de ces statistiques, une étude approfondie de cette expérience en lien avec la structuration des aspirations scolaires et professionnelles chez les élèves qui arrivent aux termes de ce parcours dans les écoles secondaires en Côte d’Ivoire (classe de terminale – dernier palier d’orientation déterminant et irréversible pour les études universitaires) mérite d’être menée.

Pour traiter cette question, il nous semble important avant de commencer, de faire une revue de littérature en situant le sujet dans son contexte scientifique. Cependant, fort est de

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constater que les travaux portant sur la spécificité de ce sujet sont plutôt rares, voire inexistants dans le contexte ivoirien. Les écrits recensés dans ce travail sont donc essentiellement tirés de la littérature scientifique provenant d’autres pays ou continents (Europe et Amérique du Nord). Leur choix et la manière dont ils sont présentés tiennent compte de la pertinence des variables qui influencent l’expérience scolaire des élèves et la structuration de leurs aspirations scolaires et professionnelles, mais aussi de l’angle sous lequel ils sont abordés. Présentés ainsi, ces travaux apportent un grand éclairage sur les questions et les grandes lignes qui orientent cette recherche. Ils ont été regroupés en deux grandes catégories. Il y a d’une part, ceux qui abordent le sujet sous l’angle du fonctionnement des institutions scolaires et, d’autre part, ceux qui mettent l’accent sur l’influence des acteurs principaux de ces institutions.

2 Recension des écrits

2.1 L’influence des variables relatives au fonctionnement des systèmes éducatifs

Cette première catégorie de travaux recensés traite de questions relatives à l’expérience scolaire des élèves et la structuration de leurs aspirations sous l’angle du fonctionnement des institutions scolaires. Ils font référence plus particulièrement aux variables liées au contexte institutionnel, à l’organisation interne des établissements, mais aussi, à l’influence de la performance des élèves en classe. Ces variables qui ne sont pas exhaustives sont présentées dans la plupart des travaux comme des déterminants majeurs qui occupent une place centrale dans la configuration de cette expérience chez les élèves et de ce fait même, dans la structuration de leurs aspirations scolaires et professionnelles et dans la détermination de leurs choix de carrière.

2.1.1 L’influence du contexte institutionnel

Le contexte institutionnel représente toute l’organisation mise en place au niveau des ministères de l’Éducation pour assurer la gestion et le bon fonctionnement des établissements scolaires. Il fait surtout référence aux lois et aux décisions prises par la hiérarchie de ces institutions et qui s’appliquent à l’ensemble du système éducatif. Ces décisions et lois qui

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régulent le fonctionnement des écoles ne sont pas sans influence sur le comportement de ses acteurs. Selon leur mode de fonctionnement, il existerait une diversité de systèmes d’éducation et de formation et chaque système influence d’une manière ou d’une autre le parcours scolaire et universitaire de ses élèves et étudiants (Picard & al., 2011). Selon ces auteurs, les systèmes d’éducation fixent les règles de transition entre les ordres d’enseignement, les bifurcations et les critères d’accès aux filières ainsi que la durée normale ou optimale des parcours. Pour eux, la différence fondamentale entre les systèmes d’éducation se situerait au niveau de l’âge de la première bifurcation. Par rapport à ce critère, certains systèmes seraient plus ou moins différenciés que d’autres et cela aurait un impact considérable sur les parcours des élèves et des étudiants. Dans les pays où l’âge de la première bifurcation est précoce (11 ans) comme le cas de l’Allemagne, les élèves seraient appelés très tôt à faire des choix de filières ou de formation (Dupriez, Monseur, & Campenhoudt, 2009, 2012). Cela favoriserait l’autosélection d’origine sociale qu’ils définissent comme le fait pour un élève de choisir ses filières de formation non pas en fonction de ses capacités, mais selon la classe sociale à laquelle il appartient (Dupriez & al., 2009, 2012). Si l’on se réfère toujours au cas de l’Allemagne, à 11 ans, à quoi ces jeunes pourraient-ils aspirer de mieux comme profession à part celles que leur environnement leur permet de voir et d’appréhender ? Dans ce contexte, les préférences professionnelles des enfants de classes ouvrières ont plus tendance à être portées vers les métiers de leurs parents et ceux qui sont pratiqués dans leurs environnements immédiats. Les jeunes des classes favorisées aspireraient tout aussi à des métiers ou professions plus valorisés vu l’occupation professionnelle exercée par leurs parents. Selon Dupriez et al. (2009, 2012), il existerait aussi des systèmes non différenciés comme celui des États-Unis et des systèmes où l’âge de la première bifurcation est un peu tardif. C’est le cas de la France. Dans ce pays, les élèves sont appelés à faire leur premier choix d’orientation vers l’âge de 15 ans en pleine adolescence (Dupriez & al., 2009, 2012). Dans ces deux systèmes, les jeunes accorderaient une importance non négligeable au réseau social qu’ils tissent entre eux (Dupriez & al., 2009, 2012). Cela aurait comme conséquence, d’après ces auteurs, une certaine influence de leurs homologues dans la plupart des décisions qu’ils sont appelés à prendre, y compris celles qui sont relatives à leurs choix de carrière.

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Picard et al. (2011) mentionnent aussi que dans leur mode de fonctionnement, certains systèmes apparaîtraient moins flexibles, voire plus rigides que d’autres. Selon eux, la flexibilité ou non des organisations scolaires serait un préalable à la diversification des parcours à l’enseignement supérieur. Cette flexibilité s’observe lorsque « les changements de programme d'études sont possibles et ne stigmatisent pas la suite de la formation, où des passerelles entre les ordres d'enseignement ont été créées, où le développement de la formation continue est soutenu » (Picard & al., 2011, p. 3). À titre d’exemple, ils montrent la flexibilité du système québécois marqué par la possibilité de s’inscrire à temps plein ou à temps partiel, la possibilité de travailler pendant les études, la possibilité de changer de programme d’études ou d’établissement en cours de formation, la possibilité de faire un retour en arrière dans les études après avoir eu accès à un niveau supérieur de formation et la possibilité de retourner aux études après les avoir abandonnées quelques années auparavant. Cette souplesse aurait comme conséquence la formation des itinéraires atypiques au cours de la scolarisation et l’allongement de la durée des études (Picard & al., 2011). Par ailleurs, dans d’autres systèmes comme celui de la France où l’organisation scolaire paraît moins flexible, non réversible et linéaire, la possibilité de faire une réorientation ou un changement de filière est plutôt rare, voire impossible dans la majorité des cas, à cause de la centralité du système (Picard & al., 2011).

L’une des caractéristiques qui fondent aussi le fonctionnement des systèmes éducatifs serait liée à la place que ces systèmes accordent à la sélection et à la répartition des élèves dans la gestion des flux scolaires (Dupriez & al., 2009, 2012). Ces balises seraient plus perceptibles au niveau des différents paliers de l’orientation qu’au niveau des classes intermédiaires. Selon ces auteurs, ces règles de sélection sont établies en fonction de la probabilité ou des chances de réussite de l’élève ou de l’étudiant dans la filière; mais elles auraient aussi pour but de dissuader celles et ceux qui auraient des prétentions démesurées par rapport à la profession qu’ils ou elles aimeraient exercer vu l’insuffisance de leurs capacités. Ainsi, l’entrée dans certaines filières de formation est conditionnée par l’atteinte de certains objectifs de cours, à des critères de performance en classe, aux résultats de la passation de certains tests standardisés et d’autres critères jugés utiles par les administrations de ces institutions d’enseignement (Dupriez & al., 2009, 2012). Cependant, la légitimité de ces

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critères est différemment appréciée par les parents d’élèves, les élèves eux-mêmes et dans le monde de la recherche. Bien que ces critères soient en accord avec l’excellence et le mérite des uns et des autres (Kouadio, 1986), pour Duru-Bellat (2014) et Boudesseul (2010), par ces critères, l’institution scolaire apparaît comme le premier vecteur de la ségrégation professionnelle (discrimination entre les candidats liée au choix des filières de formation et des professions). Selon Duru-Bellat (2014), dans un système rigide comme celui de la France, ces critères favorisent l’autosélection d’origine sociale et obligent les élèves à suivre le cheminement qui leur est tracé depuis la première bifurcation jusqu’à leur sortie du système. Selon Landrier et Nakhili (2010), cela creuserait davantage les écarts entre les individus, car chaque palier d’orientation produit des inégalités entre les individus qui se cumulent au fur et à mesure que ces derniers avancent dans le système. Pour eux, « ces inégalités découlent de mécanismes complexes qui concernent aussi bien les aspirations des élèves, leurs choix d’études ainsi que leur traitement par le système scolaire » (p. 23).

Hormis ces facteurs liés au fonctionnement des institutions scolaires, d’autres, liés à leur organisation spécifique influencent aussi l’expérience scolaire des élèves et la structuration de leurs aspirations professionnelles. Ils peuvent être rassemblés dans ce que nous appelons « organisation interne des établissements ». Cet ensemble de vocables fait référence dans le cadre de notre recherche à la composition sociale de ces établissements. De façon plus spécifique, il a trait à la taille de ces établissements, aux possibilités qu’ils offrent aux élèves en termes de formation et de types de formation et à la composition sociale du public scolaire en termes de mixité.

2.1.2 L’influence de l’organisation interne des établissements

Plusieurs travaux montrent que les établissements sont différents les uns des autres du point de vue de leur organisation interne. Les effets de ces contextes sur les conduites et les aspirations professionnelles des élèves ont alimenté et continuent d’alimenter les débats et les recherches en occident (Duru-Bellat, 2003). Selon elle, la plupart de ces travaux ont été effectués par des chercheurs anglo-saxons. Ils montrent que la composition sociale des établissements aurait un impact non seulement sur la réussite scolaire, mais aussi sur le choix

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de filière chez les élèves. Selon Arrighi et Gasquet (2010), les élèves sont confrontés à plusieurs contraintes liées à leur processus d’orientation. Ces contraintes seraient liées « à la rareté des spécialités de formation sur un territoire donné, à la nature fortement sexuée de ces formations et à l’existence de discriminations » (p. 99). Nakhili (2007) avait déjà évoqué le problème de la composition sociale des établissements en termes d’offres de formation. Elle conclut qu’une bonne répartition des ressources de formation entre zones d’éducation prioritaire et zones urbaines permettrait de réduire le phénomène de l’autosélection d’origine sociale. En effet, d’après ses travaux, la présence de formations prestigieuses (classes préparatoires aux grandes écoles - CPGE, section de technicien supérieur – STS, filières des instituts universitaires de technologie – IUT etc.) dans les écoles populaires donnerait environ 1,8 fois plus de chance à ces élèves d’envisager ces formations.

Outre l’offre de formation en tant que composante sociale des établissements, la question de la mixité selon le genre ou non dans les classes et dans les établissements a aussi intéressé certains chercheurs. Selon Duru-Bellat (2010), derrière l’idée selon laquelle la mixité à l’école ou dans les classes serait l’expression la plus achevée du rejet de la discrimination, se cacheraient plusieurs tabous qui remettent en question le bien-fondé de cette approche. En effet, elle justifie ses propos en mentionnant que les élèves et les enseignants sont fortement marqués dans leurs interactions de tous les jours par des représentations sociales du masculin et du féminin. Cela aurait d’après elle, des incidences sur bon nombre d’aspects de leur vie scolaire parmi lesquels le rendement à l’école et les représentations de l’avenir. Selon Duru-Bellat (2010), dans une classe mixte, les enseignants auraient des attitudes différentes vis-à-vis des garçons et des filles. Ceux-ci accorderaient plus de temps au public masculin qu’au public féminin (environ 56 % aux garçons contre 44 % aux filles). Dans ces contextes, les garçons seraient amenés à exploiter toutes leurs possibilités en classe à travers les interventions de l’enseignant, reçoivent plus de critiques concernant leurs conduites que l’enseignant cherche à canaliser et font l’objet d’une notation plus sévère que les filles (Duru-Bellat, 2010). À l’inverse, elle note que les enseignants ont tendance à moins stimuler les filles intellectuellement que les garçons; et cela depuis le primaire et que ces différences qui s'accroissent avec l'âge seraient plus marquées dans le second cycle du secondaire. Cette faveur pédagogique accordée plus aux garçons qu’aux filles pourrait, selon elle, laisser croire

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à ces dernières qu’elles méritent moins d’attention et que leur réussite serait moins importante par rapport à celle des garçons. Cela aurait aussi, d’après elle, une incidence sur la confiance en soi chez les filles et laisserait émerger le sentiment de domination masculine chez les garçons. À en croire l’auteure, la cohabitation, filles et garçons dans la même classe ou dans la même école auraient aussi d’une autre manière une incidence sur leurs performances et leur degré de masculinité et de féminité. En effet, selon ses travaux, l’identité sexuelle des filles serait plus affirmée dans les écoles mixtes que dans les écoles non mixtes. Cela s’observe d’après elle, dans les préférences qu’elles portent sur les métiers ou les professions qu’elles aimeraient exercer plus tard.

Au niveau de leurs performances, Duru-Bellat (2010) trouve que dans un environnement non mixte, les filles trouvent l’environnement plus convivial, sécuritaire et confortable pour mieux développer leurs compétences y compris dans les matières destinées aux garçons telles que la plupart des matières scientifiques et plus particulièrement les mathématiques. Chez les garçons, la non-mixité provoquerait un climat de compétition plus brutale et plus agitée dans les milieux populaires. Pour elle, « même si la mixité ou la non-mixité n’affecte pas de manière marquée les performances scolaires, elle module sensiblement le quotidien des classes et les attitudes des élèves » (p. 203).

Duru-Bellat et al. (2004) montrent aussi que l’influence des caractéristiques du contexte scolaire sur les élèves, sur leurs attitudes, sur leurs progressions et sur leurs orientations peut être regroupée au sein du concept qu’ils ont appelé « effets d’établissement ». Ils notent que ces « effets d’établissement » auraient une influence modérée sur les progrès et les attitudes des élèves et expliqueraient d’après leurs analyses entre 8 et 15 % la variance des scores entre les élèves dans les différents établissements. Cependant, il serait bon de noter, d’après ces auteurs, que cinq facteurs de l’environnement scolaire s’avèrent liés à de meilleurs résultats chez les élèves. Ce sont « des attentes élevées à leur égard, une polarisation sur les acquis de base, un climat de sécurité et d’ordre, des évaluations fréquentes de leurs progrès, et enfin … dans une proportion moins forte en France - une forte emprise du chef d’établissement » (p. 443). Toutefois, selon ces auteurs, une distinction doit être faite entre « effets d’établissement » et « effets de classe »; le premier étant lié à tout l’établissement alors que

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le second est exclusivement réservé à une unité de l’établissement qui est la classe. Pour eux, quel que soit le groupe (classe ou établissement), il y aurait toujours la présence d’un groupe majoritaire qui fonctionnerait comme « le groupe de référence pour tous les élèves ». Pour Duru-Bellat et al. (2004), la composition de ce groupe de référence jouerait « sur l’image de soi, les motivations des élèves à réussir, leurs représentations de l’avenir et leurs projets » (p. 446).

2.1.3 L’influence de la performance scolaire des élèves

La performance scolaire semble être la variable la plus étudiée parmi toutes celles qui façonnent l’expérience scolaire des élèves (Alpe, 2006; Berthelot, 1987; Boudesseul, 2010; Clignet, 1964; Courtinat-Camps & Prêteur, 2012; Dumora, 1998, 2004; Duru-Bellat, 2014; Hirschi, 2012; Kouadio, 1986; Lannegrand-Willems, 1998; Lemaire, 2004; Louche, Hugues, & Sarrade, 2001; Nakhili, 2005, 2007). Elle est en lien avec les questions de l’évaluation, des examens, du classement à l’école, des choix de filières ou de séries, mais aussi avec celle du redoublement qui en fin de compte structurent et modèlent les aspirations scolaires et professionnelles des étudiants (Guichard, 1993, 2012). Selon lui, les notes qu’obtiennent les élèves en classe ont une grande importance dans l’expérience scolaire qu’ils vivent durant toute leur scolarisation. Il expose deux cas de figure caractéristiques de la situation de l’élève. L’un présente l’élève en situation d’échec et l’autre le présente en situation de réussite scolaire. Dans les deux cas, selon lui, l’élève compare ses performances à celles des autres et se fait une image de sa propre personne qu’il a appelée « image propre » et une image qu’il suppose que les autres se font de lui « image sociale ». Pour lui, ces deux images sont complètement différentes chez les élèves qui obtiennent de bons résultats et chez ceux qui ont des rendements faibles ou médiocres. Il note que les élèves en situation d’échec « se pensent moins bons que les autres, non seulement en termes de schémas scolaires de soi (mémoire, organisation de travail, etc.), mais aussi relativement à des dimensions beaucoup plus générales (ouverture aux autres, forces, intelligence, etc.) » (2012, p. 34). Cette situation est liée au sentiment d’accomplissement personnel (Carbonneau-Bergeron, 2007) que Lent (2008) décrit comme la source la plus importante du sentiment d’efficacité personnelle. Elle pourrait aussi être mise en relation avec les variations de l’estime de soi et ses conséquences

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sur l’individu au niveau des affects, de la cognition et de l'autorégulation du comportement décrits par Crocker et Wolfe (2001). D’après Guichard (2012), du fait que « c’est en relation avec des schémas de soi que le jeune construit des anticipations professionnelles » (p. 35), les jeunes échouant à l’école se percevront comme dépourvus de qualités et de toutes autres compétences pouvant les stimuler à entamer des formations supérieures et à mieux s’insérer socialement et professionnellement. Chez les élèves en situation de réussite scolaire par contre, cela semble être l'inverse de celle vécue par les précédents. Leurs images de soi et leurs images sociales qui sont en consonance les pousseraient à percevoir le monde futur avec beaucoup plus de sérénité. Du fait de la position qu’ils occupent en classe et à l’école, ils aspireraient plus à des filières élitistes et par conséquent à des positions sociales plus élevées (Guichard, 1993). Dans ce même ordre d’idées, Nakhili (2005) fait observer que les performances scolaires et la série du baccalauréat exprimeraient à elles seules 29,2 % de la variance du niveau d’étude visé par les étudiants dans le système scolaire français. Pour Lemaire (2004), la filière d’étude influence fortement les aspirations et le niveau d’étude visé à l’université.

Dans son élaboration, Dumora (1990) considère deux processus fondamentaux dans la formation des intentions professionnelles chez les jeunes apprenants. Ce sont le processus de la « réflexion comparative » et celui de la « réflexion probabiliste ». Le premier, selon elle, apparaît chez l’enfant entre 11 et 13 ans. Il comprend quatre étapes qui sont la liaison tautologique, la projection métaphorique, la projection métonymique et la comparaison tensionnelle (Dumora, 2010). À chacune de ces étapes, le sujet met en relation des éléments descriptifs de son soi avec des éléments descriptifs des professions (Dumora, 2010). Selon elle, le développement de ces différentes relations conduit le sujet à envisager vers 14, 15, voire 16 ans, un autre mode de réflexion dans l’élaboration de ses choix professionnels. Ainsi, la prise en compte de la perception de sa situation scolaire actuelle, les informations et conseils qu’il a reçus à propos de l’orientation et ses représentations des exigences futures des diverses formations et professions (Guichard, 2012) l’amènent à tenir compte des chances et de la probabilité de réussite qu’il a en envisageant telle ou telle filière de formation. Pour Dumora (1990), ce processus de réflexion probabiliste passe aussi par des étapes successives et conduit au terme de sa construction « en un calcul subjectif dans lequel le sujet prend la

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mesure entre l’espace des possibles et l’espace des probables » (p. 118). Pour elle, la première étape de ce processus qu’elle décrit comme « la prédiction » repose sur l’idée selon laquelle chez le préadolescent, il suffit de vouloir pour pouvoir. Elle est secondée par l’étape des « conjectures » où l’adolescent est de plus en plus confronté à l’incertitude de sa réussite scolaire lorsqu’il prend en compte les exigences des différentes formations qui lui sont offertes. Cette situation l’amène à élaborer des scénarios et à définir des stratégies qui tiennent de plus en plus compte des conseils et des appréciations des différents professionnels dans le milieu, de ses représentations actuelles des exigences des formations offertes et des professions et d’autres variables qualitatives qui lui permettront de nourrir sa réflexion probabiliste. Ce deuxième processus décrit par Dumora serait directement lié à l’expérience scolaire de l’élève (Guichard et Huteau, 2006) et dans une certaine mesure au processus de la subjectivation adolescente. Tout en tenant compte de ses capacités, de ses moyens scolaires et de ses intentions professionnelles, l’articulation de ces deux processus engendrerait un autre processus qu’elle nomme « réflexion implicative » (Dumora, 2010). Cette réflexion étant directement liée à la subjectivation adolescente, elle amènerait les uns et les autres à élaborer différents types de discours que Dumora (1990, 2004, 2010) regroupe sous deux grandes formes de trajectoires. Il s’agit d’une part des trajectoires lisses, et d’autre part des trajectoires de ruptures. Pour elle, dans les discours de trajectoires lisses, il y’aurait une certaine consonance entre la réflexion comparative et la réflexion probabiliste, alors que dans les discours de trajectoires de rupture, l’on noterait une certaine dissonance entre ces deux types de réflexion. Elle distingue aussi différents types de logiques liées à ces trajectoires

lisses et à ces trajectoires de rupture. Ainsi, derrière les discours de trajectoires lisses, il y aurait une certaine logique d’excellence, une logique du pragmatisme ou une logique

illusionniste (Dumora, 1990, 2004, 2010). Pour elle, la logique de l’excellence « produit un choix valorisé et marqué par la coïncidence entre le niveau d’aspiration et la probabilité perçue d’orientation » (1990, p. 124). C’est aussi celle des adolescents assurés de continuer leurs études et qui se focalisent tout au long de la scolarité collégienne et lycéenne sur l’évidence du choix des filières valorisées (filières scientifiques du lycée puis des filières valorisées de l’enseignement supérieur). La logique du pragmatisme serait caractérisée par « la force du réalisme du sujet qui s’assigne un objectif accessible en fonction de ses possibilités » (Dumora, 1990, p. 124). Elle mentionne en outre que « le pragmatisme peut

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être soit une forme de renoncement sans véritable rupture avec les choix valorisés, soit une forme d’acceptation « tranquille » des choix moins valorisés, soit un choix d’emblée réaliste » (p. 124). En pareille circonstance, selon elle, le sujet se « focalise sur le pôle professionnel et sur la vie active future » (p. 124). Dans le cas de la logique de l’illusion, l’élève aspire à des filières prestigieuses alors que ses moyennes en deçà des exigences requises ne lui permettent pas d’y accéder. « L’illusion maintient jusqu’aux échéances une croyance magique en la réussite malgré les contraintes des options, pourtant évoquées par certains » (Dumora, 2004, P. 259). Face à cette situation, « la dissonance ne se résout souvent que par une capitulation pure et simple des préférences au moment des échéances de l’orientation » (p. 559).

Dans les trajectoires de ruptures, nous distinguons aussi trois types de logiques. Ce sont l’expectative, la logique de la rationalisation et la logique de la résignation. Selon Dumora (1990), dans la logique expectative, le sujet se trouve dans une position « d’attente » de résultats par rapport à son orientation. Elle serait marquée par la dominance des affectes négatifs. Le sujet exprime aussi dans son discours « l’ambivalence de sa réalité psychique (entre différentes motivations, entre l’adhésion à la norme ambiante et une fixation antérieure, entre le calcul du risque et celui du coût, entre les préférences personnelles et les pressions familiales) » (p. 125). Au niveau de la logique de rationalisation, selon Dumora (1990), par la confrontation entre le désirable et le probable, le sujet modifie son choix et la

perception qu’il avait de ses choix antérieurs. Ce mouvement qu’elle qualifie de « retournement » indique une modification radicale de l’un ou de l’autre terme du choix

(motivation / valorisation). « Ce retournement focalise sur le pôle professionnel, sur l’élaboration cognitivo motivationnelle du choix de remplacement, récupéré comme choix motivé, et sur l’évitement de la dissonance » (Dumora, 1990, p. 124). Le dernier discours entretenu par les élèves et étudiants dans les trajectoires de rupture est celui de la logique de la résignation. Il s’agit ici, selon Dumora (2004), « d’une reproduction de choix successifs de moins en moins valorisés, contraints par le niveau scolaire et les injonctions institutionnelles qui imposent des renoncements à chaque palier d’orientation » (p. 126). Cette logique qualifiée aussi de pragmatique est entretenue par les élèves conscients de leurs

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difficultés et des renoncements à effectuer. Ils choisissent ainsi des filières de moins en moins valorisées pour se mettre ainsi à l’abri des échecs (Dumora, 2004).

Certaines études réalisées en Afrique (Clignet, 1964; Mbock-II, 1990; Miaro, 1973) abordent aussi les questions relatives aux performances scolaires et leur prise en compte dans les choix décisionnels des élèves quant à la poursuite de leur scolarité. Selon Clignet (1964), le fait de redoubler une classe aurait différemment une incidence sur les aspirations professionnelles des étudiants. En effet, au Gabon, selon ses résultats, « le fait de redoubler ne modifie ni la nature ni le niveau des aspirations des élèves » (p. 74). Au Mali par contre, ses résultats montrent que les carrières de l'enseignement attirent davantage les non-redoublantes que les redoublants (34 % contre 25 %). En Côte d'Ivoire, « le niveau d'aspiration des non-redoublants serait plus élevé que celui des non-redoublants (47 % contre 35 %) », alors qu’au Sénégal, « les redoublants qui n'ont pas d'idée sur leur avenir sont plus nombreux que les non-redoublants » (Clignet, 1964, p. 74). Selon l’étude de Mbock-II (1990) qui a porté sur un échantillon des élèves de la classe de troisième (dixième année de scolarisation) de la ville de Yaoundé au Cameroun, il ressort que seule la réussite scolaire des élèves a une influence sur leurs aspirations; la confiance et l’attitude face à l’argent ayant des effets non significatifs. De ce point de vue, plus les élèves ont un niveau de réussite scolaire élevé, plus ils aspirent aussi à des professions plus prestigieuses. Quant à la recherche de Miaro (1973), elle montre que parmi les déterminants de l’aspiration scolaire et professionnelle, figurent certaines variables familiales et culturelles (l’origine sociale de l’élève, le niveau socio-économique de ses parents, le revenu du père et la religion) et certaines variables de l’environnement scolaire telles les résultats scolaires et le système d’éducation. Selon ses analyses, les étudiants dont le revenu du père est élevé ont des aspirations plus élevées que celles des étudiants dont les revenus des parents sont faibles. Selon elle, ce résultat varierait considérablement en fonction du niveau d’étude des élèves. Les élèves de terminale (treizième année de scolarité) bénéficiant de bourses et autres avantages de l’état, cette variable modulerait fortement leurs aspirations d’étude. Par ce fait, les élèves de terminale ayant des parents à revenus faibles ou modestes aspireraient à des niveaux d’études sensiblement égales à celles des fils et des filles de salariés en termes de durée de formation.

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Dans les différents travaux que nous venons de présenter, il est fort remarquable de souligner que l’expérience scolaire des élèves et la structuration de leurs aspirations professionnelles sont fortement modulées par le contexte scolaire dans lequel ils étudient. Leurs expériences et leurs anticipations de l’avenir sont aussi liées aux efforts individuels qu’ils fournissent et à la position qu’ils occupent respectivement en classe et dans l’établissement. Ces indicateurs les amèneraient à fonctionner selon une certaine logique. Ils auraient aussi une certaine influence sur leur conduite en ce qui concerne leur orientation et la poursuite de leur carrière. Qu’en est-il maintenant de l’influence des acteurs du système éducatif ?

2.2 L’influence des acteurs principaux du système éducatif

Selon Guichard et Huteau (2006), les relations avec les pairs et avec le personnel de l’école sont au cœur de l’expérience scolaire et sociale que vivent les élèves dans leurs établissements. Dans la plupart des travaux que nous avons parcourus, il ressort que les pairs et certains intervenants de l’école sont les acteurs les plus significatifs qui influencent l’expérience scolaire et la structuration des aspirations scolaires et professionnelles des élèves. Les détails de ces travaux sont présentés dans les points ci-après.

2.2.1 Le rôle joué par les pairs

Malgré qu’elle ait fait l’objet de nombreuses publications en éducation, les travaux qui portent sur l’influence des pairs dans le domaine des aspirations scolaires et professionnelles et du choix de carrières chez les jeunes sont plutôt rares (Dupriez et al., 2009). Pour Claes

(1994) cité par Lannegrand-Willems (1998), l’adolescence est une période qui est « particulièrement marquée par l’appropriation progressive d’une vie sociale et affective en

dehors de la zone d’influence parentale et par l’émergence d’un engagement intense dans la relation avec les pairs » (p. 236). Selon Lannegrand-Willems (1998), pour Claes (1994) parmi les quatre sous-réseaux (la famille nucléaire, la famille élargie, les pairs et les adultes non apparentés) au sein du réseau social des adolescents, le sous-réseau des pairs reste le plus important et représente environ deux tiers de leur univers social. Lannegrand-Willems (1998) fait aussi remarquer que l’école et plus particulièrement les classes restent des endroits

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privilégiés où s’exerce avec acuité cette influence des pairs. D’après les résultats de sa recherche, ces influences s’exercent non seulement par les attentes et les rétroactions qu’ils se font mutuellement, mais aussi par le soutien de l’entourage, l’identification à des modèles et les sources d’informations qu’ils ont. À ce propos, Dupriez et al. (2009) révèlent que le modelage (l’identification à des modèles) et les sources d’informations demeurent les principales sources d’influence au niveau de la formation des aspirations professionnelles chez ces jeunes. Ils mentionnent aussi que les interactions entre les pairs sont plus enrichies lorsqu’au sein de leurs groupes, les jeunes apprennent auprès des parents de leurs amis. Ainsi, plus les parents de leurs amis auront fait de longues études et occupent des postes de responsabilité dans la société, plus ces jeunes auront tendance à avoir des ambitions scolaires et professionnelles plus élevées. Pour mieux saisir l’influence des pairs dans le contexte scolaire, Lannegrand-Willems (1998) a effectué une étude auprès de 209 élèves de troisième de deux établissements de la ville de Bordeaux, dont l’une est située dans une zone favorisée et l’autre en zone d’éducation prioritaire. Cette étude qui avait pour objectif de savoir si la classe et le groupe d’amis dans la classe constituaient des groupes de référence pour les adolescents a mis en exergue deux dimensions de la relation aux groupes. Ce sont la valence accordée à chacun de ces groupes et la ressemblance entre soi et chacun de ses groupes. Dans le cadre de son étude, la valence est définie comme la valeur positive, négative ou neutre que l’adolescent a à l’égard de son groupe classe ou de son groupe d’amis. La ressemblance quant à elle, était définie comme la similarité perçue entre soi et le groupe ou entre le soi et le non-soi. Selon les résultats de cette recherche, « les élèves sont plus positifs et pensent ressembler plus à leurs amis de la classe plutôt qu’à la classe entière » (p. 247). Elle conclut que les amitiés sont donc plus investies dans le groupe que dans la classe dans l’ensemble de ces deux établissements. La valence par rapport au groupe d’amis reste stable durant toute la durée de l’année scolaire dans les établissements situés en zones d’éducation prioritaire alors qu’elle tendrait à croître au cours de l’année scolaire dans les établissements situés en milieux favorisés. Elle explique cette constance de la valence à l’égard des pairs dans les établissements situés dans les milieux défavorisés par le fait que l’orientation reste une grande préoccupation individuelle chez les élèves issus de milieux modestes et que cela leur empêcherait de développer les relations interpersonnelles dans le cadre scolaire.

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Hormis les pairs, selon Guichard et Huteau (2006), dans leur cheminement scolaire et dans la vie courante, les jeunes rencontrent plus de professionnels auxquels ils pourraient s’identifier. Les informations que ces derniers leur donnent concernant leur profession seraient à leurs yeux assez importants pour nourrir et formaliser des projets professionnels (Dupriez & al., 2009). Dans ce contexte, les relations et les interrelations que l’élève noue au sein de son établissement à travers le processus de socialisation scolaire seraient à la base de la formation de son identité (Dumora et al. 2008; Guichard et Huteau, 2006). C’est pourquoi, Dumora et al. (2008) mentionnent que « l’identité d’un individu lui est octroyée par le cadre social, structure structurante dans laquelle il est inscrit » (p. 2). À travers la fonction qu’il occupe et le rôle qu’il joue dans l’établissement, chaque intervenant participe d’une manière ou d’une autre à la formation du jeune apprenant et à la consolidation de son cheminement vers l’âge adulte (Guichard & Huteau, 2006). Parmi ces intervenants, deux catégories sont fréquemment mentionnées dans les travaux que nous avons consultés. Il s’agit des enseignants et des conseillers en orientation.

2.2.2 Le rôle joué par les enseignants

Selon Doucet (2007) et Lemaire (2004), ce sont les enseignants qui influencent le plus la structuration des intentions professionnelles chez les étudiants. Pour Doucet (2007), de par leur fonction, leur rôle d’encadrement auprès des élèves et la fréquence de leur rencontre, les enseignants joueraient un rôle important dans l’accompagnement et la guidance des élèves dans le choix de leur carrière. Les témoignages des responsables d’établissements dont nous présentons ici deux extraits issus de l’étude de Doucet (2007) nous donnent un aperçu du rôle et de l’influence que pourraient exercer les enseignants sur les élèves dans la structuration de leurs aspirations professionnelles.

L'enseignant, le prof de sciences, s'il aime les sciences, probablement que beaucoup plus de scientifiques vont sortir de sa classe et plus d'élèves vont se diriger vers le domaine des sciences ou dans le domaine de l'enseignement. Parce que tu les as à longueur de journée, pis c'est toi souvent qui parles, avec un micro très souvent, ça fait que c'est une très grande influence (...). Tu peux encourager, décourager des jeunes, ils ne s'en rendent même pas compte. (Homme 1) (Doucet, 2007, p. 27).

Figure

Figure 1 : Schéma adapté du modèle théorique de Bronfenbrenner (1979) à notre étude
Figure 2 : Modèle du développement des intérêts professionnels fondamentaux au cours du temps –  sources : Lent (2008)
Figure 3 : Modèle des facteurs personnels, contextuels liés à l’expérience, qui affectent le comportement  de choix professionnel – source : Lent (2008)
Figure 4 : Modèle de réalisation de la tâche – source : Lent (2008)
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Références

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